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Chapitre 01 : La ville saharienne et son développement

1.5. Le développement de la ville saharienne

1.5.1. Le développement économique de la ville saharienne

Durant des siècles, le Sahara a connu une remarquable pérennité dans son organisation économique. Les réseaux d’oasis se présentent comme des chapelets d’agglomérations, les ksour s’égrènent le long de vallées et mettent en œuvre des systèmes socio-hydrauliques leur permettant d’exploiter leur palmeraie. Les ksour fonctionnaient comme étape-relais pour le commerce caravanier. Cette action leur conférait une position forte et constituait, avec les revenus de la palmeraie, l’essentiel de leur fondement économique.

Désormais, le Sahara algérien est une partie intégrante de l’état-nation qui se met en place avec l’indépendance. Déjà engagé avec la colonisation, un nouveau processus fondé sur une logique de diffusion des mêmes mécanismes politiques, économiques et sociaux agit sur l’ensemble de l’Algérie. Durant la colonisation, le Sud avait déjà subi des modifications importantes. La fin du commerce caravanier, liée à la réorganisation du commerce et des transports durant le 20esiècle a sapé un des piliers de ces ksour.

Les transformations institutionnelles introduites depuis l’indépendance sont plus profondes. Le Sud revêt une importance stratégique pour le pouvoir central. Ses nouvelles richesses économiques (gisement pétrolifères) dont l’exploitation est récente (1956) ont participé pleinement au processus d’accumulation économique et ont été à la base de la politique algérienne de développement.(S. Belguidoum, 2005)

1.5.1.1 Situation économique du Sahara:une différentiation affirmée

Certes le Nord-Est saharien ne surprend pas avec un taux élevé d’actifs de l’industrie du pétrole (14%). Sur l’axe central de la pénétrante routière, la wilaya de Laghouat doit le poids de son secteur «service», avec 52.92%, à la présence d’un secteur privé très puissant (57.7%) qui est dû à la place que les Mozabites conservent dans le commerce et la libre entreprise. A l’Ouest d’El Goléa, les paysans forment encore plus de la moitié des effectifs (55.95%), voilà qui permet d’opposer à un Sahara oriental dominé par les hydrocarbures et un Sahara septentrional fief des commerçants, un Sahara occidental resté très rural et de reconsidérer, donc, les bases de la restructuration régionale du Sahara algérien.

Ainsi, ce sont ces trois régions: celle du pétrole et de la fonction publique avec pour capitale Ouargla, celle du M’Zab avec son bastion des libres entrepreneurs (l’argent mozabite s’est investi massivement) ou celle du Gourrara avec ses solides paysanneries "privées". Dans ce grand chantier que constitue l’Algérie, le Sahara apparaît privilégié et ce, non pas depuis 1956 (l’avènement du pétrole), mais aussi en 1966, depuis la tenue symbolique du conseil des

ministres, hors capitale, qui a décidé à Ouargla, le lancement du plan de développement de cet espace immense et convoité (M. Chaouche Bencherif, 1996).

1.5.1.2 Des villes de services : le rôle moteur de l’Etat

La caractéristique essentielle des villes sahariennes est d’abord qu’elles sont des centres administratifs, de gestion et de services. Cette dimension est largement illustrée par la nette prédominance des activités tertiaires, qui avec plus des 2/3 de l’emploi recensé, montre sa nette hégémonie. Illustrant l’intégration des territoires sahariens à l’état-nation, la domination de l’emploi étatique est manifeste.

C’est essentiellement dans l’administration et les services publics que l’Etat marque sa présence. Le statut de ces villes et le rôle qui leur est dévolu pour organiser et gérer le Sahara leur permettent de bénéficier d’un important investissement en équipement de commandement et de services, créateurs de nombreux emplois. Administrations publiques (collectivités locales, directions et sous directions publics), établissements scolaires et de formations, centres universitaires, hôpitaux et centres de santés, postes et établissements bancaires, bureaux d’études…..

Si l’Etat constitue la manne de ces économies locales, il n’est pas le seul acteur. D’autres forces sociales locales agissent et participent à la vie économique. (S. Belguidoum, 2005)

1.5.1.2.1 Commerces et services privés:les activités marchandes et de services sont omniprésents et marquent profondément le paysage urbain. Rues marchandes, marchés quotidiens ou hebdomadaires, les commerces et les services sont présents dans la ville à tous les niveaux, même si des hiérarchies spatiales sont évidentes dans leur occupation de l’espace urbain. Intégrés au bâti, surgissant dans les endroits les plus inattendus du tissu, nul quartier n’en est dépourvu : garages ou Rezde chaussée de maisons parfois encore inachevées, abritant tous types de locaux, allant de la petite épicerie jusqu’au magasin de luxe (vêtements, meubles), en passant par les ateliers de réparation, les cafés et restaurants, les librairies et taxiphones. Les services concernant les activités de transport (taxis et transport de marchandises).

Pratique marginale pour les uns, lucrative pour les autres, le commerce est à la fois la marque d’un dynamisme inégal et la collaboration des activités de service de l’Etat. La multiplication des commerces et des services n’est en effet possible que grâce à la circulation de la masse monétaire que l’économie publique assure.

