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B. La prise en charge actuelle de l’IRCT en France

3. Le rapport de la cour des comptes de Septembre 2015

a) L’IRCT : un coût considérable pour l’assurance maladie

Selon le rapport de la cour des comptes de Septembre 2015, le coût de l’IRCT en France s’élevait en 2013 à environ 3,8 milliards d’euros, dont 3,1 pour la dialyse et à 0,7 pour la greffe, intégralement financé par l’assurance maladie. Entre 2010 et 2012, il a crû de 4,9 % en rythme annuel, du fait essentiellement de l’augmentation du nombre de patients. Il devrait atteindre 5 milliards d’euros en 202592.

En moyenne, le coût annuel d’un patient est de 44 880 euros mais il varie considérablement selon les modes de prise en charge : 14 700 euros pour un greffé rénal contre 65 091 euros pour une personne dialysée. Les dépenses hospitalières représentent l’essentiel des coûts (68 %) devant les transports (18%) et les médicaments (9%) dont l’érythropoïétine. Cette pathologie, souvent liée au diabète de surcroît, représente plus de 2 % des dépenses de santé.

La mise en place du plan national 2007-2011 pour l’amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques a entraîné ces dernières années une mobilisation importante de nombreux intervenants autour de ces pathologies, mais de très gros progrès restent à faire dans le domaine de la prévention de ces maladies, dans la coordination des soins, l’harmonisation des pratiques, ainsi que dans l’intégration des patients et de leurs proches tout au long du parcours de soins93.

En ce qui concerne la prise en charge de l’IRCT, la Cour des comptes a dressé un bilan des politiques conduites depuis une quinzaine d’années.

b) Constats de la Cour des comptes

Malgré certains progrès dans les prises en charge, le rapport de la Cour des comptes met l’accent sur des insuffisances de la politique publique qui ont pour conséquence « des coûts de prise en charge très sensiblement plus élevés que chez nos voisins et une adaptation insuffisante aux attentes des patients en termes de qualité de vie comme de bonne adaptation des traitements à leur situation spécifique ».

92 www.ccomptes.fr, septembre 2015.

(i) Des modalités de prise en charge diversifiées, mais inégalement développées

Les données du registre REIN permettent de dégager deux grandes conclusions :

o La dialyse est toujours effectuée principalement dans les structures les plus coûteuses (hémodialyse en centre ou en unité de dialyse médicalisée) au détriment des modes de dialyse autonome (autodialyse, hémodialyse à domicile, dialyse péritonéale).

o Même si le recours à la greffe est croissant, il est encore insuffisant. La liste des patients en attente d’une greffe continue de progresser, et d’autres pays européens sont plus performants que la France à cet égard. (ii) Des politiques publiques manquant de continuité et insuffisamment ambitieuses Là encore, s’il y a eu des améliorations indéniables au fil du temps dans la prise en charge des malades rénaux chroniques, il apparaît que de nombreux progrès peuvent être encore faits : o dans la prévention et la détection de la maladie rénale chronique : î Avant la création en 2002 du registre REIN (Réseau Epidémiologie et Information en Néphrologie), aucune information précise n’était disponible sur la prise en charge de l’IRCT en France tandis que des registres existaient de longue date aux Etats Unis et chez nos voisins européens. De plus, ce registre ne couvre toutes les régions de France que depuis 2013.

î Alors que le diagnostic de la maladie rénale est uniquement biologique, des progrès significatifs peuvent être accomplis en matière de dépistage précoce de cette pathologie. A titre d’exemple, la proportion de patients diabétiques chez qui l’on diagnostique une atteinte rénale est toujours très insuffisante (environ 30 %), alors que la population de patients diabétiques en dialyse ne cesse de s’accroître au fil du temps.

î Par ailleurs, en 2016, 30 % des patients en IRCT arrivent encore à la dialyse en urgence.

o dans le domaine de la transplantation :

î Alors que la greffe est considérée comme la stratégie de traitement de l’IRCT la plus efficiente, la performance globale de la France en nombre de transplantations rénales apparaît encore limitée. En matière de greffes avec donneurs décédés, des progrès remarquables ont été enregistrés dans notre pays. Sur 16 pays développés, la France occupe actuellement le 4ème rang, mais le « don du vivant » reste relativement faible (13ème rang sur 16) malgré une forte progression ces dernières années.

