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LE NOM DE FAMILLE, UNE TRANSMISSION A CONQUERIR ?

Dans le document La Condition des aïeux en droit de la famille (Page 122-126)

LES AÏEUX ET LA CRISE DES TRANSMISSIONS INTERGENERATIONNELLES

LE NOM DE FAMILLE, UNE TRANSMISSION A CONQUERIR ?

192. Le nom est le phonème qui permet de reconnaître l’existence d’une personne346. Plus précisément, le nom de famille347 est le nom porté par les membres d’un même groupe, ayant un ou plusieurs ascendants communs348. Le nom est un élément de l’état. C’est le principal élément de désignation349 et donc d’identification des personnes physiques. « Le nom est le mode de désignation et d’identification des personnes dans leurs rapports respectifs, et dans leurs rapports avec l’autorité publique »350.

193. Outre sa fonction sociale, le nom transmet une culture et une tradition propres à chaque groupe familial. « Outre la désignation de l’individu, il est également un élément de rattachement à une famille puisque ce nom est commun à tous ses

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Personne physique mais également morale mais cette dernière n’est pas l’objet de notre étude.

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Le nom était qualifié de « patronymique » antérieurement à la loi du 4 mars 2002, en référence à la place du père dans l’attribution du nom.

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Il est complété par le prénom, Cf. article 57 du Code civil, qui a pour fonction de distinguer la personne au sein de sa famille, dont les membres portent par hypothèse le même nom. Les accessoires du nom sont le surnom, le pseudonyme et les titres nobiliaires.

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Bien plus important que d’autres éléments tels que le numéro de sécurité sociale, les empreintes digitales, les empreintes génétiques.

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KAYSER, « La défense du nom de famille d’après la jurisprudence civile et d’après la jurisprudence administrative », RTD. Civ. 1959.10.

membres »351. Le nom évoque l’histoire d’une famille, en suggérant une origine territoriale, professionnelle ou confessionnelle352. Donc, les grands-parents, mais également les petits-enfants, ont naturellement un rôle à jouer ici, en leur qualité de membres de la famille. D’autant que « la question est particulièrement chargée de symboles. Perpétuation du culte des morts, rattachement à la lignée, le nom contient une charge émotive considérable »353.

194. Le nom était à l’origine une désignation individuelle avant de devenir familiale. Les prénoms suffisaient alors à désigner les personnes. Puis sont apparus les surnoms destinés sans doute à surmonter les difficultés liées aux homonymies. Progressivement, le nom personnel a été adjoint au nom du père, ce qui a permis un premier rattachement familial. A partir du XIIème siècle, les noms de famille ont commencé à se fixer. Le clergé transcrivait les noms transmis de pères en fils et en filles dans l’état civil dont il était le gardien. Ces noms sont devenus les patronymes d’aujourd’hui, étymologiquement « nom du père ».

195. Le nom ne faisait pas encore l’objet de textes quelconques. Les roturiers enrichis pouvaient, en devenant acquéreurs d’une terre, acheter une apparence de noblesse en changeant de nom. Ces changements furent pourtant interdits en 1555 par Henri II. Cette interdiction avait pour but de contrôler la population dans une optique fiscale et de mettre en œuvre le principe de conscription354. Elle fût à ce titre reprise

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Droit des personnes et de la famille, Collection Lamy droit civil, Etude 268, « L’acquisition du nom et du prénom » par M. DUPUIS.

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Cette suggestion d’origine vient elle-même des surnoms du Moyen-Age, qui, outre le nom des nobles issu de celui de leur seigneurie, était tiré pour les roturiers de leur profession, d’une qualité physique ou morale, du pays d’origine, du lieu d’habitation, des fonctions ou de pure fantaisie, Cf. Juris-Classeur Civil, Annexes, V° Du nom – Généralités, par A. BENABENT.

353

S. SHINDLER-VIGUIE, « La liberté de choix du nom des personnes physiques », Defrénois 1994 article 35942 p. 1409.

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dans le Code Michaud en 1629 et a abouti à la loi du 6 fructidor an II355. La Révolution l’a maintenu356 en faisant de la fixité du nom un principe républicain de base357.

196. Le nom de famille a gardé jusqu’à récemment un fondement essentiellement coutumier358. Jusqu’à la loi n° 2002-304 du 4 mars 2002 sur le nom de famille, peu de règles étaient codifiées en ce domaine. Aucun texte de réglementation générale sur le nom n’avait été jusqu’alors adopté359. La commission de réforme du Code civil avait élaboré un projet qui n’a pas abouti360. Plus récemment est apparue la nécessité de faire évoluer les règles vers plus d’égalité surtout dans l’intérêt de l’enfant et non du père et de la mère361.

197. Alors que les caractères du nom sont clairement définis, en ce qu’il est obligatoire362, immuable363, indisponible364 et imprescriptible365, la nature juridique du

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Philippe BERNARD, Le Monde, 10 février 2001.

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Philippe BERNARD, Le Monde, 10 février 2001.

357

Loi du 6 fructidor an II.

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Notamment en matière de dévolution du nom.

359

Outre la loi du 11 germinal an XI relative aux prénoms et changements de noms, on relève la loi du 2 juillet 1923 perpétuant le nom des citoyens morts pour la patrie. Divers textes sont également intervenus pour assurer une protection efficace du nom tant en matière pénale qu’en ce qui concerne la propriété littéraire et artistique. Pour un inventaire complet des textes, Cf. A. BENABENT, préc.

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Séances de mai et juin 1951 ayant donné lieu à un avant-projet de 1953, articles 204 à 223.

361

En ce sens déjà : DESPTOPOULOS, « Le nom de famille », RTD. Civ. 1969. 716. F. LAROCHE- GISSEROT, « Le nom de la femme mariée : le désordre s’installe », D. 2003. Chron. 633, qui critique la loi nouvelle.

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De part sa volonté, la personne ne peut déroger aux règles d’attribution du nom.

nom a donné lieu à de longues controverses. Il est admis aujourd’hui que le nom présente un caractère ambivalent. Il s’analyse tant en une institution de police civile366 qu’en un droit de son titulaire367. Certains auteurs ont considéré ce droit comme un véritable droit de propriété368 ; d’autres comme un droit de la personnalité369, un droit de famille370.

198. Sous cet aspect, les grands-parents, tout comme les petits-enfants, ont un rôle indéniable à jouer en matière de nom et ce, tant en matière de changement du nom de famille (CH 1) que pour la protection de ce nom de famille (CH 2).

364

Le nom ne peut être cédé, sauf lorsqu’il s’agit du nom commercial.

365

Le nom ne se perd pas par un non-usage ni ne s’acquiert par un usage prolongé.

366

PLANIOL et RIPERT, Traité pratique de droit civil français, 2ème éd., t. I, n° 114.

367

MAZEAUD, Leçons de droit civil par M. de JUGLART, t. 1, 1967, n° 565. ; KAYSER, RTD. Civ. 1959. 10. ; A. PONSARD et F. LAROCHE-GISSEROT, Rep. Civ. V° Nom – prénom.

368

Cf. Infra, la protection du nom de famille.

369

Ce qui est en concordance avec l’évolution actuelle des idées. Cf. en ce sens : MAZEAUD, Leçons de droit civil par M. de JUGLART, t. 1, 1967, n° 565. ; J. FOULON-PIGANIOL : D. S. 1968. 117. ; KAYSER, RTD. Civ. 1959. 10. ; PONSARD et F. LAROCHE-GISSEROT, préc.

370

CHAPITRE I

Dans le document La Condition des aïeux en droit de la famille (Page 122-126)