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La nature juridique du territoire de l'Etat

Paragraphe I - Le territoire de l'Etat

B- La nature juridique du territoire de l'Etat

2) L' explications contemporaines:

On considère aujourd'hui, de façon plus rationnelle que les privilèges et immunités accordées aux uns et aux autres sont d'avantage des immunités fonctionnelles s'expliquant par la notion de respect

du à un service public étranger, sur la base du principe de la réciprocité.

- Hotels d'ambassades:

L'Etat s'interdit d'intervenir dans l'ambassade, respecte des immunités, simplement pour que les diplomates étrangers puissent exercer leurs fonctions en toute liberté, et que réciproquement nos

propres diplomates à l'étranger bénéficient de conditions identiques.

- Navires de guerre:

Pour ce qui est des navires de guerre (qui de fait avaient tout simplement la possibilité de se défendre), sauf à provoquer des incidents d'une extrème gravité, il s'agit simplement de reconnaitre , à

travers le service publique étranger, la souveraineté de l'autre Etat qui, par nature même ne saurait être soumise à l'autorité d'un autre Etat.

B- La nature juridique du territoire de l'Etat.

Traiter de la nature juridique du territoire de l'Etat c'est envisager les rapports qui peuvent exister entre le territoire et l'Etat auquel il sert de socle, s'interroger sur la fonction qu'il remplit vis à vis de

l'Etat.

L'étude de cette relation a donné lieu à l'élaboration d'un certain nombre de théories, plus ou moins

contestables sans doute, mais qui dans leurs imperfections ont néanmoins l'intérêt d'éclairer différents angles d'approche possible d'une réalité complexe qui les englobe tous. Nous les évoquerons ici très brièvement, renvoyant pour un approfondissement à un cours de théorie du droit ou/et de théorie de

l'Etat.

a) La théorie du territoire sujet:

1) Enoncé de la théorie:

Cette théorie considère le territoire comme un élément inséparable de l'Etat, comme un élément constitutif, consubstantiel (= d'une seule et même substance), de l'Etat , comme identifié à l'Etat personne.A ce titre le territoire est assimilé à la personne de l'Etat, il est indiscociable du titulaire

direct des droits et obligations de l'Etat.

Selon cette théorie "organiciste", qui considère l'Etat comme un organisme fait de la réunion d'un peuple, d'un territoire et d'une organisation juridique souveraine, le territoire apparaît non seulement comme un élément constitutif de l'Etat, mais comme participant à la qualité même de l'Etat, d'où son

nom allemand d'"Eigenshaft théorie" (=).

2)Auteurs ayant défendu cette théorie :

On pourra citer parmi les auteurs qui, à un moment où à un autre, ont défendu cette thèse:

Hauriou, Carré de Malberg, l'autrichien Georg Jellineck pour qui "le territoire de l'Etat ne fait pas partie de l'avoir de l'Etat mais de son être", l'allemand Tricker pour qui le territoire est le

"mode d'expression spatial de l'Etat".

3) Critique de la théorie:

Cette théorie n'est pas satisfaisante dans la mesure où elle supposerait que l'Etat ne saurait survivre aux modifications de son territoire et/ou que son identité change chaque fois qu'il subirait

une modification de celui-ci. Or le droit positif montre que le principe de la continuité de l'Etat fonctionne et que, bien au contraire, la persinnalité de l'Etat perdure malgré ses modifications

territoriales.

Exemples:

- La France, après la perte de l'Alsace et la Lorraine, au profit de l'Allemagne, au traité de Francfort du 10 mai 1871.

- Le Paraguay, après la perte de 70% de son territoire au profit de l'Argentine, en 1870 lors de la

"Guerre de la triple alliance" (Brésil, Uruguay, Argentine).

b) La théorie du territoire objet:

1) Enoncé de la théorie:

Cette théorie, déclinée de différentes manière, dissocie l'Etat de son territoire. Elle considère le territoire comme le champ d'application d'un droit réel de propriété ou, à un degré supérieur, d'un droit réel de souveraineté. D'après cette théorie le territoire est l'objet même du pouvoir

étatique.