î Par ailleurs, malgré l’augmentation significative du nombre de greffes, les délais d’attente pour une greffe sont de plus en plus longs, des inégalités sociales et géographiques d’accès à la transplantation sont mises en évidence, et l’objectivité des règles d’attribution des greffons est remise en question. o dans le domaine de la dialyse : î La mise en œuvre de la tarification à l’activité a été défavorable au développement des alternatives à la dialyse en centre ou en unité de dialyse médicalisée. Des baisses de tarifs des centre lourds et des UDM, réalisées entre 2007 et 2010, ont permis une convergence tarifaire entre les deux secteurs public et privé, mais les variations des tarifs à la hausse pour les modalités alternatives et à la baisse pour les centres ont été insuffisantes pour modifier significativement les niveaux de rentabilité comparée des différentes modalités de prise en charge. Par ailleurs, en France, la dialyse est extrêmement rentable pour les structures lucratives, et les frais de transport des patients constituent un budget particulièrement lourd. Ils représentent environ 17 % du total des dépenses liées à l’IRCT. Ainsi, le coût de l’hémodialyse apparaît nettement plus élevé en France qu’à l’étranger, comme le montre le tableau suivant :

Coûts de traitement (Référence) France Allemagne Belgique Royaume- Uni

Coût moyen de la séance d’HD en centre lourd 859 à 1 018 496 592 547 Coût moyen rapporté à celui de la France 100 % 58 % 69 % 64 % Coût moyen/hémodialysé/an 62 610 40 000 45 800 28 278 Coût moyen rapporté à celui de la France 100 % 64 % 73 % 45 % Tableau n° 9 : Coût moyen en euros de la dialyse dans trois pays européens, rapporté à celui en France94. Le coût moyen d’une séance d’HD en centre lourd en France est variable selon l’établissement de dialyse. c) Axes de réduction des coûts proposés par la Cour des comptes Les comparaisons des coûts de la dialyse en France par rapport à d’autres pays ne se traduisent pas par des différences de qualité des traitements ou d’espérance de vie objectivées95 Elles mettent en lumière l’ampleur des marges de progression pour obtenir une meilleure maîtrise de ces coûts tout en conservant une prise en charge de qualité.

94 Rapport de la cour des comptes.

(i) En matière de prévention

Des efforts financiers doivent être engagés pour retarder la progression de la maladie rénale chronique vers le stade terminal, pour améliorer la détection de cette pathologie et sa prise en charge aux stades les plus précoces. (ii) En matière de transplantation Si la France veut rejoindre le niveau des pays les plus performants, elle doit : o revoir régulièrement les règles d’attribution des greffons aux patients en attente de greffe. Dans un souci de clarté et d’équité, ces règles ont été revues début 2015, et il y a eu mise en place d’un « score » commun à toutes les régions ;

o augmenter significativement les prélèvements sur donneurs décédés en améliorant le recensement des donneurs potentiels, en favorisant l’augmentation du taux de consentement et en recourant à l’ensemble des possibilités légales de prélèvement, notamment sur des personnes dites « Maastricht III » pour lesquelles une décision d’arrêt des soins en réanimation a été prise du fait du pronostic de la maladie ;

o développer les transplantations à partir de donneurs vivants. Dans d’autres pays, les possibilités de dons croisés sont plus importantes et le don altruiste anonyme se pratique.

(iii) En matière de dialyse

Etant donné le coût actuel de la dialyse, la Cour des comptes propose de substituer à des obligations de moyens des objectifs de qualité. Pour gagner en efficience, elle recommande de :

o substituer aux différents forfaits de rémunération en vigueur un tarif unique par patient dialysé, comportant des majorations et minorations en fonction de l’état du patient et des résultats des traitements, intégrant les frais de transport, les examens biologiques et les supplémentations nutritionnelles éventuelles ;

o réduire significativement les tarifs des séances en centre lourd et en UDM afin de favoriser la prise en charge des patients par les structures les plus efficientes en termes de qualité des soins.