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FIGURE 4 : CONTINUUM DE MOTIVATION ET D’AUTODETERMINATION SELON DECI ET RYAN

La motivation extrinsèque a pour base un résultat extérieur à l’action. L’action est

« instrumentale » (CARRE, 2005, p.140). Une formation est entreprise dans l’espoir d’obtenir un diplôme et d’exercer un métier par exemple.

La motivation extrinsèque se décline en quatre formes :

• « contrôlée » : il y a soumission à une autorité, la sanction régule le comportement de l’individu.

• « introjectée » : l’individu agit de lui-même mais il s’applique des règles toujours en rapport avec la sanction.

• « identifiée » : l’individu agit en fonction de ses convictions personnelles, et de l’importance qu’il accorde au résultat.

• « intégrée » : représente le stade ultime de la motivation extrinsèque.

L’individu agit en totale adéquation avec lui-même, en ayant conscience de sa liberté.

Motivation Intrinsèque Extrinsèque Extrinsèque Extrinsèque Extrinsèque

contrôlée introjectée identifiée intégrée

Amotivation

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Continuum d'autodétermination

Pour les auteurs de cette classification, les motivations extrinsèques peuvent êtres dites « autodéterminées » puisqu’elles viennent toutes de l’individu. La finalité, même extérieure au sujet, ne vient pas remettre en question son autodétermination.

La motivation intrinsèque suppose une stimulation intérieure. Elle est possible grâce à une action menée pour elle-même, pour le plaisir qu’elle procure, sans aucun autre intérêt.

Pour en revenir plus précisément à la théorie de l’autodétermination, il s’avère que les auteurs ont mis en avant que l’être humain d’une façon innée tend à satisfaire :

« trois besoins psychologiques fondamentaux, à savoir le besoin d’autonomie, le besoin de compétence et le besoin de relation à autrui » (RYAN et LAGUARDIA, 2000, p.285).

Le besoin d’autonomie renvoie à la décision de l’action qui émane de l’individu lui-même. Le besoin de compétence est lié au besoin de relever des défis, de prise en charge par soi-même de la performance à réaliser. Le besoin de relation à autrui renvoie à la nécessité d’être entouré et d’appartenir à un groupe.

2.3.5. LE SENTIMENT DEFFICACITE PERSONNELLE

Pour qu’un individu agisse, il faut qu’il s’en sente capable. BANDURA ne nie pas l’importance de l’expectation de résultat mais il insiste sur le fait que cela ne garantit pas que l’individu s’engage dans une action. Il veut donc compléter cette théorie avec ce qu’il désigne comme le « sentiment d’efficacité personnelle », c’est-à-dire la capacité de mobiliser les comportements et compétences dans le but de mener à bien un projet. Plus précisément, l’efficacité personnelle est définie comme : « […] la croyance de l’individu en sa capacité d’organiser et d’exécuter la ligne de conduite requise pour produire des résultats souhaités » (BANDURA, 2003, p. 12). Pour effectuer une tâche ou mener à terme un projet, l’individu doit donc identifier les moyens et aptitudes à mettre en œuvre.

Il doit évaluer ses capacités personnelles, et les mobiliser.

Le même auteur, a mis en évidence quatre sources d’efficacité personnelle : l’expérience active de maîtrise, l’expérience vicariante, la persuasion verbale, et enfin les états physiologiques et émotionnels.

• « L’expérience active de maîtrise » concerne les succès ou échecs antérieurs que l’individu aurait connus. Pour développer son sentiment d’efficacité personnelle, le mieux est de vivre des expériences qu’il maîtrise et qu’il réussit. La facilité n’est néanmoins pas de mise car l’échec, s’il y en a, sera plus difficile à appréhender par la suite. Par conséquent, « un sentiment résilient d’efficacité nécessite de vaincre des obstacles grâce à des efforts persévérants » BANDURA (2003, p.125). Le sentiment d’avoir mis en œuvre des stratégies à travers l’effort, pour dépasser ses limites, construit la croyance d’efficacité. Cette croyance, il ne faut pas la confondre avec la performance car celle-ci dépend de nombreux facteurs comme la difficulté, le cadre temporel, le mode d’organisation cognitive.

(op.cit.p.127). L’individu en structurant ses tâches progressivement construit un sentiment d’efficacité personnelle, durable et solide.

