• Aucun résultat trouvé

4. Les entrées excitatrices du striatum : les afférences cortico- et thalamo-striatales

4.2. Les afférences thalamo-striatales

4.2.3. La physiologie des synapses thalamo-striatales

Les études in vivo. Vers la fin des années 70, plusieurs équipes ont stimulé

électriquement les noyaux thalamiques intralaminaires et observé des EPSPs à faibles latences, au niveau du striatum de chats et de rats sous anesthésie (Kocsis and Kitai, 1977; Vandermaelen and Kitai, 1980). Cette observation a permis de mettre en évidence l’existence d’une connexion thalamo-striatale monosynaptique glutamatergique. Quelques années plus tard, ces neurones striataux répondant au thalamus ont été identifiés comme étant les MSNs (Wilson et al., 1983) ainsi que les interneurones cholinergiques (Wilson et al., 1990). La stimulation électrique des noyaux thalamiques intralaminaires induit également des inhibitions prolongées de ces neurones indiquant que les projections thalamiques forment des contacts polysynaptiques dans le striatum (Wilson et al., 1983, 1990). De façon intéressante, chez le singe éveillé une stimulation unique du complexe CM/Pf ne permet pas d’activer les neurones striataux (Nanda et al., 2009). Dans cette étude, les cellules, assimilées soit à des MSNs soit à des interneurones cholinergiques, répondent uniquement aux stimulations en bouffées (100 Hz pendant une 1 seconde) du CM/Pf. Les MSNs répondent aux bouffées de PAs en augmentant progressivement leur taux de décharge alors que les interneurones cholinergiques adoptent une autre stratégie en modulant finement leurs activités (par une combinaison d’augmentations et de réductions du taux de décharge) (Nanda et al., 2009). Cette modulation fine de l’activité des interneurones cholinergiques est

68

liée à leurs participations dans des circuits intrastriataux. En effet, des observations anatomiques montrent d’une part que le complexe thalamique CM/Pf contacte les interneurones GABAergiques et cholinergiques (Sidibé and Smith, 1999) et d’autre part que interneurones cholinergiques reçoivent des entrées inhibitrices en provenance des interneurones GABAergiques mais aussi en provenance des collatérales des MSNs (Gonzales et al., 2013). Ainsi, ces entrées inhibitrices permettraient de régler le taux de décharge des interneurones cholinergiques après l’activation des afférences thalamo-striatales. Cette hypothèse est étayée par le fait que, chez le rat et le singe, la stimulation du CM/Pf entraine une réduction de la concentration striatale d’acétylcholine ; ce phénomène pouvant être reversé par l’administration d’antagoniste des récepteurs GABAA (Nanda et al., 2009; Zackheim and Abercrombie, 2005).

Les études in vitro. En 2007, Smeal et collaborateurs ont décrit une de tranche de

cerveau de rat permettant de conserver les axones cortico- et thalamo-striataux en provenance du complexe CM/Pf (Smeal et al., 2007) puis fut adaptée chez la souris l’année suivante (Ding et al., 2008). Ce nouvel outil a permis d’explorer les propriétés biochimiques et fonctionnelles de la synapse thalamo-striatale et de comparer ses propriétés avec celles de la synapse cortico-striatale (Ding et al., 2008; Smeal et al., 2008). Par exemple, cette tranche a mis en évidence que, au niveau de la synapse CM/Pf-MSN, le ratio des récepteurs NMDA /AMPA est supérieur à celui de la synapse cortico-striatale (Ding et al., 2008; Smeal et al., 2008). Cette préparation expérimentale a également mis évidence différentes règles de plasticité synaptique à court-terme chez différents modèles animaux (Ding et al., 2008; Smeal et al., 2007). En effet, Ding et collaborateurs, observent de la dépression au niveau des synapses thalamo-striatales de souris alors que Smeal et collaborateurs, observent eux de la facilitation aux synapses thalamo-striatales de rat.

