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CHAPITRE 1. ÉTAT DE L’ART ET CHOIX TECHNOLOGIQUES : SYSTÈMES EMBARQUÉS POUR LE SUIVI

4. La surveillance des personnes dépendantes

Le LAAS-CNRS travaille dans le domaine de la domotique médicale depuis 1995 [99]. Il a mené plusieurs expérimentations de mise en œuvre de plateformes d'aide à l'autonomie. Le projet HOMECARE se situe dans le prolongement de ces travaux. L’objectif principal est de valider une plateforme de surveillance complète sur site réel. Ce système doit être capable de détecter une situation de danger et de transmettre l’information vers le personnel médical en charge de la surveillance.

4.1. Principaux résultats et acquis du LAAS : le projet PROSAFE

Plusieurs expérimentations de mise en application de plateformes de surveillance de personnes dépendantes ont été conduites par le LAAS-CNRS (Figure 19). Ces expérimentations sont toutes liées au concept initial PROSAFE basé sur un modèle qui exploite les habitudes de vie par apprentissage [5]. Ce modèle est fondé sur l’acquisition d’informations d’activités à l’aide d’un réseau de capteurs de mouvements déployé dans l’environnement de vie de la personne.

Figure 19. Historique des plateformes de surveillance développées par le LAAS-CNRS Les principaux résultats issus des expérimentations PROSAFE sont :

la validation d’un modèle fondé sur l’apprentissage des habitudes de vie [5] ; une évaluation positive sur les aspects d'aide à la sécurité et au diagnostic [2] ;

une architecture type basée sur le déploiement d’un réseau de capteurs de mouvements sans fil lié à une interface logicielle de suivi des patients [2].

59 Figure 20. Architecture fonctionnelle PROSAFE

A partir de ce modèle, deux analyses sont réalisées :

une analyse temps-réel : elle détecte un incident et prévient le surveillant ;

une analyse différée : c’est l’observation de l’évolution du comportement du patient à l’aide

de courbes d’activités en fonction du temps.

4.1.1. Le suivi des activités à l’aide du réseau de capteurs de mouvements

Le suivi des activités de la personne est basé sur le déploiement d’un réseau de capteurs de mouvements infrarouges sur le lieu de vie. Lors de l’expérimentation « PROSAFE étendue » plusieurs capteurs ont été utilisés, découpant ainsi le lieu de vie en plusieurs zones de détection et assurant un service de suivi continu (Figure 21). Chaque mouvement ou déplacement de la personne déclenche une détection du capteur de la zone correspondante. Ainsi, l’intensité d’une activité se traduit par le nombre d’activations des capteurs en fonction du temps. Les déplacements réels de la personne sont interprétés par le système comme des déplacements entre les différentes zones de couverture des capteurs. Les endroits de l’appartement nécessitant une analyse plus fine des activités sont les zones autour du lit, et les zones de séjours prolongés (fauteuil, table, salle de bains, etc.).

Figure 21. Déploiement du réseau de capteurs de mouvements

Différé Temps-réel Matériel

Acteurs Acquisition Interprétation Décision Gestion Capteurs Appareils Aidants Usager Statistiques des événements Construction du modèle Base de données Données Interfaçage Appel Capteurs de mouvements

60 Les capteurs de mouvements développés spécifiquement pour l’application PROSAFE, utilisent un principe de détection infrarouge passif (Pyroelectric or Passive InfraRed, PIR) et communiquent en sans-fil avec un boîtier émetteur/récepteur situé à l’extérieur de l’appartement. Le capteur PIR est placé au plafond et orienté vers le sol, la zone de couverture est de 1 à 2m² au niveau du sol et elle est réglable à l’aide de caches de différentes tailles et formes. En fonction du réglage de la sensibilité, il est capable de détecter le déplacement d’une personne jusqu’au simple mouvement du corps. Nous retenons le principe de suivi des activités à l’aide d’un réseau de capteurs de mouvements déployé dans l’environnement de vie mais avec des capteurs PIR améliorés conformément à notre cahier des charges :

fréquence radio : 868 Mhz ; temps de réponse : 50 ms ;

temps minimum entre 2 détections : 0,5 s ;

paramétrage à distance : adresse, sensibilité, fonctionnement (marche, arrêt) ; autodiagnostic : batterie faible et détection ;

autonomie : entre 6 mois et 2 ans (suivant la sollicitation du capteur) ;

liaison entre le boîtier émetteur/récepteur radio et l’ordinateur de collecte : USB.

