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B. Le principe de précaution

V. La précaution et l'assurance : considérations juridiques

Les différents tentacules de la précaution, soit les dispositions législatives procédurales s'adressant à l'État, l'éthique de précaution, l'approche de précaution, les techniques et mesures de précaution, et le principe autonome de précaution en responsabilité civile, ont désormais été distinguées652. Il faut toutefois convenir que celles-ci n'intéressent pas toutes l'assurance de la même manière. Au plan juridique, nous retenons que les dispositions législatives de précaution n'ont pas d'impact en droit des assurances à proprement parler, puisqu'elles s'adressent essentiellement à l'État. Cela explique pourquoi les conséquences possibles du principe dans le champ du droit de l'assurance sont dans la plupart des cas rapidement réduites à néant653. Par exemple, H. Cousy a publié un article intitulé « Le principe de précaution et ses relations avec le droit des assurances ». Avec égards, il nous apparaît que l'apport en droit des assurances se limite toutefois à la présentation du principe de précaution et à la manière dont l'assurance peut gérer les risques qui intéressent par ailleurs ce principe. Il n'est pas spécifiquement question de la relation entre le principe et le droit des assurances.

652 Ewald réfère aussi à différentes « vies du principe de précaution », soit une vie idéologique, politique, parlementaire, administrative, judiciaire, médiatique et enfin, celle en milieu entreprenarial. Voir F. EWALD, Aux risques d'innover. Les entreprises face au principe de précaution, préc., note 136, p. 12-13. Comme il a été mentionné, ces « tentacules » sont présentées de manière séparées bien qu'en pratique, celles-ci s'entelacent inévitablement, sans possibilité de les traiter chacunes aussi distinctement.

653 Par exemple, selon Ewald, le secteur de l'assurance ne serait pas directement touché par la question du principe de précaution, cette dernière se situant en amont du domaine de l'indemnisation. Voir F. EWALD, « Le point de vue des assureurs », dans La prévention et la protection dans la société du risque : le principe de précaution, Les colloques de l’Institut Servier, Amsterdam, Éditions Elsevier, 2001, p. 101. Selon lui, « D'un autre côté, le principe de précaution peut concerner l'assureur, dans la mesure où cette notion serait entendue comme définissant un nouveau principe de responsabilité ». Voir Id.

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Nous avons toutefois conclu qu'il ne s'agissait pas de résumer le « principe de précaution » à l'outil procédural de droit administratif qui est consacré dans la loi. En ce qui concerne l'éthique de précaution, et l'approche d'un État donné en cette matière, il ne nous a pas été donné d'en mesurer une incidence directe654. C'est plutôt à travers les mesures et techniques de précaution, et devant la possibilité d'émergence d'un principe autonome de précaution, que des effets concrets pourraient être ressentis en droit des assurances655. Les mesures qui nous intéressent en l'espèce étant celles susceptibles d'influencer le secteur de l'assurance, nous retenons principalement les suivantes : connaissance et identification des risques, prévention des risques, indemnisation des dommages, et responsabilité civile656. Nous mettons pour l'instant de côté cette dernière, qui sera abordée plus loin, pour nous concentrer sur les premières. Mais avant tout, à la base de tout ce qui entoure la précaution se trouve le « risque » et surtout, l'incertitude qui en appelle à une obligation d'information accrue.

Comme il en a été question dans la première partie, l'obligation de renseignement est déjà particulièrement élevée dans le cadre d'un contrat d'assurance, tant au plan de la déclaration du risque que de son aggravation. Or, dans un contexte de précaution, l'incertitude engendre plusieurs défis à cet égard. D'abord, il faut considérer que l'identification des risques eux- mêmes est un processus complexe en contexte d'incertitude scientifique. Pourtant, les entreprises sont susceptibles d'être assujetties à des obligations concernant la connaissance des risques afférents à l'objet de leur production657. Des obligations de déclaration et d'information aux autorités publiques ou à des tiers au sujet des connaissances acquises concernant ces risques peuvent également être prévues. Cependant, certains privilèges sont susceptible d'atténuer le fardeau des entreprises à cet égard, comme « le secret des délibérations des autorités publiques, le secret de l'instruction, le secret industriel et

654 Mentionnons toutefois que les entreprises ressentent amplement les effets d'une opinion publique de plus en plus empreinte par l'éthique de précaution, ce qui appelerait à des modifications volontaires dans leurs comportements afin de préserver leur image. Voir F. EWALD, Aux risques d'innover. Les entreprises face au principe de précaution, préc., note 136, p. 58.