La limite de la tranche horizontal oblique de cerveau (Ding et al., 2008; Smeal et al., 2007) est la conservation unique des afférences thalamo-striatales en provenance du complexe CM/Pf et la non-préservation des afférences en provenance d’autres noyaux thalamiques. Une étude récente, basée sur l’utilisation de l’optogénétique pour remédier à ce défaut, a mis en évidence les propriétés physiologiques des synapses thalamo-striatales dont les éléments pré-synaptiques proviennent du noyau centro-latéral (CL) et du CM/Pf (Ellender et al., 2013). Les neurones du CL sont « bushy », de par leurs dendrites très

69

ramifiées et ils montrent des bouffées calciques à bas seuil (sous anesthésique) alors que les neurones du CM/Pf sont longs avec des dendrites très peu ramifiées et ils déchargent rarement sous forme de bouffées de PAs (Lacey et al., 2007). Dans le striatum, les afférences en provenance du CL ciblent les épines dendritiques tandis que les afférences provenant du CM/Pf projettent majoritairement sur les troncs dendritiques. L’opto-stimulation des entrées thalamo-striatales provenant du CL induit une réponse excitatrice de large amplitude, au niveau des MSNs (indifféremment des voies directe/indirecte), médiée par les AMPAR, et une facilitation à court-terme. A contrario, l’opto-stimulation des synapses CM/Pf-MSN induit une réponse excitatrice de faible amplitude médiée par les NMDAR ainsi qu’une dépression à court-terme (Ellender et al., 2013). Concernant la plasticité à long-terme thalamo-striatale, aucune plasticité synaptique n’émerge au niveau de la synapse CL-MSN après un protocole de STDP alors qu’au niveau des synapses CM/Pf-CL-MSN la répétition de séquences post-pré ou de séquence pré-post induisent de la t-LTD, et ce en bloquant les récepteurs GABAergiques (Ellender et al., 2013) (Figure 22). Plus récemment, une autre équipe a utilisé un protocole de STDP optogénétique « en burst » aux synapses CM/Pf-MSN et a également observé pour la séquence post-pré une t-LTD dépendante des NMDAR et indépendante de la signalisation endocannabinoïde (Wu et al., 2015b).

Les propriétés des synapses thalamo-striatales CL-MSN et l’activité en bouffées du CL suggèrent que ces synapses sont idéales pour permettre la dépolarisation des MSNs puis leur décharge (Ellender et al., 2013). Dans un autre rôle, l’activité du CM/Pf et les propriétés de leurs synapses thalamo-striatales suggèrent que ces synapses ont plutôt un rôle de modulateur facilitant les processus dépendant du calcium (Ellender et al., 2013).

70 Figure 22 : Propriétés synaptiques des afférences thalamo-striatales en provenance du noyau CL ou du noyau Pf. (A) Schéma du protocole expérimental pour l’opto-activation des afférences provenant du CL ou du Pf, la stimulation électrique du cortex et l’enregistrement de l’activité du MSN grâce à la technique de patch-clamp en configuration cellule entière (B) Exemples d’EPSCs enregistrés au niveau de MSNs maintenus à un potentiel de membrane de +40 mV. Les traces noires correspondent aux courants médiés par les récepteurs NMDA et AMPA. Les traces grises correspondent uniquement aux courants médiés par les récepteurs AMPA en présence d’AP5 (un antagoniste des récepteurs NMDA). Les traces rouges représentent les courants des récepteurs NMDA par soustraction de la trace noire et de la trace grise. (C) Graphique exposant les moyennes des ratios NMDA/AMPA au niveau des synapses thalamo-striatales (CL-MSN, Pf-MSN) et cortico-striatales. (D) et (E) Les protocoles de STDP thalamo-striatale (post-pré en rouge et pré-post en noir) permettent d’induire de la plasticité à long-terme au niveau des synapses Pf-MSN (E) mais pas au niveau des synapses CL-MSN (D). Les graphiques montrent le décours des moyennes des amplitudes d’EPSPs normalisées avec 5 minutes de ligne de base (à gauche de la ligne pointillé indiquant le protocole de STDP) puis 25 minutes d’enregistrement (à droite de la ligne en pointillés). La trace numérotée 1 correspond à la moyenne des EPSPs pendant les 5 minutes de ligne de base. La trace numérotée 2 correspond à la moyenne des EPSPs pendant les 5 dernières minutes de l’enregistrement. En haut et au milieu, un potentiel d’action dans un MSN précédé ou suivi par l’opto-activation d’afférences thalamo-striatales. D’après Ellender et al., 2012.

71