Dans une société ou une économie informelle (définie comme l’ensemble des activités non déclarées assurant un revenu) joue un rôle considérable, il est difficile de quantifier le poids réel des activités de commerce et de service, le volume des richesses qui circulent et la population qui y est occupée. Mais les statistiques fournies par les directions du commerce donnent néanmoins un ordre de grandeur, qui permet d’apprécier la force de cette activité dans les économies locales.

La fin de commerce caravanier n’a donc pas supprimé la fonction de place marchande de ces villes. Bien au contraire, elles ont su s’adapter aux transformations, et continuent de

jouer un rôle non négligeable dans les échanges, formels ou informels, entre le Nord et le Sud, l’Est et l’Ouest. (S. Belguidoum, 2005)

1.5.1.2.2Une présence industrielle minorée mais aux effets multiples: villes services, elles ne comportent qu’une activité industrielle réduite, moins importante que pour l’ensemble de l’Algérie urbaine (de 7 à 15% contre 17,5%). Mais cette activité est réelle, et ses effets inducteurs sur les économies locales et les structures urbaines sont indéniables.

L’industrie est un phénomène récent, liée directement aux investissements étatiques et à l’exploitation des gisements pétroliers, elle se développe sous deux formes, spécifiant ainsi les localités : les grandes entreprises publiques, et les petites et moyennes industries.

L’ouverture des grands chantiers d’exploitation à Hassi Messaoud a eu des effets considérables. La création d’une ville (Hassi Messaoud compte 38 000 habitants et 17 000 emplois) et les implications pour les villes voisines (Ouargla située à 80 km et Touggourt à 120 km) ne sont pas des moindres. Ainsi, une partie non négligeable des travailleurs du site réside à Ouargla ou à Touggourt. (S. Belguidoum, 2005)

1.5.1.2.3Le secondaire au Sud :un secteur lié plutôt aux hydrocarbures

En plus du pétrole, le sous-sol du Sahara recèle bien d’autres richesses pouvant remédier aux disparités régionales du Sahara et créer d’autres pôlesd’attraction. C’est à l’extrême Ouest que se situe le gisement de Gara-Djébilet (4 000 emplois) qui dispose d’énormes réserves en fer, justifiant la construction d’une voie ferrée de Bechar-Gara-Djébilet et la création de la sidérurgie de l’Ouest. La présence de minerais de charbon prés de Bechar, permettrait une transformation sur place. Les anciennes houillères seront rouvertes sur un nouveau site (Mennounet avec 4 600 emplois). Au Sud, le Hoggar est riche de ses minerais rares disperses à travers les terrains anciens (Tungstène, Wolfram, Etain, Diamants) et Or, Uranium àTamanarrett (1300 emplois). Enfin, au centre du Sahara, la région d’In Salah renferme des gisements de gaz répartis autour d’In Salah, Timimoun et Reggane; ce sont des réserves égales ou supérieures à celle de Hassi R’mel qui pourront prendre le relais. Ainsi les potentialités du sous-sol et la mise en valeur des terres peuvent créer un équilibre spatial interne au Sahara et, de ce fait, permettre l’extension du pays vers le Sud(M. Chaouche Bencherif, 2006).

1.5.1.2.4Une agriculture qui marque le paysage urbain:

Une des conséquences de la transformation de la structure des cités sahariennes est la part de plus en plus réduite de la population active quis’adonne au travail de la palmeraie.

Fortement concurrencée par les autres activités, l’agriculture comme activité principale ne mobilise plus que 3 à 5 %des actifs occupés de ces villes (hormis El Oued). Au total, ce sont quelques 10 à 15 % des actifs de ces villes qui vivent à plein temps ou à temps partiel du travail agricole. Faible dans les noyaux les plus urbanisés, il est plus important lorsque l’on s’éloigne des centres urbains.

Pourtant ce constat doit être nuancé, car l’agriculture joue un rôle plus important que ne le laissent apparaitre ces données. Outre les agricultures à plein temps, les agriculteurs à

temps partiel et les ouvriers agricoles saisonniers, il faut tenir compte des propriétaires fonciers, qui sont encore nombreux. Cette propriété foncière agricole est très hétérogène. Elle est composée d’abord d’une petite propriété familiale, pour qui la possession de quelques dizaines de palmiers, donnés en location, permet d’obtenir une rente comme revenu d’appoint.

Existent également des propriétés moyennes et quelques grands propriétaires ayant récupérés leurs biens nationalisés au milieu des années 70, qui bénéficient d’une rente conséquente.

Loin d’être marginalisée, l’activité agricole est toujours présente et participe à l’urbanité saharienne. L’importance des marchés agricoles, avec leurs fonctions locales, régionales et nationales, contribue à créer une « ambiance urbaine» particulière. L’agriculture marque profondément la vie quotidienne, tant sur le plan économique que social. Intégrée au paysage urbain, la palmeraie, certes souvent réduite du fait des extensions urbaines, donne toujours à la ville sa spécificité. (S. Belguidoum, 2005)

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