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Le « petit récit » que nous tentons de raconter se situe à Lourdes, pendant le Pèlerinage National, tous les ans entre le 11 et le 16 août de 2007 à 2013. Il s’agit donc d’une pratique religieuse particulière, qui s’inscrit dans un genre largement décrit par les anthropologues, le pèlerinage, et dans un lieu, Lourdes, qui a lui-même une histoire, des rites et des récits auxquels le Pèlerinage National a largement contribué. L’objectif de ce chapitre est de commencer à clarifier le paysage académique sur la pratique du pèlerinage, Lourdes et le Pèlerinage National, pour mieux situer le décor de notre enquête et les interrogations que les chercheurs se sont déjà posées. Nous commencerons dans ce chapitre à mettre en œuvre une méthode d’échanges entre différentes disciplines académiques, théologie, histoire, anthropologie…, qui nous suivra tout au long de notre travail.

Le pèlerinage

Sous des formes diverses et avec des histoires variées, le pèlerinage apparaît comme une constante religieuse de l’humanité, et sa pratique est en augmentation dans les sociétés sécularisées146.

Nos termes de « pèlerinage » et de « lieu sacré » s’avèrent typiquement occidentaux. […] Mais sous d’autres appellations, les réalités que ces mots enserrent se retrouvent dans un très grand nombre de cultures : sans abuser du terme, on peut les dire quasiment planétaires. Comme telles, elles apparaissent données d’une anthropologie de l’homme en sa vie de religion, nullement liées à une religion institutionnellement établie147.

Ceci explique la présence d’une riche littérature historique, ethnologique, anthropologique ou sociologique sur le thème du pèlerinage, dont l’étude peut aider à éclairer la nôtre. Démarche anthropologique commune à toutes les religions, le pèlerinage est donc intrinsèque à la vie chrétienne, et sa pratique est attestée dans l’histoire de l’Église depuis les tout débuts du christianisme. Cependant, au cours des siècles, l’accent ecclésial et les formes pratiques du pèlerinage ont varié en fonction des contextes de l’Église et des communautés. Dans la vie de l’Église, le pèlerinage a été tour à tour outil de mémoire, de catéchèse, de construction de la personne et/ou de l’Église, de rencontre du Christ, de rencontres entre communautés

146 Liliane Voyé, « Le chemin, le temps et le « soi » », dans Pèlerinage et espace religieux, Bruxelles, Lumen Vitae, (coll. trajectoires n° 17), 2007, p. 15.

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chrétiennes148. Mais malgré cette longue histoire, la relation de l’institution avec cette

pratique est ambiguë, surtout depuis les Réformes du XVIème siècle : « En régime chrétien, les

pèlerinages se placent fondamentalement sous le régime des adiaphora149. » La rédaction

traduit en note : « Pratiques indifférentes, ni recommandées ni interdites » et l’auteur précise, également en note : « À vrai dire, dans le protestantisme, les pèlerinages ne font même pas partie des adiaphora : ils sont purement et simplement prohibés. » Dans le catholicisme, on peut noter une alternance entre la mise en valeur des pratiques pèlerines et une certaine défiance vis-à-vis de celles-ci. Cette réserve s’exprime assez fortement dans les années qui suivent le concile Vatican II :

L’ANDDP « prend acte d’une mentalité qui existe dans une certaine portion du clergé ou dans une certaine élite de laïcs et chrétiens engagés dans l’action apostolique à l’endroit des pèlerinages, considérés trop souvent comme “marginauxˮ dans l’Église et qui, effectivement, semblent se situer à contre- courant de toute la pastorale d’aujourd’hui, en tant qu’ils s’exercent dans un cadre spécifiquement religieux, arrachent les chrétiens à leur milieu de vie, trouvent leur motivation dans le culte de la Vierge et des saints et tendent à créer une communauté passagère et artificielle, en dehors de la vie concrète150. »

Malgré ces ambiguïtés, on constate aujourd’hui une vitalité renaissante des pèlerinages, particulièrement en Europe. À la lumière rapide de quelques auteurs, examinons le contenu de cette constante religieuse de l’humanité, quelques façons dont elle se manifeste en christianisme et les caractéristiques de son renouveau actuel. Ceci nous aidera à mieux comprendre nos observations, à trouver des mots et des concepts pour décrire ce que nous voyons, à interroger ce qui semble ne pas poser de question.