655 Ceux-ci demeurent néanmoins des outils « poreux » qui font donc jouer indirectement éthique et approche de précaution.

656 F. EWALD, « Philosophie politique du principe de précaution », préc., note 559, p. 60-62.

657 Cette obligation serait accentuée dans les cas où il y aurait inversion de la charge de la preuve. Voir O. GODARD,C.HENRY,P.LAGADEC et E.MICHEL-KERJEAN, préc., note 224, p. 97-100.

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commercial comme la confidentialité des données personnelles »658. Quoi qu'il en soit, il reste que l'obligation entre l'assureur et l'assuré sera analysée selon les critères dégagés en droit des assurances comme discuté précédemment659. Il va sans dire que l'intérêt de l'assureur d'obtenir toute information concernant les risques, même non avérés, concernant les produits, technologies et activités de ses assurés sera très élevé, surtout dans un contexte où il est difficile d'exiger des mesures de prévention particulières.

A priori, les mesures de précaution peuvent être distinguées des mesures de prévention et

de celles de sauvetage660 :

La mesure de prévention se situe avant la réalisation du risque, dont elle tend à diminuer la fréquence ou l'intensité661. La mesure de sauvetage, de sauvegarde ou de préservation — tous ces termes peuvent être regardés comme synonymes – intervient après le sinistre, dont elle tend à minimiser, voire à empêcher les conséquences dommageables.662

Comme elles sont susceptibles de limiter la survenance de l'événement appréhendé comme risque, les premières, dont le coût est généralement assumé par le preneur d'assurance, sont

658 F. EWALD, « Philosophie politique du principe de précaution », préc., note 559, p. 60. En matière de secret commercial, l'art. 1472 C.c.Q. prévoit une exonération de responsabilité pour les préjudices résultant de la divulgation d'un secret commercial lorsque l'intérêt général semble primer sur le maintien du secret, entre autres en matière de santé et de sécurité publique. Cette disposition n'aurait toutefois pas fait l'objet d'un usage fréquent par les tribunaux. Voir A. STEELE, « Les dessous des informations confidentielles et des secrets de commerce », dans Barreau du Québec. Service de la formation continue, Développements récents en droit de la non-concurrence (2009), vol. 313, Cowansville (Qc), Yvon Blais, 2009, p. 141. Sur la notion de secret commercial, voir Id., p. 107 et suiv. Au sujet de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels, voir notamment la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. (1985), ch. A-1, la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, R.L.R.Q., c. A-2.1, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, R.L.R.Q., c. P-39.1, et les articles 35 à 41 C.c.Q. Voir également M.-A. RACICOT, « Renseignements commerciaux confidentiels et accès à l’information : un guide pour s’y retrouver », dans Barreau du Québec. Service de la formation continue, Développements récents en droit de l’accès à l’information (2003), vol. 188, Cowansville (Qc), Yvon Blais, 2009, p. 5-48.

659 Notons que comme l'article 2408 C.c.Q. est d'ordre public, l'assuré ne pourrait invoquer son droit au secret commercial pour éviter de déclarer l'information requise de l'assureur. Celui-ci doit par contre obéir au principe de pertinence des informations requises. Voir D. LLUELLES, préc., note 218, p. 219 et suiv.

660 Selon Ewald, la précaution ferait partie d'une démarche de prévention. Voir F. EWALD, « Philosophie politique du principe de précaution », préc., note 559, p. 28.

661 Les mesures de préventions sont donc prises dans un contexte où l'on considère avoir un portrait complet de la situation. Elles découleront généralement d'une seule décision. En d'autre termes, un suivi n'est pas nécessairement requis afin de s'assurer que les mesures correspondent toujours à la réalité. La prévention est donc un concept statique. Voir L. EECKHOUDT et S. SPAETER, préc., note 229, 72. Les risques qui seront pris en charge par un principe de prévention peuvent être de nature très diversifiée, et n'ont pas à être de la même ampleur que ceux visés par la précaution (graves et irréparables). Voir M. BOUTONNET, Le principe de précaution en droit de la responsabilité civile, préc., note 18, p. 22.

