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III. Les bananiers

2. La systématique des bananiers

Les bananiers sont des monocotylédones appartenant à l’ordre des Zingibérales et à la famille des Musaceae. Le regroupement de l’ordre des Zingibérales avec celui des Poales et des Arécales reste problématique (Givnish et al., 2010). L’analyse de 93 gènes nucléaires en copie unique regroupait les Zingibérales (bananiers inclus) et les Arécales (palmiers) dans un même groupe proche des Poales (D’Hont et al., 2012; Figure 9a). L’analyse des séquences chloroplastiques suggère un résultat différent : les Zingibérales et les Poales appartiendraient à un même groupe proche de celui des Arécales (Martin et al., 2013; Figure 9b).

Derrière le terme générique de bananier se cache une grande diversité avec environ 1200 accessions recensées (Lescot, 2013) et divisées en deux groupes principaux:

- les bananiers séminifères dits sauvages ; - les bananiers parthénocarpiques dits cultivés.

Chez les bananiers séminifères, l’ovaire des fleurs femelles ne se développe qu’après fécondation pour former des fruits. Les fruits de ces bananiers sont de taille restreinte, riches en graines noires et dures et presque sans pulpe. A l’inverse, les bananiers dits cultivés produisent des fruits sans fécondation d’ovule (parthénocarpie). Les fruits peuvent se développer sans pollinisation ni formation de zygotes et se remplir de pulpe. Les fruits des bananiers dits cultivés sont très peu fertiles et leurs fruits contiennent peu ou pas de graines. Tous les bananiers ont la capacité de se propager à travers les rejets (multiplication végétative).

Figure 10. Répartition géographique des espèces Musa acuminata et Musa balbisiana en

Asie du Sud Est

Distribution naturelle déduite des ancêtres à l’origine des variétés cultivées communes modernes pour la production de bananes comestibles. Musa acuminata burmannicoïdes n’est pas indiquée et se situe au niveau de Musa acuminata burmannica (De Langhe et al., 2009).

49 a) Les bananiers séminifères dits sauvages

Les bananiers séminifères sont présents dans les vallées et les clairières humides des forêts de faible et moyenne altitude de la zone intertropicale en Asie du Sud Est, de la péninsule indienne aux Îles Samoa (Robinson, 1996). Les 67 espèces de bananiers séminifères recensées actuellement sont toutes diploïdes avec un nombre chromosomique de base 7, 10 ou 11 en fonction des espèces (Constantine & Rossel, 2001; Li et al., 2010). Les dernières données de phylogénie moléculaire indiquent une division des bananiers séminifères en deux clades (I et II) et cinq sections (Li et al., 2010). Parmi ces cinq sections, la section Eumusa (aussi appelée

Musa (Wong et al., 2002)) est la plus répandue géographiquement et contient 21 espèces

ayant un nombre chromosomique de base 11. Cette section contient en particulier les deux espèces Musa acuminata et Musa balbisiana à l’origine de la grande majorité des accessions cultivées de bananiers. Musa acuminata a une aire de distribution très vaste (Ortiz, 1997) et est généralement divisée en six ou neuf sous-espèces (Figure 10 ). L’accession ‘Pahang’ utilisée dans le cadre du projet de séquençage du génome de bananier appartient à la sous-espèce Musa acuminata subsp. malaccensis dont l’origine est située dans le Sud de la Thaïlande.