• « L’expérience vicariante », ou expérience des autres, constitue un « modelage social ». « Ainsi, voir ou imaginer des individus similaires à soi agir avec succès augmente les croyances d’efficacité des sujets qu’ils peuvent eux-mêmes réaliser des activités comparables » (op.cit.p.136).L’observation des autres, de leurs stratégies, guide et motive le développement personnel. C’est un véritable apprentissage qui aide l’individu à se sentir capable de se dépasser.

• Dans l’autre sens, se trouve « la persuasion verbale », qui vient des autres. En effet « il est plus facile à quelqu’un de maintenir un sentiment d’efficacité, particulièrement quand il est confronté à des difficultés, si d’autres individus significatifs lui expriment leur confiance dans ses capacités que s’ils manifestent des doutes » (op.cit.p.156). L’encouragement, le fait que les autres croient en l’individu, influence son sentiment d’efficacité personnelle. Ceci présente tout de même des limites car il est évident que les efforts de l’individu doivent se concrétiser. Lui seul peut alors intervenir.

• Enfin, « les états physiologiques et émotionnels », transmettent des indices aux individus sur leurs capacités. Encore faut-il qu’ils les interprètent positivement, et non pas comme des signes de vulnérabilité. L’individu se soumet ainsi à une auto-évaluation de son efficacité personnelle qui reste cependant subjective.

Ces quatre sources permettent aux individus d’évaluer leurs capacités, à travers l’expérience passée, présente et la volonté d’une expérience à venir. Ces jugements sont susceptibles d’influencer le sentiment d’efficacité personnelle, et par conséquent, la motivation ou autres processus médiateurs du comportement humain. BANDURA en relève en effet quatre :

• Les processus cognitifs : l’individu construit des standards, qu’il détermine à partir de sa capacité à se dépasser. Réciproquement, plus son sentiment d’efficacité personnelle sera élevé, plus ses standards seront exigeants. La pensée anticipatrice ou la prévision sont des concepts clés de ce processus. (op.cit.p.181)

• Les processus motivationnels : la situation future ou état désirés par l’individu sont « transformés en motivateurs et régulateurs actuels du comportement » (op.cit.p.188). Le but règle alors le comportement, et la croyance d’efficacité est primordiale dans son élaboration et la projection dans l’avenir. L’individu en s’auto évaluant, évalue aussi les efforts qu’il doit fournir pour atteindre son but.

• Les processus émotionnels : constituent les sentiments personnels d’un individu par rapport à des évènements. Ces derniers seront interprétés de manière différente selon les personnes. Ceux qui sont positifs, vont augmenter leur efficacité, quand au contraire, les pessimistes vont se laisser envahir par des sentiments négatifs qui auront pour effet de diminuer leur sentiment d’efficacité personnelle, donc l’utilisation de toutes leurs capacités. (op.cit.p.242).

• Les processus de sélection : l’individu évoluant au sein d’un milieu aura tendance à sélectionner ses activités et ses projets par rapport à sa croyance en son efficacité, ses capacités. Ainsi, il évitera ce qu’il juge trop difficile et s’engagera volontiers dans un projet qu’il se sent capable de mener à terme. Plus il aura un sentiment d’efficacité personnelle élevé, plus il se lancera des défis.

2.3.6. L’ESTIME DE SOI

MUCCHIELLI considère l’estime de soi comme le fondement de la dynamique motivationnelle (1981, p. 75). L’estime de soi serait composée de deux éléments : la

confiance en soi et la force du Moi : « l’attitude envers soi ou estime de soi est une attitude fondamentale. C’est elle qui va donner un sens - en portant ou non la signification : succès possible - à toutes les actions entreprises ». (p.76).

L’estime de soi est donc en ce sens au cœur de la dynamique motivationnelle, comme le principal moteur de la réalisation de ses projets. La reconversion professionnelle doit puiser sa force dans cette dynamique individuelle pour se réaliser. L’action entreprise doit ensuite se concrétiser en projet, notion essentielle dans l’acte de transformation de soi.

2.3.7. LE PROJET DE RECONVERSION

Sur l’échelle de la motivation, le projet se place au sommet, avant l’action. Ainsi, NUTTIN détermine le projet comme « la concrétisation personnelle d’un besoin » NUTTIN (1980, p. 258). Il fait du projet, au même titre que les buts et les plans, une donnée obligatoire du développement humain. Etre de projet par essence, l’homme est toujours en construction, en projection d’un état supérieur. Le projet est la manifestation concrète de la motivation et de la quête de progrès.

