Nombres r´ eels, suites num´ eriques
1. LE CORPS DES NOMBRES R ´ EELS CHAPITRE VIII. SUITES
Toute partie non vide minor´ee deRadmet une borne inf´erieure.
Corollaire (Propri´et´e de la borne inf´erieure)
1.a
SoitAune partie non vide et minor´ee deR, mettons para. L’ensemble−Aest non vide et major´e (par −a), donc admet une borne sup´erieure b. On v´erifie ais´ement que −b est un minorant de A, et que pour tout r´eel ε strictement positif, −b+ε n’est pas un minorant deA:Aadmet−bpour borne inf´erieure dansR.
D´emonstration
Restarchim´edien : soitx∈R,a∈R∗+. Il existe un entier naturelntel que :na > x.
Proposition (Le corps des r´eels est archim´edien)
1.b
On raisonne par l’absurde, en supposant qu’il n’existe pas de tel entiern. L’ensemble A={na, n∈N}est non vide, major´e parx, et admet donc une borne sup´erieureb.
Commebest un majorant deA, pour tout entier natureln, on a : na6b
En particulier, pour tout entier natureln, (n+ 1)a6b b−aest donc un majorant de A, ce qui est absurde.
D´emonstration
Etant donn´´ es deux r´eelsaetx, aveca >1, il existe un entiern∈Ntel quean> x.
Corollaire (Puissances d’un nombre sup´erieur `a un)
1.c
Ecrivons´ a= 1 +h(h >0). D’apr`es la formule du binˆome de Newtona, on a, pour tout entier natureln:
(1 +h)n>nh
CommeRest archim´edien, il existe un entierntel quenh > x, d’o`u le r´esultat.
a. Ou par r´ecurrence, entraˆınez-vous `a le montrer ainsi.
D´emonstration
Faire l’exercice 6 de TD.
Exercice (Borne sup´erieure)
1
180 St´ephane FLON
CHAPITRE VIII. SUITES 1. LE CORPS DES NOMBRES R ´EELS 1.2. Caract´erisation des intervalles
Une partieX de Rest diteconvexe si elle contient le segment joignant deux quel-conques de ses points.
D´efinition (Partie r´eelle convexe)
1.a
Les intervalles de Rsont les convexes deR. Proposition (Intervalles et convexes)
1.d
Tout intervalle deRest convexe : le montrer pour [a, b[.
R´eciproquement, soit I un convexe de R. Si I est de cardinal 0 ou 1, c’est un intervalle : supposons queIcomprenne au moins deux ´el´ements. SiIest born´e, soit a= infI et b = supI. On a a, b∈ R et a < b. On va montrer que ]a, b[⊂I. Soit c ∈]a, b[ : par d´efinition de a et de b, il existe deux ´el´ements x et y de I tels que x < c < y. Par convexit´e deI,c∈[x, y]⊂I. On a donc ]a, b[⊂I⊂[a, b] : dans les quatre cas possibles,I est bien un intervalle.
Si par exempleIest minor´e et non major´e, soita= infI. On montre que ]a,+∞[⊂I.
Soitc∈]a,+∞[ : il existe deux ´el´ementsxetydeItels quex < c < y. Par convexit´e deI,c∈I. D`es lors,Ivaut ]a,+∞[ ou [a,+∞[ : dans tous les cas, c’est un intervalle.
De mˆeme dans les autres cas.
D´emonstration
1.3. Valeurs approch´ees, densit´e des rationnels
Etant donn´´ esx∈R, a∈R∗+, il existe un unique entier relatifntel que na6x <
(n+ 1)a.
Proposition (Partie enti`ere)
1.e
Existence : commeRest archim´edien, on peut trouver un entierk tel quex < ka.
L’ensemble Ω ={k0 ∈Z, k0a6x}est donc major´e park, et le caract`ere archim´edien deR montre encore qu’il est non vide. Son plus grand ´el´ement nest tel quena6 x <(n+ 1)a.
Unicit´e :
D´emonstration
On d´efinit larelation de congruence modulo asurRpar
∀(x, y)∈R2,(x≡y[a])⇔(∃n∈Z, y=x+na).
181 St´ephane FLON
1. LE CORPS DES NOMBRES R ´EELS CHAPITRE VIII. SUITES D’apr`es la proposition pr´ec´edente, pour tout r´eelx, il existe un uniquey∈[0, a[ tel quex≡y[a].
Si xest un r´eel, l’unique entier relatifn v´erifiant n6x < n+ 1 s’appelle lapartie enti`ere dex, et se noteE(x),[x], oubxc.