L’architecture matérielle PROSAFE sera déployée dans un premier temps en laboratoire pour effectuer des essais.

4.1.2. Modélisation des habitudes de vie, analyses temps-réel et différée

La modélisation intègre les habitudes de l’usager dans son domicile. Pour chaque zone de détection, le modèle propose une classification temporelle des activations capteurs [2]. Cette classification est automatiquement découpée en 6 périodes temporelles caractéristiques des habitudes de vie qui cadrent l’intensité des activités dans chaque zone de l’appartement durant la matinée, le déjeuner, l’après-midi, le début de soirée, le coucher et la nuit (Figure 22).

61 A partir de cette modélisation des habitudes de vie, plusieurs critères d’activités ont été définis :

immobilité : absence de mouvement de l’usager dans une zone de détection ;

séjour : caractérise le temps de séjour habituel de l’usager dans chaque zone de détection ;

agitation : intensité de l’activité sur les 10 dernières minutes et sur l’ensemble des capteurs ;

distance parcourue : déplacement entre les différentes zones ;

vitesse de marche relative : elle indique la vitesse de passage dans des zones prédéfinies.

Ces critères d’activités permettent de détecter plusieurs incidents en temps réel :

chute : immobilité prolongée de l’usager dans une zone de détection (zone lit exclue) ;

fugue : détection d’une sortie à un horaire non autorisé ;

agitation excessive : activité qui dépasse le seuil d’activité normale à un instant donné.

Les incidents en temps réel sont observés en permanence par rapport à un seuil de détection

personnalisé défini par le modèle de référence. Lorsque ce seuil est dépassé, une alerte est envoyée vers le personnel médical. Les seuils de détections sont évolutifs et calculés par deux mécanismes :

1) moyenne glissante : le calcul des seuils est basé sur la moyenne des événements observés

sur les 30 derniers jours, intégrant ainsi les habitudes des personnes dans la modélisation ;

2) apprentissage supervisée : la personne responsable d’une intervention en cas d’alerte, doit

préciser au système la véracité du diagnostic en validant, ou refusant, l’alerte selon la situation constatée. Dans le cas d’une fausse alerte, le seuil de détection associé est ajusté.

L’analyse différée est fondée sur plusieurs critères d’activités :immobilité, séjour, agitation, distance

parcourue et vitesse de marche relative. Ils permettent au personnel médical d’effectuer une analyse longitudinale afin d’apprécier l’évolution de l’état de santé des personnes surveillées et d’adapter le cas échéant les traitements prescrits.

4.1.3. Limite de fonctionnement de PROSAFE étendue

Les expérimentations qui ont été conduites avec plusieurs patients pendant plusieurs mois [2] ont montré certaines limites du système, notamment au niveau :

du nombre de fausses détections de chute : 74 pour un total de 115 jours de suivi, jugé trop

important ;

du suivi des déplacements : lorsque deux personnes sont dans l’appartement, le système

détecte des déplacements incohérents et arrête la surveillance.

Au travers de cette présentation, on observe que la solution PROSAFE étendue utilise des capteurs qui ne peuvent faire la distinction entre la personne surveillée et une tierce personne. Pour résoudre ce problème, nous proposons d’identifier les individus avec un équipement porté.

L’idée de départ du système HOMECARE était d’associer les capteurs de mouvements ambiants avec un système RFID porté pour identifier la personne et mettre en place un suivi continu 24 h/24 en établissement. Nous avons finalement choisi de développer un système de suivi actimétrique pour

62 identifier et proposer de nouvelles possibilités de mesure d’activités ne se limitant pas au seul suivi des personnes dépendantes et au cahier des charges fixé par le projet HOMECARE.

4.2. Présentation du cahier des charges HOMECARE

L’objectif principal du projet HOMECARE est d’évaluer et de valider un système complet de surveillance de personnes dépendantes dans une unité de soins spécialisée pour patients Alzheimer. L’évaluation de cette solution est considérée sous l’angle de la satisfaction des patients, des familles, et du personnel médical amenant à des recommandations techniques, médico-techniques, sociales et humaines. L’objectif secondaire du projet, est d’évaluer la solution HOMECARE pour le maintien à domicile et de proposer le cas échéant des adaptations dans ce contexte.