Une pratique peu langagière

La renaissance contemporaine de l’intérêt pour la pratique du pèlerinage dans les pays développés interroge de nombreux auteurs académiques, que leurs préoccupations soient anthropologiques, théologiques ou pastorales. La plupart d’entre eux situent ce renouveau en regard des pratiques plus anciennes, en particulier médiévales. Ils sont souvent justifiés dans cette analyse par une partie extrêmement visible de la pratique pèlerine contemporaine en Europe, l’affluence sur les routes de Saint-Jacques de Compostelle depuis maintenant

148 Jean-Pierre Derville, « Les pèlerinages dans le Bible et l’histoire de l’Église : chemins de vision et de guérison », dans Pèlerinages et espace religieux.

149 Michel-Yves Perrin, « Des pèlerinages dans le christianisme », Communio, Revue Catholique Internationale, XXII, 4, n° 132 (1997) : « Le pèlerinage », p. 10.

150 Henry Branthomme et Chantal Touvet, Histoire des Sanctuaires de Lourdes. 1947-1988. Évolutions et réalisations, Lourdes, NDL Éditions, 2005, p. 323, citant le Journal de la Grotte, 3 décembre 1967, à propos du congrès de l’ANDDP (Association Nationale des Directeurs Diocésains de Pèlerinage) qui s’est déroulé à Rome peu de temps auparavant.

53 quelques décennies, mais étendent leurs études à de nombreux sanctuaires et rites, d’importance européenne, nationale ou simplement locale.

« Muséalisation » ou « rituel réceptacle »

Ainsi dans leur ouvrage, The Modern Pilgrim : Multidisciplinary Explorations of Christian Pilgrimage151, plusieurs universitaires des Pays Bas, Paul Post, Jos Pieper et Marinus van

Uden ont rassemblé douze études, utilisant des approches méthodologiques différentes, analyses quantitatives, observations ethnographiques, analyse de documents, entretiens non directifs… en vue de mieux cerner le pèlerinage contemporain en Europe. Cet ouvrage est le compte-rendu d’un vaste programme de recherche dans lequel le pèlerinage est abordé sous un double aspect. D’une part, des études de psychologie de la religion s’attachent à mieux comprendre les motivations et les effets du pèlerinage sur les pratiquants. D’autre part, dans le cadre des études d’ethnologie européenne, des études liturgiques s’interrogent sur l’interaction dynamique entre le culte et la culture. La question étudiée est celle de la formation, de la transformation et de l’éventuelle pérennisation des pratiques religieuses populaires. Le pèlerinage à Lourdes, le chemin de Saint-Jacques de Compostelle sont évoqués, ainsi que des pratiques plus locales, en particulier aux Pays-Bas et en Belgique. Les auteurs s’intéressent en particulier au réinvestissement des formes rituelles antérieures et se posent la question d’une tendance à la « muséalisation » de certaines pratiques religieuses, qui passent progressivement du culte au folklore et à la représentation. Selon eux, les rites, en particulier ceux qui se situent hors de l’espace traditionnel des églises, qui semblent étranges, bénéficient d’un effet de mode certain. Cependant, décortiqués, triés, choisis, ne risquent-il pas de n’être plus que des objets vides de sens sur l’étagère d’un musée ? En fait, il ne faudrait pas conclure trop rapidement à une disparition de la signification religieuse de ces pratiques. Pour Paul Post et ses confrères, malgré le succès du « traditionnel », on voit apparaître du nouveau dans le type de pèlerin et le pèlerinage contemporains. La tradition permet en effet un contraste avec l’expérience quotidienne et devient un lieu pour la recherche de l’identité et de la qualité de vie.

D’autres anthropologues, mais aussi des théologiens, comprennent eux aussi le succès contemporain d’une démarche qu’on pourrait qualifier d’ancienne, de prémoderne, dans sa capacité à aider les hommes d’aujourd’hui dans leur quête d’identité. Le pèlerinage, en effet, « renvoie à une sorte d’archétype, de modèle inscrit de façon indélébile dans l’inconscient

151 Paul. Post, Jos Pieper et Marinus van Uden, The Modern Pilgrim : Multidisciplinary Explorations of Christian Pilgrimage, Leuven, Uitgeverij Peeters, 1998.