D´efinition (Partie enti`ere)
1.b
Soitxun r´eel, etnun entier naturel. Il existe un unique entier relatifmn tel que mn10−n 6x <(mn+ 1)10−n
Le r´eelαn=mn10−n (resp.βn= (mn+ 1)10−n) est appel´eapproximation d´ecimale dex`a 10−n pr`es pard´efaut (resp. parexc`es).
D´efinition (Approximations d´ecimales)
1.c
La fonction n7→αn (resp.n7→βn) est croissante (resp. d´ecroissante) :
Nous verrons plus tard que ces deux suites sont adjacentes, et que leur limite commune estx.
Soit A une partie de R. On dit A dense dans R si A rencontre tout intervalle de longueur non nulle.
D´efinition (Partie dense de r´eels)
1.d
A est dense dansRsi et seulement si pour tout (a, b)∈R2, o`ua < b, A∩]a, b[6=∅, ou encore : entre deux r´eels quelconques, on peut trouver un ´el´ement deA.
Illustration
Qest dense dansR.
Proposition (Densit´e des rationnels dans les r´eels)
1.f
Soita, b∈R, o`ua < b.
Soitnun entier naturel tel que 10−n< b−a, etmn l’entier tel que : mn10−n6a <(mn+ 1)10−n
On aa <(mn+ 1)10−n6a+ 10−n < b.
D´emonstration
182 St´ephane FLON
CHAPITRE VIII. SUITES 2. SUITES DE NOMBRES R ´EELS : PREMI `ERES D ´EFINITIONS
L’ensembleR\Qdes nombres irrationnels est dense dansR. Proposition (Densit´e des irrationnels dans les r´eels)
1.g
Soita, b∈R, o`ua < b. Il existe un nombre rationnelrdans l’intervalle ]a−√ 2, b−
√2[. Le nombre irrationnel r+√
2 appartient `a ]a, b[.
D´emonstration
Faire l’exercice 3 de TD.
Exercice (Sous-groupes additifs r´eels)
2
2. Suites de nombres r´eels : premi`eres d´efinitions
On appellesuite de nombres r´eelstoute famille d’´el´ements deRindex´ee parN. Leur ensemble est not´eRN. Une suite sera le plus souvent not´ee sous forme indic´ee, i.e.
on ´ecrirau= (un)n∈N.
un est appel´e le terme derang (ou d’indice)ndeu, outerme g´en´eral.
u0est appel´eterme initial.
D´efinition (Suite de nombres r´eels)
2.a
Une suiteu= (un)n∈N de nombres r´eels est ditconstante si
∀n∈N, un+1=un.
La suiteuest ditestationnaire si elle est constante `a partir d’un certain rang,i.e.
∃n0∈N, ∀n>n0, un+1=un. D´efinition (Suite stationnaire)
2.b
Notre ´etude portant principalement sur le comportement `a l’infini, nous ne faisons pas de grande diff´erence entre une suite constante et une suite stationnaire. Plus g´en´eralement, il faut bien comprendre que le comporte-ment `a l’infini d’une suite n’a aucun lien avec son comportement en un nombre fini d’indices fix´es. En particulier, le comportement `a l’infini d’une suite n’est pas modifi´e si on en change ou mˆeme supprime un nombre fini de termes.
Siuetv sont deux suites de nombres r´eels, lasomme u+vde ces suites est la suite de terme g´en´eralun+vn. On d´efinit ainsi une loi de composition interne d’addition surRN.
Soitu= (un)n∈Nune suite r´eelle, et soitλ∈R. On d´efinit la suiteλu, suite dont le terme g´en´eral estλun. Cela d´efinit une loi de multiplication scalaireR×RN→RN.
D´efinition (Op´erations sur les suites)
2.c
Si λ, µ∈R, etu, v∈RN, alorsλu+µv∈RN,i.e.RNest stable par combinaison lin´eaire.
183 St´ephane FLON
2. SUITES DE NOMBRES R ´EELS : PREMI `ERES D ´EFINITIONS CHAPITRE VIII. SUITES
L’ensembleRN, muni de la loi de composition interne d’addition et de la loi externe de multiplication scalaire est un espace vectoriel r´eel : pour toutes suites r´eelles u et v, tous r´eelsλetµ, on a :
(1) (RN,+) est un groupe commutatif ; (2) λ(µu) = (λµ)u;
(3) 1.u=u;
(4) (λ+µ)u=λu+µu; (5) λ(u+v) =λu+λv.
Th´eor`eme (Structure d’espace vectoriel sur les suites)
2.a
Soituetvdeux suites r´eelles. Leproduit uvdeuet dev est la suite r´eelle de terme g´en´eralunvn.
D´efinition (Produit de suites)
2.d
(RN,+,×) est un anneau commutatif.