Le cahier des charges a été établi lors de plusieurs réunions en s’appuyant sur la collaboration de quatre pôles de compétences majeurs : la recherche avec le laboratoire LAAS-CNRS, l’industrie avec les sociétés CEDOM et ATOS ORIGIN, la médecine avec l’hôpital local de Caussade, et le volet éthique pour l’évaluation des usages avec l’Institut Européen de Télémédecine du CHU de Toulouse.

Le cahier des charges spécifie la suite chronologique des tâches suivantes : enrichissement des acquis, intégration d’une solution fonctionnelle et opérationnelle, élaboration d’un cahier des charges opérationnel, exploitation et évaluation du système en vue d’une industrialisation. Au niveau technique, les fonctions suivantes doivent être assurées à l’issue du déploiement de la plateforme :

identification pour la mise en place d’un suivi du patient 24 h/24 ; localisation en intérieur ;

détection de chute ;

critères d’activités enrichis ;

interfaces ergonomiques et optimisées ;

mise à disposition de données simplifiées pour le personnel médical.

Deux sujets de thèses complémentaires ont été associés pour la mise en œuvre de la solution HOMECARE. Les travaux de thèse présentés dans ce manuscrit sont focalisés sur les trois premiers points du cahier des charges avec le développement des fonctionnalités d’identification, de détection de chute, et de localisation en intérieur associant systèmes portés et ambiants. La thèse de Walid Bourennane [3] est ciblée sur les trois derniers points du cahier des charges, en particulier sur le développement des critères d’activités enrichis qui associent les critères d’activités PROSAFE avec les nouvelles fonctionnalités d’identification, de localisation et de détection de chute. Ces deux sujets de thèse ont été menés en parallèle avec une participation active de chacun à l’ensemble des travaux. La mise au point du système a été réalisée en deux temps :

mise au point des fonctionnalités principales en laboratoire (chapitre 2) ; déploiement de la solution dans une unité de soins (chapitre 4).

Au niveau de la fonction de localisation et d’identification, deux solutions ont été proposées car les contraintes de déploiement et de port des systèmes sont différentes en institution et à domicile :

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1) Cas de la surveillance de patients Alzheimer en institution : des solutions techniques à base

d’éléments portatifs de types bracelet et collier rappelant au patient son handicap sont en général rejetées par celui-ci. La solution proposée est de placer le dispositif dans un pansement, formant ainsi un patch à positionner dans le dos du patient. Ce patch doit posséder une autonomie de fonctionnement d’au moins deux semaines pour assurer un suivi continu et pour réduire la maintenance assurée par le personnel médical (changement de pile). Cette contrainte limite les calculs embarqués et le nombre d’échanges radio et impose le choix et la mise en œuvre d’une méthode de localisation simple. De plus, le déploiement d’un système de localisation en milieu hospitalier doit être simple et rapide pour ne pas gêner le fonctionnement de l’établissement. Ainsi, nous proposons d’utiliser le TAG pour identifier le patient et des Balises déployées dans l’unité de soins pour le localiser.

2) Cas de la surveillance de personnes fragiles ou peu dépendantes à domicile : nous avons

exploré une autre solution de localisation. En effet, à domicile les personnes suivies ne sont pas forcément des patients avec des troubles cognitifs sévères de type Alzheimer. Un système acoustique a été ajouté au TAG pour former le Télémètre US (UltraSon). Cette solution est plus contraignante au niveau du port car le système est plus encombrant que le patch mais elle permet de suivre précisément les déplacements de la personne par le biais d’une méthode de localisation en intérieur continue et précise.

Dans la suite de ce document nous présentons la mise au point en laboratoire des fonctionnalités de détection de chute (partie 5), un état de l’art sur la localisation (partie 6) et deux solutions de localisation en intérieur et d’identification avec des systèmes portés pour :

le suivi de personnes dépendantes en institution (partie 7) ;

le suivi de personnes fragiles ou peu dépendantes à domicile (partie 8).