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2. Techniques de synthèse et de caractérisation

2.7 Caractérisations électrochimiques

2.7.5 La spectroscopie d’impédance électrochimique (SIE)

La spectroscopie d’impédance électrochimique (S.I.E.) est une méthode de caractérisation non destructive orientée vers l’étude des processus faradiques (tel que le transfert de charge lors de réactions d’oxydoréduction) et non faradiques (tels que la résistance du milieu électrolytique contenu entre l’électrode de travail et l’électrode de référence, l’adsorption d’espèces à la surface de l’électrode de travail, la capacité de la double couche électrique et le transfert de masse lié à la diffusion d’espèces électroactives). Cette technique consiste à appliquer un potentiel constant à l’électrode de travail, auquel est superposée une tension sinusoïdale EWe, de fréquence variable f et de faible amplitude Va (Équation [2.11]), puis à analyser la réponse de cette perturbation électrique qui prend la forme d’un courant sinusoïdal IWe possédant une amplitude Ia et un angle de phase 𝜑 par rapport à la tension imposée (Équation [2.12] et Figure 2.10).112

Es- = Vhsin (ωt ) [2.11]

Is- = Ihsin (ωt + φ ) [2.12]

où EWe et Va sont exprimés en volts, IWe et Ia sont donnés en ampères (A), 𝜔 est la fréquence angulaire exprimée en radians (𝜔 = 2πf, où f est la fréquence donnée en s-1),

Figure 2.10. Réponse d’un système électrochimique générée sous la forme d’un courant IWe avec un angle de phase 𝜑 après l’imposition d’une tension sinusoïdale EWe113. Ia et Va représentent les amplitudes du courant sinusoïdal et de la tension sinusoïdale imposée, respectivement.

Les réponses qui découlent de la perturbation électrique permettent d’interpréter les processus faradiques et non faradiques se déroulant à l’interface électrode/milieu électrolytique. L’impédance ZWe du système perturbé est définie en fonction de EWe et IWe par analogie à la loi d’Ohm113 :

𝑍t: =YABa AB = 𝑍%

luN (vb )

luN (vb0w )= 𝑍%(cos(φ ) + 𝑗 sin(φ )) [2.13]

𝑍t: = 𝑍x:+ 𝑗𝑍;y [2.14]

où ZWe est donné en ohm (W), tout comme Z0 qui représente son amplitude, 𝜑 est le décalage de phase (rad), j représente le nombre imaginaire (j2 = -1), et Zre et Zim sont respectivement les composantes réelles et imaginaires de l’impédance totale du système.

EWE

E I

L’impédance est un concept plus complexe que la résistance, qui ne dépend pas de la fréquence et dont les signaux d’entrée et de sortie sont toujours en phase. Au contraire, les valeurs d’impédance dépendent beaucoup de la fréquence utilisée. Dans le but de mieux interpréter les valeurs d’impédance obtenues dans différentes conditions, des modèles pouvant représenter les circuits électriques équivalents aux systèmes électrochimiques analysés ont été établis. Un diagramme de Nyquist illustre la partie imaginaire de l’impédance (-Zim), qui représente la composante capacitive du circuit, en fonction de sa partie réelle (Zre) qui représente sa composante résistive; la Figure 2.11a est un exemple. Chaque point sur ce diagramme correspond à une fréquence, les hautes fréquences se situant aux plus faibles valeurs de Zre.

Figure 2.11. a) Diagramme de Nyquist typique obtenu dans ce travail pour le semi- conducteur CuGaS2 immergé dans une solution aqueuse alcaline, et b) circuit électrique équivalent de l’interphase semi-conducteur/milieu électrolytique correspondant.

0 1500 3000 4500 0 500 1000 1500 5 10 15 20 25 30 35 0 15 30 45 60 Zre (Ohm) -Z im ( O hm ) Rs (-Zim=0)

Zre (Ohm)

-Z im (Oh m) B as s es fréquences a b

R

ct

R

S

C

ZCE

Dans le cas de la Figure 2.11a, qui illustre un diagramme de Nyquist typique obtenu dans ce projet, le circuit électrique équivalent est composé d’une résistance en série (RS), connectée en série avec la capacité de la zone de charge d’espace du semi- conducteur (CZCE) branchée en parallèle avec une résistance au transfert de charge (Rct)

qui est associée à une réaction de transfert d’électron (Figure 2.11b). Rs comprend la résistance du milieu électrolytique contenu entre l’électrode de CuGaS2 et l’électrode de référence Ag/AgCl, la résistance du matériau semi-conducteur et celle des contacts électriques. La Figure 2.11a n'est utilisée ici que pour expliquer certaines notions reliées aux mesures d'impédance et ne sera pas exploitée quantitativement dans ce chapitre d'introduction. Pour une capacité pure et un matériau lisse (cas idéal), le diagramme de Nyquist montre une droite perpendiculaire à l’axe des Zre le long de l’axe des Zim (correspondant à Zre = 0). En pratique cependant, cette droite est inclinée vers la droite (illustrant une capacité qui fuit) et dépend du potentiel appliqué à l’électrode semi-conductrice. Dans le cas d’un système purement capacitif, la résistance Rct devient infinie.