662 L. MAYAUX, « Réflexions sur le principe de précaution et le droit des assurances », (2003) 2003-02 Revue générale du droit des assurances 269, par. 4. Selon lui, la distinction n'est par contre pas toujours très rigoureuse.

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néanmoins profitables pour l'ensemble des assurés et pour l'assureur663. Quant aux mesures de sauvegarde, il est reconnu que l'assuré a une obligation de moyen de procéder à des mesures afin de mitiger les dommages, indépendamment de la décision – fondée ou non – de l'assureur d'indemniser ce dernier664. Le contrat d'assurance pourra prévoir que l'assureur assume celles-ci dans le cas où le sinistre est couvert665. N'étant ni spécifiquement des mesures de prévention, ni des mesures de sauvetage, elles pourraient néanmoins généralement être assimilées aux unes ou aux autres : « la précaution se situe dans "l'entre- deux" séparant l'une de l'autre »666.

Dans un premier cas de figure envisagé par Mayaux, on peut s'intéresser aux mesures qui sont prises avant le sinistre667 et qui s'apparenteraient à des mesures de sauvegarde. L'existence du risque lui-même est alors marquée par l'incertitude, ce qui empêche de le prévenir concrètement. Il en résulte que les mesures de précaution de type « préventives » sont de l'ordre d'une prévention que l'on espère utile, mais qui pourrait ne pas être adéquate ou même complètement vaine, par exemple si aucun risque ne se révélait être relié à l'activité ou la technologie concernée. Selon lui, de telles mesures, à l'instar des mesures de prévention, resteraient généralement à la charge de l'assuré668. Un deuxième cas de figure toucherait aux mesures de précaution prises après le sinistre669. D'une part, on pourrait envisager des mesures s'apparentant à des mesures de sauvegarde, par exemple le fait de

663 L. MAYAUX, préc., note 662, par. 5. En effet, la survenance de sinistres s'en trouve nécessairement réduite, ce qui réduit les sommes engagées par l'assureur en versements, « économies » qui se répercutent incidemment sur le montant de la prime exigée de l'ensemble des assurés. Voir Id.

664 C.c.Q, art. 1479. Voir également Lebel c. 9067-1959 Québec inc., 2014 QCCA 1309.

665 À ce sujet, L. Mayaux soulève qu'il y aurait en principe un « partage du sort après sinistre » entre l'assureur – et le réassureur, le cas échéant – et l'assuré, aux termes duquel ces mesures seraient prises en charge en partie ou dans leur entièreté. Il soulève toutefois que l'assuré n'est pas obligé légalement de mitiger le dommage, ce qui n'est pas le cas au Québec. Dans le cas où de telles mesures étaient prises, les coûts en seraient généralement assumés par l'assureur. Voir L. MAYAUX, préc., note 662, par. 6-7.

666 Id., par. 8. La finalité de ce type de mesures serait essentiellement qu'un transfert de risque ne soit pas opéré du producteur de risque vers une hypothétique victime. Voir F. EWALD, « Philosophie politique du principe de précaution », préc., note 559, p. 59

667 Par « avant le sinistre », il faut entendre avant même que la technologie ou l'activité en jeu soit utilisée ou entreprise. Ce serait le cas de la non-commercialisation d'un nouveau produit. Voir L. MAYAUX, préc., note 662, par. 11.

668 Id., par. 9.

669 Le sinistre, pour Mayaux, serait ainsi clairement distinct de la constatation du dommage. Pour lui, dès qu'on attribue à un produit un « défaut », autrement dit que des conséquences sont susceptibles d'en découler, il y a sinistre, même alors que le dommage n'est pas survenu - ou constaté. Lorsque l'activité ou la technologie n'est pas réfrénée, le « sinistre » est donc en cours de réalisation, et l'incertitude se situe plutôt au niveau de sa connaissance, de la constatation des dommages. Voir Id., par. 12-13.