Proposition (Structure d’anneau sur les suites)
2.b
En outre, pour tout r´eel λ, toutes suites r´eellesuetv, on a : (λu)v=λ(uv).
On dit alors que RN est une R-alg`ebre (c’est une sorte de super-structure combinant espaces vectoriels et anneaux).
Soitu, v∈RN. On ´ecritu6vlorsque un6vn, pour toutn∈N. D´efinition (Ordre sur les suites)
2.e
Selon nos conventions, u < vsignifieu6v et u6=v. En particulier, 0< u(ouu >0) signifie que la suite est `a termes positifs ou nuls, non tous nuls : elle n’est pas forc´ement `a termes tous strictement positifs.
Cet ordre n’est pas total :
On d´efinit comme on l’a fait plus g´en´eralement dans le chapitre sur les relations d’ordre les notions de suites major´ees, minor´ees, born´ees, de suites monotones, strictement monotones. Au passage, on peut noter qu’une suiteuest born´ee si et seulement si|u|est major´ee.
Pour la croissance d’une suite u, la d´efinition est
∀m, n∈N, (m6n)⇒(um6un).
On lui pr´ef`ere souvent l’assertion ´equivalente suivante :
∀n∈N, un 6un+1.
184 St´ephane FLON
CHAPITRE VIII. SUITES 3. LIMITE D’UNE SUITE DE NOMBRES R ´EELS
D´eterminer si les sous-ensembles suivants de suites r´eels sont des sous-espaces vec-toriels (parties non vides stables par combinaisons lin´eaires) ou des sous-anneaux (parties comprenant l’´el´ement unit´e, stables par diff´erence et par produit) deRN:
(1) L’ensembleB(RN) des suites r´eelles born´ees.
(2) L’ensemble des suites r´eelles major´ees.
(3) L’ensemble des suites r´eelles major´ees ou minor´ees.
(4) L’ensemble des suites r´eelles croissantes.
(5) L’ensemble des suites r´eelles monotones.
(6) L’ensemble des suites r´eelles sommes d’une suite croissante et d’une suite d´ecroissante.
Exercice (Stabilit´e de sous-ensembles de suites)
3
3. Limite d’une suite de nombres r´eels
On dit que la suiteu= (un)n∈Nconverge (outend) vers un r´eell∈Rlorsque
∀ε∈R∗+,∃N ∈N,∀n∈N, (n>N)⇒(|un−l|6ε).
S’il existe un r´eel l tel que la suite converge vers l, on dit que la suite est conver-gente, ou encore qu’elleadmet une limite finie. Une suite non convergente est dite divergente.
D´efinition (Limite d’une suite de nombres r´eels)
3.a
Proposer des r´e´ecritures vari´ees du fait qu’une suite r´eelle uconverge vers le r´eell.
Exercice (Convergence d’une suite r´eelle)
4
Illustration
Ecrire dans le registre formel le fait qu’une suite r´´ eelleudiverge.
Exercice (Divergence d’une suite r´eelle)
5
Changer la valeur de la suite u en un nombre fini d’indices ne change rien `a son ´eventuelle convergence.
Cette d´efinition traduit donc bien le caract`ere asymptotique de cette notion.
185 St´ephane FLON
3. LIMITE D’UNE SUITE DE NOMBRES R ´EELS CHAPITRE VIII. SUITES
On dit que la suite (un)n∈Ndiverge (outend) vers +∞(resp.−∞) si :
∀M ∈R,∃N ∈N,∀n>N, un>M (resp. ∀M ∈R,∃N ∈N,∀n>N, un 6M) D´efinition (Divergence d’une suite r´eelle vers plus ou moins l’infini)
3.b
Dans le
cas o`u la suite u tend vers une limitel ∈ R¯, on note indiff´eremment lim
n∞un = l,un →n∞ l, u→l, ou encore limu=l.
Proposer des r´e´ecritures vari´ees du fait qu’une suite r´eelle udiverge vers +∞.
Exercice (Divergence d’une suite r´eelle vers l’infini)
6
Une suite admet au plus une limite.
Proposition (Unicit´e de la limite)
3.a
D´emonstration
Ne pas oublier qu’en g´en´eral, une suite r´eelle n’admet pas de limite (finie ou non). La notation lim
n un
ne peut ˆetre employ´ee que si on a ´etabli (ou suppos´e) l’existence de cette limite. Pour bien distinguer le type de divergence, on dit parfois qu’une suite r´eelle divergeant vers +∞ou−∞estdivergente de premi`ere esp`ece, et que les suites n’admettant pas de limite sont divergentes de seconde esp`ece.
186 St´ephane FLON