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collectif où il lie à des éléments matériels (l’espace et le temps) des significations décisives pour le décryptage et la compréhension du monde et de soi152 ». Ressourcement de la foi,

démarche pénitentielle, affirmation identitaire, lieu d’une demande, approfondissement culturel, ces différents aspects du pèlerinage peuvent contribuer à la découverte et la reconstruction de soi, c’est-à-dire participer à l’élaboration de réponses aux formes contemporaines de la question du sens.

Avant d’en conclure à une « muséalisation » du pèlerinage qui tend à écarter des réalités et, partant, de toute religion véritable, celui qui s’aventure sur cette voie, il convient de se demander s’il n’y a pas là l’expression d’une aspiration qui ne s’exaspère que parce que toute satisfaction lui est refusée dans le contexte propre de notre temps, ou plutôt parce que c’est là l’unique moyen de traduire une expérience qui ne trouve pas à se communiquer autrement153.

Pour Humbert Jacomet, le pèlerinage médiéval, utilisé par l’Église pour lutter contre l’isolement des sociétés de cette époque, bénéficiait d’un encadrement assez précis, le pèlerin était aidé par un ensemble institutionnel assez complet : hospices, rituels liturgiques, statut… Aujourd’hui comme autrefois, le pèlerin rompt avec ses habitudes parce qu’il cherche un avenir. Cependant, à l’heure de la mort de Dieu, le pèlerin contemporain marche comme un exilé au milieu des ruines. Mais cela n’empêche pas cette expérience de le restituer à lui- même et de changer son rapport aux autres. Celui qui part en pèlerinage, aujourd’hui comme hier, rentre dans un autre temps, celui de la conversion. L’Église dans le monde actuel doit trouver la façon d’aider le pèlerin à déchiffrer ce qui le travaille. Le pèlerin fait l’expérience que ce n’est plus lui qui agit mais Dieu qui agit en lui : l’Esprit infuse ses dons au sanctuaire. Lorsque longtemps après, au retour, le miracle ignoré produit ses effets, l’Église propose de participer à sa mission. Le pèlerinage est à la fois accomplissement et envoi.

En ce sens, le pèlerinage fonctionne comme un « rituel réceptacle », permettant des expériences porteuses de sens154. Les rites chrétiens sont en effet actuellement dans une

situation paradoxale : alors que la pratique sacramentelle normée semble en voie de raréfaction, on assiste à une sorte de relocalisation des rites155. Ceux qui ont perdu leurs

152 Liliane Voyé, « Le chemin, le temps et le « soi » », p. 16.

153 Humbert Jacomet, « Pèlerin du Moyen Âge et pèlerin d’aujourd’hui : raison et déraison du pèlerinage », dans Communio, Revue Catholique Internationale, XXII, 4, n° 132 (1997) : « Le pèlerinage », p. 112.

154 Paul Post, « Le pèlerin moderne : un rite entre tradition et (post)modernité », p. 22.

155 Paul Post, Jos Pieper et Marinus van Uden, « Good Times, Bad Times : devotional Rituals between Tradition and Modernity », dans The Modern Pilgrim : Multidisciplinary Explorations of Christian Pilgrimage, p. 263- 279.

55 racines et se sentent étrangers dans les bâtiments églises se tournent vers de nouveaux rituels156.

Gestes et rites de pèlerinage

Le pèlerinage est en effet une pratique rituelle, à tel point que deux des anthropologues les plus reconnus sur ce sujet situent cette pratique dans la même catégorie que les « rites de passage » : « Le pèlerinage apparaît comme l’une des formes les plus totales de l’accomplissement des rites de passage157. » « Yet, there is undoubtedly an initiatory quality

in pilgrimage158. » Comme dans les rites de passage, les pèlerins sont invités à se séparer de

leur ordinaire pour plonger dans un monde autre, à la marge, dans la liminalité, importante dans toutes phases de changement culturel pour reformuler les structures sociales, pour la génération de nouveaux modèles expérimentaux. À ce titre, le pèlerinage répond particulièrement aux besoins d’une société en pleine mutation et à ceux d’individus dont la quête est souvent implicite159. Dans une période où le sens manque de support, les rites

fonctionnent comme repères.

God has made humans such that they need rituals in which they embody their highest values. These rituals function as a means of keeping their live centred on these values and narratives. In a fallen world such rituals become more, not less, important. Pilgrimage is one such practice160.

