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La philosophie en CRP pour bien penser

TABLEAU 2 : LE DIALOGUE ET LA RECHERCHE EN CRP POUR LE BIEN PENSER

2.3 La philosophie en CRP

2.3.1 La philosophie en CRP pour bien penser

L’acte de philosopher en CRP semble contribuer au bien penser. Que ce soit sur le processus de pensée et les habiletés mobilisées, sur la pensée réflexive ou encore sur la pensée compétente, la pratique de la philosophie en CRP agit de façon directe sur les articulations principales du bien penser.

2.3.1.1 Philosophie, processus de pensée, habiletés et attitudes

Le processus de pensée est ce qui mobilise et organise les habiletés et les attitudes dans le but de produire un jugement. L’acte de philosopher est sans contredit un des actes par excellence pour favoriser ce processus. En effet, pour comprendre l’expérience, la pensée doit se mettre en action pour mobiliser et orchestrer les habiletés, les attitudes et autres outils de la pensée afin de connaître et de donner du sens (acte de rechercher), d’assurer davantage de sens (acte d’organiser l’information) et d’assurer la valeur de vérité (acte de raisonner).

En ce sens, le caractère générique de la philosophie ainsi que l’examen rigoureux des opinions demandent de pousser plus loin en avant le processus de pensée. La nécessité de multiplier des liens entre les concepts pour mieux comprendre l’expérience et pour construire davantage de sens favorise la mobilisation et l’orchestration des habiletés et attitudes. En effet, pour élaborer les liens, les personnes qui philosophent doivent mobiliser et orchestrer les actes de rechercher, de raisonner et d’organiser l’information. Des habiletés comme faire des hypothèses, donner des exemples et des contre-exemple, donner des raisons, évaluer ces raisons, faire des comparaisons et des distinctions, établir des causes et des conséquences et bien plus encore sont mobilisées pour construire du sens.

L’élaboration de liens en philosophie contribue encore plus à la mobilisation et à l’orchestration des habiletés lorsqu’elle se fait à partir de mégacritères. Les personnes qui philosophent doivent réfléchir sur ces liens selon différents contextes afin d’établir ce qui

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est bien, vrai, acceptable… pour construire du sens. De même, la recherche de cohérence et de pertinence (métacritères) augmente l’incidence de l’utilisation des actes de penser afin d’assurer des jugements valides et raisonnables. Il ne suffit plus d’énoncer son opinion. Il faut que le processus de pensée mobilise et orchestre les habiletés pour produire un tout pertinent et cohérent, un tout qui donne une unité au sens relié à l’expérience. Pour ce faire, les liens et les idées ne doivent pas seulement être multipliés; ils doivent être soumis à un examen rigoureux.

L’examen rigoureux des liens et des idées en CRP passe par le questionnement systématique ou méthodique. Le questionnement diversifié (grâce aux différents types de questions) et soutenu (par l’itérativité et l’idée de faillibilisme) force à réfléchir davantage pour établir des liens cohérents, pertinents et significatifs. Ainsi, le questionnement sollicite encore le processus de pensée. Les individus qui philosophent doivent mobiliser sans cesse des habiletés pour établir des liens qui satisferont les exigences de la recherche commune de sens et de vérité.

Le questionnement et l’examen rigoureux des différentes opinions, tout comme la nécessité d’établir des liens cohérents, pertinents et significatifs et l’utilisation de métacritères et mégacritères en philosophie contribuent à mobiliser davantage et avec une certaine rigueur le processus de pensée. Cette rigueur prend toutefois toute sa force dans la pensée réflexive.

2.3.1.2 Philosophie, métacognition, autorégulation, identité épistémologique

La pensée réflexive, rappelons-le, consiste à prendre conscience de ce qui est en action dans l’élaboration d’un jugement (métacognition) afin de l’évaluer à partir de critères (autocritique) et de corriger ou de prévenir les erreurs tant dans le résultat que dans le processus de pensée (autorégulation). De plus, la pensée réflexive est celle qui permet à

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l’individu de prendre conscience de son identité épistémologique qui, à son tour, facilite ou non la capacité de métacognition, d’autocritique et d’autorégulation. Plus précisément, les rapports qu’il entretient avec les savoirs, la façon de les produire et de les acquérir et leur valeur influence grandement la pensée réflexive d’un individu.

La pratique de la philosophie en CRP semble avoir une incidence très importante sur le développement de la pensée réflexive. La recherche logique semble favoriser la dimension métacognitive de la pensée réflexive. Elle porte le regard sur certains aspects qui constituent les points de vue et qui ne seraient peut-être pas observés autrement. Entre autres, les recherches de raisons, de présupposés, de causes, de conséquences, d’implications (logique informelle), d’identification de sophismes dans le raisonnement ou encore l’élaboration de raisonnements déductif/inductif, moyens/fin ou hypothétique (logique formelle) permettent de voir ce qui est en jeu dans la construction de points de vue. Le questionnement logique permet de prendre conscience de plusieurs éléments constituant un point de vue, une opinion.

Le questionnement logique peut aussi déboucher sur l’évaluation des jugements et de leur élaboration. Cette évaluation se fait grâce aux métacritères utilisés par l’enquête logique. Il s’agit d’évaluer les points de vue selon leur cohérence, leur pertinence interne et externe, c’est-à-dire entre les différentes parties dans leur structure et leur organisation et des liens avec le contexte dans lequel ils s’inscrivent. En ce sens, la recherche logique contribue à former des outils pour juger de la rigueur et de l’organisation des jugements. Elle permet non seulement de prendre conscience de ce qui est en jeu dans l’élaboration des points de vue, mais également d’en faire une évaluation pour contribuer à la dimension autocritique de la pensée réflexive. Une fois l’autocritique réalisée à partir des critères logiques, il est possible de partir de cette évaluation et des critères sur lesquels elle s’appuie pour améliorer, pour peaufiner la pensée.

La prise de conscience et l’autocritique sont souhaitables dans le but d’aboutir à l’autorégulation. Puisque l’individu a pris conscience de ce qui est en jeu dans la pensée (processus et produit) grâce à l’enquête logique, qu’il s’est évalué à partir de critères

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logiques pour voir ce qui fonctionne ou non, il est en mesure d’apporter les changements nécessaires pour renforcer la pensée grâce à la logique. Il peut chercher des solutions/positions/conclusions, des outils/habiletés ou encore des liens/relations plus pertinents et cohérents pour éviter ou pallier les problèmes de jugement possibles. Ainsi, la logique contribue grandement à la pensée réflexive (métacognition, autocritique, autorégulation) grâce à l’enquête et aux métacritères qui lui sont inhérents. Le tableau qui suit montre comment cette enquête et ses critères peuvent nourrir la pensée réflexive.

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