b) Les bananiers parthénocarpiques, dits cultivés, diploïdes et triploïdes

Les bananiers cultivés modernes sont essentiellement issus d’hybridations inter et/ou intra-spécifiques entre les espèces Musa acuminata (génome A) et Musa balbisiana (génome B) appartenant à la section Musa et sont généralement triploïdes (Simmonds & Shepherd, 1955; D’Hont et al., 2000). Une étude moléculaire basée sur des marqueurs RFLP (polymorphismes de longueur des fragments de restriction) suggère que l’origine des variétés cultivées produisant les bananes comestibles communes est particulièrement liée à deux sous-espèces de Musa acuminata : Musa acuminata subsp. banksii et M. acuminata subsp. errans (Carreel

et al., 2002). Les principaux groupes génomiques sont les AA, AAA, AAB et ABB. Au sein

d’un même groupe génomique, plusieurs accessions possédant un ensemble de caractères communs sont regroupées dans un même sous-groupe comprenant notamment les variants d’un même clone. En effet, les mutations somatiques sont très importantes pour la diversification des bananiers parthénocarpiques compte-tenu de la forte stérilité de ceux-ci. La première étape de la domestication des bananiers fut l’hybridation de différentes sous-espèces de Musa acuminata isolées géographiquement mais mises en contact par l’Homme dans les

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îles de l’Asie du Sud Est et la Mélanésie (Kennedy, 2009). L’aire de contact du Nord située entre les Philippines et le « continent de l’Asie du sud est » (de la Thaïlande à la Chine) est la meilleure candidate pour être l’aire à l’origine de la formation de nombreuses accessions AA cultivées qui contribuèrent aux cultures commerciales AAA. Les hybridations entre Musa

balbisiana et des sous-espèces de Musa acuminata au niveau des zones de contact sont à

l’origine de la formation des accessions AB cultivées (Perrier et al., 2011).

L’émergence des bananiers triploïdes serait une conséquence directe de la formation de gamètes diploïdes par des hybrides cultivés AA et AB puis par hybridations intra ou inter-spécifiques et aurait donné les groupes AAA, AAB et ABB (Perrier et al., 2011). Les triploïdes AAA sont les plus répandus et les plus cultivés à travers le monde. Parmi eux, les bananiers ‘Gros Michel’ furent très cultivés pour l’exportation au cours de la première moitié du XXème siècle avant que la maladie de Panama (fusariose causée par Fusarium oxysporum f.sp. cubense) ne les dévaste. Ils furent alors remplacés par les clones ‘Cavendish’ (Ploetz, 2005). Les différentes accessions ‘Cavendish’ seraient issues les unes des autres par mutations somatiques (Simmonds, 1954). Les clones ‘Cavendish’ et ‘Gros Michel’ proviendraient d’hybridations entre des accessions issues de trois sous-espèces différentes :

Musa acuminata subsp. banksii, Musa acuminata subsp. zebrina et Musa acuminata subsp. malaccensis d’après une analyse de séquences nucléotidiques d’un élément répété (Baurens et al., 1997) et des analyses de phylogénie moléculaire à partir de 22 marqueurs microsatellites

(Hippolyte et al., 2012) et de marqueurs DArT (« Diversity Arrays Technology » ; X. Perrier, CIRAD, communication personnelle). Les triploïdes AAB représentent le deuxième groupe de bananiers les plus répandus et cultivés à travers le monde. Parmi eux, les plantains sont des bananiers à cuire très appréciés en particulier dans toute l’Afrique de l’Ouest où ils représentent une alimentation de base.

Tableau 3. Liste de fruits climactériques et non-climactériques

Fruits climactériques Fruits non-climactériques

Tomate Raisin2 Banane Fraise3 Pêche Framboise Prune Concombre Avocat Citron Abricot Cerise Figue Ananas Goyave Litchi Kiwi Mandarine Mangue Myrtille Melon1 Olive Papaye Orange Poire Pamplemousse Nectarine Pastèque

Fruit de la passion Cacao

Classification réalisée à partir de (Kader, 2002). 1Des génotypes non-climactériques ont aussi été référencés.

2Les récepteurs des raisins sont sensibles à l’éthylène et leur expression est modulée lors de la maturation bien que ces fruits soient dits non-climactériques.

3Un pic de production d’éthylène accompagné d’un pic de respiration similaire à ceux des fruits climactériques a aussi été observé chez la fraise (Iannetta et al., 2006).

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