Les rituels sont marqués par des gestes, des déplacements qui permettent d’articuler la vie intérieure à une observance externe. Chaque pèlerinage particulier a ses propres rites, processions, inclinations, touchers de reliques ou du rocher, dépôts de cierges qui s’inscrivent dans un récit enrichi de légendes, folklore, mythe et littérature et qui interagissent pour former un ensemble cohérent, source de significations.

Rituel et pratiques du pèlerinage, tels que les perçoit un regard en survol des différentes cultures religieuses, imposent au contraire une organicité propre au fait

156 Paul Post, Jos Pieper et Marinus van Uden, « Ritual Landscape : on Outdoor Liturgy ; Processional Parks, Papal Visits, end Popular Rites Associated with Sudden Death, » dans The Modern Pilgrim : Multidisciplinary Explorations of Christian Pilgrimage, p. 281-313.

157 Alphonse Dupront, Du sacré : croisades et Pèlerinages, p. 415.

158 « Néanmoins, il y a sans aucun doute un caractère initiatique dans le pèlerinage. »Victor et Edith, L.B. Turner, Image and Pilgrimage in Christian Culture : Anthropological perspectives, NewYork, Columbia University Press, 1978, p. 8.

159 Liliane Voyé, « Le chemin, le temps et le « soi » », p. 25.

160 « Dieu a créé les hommes de telle sorte qu’ils ont besoin de rites dans lesquels incarner leurs valeurs les plus hautes. Ces rituels fonctionnent comme des moyens pour garder leurs vies centrées sur ces valeurs et leur narration. Dans un monde déchu, de tels rituels deviennent plus importants, et non pas moins importants. Le pèlerinage fait partie de ces pratiques. » Craig Bartholomew, « Journeying on : a Concluding Reflection », p. 205.

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pèlerin. Celle-ci s’analyse en gestuaires et rites de participation, en dramatique de rencontre et en liens avec le « lieu sacré »161.

Les gestes sont accomplis sans forcément avoir été compris162, le fruit du pèlerinage est

apaisement plus que guérison, émergence d’un autre regard163. « Ainsi s’engage, dans le

silence du geste, une dramatique de la rencontre164. » Notre méthode de recueil des données,

dans laquelle l’observation participante côtoie les témoignages de pèlerins, s’est imposée pour tenir compte de ce caractère principalement non-verbal de la pratique pèlerine, caractère qui est sans doute une des raisons de sa situation ambiguë dans la réflexion théologique. Nous reviendrons sur ce point tout au long de notre parcours et dans la conclusion.

Église et religion populaire

Dans son éditorial du numéro spécial de la revue Communio165 sur le pèlerinage, Michel-

Yves Perrin constate en effet :

Un étonnement : Alors que les pèlerinages constituent de nos jours, dans le monde catholique, un phénomène d’une ampleur considérable et toujours renouvelée, et donc à tout le moins un enjeu pastoral des plus éminents, et dès lors en attente d’un discernement théologique, un rapide dépouillement des indices des principales revues de théologie contemporaines aboutit à un constat clair : le terme « pèlerinage » en est quasiment absent. […] le fait pèlerin semble évacué du discours théologique, ou plus exactement, […], réduit à un statut purement métaphorique. […]

L’auteur poursuit en constatant qu’ « estampillé du sceau de la “religion populaireˮ, le fait pèlerin se trouve rangé au nombre de ces “expressions religieuses de faible légitimitéˮ ». C’est pourquoi malgré l’importance de sa pratique, il tend parfois à être considéré comme marginal, voire presque hétérodoxe. Seul le sanctuaire a une définition canonique (canons n° 1230-1234). Dans le Droit Canon, le pèlerinage n’est évoqué que pour y interdire « l’absolution donnée par mode général » (canon n° 961, §2). Un document récent du magistère semble donner raison à cette appréciation : le pèlerinage et les sanctuaires sont évoqués par le Directoire sur la piété populaire et la liturgie, dont le ton est tout à la fois celui du respect pour les pratiques évoquées mais aussi celui du souci de leur encadrement, comme le montre le paragraphe de conclusion :

161 Alphonse Dupront, Du sacré : croisades et Pèlerinages, p. 394.

162 Humbert Jacomet, « Pèlerin du Moyen Âge et pèlerin d’aujourd’hui : raison et déraison du pèlerinage », p. 116.

163 Liliane Voyé, « Le chemin, le temps et le « soi » », p. 30. 164 Alphonse Dupront, Du sacré : croisades et Pèlerinages, p. 402. 165 Michel-Yves Perrin, « Des pèlerinages dans le christianisme », p. 7.

