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FIGURE 3 : ENQUETE FPSPP 2011 : SITUATION DES PERSONNES APRES LE CIF

II- CADRE THEORIQUE

2.1.2.1. La théorie du capital humain

La trajectoire professionnelle suppose donc une planification stratégique. Partant de ce postulat, nous pouvons constater que le contexte économique n’offre pas de place à tous. Les emplois disponibles sont prisés et pour se distinguer dans la « queue pour l’emploi », l’individu doit avoir les meilleurs « signaux ». A ce titre, il est à noter que les théories économiques expriment globalement la corrélation suivante : plus un individu émet des signaux, plus il aura de possibilités d’accéder à un emploi et par extension un emploi de son choix. Il arbore ainsi les preuves de ses capacités à exercer un métier à travers un diplôme ou une attestation de formation professionnelle.

Dans le cadre d’une reconversion, le risque est grand. L’individu doit quitter sa profession pour suivre une formation. Il entre dans une voie de passage : il ne fait plus partie de son groupe d’appartenance mais n’appartient pas encore au groupe de

référence. Entre deux mondes, la formation lui permet d’émettre les signaux qui pourraient le faire accepter du groupe de référence. C’est dans cette perspective que la conception économique nous invite à regarder la formation comme un investissement pour l’accès à une reconnaissance par la formation et/ou le diplôme.

Il nous semble en effet important de nous attarder sur le rapport entre la formation et l’économie, qui repose sur un véritable investissement. En effet, dans un contexte tel que nous l’avons déjà décrit, le départ en formation apparaît « comme un choix à hauts risques » pour reprendre les termes de CORREIA (1997, p.130), puisqu’il suppose un relatif retrait du travail et une rupture avec le monde de l’entreprise. Appréhendée sous un angle économique, la reconversion professionnelle par la formation apparaît finalement comme un investissement rationalisé.

Les travaux de BECKER (1964) ont donné naissance à la théorie du capital humain dont il est considéré comme le père fondateur. L’originalité de son travail réside dans le fait qu’il applique systématiquement la rationalité économique individuelle à plusieurs domaines peu ou pas abordés par les économistes. Pour lui, l’éducation est un investissement dont l’objectif est d’améliorer la productivité de l’individu. Ce

« placement » permet alors à celui qui l’effectue, un meilleur « retour sur investissement », par un meilleur salaire.

En considérant la formation et par extension la reconversion professionnelle par la formation, tous les éléments de l’investissement sont réunis :

- le détour, ou démarche acceptée qui éloigne de la satisfaction immédiate et directe par la consommation ;

- le coût, en travail et en consommation intermédiaire, qui permet de réaliser l’instrument efficace ;

- le retour, ou le flux d’avantages généré par la démarche et qui élève le niveau de satisfaction et rentabilise la conduite adoptée ;

- le temps, au double sens de celui consommé durant le détour et de celui amélioré durant le retour.

En résumé, nous pouvons analyser la reconversion professionnelle de la façon suivante :

Plutôt que d’aller sur le marché du travail pour envisager le changement de métier, l’individu se rend en formation, c’est le détour d’investissement. Il supporte les frais annexes de formation et doit aussi concéder du temps non alloué à d’autres occupations, c’est le prix à payer. L’individu trouve ensuite un métier en rapport avec son projet professionnel et avec parfois un salaire plus élevé, c’est le retour sur investissement. Enfin, c’est aussi du temps consacré à la formation.

Le CIF en tant que dispositif de formation professionnelle permet de limiter les considérations purement économiques de l’investissement formation. En effet, le maintien du salaire et le paiement des coûts pédagogiques permettent à l’individu de se concentrer uniquement sur le déroulement de sa formation et l’acquisition des compétences nécessaires à l’exercice de son futur métier. Du côté des avantages, nous pouvons donc observer que le supplément de revenu ne constitue pas le seul enjeu de reconversion. L’individu en reconversion professionnelle vise également un meilleur statut et une satisfaction personnelle non négligeables.

BERET (1992), affirme ainsi que : « […] Investir c’est choisir une situation qui définit [l’individu] lui-même (par son statut d’investisseur c’est-à-dire son type d’investissement : scolaire, professionnel…) et qui le projettent dynamiquement dans l’avenir. ». Par l’investissement, le sujet se projette dans le futur, vers le statut désiré.

BERET rajoute que la mobilité professionnelle peut être mise en parallèle avec la notion d’investissement, par cette dynamique tournée vers l’avenir. Néanmoins, il rappelle que les mobilités peuvent être analysées comme « traduisant des manières dont les acteurs fabriquent leur trajectoire professionnelle au sein de système de règles intégrées – c’est-à-dire à la fois pris en compte et transformés-dans les stratégies d’acteurs socialement et économiquement définis dans leur rapport au marché du travail.» (op.cit.p.355). La notion de mobilité renvoie à la fois à la liberté de l’acteur mais aussi à un espace social régi par des règles qui vont conditionner la mobilité.

Une analyse du marché du travail montre que les places disponibles vont conditionner la mobilité. Cette mobilité après formation révèle un autre aspect de

l’investissement : le diplôme. Les sujets s’orientant vers un nouveau métier à travers le CIF viseraient aussi l’acquisition d’une certification reconnue et la reconnaissance par les membres de son groupe de référence.