Cette quête de progrès comme annoncé peut être cognitivement élaborée et concrétisée. Comme le soutenait NUTTIN : « Nous considérons le projet comme un besoin qui, au niveau du fonctionnement cognitif, cherche son issue (outlet) dans une relation avec le monde et revêt ainsi une forme comportementale concrète : une structure moyen-fin. […] Pour nous, en effet, le besoin abstrait se concrétise, soit en projet d’action grâce à un processus d’élaboration cognitive […] soit en comportement conditionné grâce à un processus de canalisation » NUTTIN (1980, p.275). Autrement dit, l’individu pour répondre à son besoin va mettre en place un projet, c’est-à-dire une explicitation de ses objectifs, un choix des moyens à engager pour les atteindre. Ceci s’inscrit dans une dimension temporelle qu’il doit prendre en compte.

BOUTINET (1990) affirme qu’à chaque moment ou âge de la vie correspond un type de projet. C’est ainsi qu’il met en évidence les projets d’orientation et d’insertion de l’adolescent, le projet vocationnel de l’adulte, et le projet de retraite. Le projet dans la

perspective de BOUTINET, est inscrit dans une dimension supérieure : il est décrit avec, en toile de fond la société de progrès.

BOUTINET (1993) distingue trois transitions : celle de la jeunesse, celle de la vie adulte, celle de la retraite. La transition de la vie adulte se distingue elle-même en quatre types de projets :

- le projet professionnel : à travers lequel l’individu détermine ses choix avec trois variantes possibles : « le projet professionnel d’emploi à quart, tiers, mi-temps ou plus ; projet professionnel identitaire marqué par une perspective de continuité dans le même travail ; projet professionnel de mobilité ou projet de carrière échafaudant un itinéraire fait de changements pour les années à venir. » (p.40).

- le projet familial : en tant que projet de vie

- le projet personnel : à savoir le style de vie et les valeurs qui sont importantes pour l’individu.

- le projet latéral : projet de désengagement par rapport « aux rôles sociaux traditionnels », il s’agira ici d’engagement marginal ou périphérique.

BOUTINET estime notamment que le projet vocationnel « est possible à partir du moment où l’individu peut vivre au sein de son travail une identité professionnelle, identité à travers laquelle il aura l’impression de se réaliser, en affrontant des tâches ou des responsabilités de plus en plus complexes. » BOUTINET (1990, p. 87). Cette conception insiste sur l’importance du projet, plus particulièrement sur la projection de soi dans l’avenir, à travers une profession que l’on souhaite exercer.

De ce point de vue, le « projet identitaire » vise également une reconnaissance sociale. (op.cit.p.87).C’est à travers son projet que l’individu existe, et à terme se réalise, progresse. Le projet identitaire se manifestera d’une manière concrète dans la volonté de l’individu d’être « expert dans son activité professionnelle ». (op.cit.p.87)

Cependant, BOUTINET (1993) rappelle que la dynamique de projet peut être assimilée à une injonction qui peut entraîner des désillusions. La nécessité de projet imposée par notre environnement social et la nécessité de se mettre en mouvement pour

se réaliser peut créer des situations de désillusion : « Tout réside en définitive dans l’art de gérer de telles injonctions ; certains y arrivent en passant par les interstices des deux paradoxes ; d’autres y succombent et se laissent désillusionner par un nouvel échec, survenant après l’essai de nombreux autres expédients ». (p.113)

VASSILEFF (1997) a montré que le concept de projet peut être enrichi par le concept de projection. Le projet d’un individu est le fruit de sa capacité de projection. La projection est la démarche de l'individu qui donne du sens à ses pensées et à ses actes à partir de ses propres conceptions. C'est cette démarche, expression du désir, qui fonde l'autonomie et qu'il convient en premier lieu de développer chez les formés.

La notion de projet a par ailleurs été associée au projet identitaire par BARBIER (p.51-54). Il présente le projet comme une représentation, le « désir de changement correspondant à un projet de production pourrait trouver son origine dans le désir de changement correspondant à un projet de soi ou à un projet d’identité ».

2.3.8. DE NOUVELLES PERSPECTIVES DE RECHERCHES

En définitive, c’est sur la base des références susmentionnées que CARRE (2005) a déterminé des « lois de la motivation » (p.142). Selon son analyse il existerait six mécanismes régissant la motivation à se former et l’adhésion à projet de formation. Cette analyse se résume dans le tableau suivant :

TABLEAU 4 : PROCESSUS MOTIVATIONNELS LIES A LA FORMATION ET A