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II. LE FRANÇAIS ENSEIGNE AU LYCEE

2. Le plurilinguisme en formation

2.1. La construction d’une posture plurilingue

La construction de la pluralité des langues et des cultures à travers le développement de la didactique intégrée des langues, implique, au-delà d’une prise de conscience, une reconnaissance du bilinguisme biculturel voire de la pluralité linguistique et culturelle par l’enseignant. Elle n’est possible que si l’enseignement des langues, et plus particulièrement du français, connaît « une conception rénovée de la formation des enseignants » (Candelier &

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Castellotti, 2012, p. 21). En effet, l’enseignement reste essentiellement monolingue dans un système qui pourtant prône l’ouverture aux nouvelles approches didactiques en langues.

Ainsi, les intentions sont-elles en France d'ouverture plurielle, selon les recommandations européennes, alors que les dispositifs éducatifs, les pratiques et les représentations sociales vont davantage dans le sens cumulatif d'une juxtaposition des langues / cultures, perçues comme des entités dans des bulles monolingues peu perméables (Montagne-Macaire, 2008, p. 16).

Pour sortir du monolinguisme, la formation doit prendre en compte les différentes dimensions – sociale, professionnelle et personnelle – qui entrent en jeu dans l’enseignement/apprentissage des langues. Si l’aspect professionnel est important pour rendre sensible l’enseignant de « la nécessité d’une nouvelle éducation linguistique et culturelle » (Candelier & Castellotti, 2012, p. 21) et lui permettre de découvrir et d’expérimenter d’autres approches didactiques et pédagogiques, il est un aspect essentiel de la formation, celui de la formation sociale et personnelle. Celle-ci doit le sensibiliser aux aspects sociolinguistiques des langues (rôles d’inclusion, d’exclusion, de cohésion…). Elle doit le rendre conscient des conceptions qu’il a lui-même des langues et par conséquent des rapports aux langues qu’il transmet. Il pourra ainsi prendre conscience de la place de la langue dans tout apprentissage, de l’existence de plusieurs langues et changer de posture face aux langues en présence, voire élaborer de nouveaux scénarios d’acquisition/apprentissage. Il pourra surtout adopter cette posture plurilingue qui valorise le contact des langues et l’identité plurielle des élèves.

Une posture plurilingue peut amener les enseignants à prendre en compte les compétences partielles en langues et l’usage des langues en fonction des besoins, à considérer les langues du répertoire d’un élève salvadorien dans leur complémentarité, à intégrer la dimension d’un enseignement linguistique global pour mettre en place des approches plurielles telles qu’un enseignement bilingue reposant sur la didactique intégrée des langues voire sur l’intercompréhension entre les langues parentes.

2.2. Vers une éducation plurilingue

L’ouverture de l’enseignement du français à la didactique des langues et de l’enseignement des langues aux approches plurielles vise à modifier les représentations et les conceptions de l’enseignement des langues et en langues.

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Au-delà du simple fait que le français est considéré comme une langue, langue que l’on enseigne et que l’on apprend, et non seulement comme une matière à contenu disciplinaire (littérature, grammaire, rédaction…), il apparaît dans les disciplines autres que linguistiques comme une langue et comme une culture qu’il faut enrichir par un travail certes sur le lexique spécialisé mais surtout sur les discours disciplinaires. Se posent alors dans l’enseignement du français des questions qui dépassent le cadre strictement disciplinaire et qui sont d’ordre purement linguistique.

L’espagnol, quant à lui, sort de son isolement de langue maternelle du système salvadorien pour se construire en tant que langue de scolarisation aux côtés du français et au contact d’autres langues, l’anglais et le portugais. Enfin, les langues étrangères, l’anglais et le portugais, sont enseignées au lycée comme des langues vivantes. Les enseignants suivent le programme français d’anglais (LV1 ou LV2) et de portugais (LV3) et utilisent des manuels destinés à des publics français et francophones. Ils s’appuient par conséquent sur le français, langue seconde des élèves, pour enseigner l’anglais ou le portugais même si les élèves lui préfèrent comme point de référence leur langue maternelle.

Le contact des langues est bien réel. Ce qui montre que l’enseignement/apprentissage des langues, y compris le français, tend à s’intéresser aux différentes relations et impacts que peuvent avoir les langues entre elles, à favoriser le jeu des relations interlinguistiques, propice à la construction de la compétence plurilingue, et à encourager la circulation des langues qui offre une ouverture à la didactisation de l’alternance des langues.

Il s’agit de sortir de la norme du natif encore en vigueur dans les institutions éducatives et d’aller vers des compétences inégales, partielles et inachevées, de penser des objectifs linguistiques et culturels divers, de considérer le répertoire verbal et la construction identitaire en constante évolution dans un parcours de vie.

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TROISIEME PARTIE :

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Le développement d’une éducation plurilingue contribue à envisager les langues en présence dans un rapport de complémentarité et à renforcer la diversité linguistique et culturelle pour construire un enseignement linguistique et culturel global. Pour cela, il faut non seulement décloisonner les enseignements de langue, langue maternelle, langue seconde/de scolarisation, langue étrangère mais aussi renouveler les méthodes et les outils de la didactique du français.

Le décloisonnement des langues et des disciplines français-espagnol et l’ouverture à de nouvelles façons d’enseigner en français et en espagnol passent par un rapprochement des enseignants des deux matières, des programmes français et salvadoriens ainsi qu’à un renouvellement des conceptions et des objectifs de l’enseignement du français et des langues dans l’établissement.