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II. La corrosion des objets archéologiques ferreux en présence de chlore

4. Structure

4.3. Le chlore : insertion, substitution ou adsorption ?

La position du chlore dans la structure est une question de première importance du fait de son implication dans les mécanismes de corrosion.

Insertion : les sites des tunnels

Semblant stabiliser la structure, des anions Cl– sont situés dans les tunnels, au centre du prisme défini

par 8 atomes d'hydrogène H, liés en groupes hydroxyles aux oxygènes O1 et O3. Post et al (Post et Buchwald, 1991) plaçaient les Cl– à la position (0, 0, 0), mais des études récentes montrent qu’il

existe un décalage de 0,33 à 0,4 Å le long de l’axe b (Ståhl et al., 2003 ; Post et al., 2003). En effet, si on tient compte du rayon ionique du chlore de 1,8 Å, et de la répulsion inter anionique, la distance séparant deux atomes Cl–Cl doit être d’au moins 3,6 Å. Aussi, Post et al (Post et Buchwald, 1991 ; Post et al., 2003) indiquent de l’ordre de 1,25 à 1,6 atomes de Cl par maille, ce qui correspond à 2/3 d’occupation des sites, en considérant deux sites occupés de manière aléatoire et le troisième site vacant. Ceci permet d’augmenter la distance Cl_Cl le long du tunnel, par un léger déplacement des Cl le long de l'axe b (figure 9). Le site du chlore est alors situé à la position (0, 0,11 , 0) (Ståhl et al., 2003). La valeur de la distance Cl–Cl est de l’ordre de 3,83 Å (Post et al., 2003) ou 3,72 Å (Ståhl et al., 2003). D’autre part, les distances interioniques H…Cl sont de l’ordre de 2,08 à 2,38 Å (Post et al., 2003). Ces résultats sont tout à fait comparables aux distances de 2,41 Å à 2,23 Å, préalablement proposées par une étude par Infra Rouge par Weckler et Lutz (Weckler et Lutz, 1998). En revanche, les sites vacants sont trop près des ions Cl– pour permettre la présence simultanée de molécules d’eau.

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Substitution dans les octaèdres

Selon Naono (Naono, 1993, cité par R. Cornell et Schwertmann, 2003) un taux de chlore supérieur à 4 %mass, ce qui correspond à 1 Cl– par maille est trop important pour correspondre à des ions situés

dans les canaux, aussi suppose-t-il qu'un certain nombre d'ions Cl– se substitue aux oxygènes et

participent ainsi aux octaèdres qui entourent les atomes de fer. Des analyses Mössbauer à 77°K ont amenées Rezel et Genin (Rezel et Genin, 1990) à la même hypothèse de substitution des ions Cl– dans

les octaèdres.

Adsorption à la surface

L’oxyhydroxyde akaganeite possède un état de surface qui permet l’adsorption d’une certaine quantité d’éléments : de l’eau ou des ions, tels les ions chlorure. Les forces responsables de cette adsorption résultent d'interactions électroniques entre les ions et la surface du cristal. Ståhl et al (Ståhl et al, 2003) évoque en effet cette hypothèse à l'issu de ses études de caractérisation structurale du composé.

L'adsorption spécifique d'anions peut aussi procéder par substitution de ligands aquo ou hydroxo de la surface de l'oxyde : les atomes de chlore sont substitués aux groupes hydroxyles (Jolivet et al., 1994).

5. Bilan

L'akaganeite ne se forme qu'en présence de suffisamment de chlore, ce qui favorise la construction des larges tunnels caractéristiques de la structure de cette phase. Le chlore est situé à l'intérieur de ces canaux, occupant un site défini selon un taux d’occupation du chlore dans la maille cristalline. Mais la teneur en chlore de la phase est variable et dépasse souvent la teneur maximale atteinte du taux d'occupation, lorsque tous les sites sont occupés. Aussi, en plus du chlore de structure en insertion dans les tunnels d'autres positions susceptibles d'être occupées ont été proposées. Une hypothèse suggère que les ions Cl– se substituent aux oxygènes et participent ainsi aux octaèdres qui entourent les Fe3+. De plus,

l’akaganeite possède un état de surface qui permet l’adsorption des ions chlorure. A ce stade, il est essentiel d'étudier ce point de localisation du chlore dans la structure de l'akaganeite car cela pourrait conditionner la façon dont la phase relâche les ions chlorures. Or aucune étude n'a jusqu'à présent clairement mis en évidence la variation de la structure en fonction du taux de chlore.