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rappeler un produit ou de cesser une activité après coup, lorsque la suspicion du sinistre se concrétise670. D'autre part, des mesures sont prises alors que la dangerosité de l'activité ou du produit n'est pas déterminée scientifiquement, demeurant donc une pure hypothèse ou crainte. Celles-ci s'assimileraient encore une fois à des mesures de prévention des conséquences possibles de cette activité ou technologie que l'on postule comme étant risquée. En bref, Mayaux est d'avis qu'une mesure de précaution « relève d'une théorie de l'ignorance du sinistre plutôt que de l'ignorance du risque. La précaution, c'est finalement de la prévention a posteriori. Mais cela reste de la prévention ce qui explique que, sauf clause contraire, son coût soit supporté par l'assuré »671. Ces mesures de précaution, contrairement à la prévention lorsqu'il n'est pas question d'incertitude, ne découlent alors pas d'une décision unique concernant leur nature. L'incertitude demande une prévention qui évolue en fonction des connaissances, des expériences, une prévention dont la flexibilité lui permet de s'adapter; la précaution en appelle donc à une attitude dynamique672.

Parmi les mesures de précaution qui peuvent entourer un champ d'activité donné, des mécanismes de responsabilité objective peuvent être envisagés par l'État afin de permettre une indemnisation des victimes sans qu'il soit nécessaire de remplir les critères d'ouverture d'un recours en responsabilité civile673. Or, le succès de cette tactique dépend en grande partie de la disponibilité des fonds nécessaires afin de verser les sommes aux victimes dont le dommage se qualifie. Ainsi, la responsabilité objective appelle l'élargissement des risques assurables674. À cet égard, l'État a le loisir de mettre en place certaines obligations

670 L. MAYAUX, préc., note 662, par 12.

671Id., par. 14. Les caractères gras ont été retirés de la citation. À ce sujet, les assureurs offrent effectivement parfois une couverture particulièrement concernant le risque de retrait de produit. Dans les situations d'incertitude, certains auteurs qualifieront ce type de prévention de démarche anticipative. Voir F. EWALD, « Philosophie politique du principe de précaution », préc., note 559, p. 28-29. Voir également H. COUSY, préc., note 604, p. 687.

672 L. EECKHOUDT et S. SPAETER, préc., note 229, p. 72.

673 Un régime de responsabilité objective dispense la victime de prouver l'existence d'une faute. Voir M. TANCELIN, Des obligations en droit mixte du Québec, préc., note 29, par. 619.

674 Voir F. EWALD, « Philosophie politique du principe de précaution », préc., note 559, p. 61. Voir également « Le principe de précaution et l'assurance », En ligne : <http://www.ffsa.fr/sites/jcms/p1_700643/fr/le- principe-de-precaution-et-lassurance?cc=fn_7358>. Notons que le régime de responsabilité sans faute découle essentiellement de l'avènement d'un « droit des accidents » au cours du XIXe siècle, et de la responsabilité basée sur la notion de risque. Voir M. Tancelin, Des obligations en droit mixte du Québec, préc., note 29, par. 619. La question a été traitée en détails dans la partie précédente.

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d'assurance675. Ce faisant, l'assureur prendra part activement à la gestion des risques en fixant des conditions au contrat d'assurance que l'assuré devra respecter afin de bénéficier de la couverture676. Indirectement, l'État confie donc à l'assureur une bonne partie de la gestion des risques677. Or, celle-ci sera faite en fonction de critères économiques et en fonction des intérêts de compagnies d'assurances678. Par ailleurs, les auteurs soulignent que l'assurance obligatoire devient une option moins efficiente lorsque la législation empêche l'assureur de contrôler l'aléa moral. Le nombre d'acteurs offrant des produits d'assurances, soit la concentration du marché, est également un facteur influent679. En ce qui concerne les nouveaux risques catastrophiques, les compagnies d'assurance ne seraient pas ravies devant la possibilité que l'autorité publique décrète une obligation de s'assurer680. À cet égard, il ne