57 Ce Directoire, dans ses deux parties, comporte de nombreuses indications, propositions et orientations qui visent à favoriser et à éclairer, en harmonie avec la Liturgie, les formes extrêmement variées de la piété et de la religiosité populaire. En prenant en compte la diversité des traditions et des circonstances, tout comme la variété des pieux exercices et des dévotions en tous genres, le présent Directoire contient des présupposés fondamentaux, rappelle les directives et transmet des suggestions, en vue d’une action pastorale fructueuse.

Il revient aux Évêques, avec l’aide de leurs collaborateurs immédiats, spécialement les recteurs des sanctuaires, d’établir des normes et de donner des orientations pratiques en tenant compte des traditions locales et des expressions particulières de la religiosité et de la piété populaire166.

Olivier Chaline167 s’interroge dans la même revue Communio que Michel-Yves Perrin sur

cette catégorie de religion populaire. Il attribue au rigorisme les suspicions portées « sur le paganisme mal christianisé, sur les motivations suspectes, sur les confusions et les ambiguïtés168 » véhiculés par les pratiques de pèlerinage. Pour lui, ces attitudes entraînent

« une ecclésiologie élitiste, mi-janséniste, mi-léniniste169 », et il invite les théologiens à

retrouver avec la rencontre « des gens » le sens « des gestes ».

Paul Post et ses collaborateurs170 font cependant remarquer que ce débat sur la dichotomie

entre culture populaire ou de l’élite a permis d’aboutir à un consensus sur un concept large et interactif de la culture, et c’est dans ce champ de forces qu’ils appellent à situer le pèlerinage et leurs rites. Cette contextualisation de toute compréhension de la pratique du pèlerinage rejoint la préoccupation actuelle de la théologie :

Contextualization evokes the dual stories that the Church inevitably indwells namely the Scriptural or Christian story and the cultural story. The Church lives at the crossroads of these two stories, and effective mission emerges from the tension between them as the Church seeks to avoid the pitfalls of both irrelevance on the one hand and syncretism on the other171.

Pour pouvoir s’interroger théologiquement sur ce qu’il observe et sur l’interaction avec la culture, le théologien aura besoin d’en comprendre les éléments anthropologiques et spirituels structurants.

166 Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, Directoire sur la piété populaire et la liturgie. Principes et orientations, 2001, n° 288.

167 Olivier Chaline, « Topographie spirituelle et ferveur des fidèles : deux lacunes dans la réflexion sur les pèlerinages, » dans Communio, Revue Catholique Internationale, « le pèlerinage », p. 27-39.

168 Ibid. p. 35. 169 Ibid. p. 36.

170 Paul Post, Jos Pieper et Marinus van Uden, « The “Places of Pilgrimage in the Netherlands”. Project, orientation, » dans The Modern Pligrim : Multidisciplinary Explorations of Christian Pilgrimage, p. 60.

171 « La contextualisation évoque cette histoire duelle dans laquelle inévitablement habite l’Église, précisément les Écritures ou l’histoire chrétienne et l’histoire culturelle. L’Église vit aux croisements de ces deux histoires, et la mission effective émerge de la tension entre elles, alors que l’Église cherche à éviter les pièges aussi bien de la non pertinence d’un côté que du syncrétisme de l’autre. » Craig Bartholomew, « Journeying on : a Concluding Reflection », p. 202.

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La rupture, la marche, le lieu saint

Pour définir le pèlerinage, le théologien orthodoxe Michel Stavrou172 se réfère au sensum

fidei :

Le pèlerinage, dans la tradition ecclésiale, s’entend d’un voyage particulier effectué à destination d’un lieu saint et, au terme du voyage, la vénération accordée au « centre » spirituel du lieu : tombeau, relique, icône, etc. Il s’agit là d’une définition générale qui, aujourd’hui, fait l’unanimité des fidèles.173

L’examen du terme employé par différentes langues lui permet d’accéder à l’essentiel du contenu de cet invariant anthropologique. Le Hag des langues sémitiques contient l’idée de

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