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IV. Problématique

Lorsque les objets archéologiques métalliques, issus de fouilles archéologiques terrestres, sont exposés à l'air, l'amplification des phénomènes de corrosion produits sur la surface métallique par la contamination en ions chlorures, peut causer à long terme la perte du matériau. Les chlorures doivent donc êtres éliminés en vue de stabiliser les objets. Les traitements de déchloruration actuellement utilisés ne sont pas optimisés du fait de la méconnaissance des produits de corrosion chlorés qui entrent en jeu dans les processus de dégradation du fer. Il est donc nécessaire de localiser les chlorures dans les couches de corrosion. Or l'état des connaissances dressé précédemment montre que très peu de publications se rapportent à la caractérisation fine des phases chlorées susceptibles de se former lors de l'altération des objets archéologiques ferreux enfouis dans les sols.

L'emploi parfois limité de techniques analytiques utilisées toujours à l'échelle macroscopique, empêche une bonne connaissance de la corrosion au niveau microscopique. En effet, les moyens d'analyses, tel que la diffraction des rayons X, sont adaptés à l'identification des phases majoritaires, mais sont limitées, du fait de la complexité des diffractogrammes qui englobent tous les produits de la couche d'altération, pour l'identification de phases minoritaires et ne donnent pas d'informations précises sur leur localisation dans les couches de corrosion. Connaître la distribution des phases dans les couches de corrosion à l'échelle du micromètre, est un élément essentiel pour mettre en place des hypothèses de mécanismes de corrosion du fer dans le sol faisant intervenir les chlorures.

Dans les produits de corrosion formés en présence de chlore, l'oxyhydroxyde chloré akaganeite est le seul réellement pris en compte dans les problèmes de stabilisation. Ce composé est considéré comme responsable des dégradations post fouilles des objets archéologiques ferreux. En effet, il a été vu que l'akaganeite peut contenir différentes teneurs en chlore et elle est donc susceptible d'en relâcher, c'est pourquoi il est souvent nommé 'réservoir à chlorures'. Connaître la position du chlore dans la structure du composé, à savoir en insertion, adsorption ou même substitution est une question de première importance du fait de l'implication de cet élément dans la corrosion. Cependant, un réel manque de données concernant l'effet de la mobilité possible du chlore sur la structure de l'akaganeite ne permet pas d'évaluer concrètement cet effet.

Le travail de recherche s'articulera donc autour de deux axes. Il s'agira d'une part de mieux comprendre la façon dont le chlore est fixé dans l'akaganeite et d'autre part de caractériser finement les couches de corrosion archéologiques en utilisant des techniques ad hoc afin de réaliser une description fine des faciès de corrosion obtenus en présence de chlore, et d'en tirer les indices nécessaires à réaliser des hypothèses de mécanisme.

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Pour le premier axe, l'akaganeite sera synthétisée puis lavée pour obtenir des produits avec différentes teneurs en chlore. La déchloruration de cette phase pourra donc aussi être étudiée. L'observation de l'évolution de la structure en fonction de cette teneur en chlore sera réalisée avec des méthodes adaptées. Certaines méthodes permettront d'axer principalement les analyses pour les déterminations d'effets sur la structure. Pour ce faire, la diffraction des rayons X, la spectroscopie Raman et la spectrométrie Mössbauer seront utilisées, tandis que des analyses de Spectroscopie d'Absorption X permettront d'évaluer à la fois le chlore de structure et le chlore adsorbé. Ceci permettra de répondre aux questions sur la localisation et la stabilité du chlore dans β–FeOOH.

Le deuxième axe procèdera à une caractérisation fine du système de corrosion dans les objets archéologiques ferreux. Ces objets sont principalement issus d'un site archéologique de référence, en l'occurrence le site de Glinet du fait qu'un certain nombre de données sur le milieu d'enfouissement sont accessibles. Quelques objets proviennent également d'autres sites archéologiques afin d'avoir une vision plus globale des systèmes de corrosion en présence de chlore. Il s'agira de faire un bilan précis des phases susceptibles de se former sur les objets archéologiques ferreux enfouis dans le sol et exposé au chlore. L'étude se limitera aux objets dans les sols et non aux objets issus de fouilles marines, car il existe peu voire pas de données sur les systèmes et sur les mécanismes de corrosion dans les sols contrairement aux systèmes de corrosion correspondant à un enfouissement en eau de mer. L'étude sera orientée vers l'investigation des modes de formation et d'évolution des produits de corrosion contenant du chlore. Pour répondre à ces objectifs, une méthodologie précise et complète a été mise en place incluant des études de caractérisation chimique et structurale à la fois à l'échelle macroscopique et microscopique. Cette méthodologie, accompagnée de la présentation des techniques expérimentales associées ainsi que le corpus d'échantillons seront présentés au chapitre II.

Chapitre II

Chapitre II : méthodologie

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I. Techniques expérimentales………. 56