675 L'assurance obligatoire serait encouragée par plusieurs juristes. Voir M. G. FAURE et T. HARTLIEF, préc., note 247, p. 235, référant à J. COWELL, « Compulsory environmental liability insurance », dans H. BOCKEN et D. RYCKBOST (dir.), Insurance of environmental damage, Brussel, Story-Scientia, 1991, p. 317-330 et A. MONTI, « Environmental risk : A comparative law and economics approach to liability and insurance », (2001) European Review of Private Law 65. La possibilité d'insolvabilité serait la principale raison par laquelle les juristes motiveraient le recours à l'assurance obligatoire. Quand aux économistes, ils évalueraient également la question sous l'angle de l'accroissement de l'utilité attendue des acteurs économiques ainsi que de l'asymétrie d'information. Voir M. G. FAURE et T. HARTLIEF, préc., note 247, p. 235-239. Souvenons-nous que le fait de rendre l'assurance obligatoire a joué un rôle dans l'émergence de la société assurantielle. 676 Id., p. 238. Selon lui, les conditions que l'assureur pourra imposer à l'assuré, par exemple de se conformer à la réglementation applicable, ne sont pas opposables aux tiers. L'assureur devrait normalement procéder à l'indemnisation même si l'assuré n'a pas respecté les conditions prévues au contrat. Le problème de l'insolvabilité de l'entreprise passe donc de la cour de la victime à celle de la compagnie d'assurance. Voir Id., p. 241. En effet, le principe général de l'effet relatif des contrats codifié à l'art. 1440 C.c.Q. nous conduirait à cette solution. L'assureur a d'ailleurs une obligation d'indemniser même si le préjudice résulte de la faute (non intentionnelle) de l'assuré. Voir C.c.Q., art. 2464. Cependant, en cas de réclamation par un tiers, l'alinéa 2 de l'art. 2502 C.c.Q. prévoit spécifiquement que l'assureur peut opposer au tiers lésé les moyens qu'il aurait pu faire valoir contre l'assuré au jour du sinistre. Voir également J.-L. BAUDOUIN, P. DESLAURIERS et B. MOORE, vol. 2, préc., note 71, p. 604. Sur les engagements formels prévus au contrat et l'effet de leur manquement, voir la sous-section B-II de la partie 1. Notons que le tiers lésé a la possibilité d'adresser sa réclamation contre l'assuré, contre l'assureur ou contre les deux. Voir Id., p. 601. Dans le cas où l'assureur n'est pas poursuivi, l'assuré peut décider de le mettre en cause. Id., p. 603. Notons que la police d'assurance pourrait être communiquée à la victime, surtout si seul l'assureur est poursuivi. Voir Id., p. 605. Sur le refus de l'assureur d'assumer la défense de l'assuré et d'indemniser le tiers lésé, voir Id., p. 606. De manière générale, sur le recours de la victime et l'assurance responsabilité, voir F. DUPRAT, préc., note 256, p. 65-87.

677 « Il faut bien se rendre compte que si la souscription d’une assurance est un préalable pour l’exercice d’une activité, les sociétés d’assurance deviennent de facto un mécanisme qui délivre les autorisations aux industriels, ce qui peut être contestable du point de vue de l’action des pouvoirs publics ». Voir M. G. FAURE et T. HARTLIEF, préc., note 247, p. 241.

678 Nous avons vu dans la première partie que le rôle social des compagnies d'assurance s'était dissout. Cela s'inscrit dans le phénomène du primat de l'économie de marché et de la frime de la responsabilité sociale des entreprises. Nous y reviendrons.

679 M. G. FAURE et T. HARTLIEF, préc., note 247, p. 239-240.

680 « Dans la pratique, néanmoins, les assureurs ne manifestent jamais d’engouement pour une assurance obligatoire, au moins s’il s’agit des risques systémiques. Selon Cousy, cela tient au fait qu’en droit, dans le cadre d’une assurance obligatoire, il est fréquent que l’assureur ne puisse invoquer aucun moyen de défense à l’encontre des tiers bénéficiaires de l’assurance. De plus, la mise en œuvre concrète de l’obligation

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faut pas écarter que l'obligation d'assurance concernant un risque ne peut être respectée que dans la mesure où les assureurs acceptent de le couvrir :

[...]le législateur doit bien être conscient que, dès lors qu’il introduit une assurance obligatoire, il dépend des assureurs pour exécuter l’obligation d’assurance. En pratique, les possibilités d’exécution effective de cette obligation seront largement fonction de la volonté d’assurer sur le marché considéré. C’est en définitive le marché de l’assurance qui décidera si, oui ou non, il est prêt à couvrir un certain risque. On peut donc aboutir à la situation fâcheuse dans laquelle le législateur introduit une assurance obligatoire, mais le marché́ refuse d’offrir cette couverture.