À la Figure 2.11a, l’intersection de la courbe du diagramme aux hautes fréquences avec l’axe des abscisses définit la résistance en série RS, alors qu’aux basses fréquences,

l’intersection de la courbe lissée correspond à RS + Rct et permet d’obtenir la résistance

au transfert de charge Rct. Tel que discuté à la section 1.5.2, la capacité de l’interphase

semi-conducteur/milieu électrolytique (Cinterphase) est constituée de 3 capacités en série,

soit la capacité de la zone de charge d’espace du semi-conducteur (CZCE), la capacité

de la couche de Helmholtz (CH) et la capacité de la couche diffuse de Gouy-Chapman

(CGC). Dans un électrolyte concentré, Cinterphase ≈ CZCE. Rappelons que cette

approximation se justifie par la faible épaisseur des couches de Helmholtz et de Gouy- Chapman dans ces conditions, qui se traduit par valeurs de CH et de CGC très élevées par rapport à CZCE.

Dans le cadre de ce projet, nous avons utilisé la S.I.E. pour caractériser les propriétés semi-conductrices des films de CuGaS2 (type de conductivité [n ou p], niveau de Fermi, densité des porteurs de charge majoritaire, énergie du bas de la bande de conduction [type n] ou du haut de la bande de valence [type p]), et pour déterminer leur surface électrochimiquement active. Les mesures ont été réalisées à l’aide du multipotentiostat Solartron 1470 associé à un analyseur de fréquences Solartron 1255B. Pour la détermination des propriétés semi-conductrices, le potentiel appliqué aux films de CuGaS2 a été varié entre 0,3 et -1,3 V vs Ag/AgCl par segments de 50 mV, avec une perturbation sinusoïdale superposée d’une amplitude de 10 mV. Une plage de fréquence comprise entre 1 MHz et 0,1 Hz a été employée, et la valeur absolue de la partie imaginaire de l’impédance (|Zim|) correspondant à une fréquence de 1000 Hz a

été utilisée pour calculer la capacité de la zone de charge d’espace (CZCE) des matériaux

semi-conducteurs aux différents potentiels d’électrode, à l’aide de l’Équation [2.15] :

𝐶XRY = '

"z{|XCD| [2.15] où CZCE ≈ Cinterphase. Pour chaque potentiel appliqué, un diagramme de Nyquist est donc

obtenu et traité. Une fréquence de 1000 Hz a été choisie afin de se soustraire aux réponses instables du système observées à plus haute fréquence et de minimiser l’impact des états de surface (imperfections à la surface du matériau) qui pourraient perturber les mesures à basse fréquence. En effet, à basse fréquence, lorsque RssCss < 1/f (où Rss et Css représentent, respectivement, la résistance et la capacité des états de surface), les états de surface ont le temps de relaxer entre chaque cycle de tension sinusoïdale superposée.

Les valeurs de CZCE ont été utilisées pour construire les graphes de Mott-Schottky

(CZCE−2 en fonction du potentiel appliqué) nécessaires à l’obtention des propriétés semi- conductrices des films de CuGaS2 (voir section 1.5.2): type de conductivité (n ou p),

niveau de Fermi EF,sc via le potentiel de bande plate Vbp, densité des porteurs de charge

majoritaire (nD [niveaux donneurs d’électrons] pour un type n ou nA (niveaux

accepteurs d’électrons] pour un type p), et énergie du bas de la bande de conduction, Ec (type n) ou du haut de la bande de valence, Ev (type p). L’information sur l’énergie de la bande interdite (Eg) obtenue via les mesures d’absorption UV-Vis (section 2.5)

permet alors de construire le diagramme de niveau d’énergie des matériaux semi- conducteurs étudiés. Dans ce travail, la dispersion en fréquence des courbes de Mott- Schottky ne sera pas traitée bien qu’elle soit observée pendant les mesures de capacités en fonction du potentiel. L’acquisition et le traitement des données ont été réalisés, respectivement, avec les logiciels ZPlot (version 2.80, Scribner Associates, inc) et ZView (version 2.70, Scribner Associates, inc)) sous environnement Windows.

La S.I.E. a également été employée pour déterminer la surface électrochimiquement active (Aactive) des films semi-conducteurs étudiés, utile pour l’évaluation de la densité des porteurs de charge majoritaires (voir Équation [1.23]). Cette évaluation requiert d’abord la mesure de la capacité de la couche de Helmholtz (CH) située à l’intérieur du

milieu électrolytique, à proximité de l’interface avec le matériau semi-conducteur. CH a été obtenue à l’aide de l’Équation [2.16] :

𝐶} = "z{|X|' [2.16]

où |Z| représente la grandeur du vecteur impédance donnée par le diagramme de Bode (log |Z| vs log f) enregistré à un potentiel situé dans la zone capacitive de l’électrode (absence de courant faradique); cette zone est obtenue à partir d’un voltampérogramme cyclique. Lorsque la fréquence angulaire 𝜔 = 2πf = 1, correspondant à une fréquence de 0,16 Hz, CH = 1/|Z|. Le facteur de rugosité des films semi-conducteurs (F.R.) est

F.R. = p pEFGCHB IéKDéGLCMNB =

RO

RO,QF SCQQB [2.17] où Aactive, Agéométrique, CH et CH,sc lisse représentent, respectivement, la surface

électrochimiquement active et la surface géométrique du film semi-conducteur, la capacité effective de la couche de Helmholtz et la capacité de la couche de Helmholtz pour un échantillon semi-conducteur lisse114,115, estimée égale à 40 µF/cm2 pour CuGaS2. L’Équation [2.17] permet alors de déterminer Aactive.

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