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Nous avons vu dans le premier chapitre que le modèle GRAI R&D identifie les éléments globaux et locaux du système de conception et offre la possibilité de discerner les différentes situations de conception et permet ainsi la conduite du système de conception. Ce modèle d’organisation est adapté pour décrire le cadre général de la prise de décision mais la décomposition en centres est une vue macroscopique du système et n’offre pas une description précise de l’activité de conception telle que nous avons pu la définir. Nous avons montré que cette activité est de plus en plus collaborative. Ainsi, le modèle d’organisation est un vecteur de performance pour le système de conception si il permet de décrire l’activité de collaboration en vue d’identifier les objectifs de l’activité et les leviers d’action et les indicateurs associés qui permettront de suivre son évolution et de l’influencer. Pour identifier ces éléments, nous proposons de définir une ontologie des situations de collaboration qui permettra de décrire l’activité de collaboration entre les acteurs.

Pour Lang et al. [Lang et al., 02] le chef de projet doit prendre en considération, lors de la création d’un groupe de travail pour mener à bien une activité collaborative, les aspects suivants :

- l’engagement et la propriété intellectuelle de chacun, - le partage d’espaces de conception,

- les stimulants organisationnels (esprit d’équipe, degrés de coopération, réputation), - le rôle et les responsabilités de chaque membre.

Et que c’est la combinaison de ces éléments qui, en terme de gestion du groupe de travail, favorisera la collaboration dans le groupe au cours du processus de conception. Mais ces éléments décrivent un contexte général de collaboration et ne prennent pas en compte clairement les aspects liés aux relations entre les membres du groupe. Ainsi, bien que les membres du groupe doivent être sélectionnés par le chef de projet de telle sorte que les aspects précédents soient renforcés positivement, leur définition n’est pas assez précise pour pouvoir influencer fortement la collaboration entre les acteurs. Ces aspects permettent simplement de stimuler les acteurs dans le but de faire que la collaboration se passe bien. Ils doivent être complétés par une analyse des activités et du cheminement de pensée qui ont conduit à l’atteinte des objectifs ; elle participe à la description du processus collaboratif au sein du groupe [Kavakli et Gero, 02]. Cette analyse se basera sur la prise en compte des

savoirs-être de chaque acteur que nous avons déjà identifiés précédemment. Pour faciliter la mise en évidence des savoirs-être nous proposons un cadre de description des différentes formes de collaboration correspondant à un contexte bien précis [Girard et al., 03]. Cette ontologie des situations de collaboration s’articule suivant trois points de vue : la définition du processus, la liberté de collaborer et l’expérience collaborative (Figure 20).

Figure 20. Ontologie des situations de collaboration [Girard et al., 03]

L’identification de la situation de collaboration permet de capitaliser des informations particulières sur le réseau d’acteurs et les connaissances qui y sont échangées [Robin et al., 04a] pour ainsi :

- compléter les différentes matrices établies pour définir la disponibilité, les responsabilités et les compétences des différents acteurs,

- apprendre un peu plus sur l’expérience collaborative de chaque acteur et sur le réseau d’acteurs,

- créer, lors de projets futurs, des équipes de plus en plus performantes dans un contexte de conception donné, avec un type de collaboration adapté.

Cette ontologie offre la possibilité au chef de projet d’agir sur la performance du système soit en proposant une situation particulière pour répondre à un problème donné, soit en identifiant les caractéristiques d’une situation collaborative qui peut apparaître au cours du processus. Des exemples de l’intérêt de ces différents types de collaboration dans le cadre d’un projet de conception sont donnés Tableau 10 et Tableau 11.

Tableau 10. Exemples de l’intérêt des différents types de collaboration dans un projet

Intérêt : Mettre en évidence les réseaux de collaboration internes et externes de chaque acteur de la conception.

Collaboration Etablie

Collaboration Imprévue

Collaboration Non Etablie

Collaboration Libre

Intérêts :

• Evaluer l’autonomie et la capacité d’ouverture d’un acteur dans un groupe • Créer de nouvelles relations avec de

nouveaux interlocuteurs. Intérêt : Favoriser l’émergence des

groupes de travail et affiner les informations sur les réseaux de collaboration.

Collaboration Encouragée

Intérêt : Favoriser l’émergence de groupes de travail avec des interlocuteurs jusque là non impliqués dans les projets, pour répondre à un problème identifié. Intérêt : Mettre en place un groupe

d’acteurs qui a déjà donné entière satisfaction dans la résolution d’un problème identique ou dans une situation similaire.

Collaboration Forcée

Intérêt : Eprouver la composition d’un nouveau groupe de travail et juger de l’évolution de chaque acteur en son sein.

Tableau 11. Exemples de l’intérêt des différents types de collaboration dans un projet

Intérêt : Créer des groupes de travail relativement homogènes pour le déroulement d’un processus de conception non clairement défini.

Collaboration Etablie

Collaboration Prescrite

Collaboration Non Etablie Collaboration

Libre

Intérêt : Favoriser la recherche autonome, par l’acteur, d’interlocuteurs dès le départ d’un projet pour lequel le processus de conception n’est pas clairement défini. Intérêt : Favoriser l’émergence d’un

groupe de travail, affiner les informations sur celui-ci et sur le processus de conception (le processus est ici en cours de formalisation).

Collaboration Encouragée

Intérêt : Créer, dès le démarrage du projet, des relations avec des

interlocuteurs qui n’étaient jusque là pas impliqué dans les projets.

Intérêt : Mettre en place un groupe d’acteurs qui a déjà donné satisfaction lors d’un projet précédent (le processus de conception est formalisé).

Collaboration Forcée

Intérêt : Regrouper des acteurs n’ayant jamais collaborer, dès le démarrage d’un projet commun pour juger de leur capacité à collaborer et des futures opportunités de partenariats.

Ainsi, chaque situation va influencer de façon différente les actions et les décisions des acteurs de la conception. Ces influences sont des vecteurs de performance et participent à la construction du processus et aident à son pilotage en tant qu’inducteurs d’action. Ainsi, le modèle d’organisation est à rapprocher du modèle de produit – processus. Dans le chapitre suivant, nous proposerons un modèle produit – processus – organisation intégré.

3.4 Synthèse

Nous avons montré dans ce paragraphe que les vecteurs de performance locaux du système de conception étaient relatifs aux modèles de produit, de processus et d’organisation. Ces éléments décrivent le système de conception mais aussi tous les projets qui ont lieu au sein du

système puisque chaque projet aura sa propre évolution représentée par la combinaison des trois modèles.

L’ensemble des vecteurs de performance aide à la modélisation du système de conception et servira de base pour le développement d’un système de mesure de performance puisqu’il facilitera l’identification des objectifs, des leviers d’action et des indicateurs de performance associés. Nous présenterons les différents systèmes d’évaluation des systèmes dans le paragraphe suivant.

4 Evaluation de la performance des systèmes de conception

Pour permettre l’organisation des projets il est nécessaire de mettre en place un système d’évaluation de la performance du système. Comme nous l’avons montré sur le modèle du concept de mesure de performance appliqué à la conception (Figure 7), cette mesure se base sur une modélisation du système à conduire et de son contexte, ainsi que sur un ensemble d’outils permettant son évaluation. Cette évaluation, au regard de la situation et du contexte de conception obtenus par le biais d’indicateurs de performance, de variables de décision, de contraintes et de leviers d’action, permet au décideur de faire évoluer (ou non) le système en agissant de telle sorte que ce dernier puisse atteindre ses objectifs.