Selon une approche patrimoniale, cette théorie considère que le territoire est une chose, un bien, un objet sur lequel l'Etat exerce un véritable droit réel:

-pour les uns ce sera un droit réel de propriété : un dominium.

-pour les autres ce sera un droit réel de souveraineté: un impérium.

Quelle que soit la forme donnée à ce droit réel, celui-ci donnera à l'Etat un droit de disposition illimité sur son territoire.

2) Auteurs ayant défendu cette théorie:

La conception du territoir "champ d'application d'un droit réel de propriété " a surtout été défendue par Oppenheim, Lauterpacht.

La conception du territoire "champ d'application d'un droit réel de souveraineté" a été défendue au début du siècle par l'allemand Laband et reprise par l'école positiviste italienne, notamment par

Cavaglieri, Donati.

Cette conception s'est développée jusqu'à la moitié du XX ème siècle. En France elle fut représentée par Paul Fauchille.

3) Critique de la théorie:

La théorie du territoire objet permet de rendre compte de l'évolution territoriale des Etats, des cessions, des acquisitions, sans que pour autant sa personnalité en soit atteinte. On pourra toutefois objecter que la relation entre l'Etat et son territoire ne se limite pas à l'exercice d'un droit réel et que le

parallélisme fait par les auteurs ne saurait être total.

En effet, si le propriétaire d'un objet peut en disposer sans qu'il en soit atteint dans sa substance (= le propriétaire qui vend tous ses biens continue à exister), l'Etat ne saurait disposer de la totalité de

son territoire et continuer à exister sur le plan international.Cette théorie , par conséquent, n'est pas satifaisante en ne rendant pas compte de la réalité juridique.

c) La théorie du territoire limite:

1) Enoncé de la théorie.

Cette théorie considère le territoire comme le cadre dans lequel s'exercera la puissance étatique.

Le territoire représente alors, comme l'écrit Léon Duguit, la "la limite matérielle de l'action effectif des gouvernants".

2) Auteurs ayant défendu cette théorie:

Cette théorie a surtout été élaborée , contre les théories du territoire objet. Elle a été défendue par Michoud, Carré de Malberg, Duguit

3) Critique de la théorie:

On lui reprocha d'être incomplète. Car si ce qu'elle affirme n'est pas inexact, elle n'intègre pas le fait, comme nous le verrons plus loin, que la compétence de l'Etat suit ses nationaux à l'étranger et

que, ce faisant, la compétence de l'Etat ne s'arrête pas aux limites de son territoire.

Exemple: un national qui réside à l'étranger est astreint au respect de sa législation nationale concernant le le service militaire.

d) La théorie de la compétence (ou territoire titre-de compétence):

1) Enoncé de la théorie:

Cette théorie se propose de purifier le concept juridique de territoire de toute référence méta-juridique, jusnaturaliste, géographique, etc...Il ne faut pas dire que le territoire est une "façon d'être",

ou "un mode d'expression de l'Etat et de son pouvoir", ce qui revient à tomber dans l'organicisme.

Le territoire n'est que l'un des aspects de la compétence de l'Etat: la compétence "ratione loci", à côté d'autres compétences "ratione materiae", "ratione personnae", etc...

Le territoire n'est pas autre chose pour le juriste que le critère spatial de l'efficacité des lois ou encore l'ensemble des compétences spatiales des organes de l'Etat. La théorie de la compétence considère le territoire comme le domaine dans lequel l'Etat peut exercer ses compétences, comme le cadre de validité de l'ordre étatique, comme une portion de l'espace terrestre dans lequel un système

de règles juridiques est applicable et exécutoire.

2) Auteurs ayant défendu cette théorie:

Enoncé par Radnitzky, dès 1905, reprise par l'Ecole autrichienne de droit internationale (Kelsen, Verdross), puis en France par Jules Basdevant, Georges Scelle, Bourquin.

Kelsen, pour qui droit et Etat s'identifient, affirme textuellement que l'Etat est "un

ordonnancement juridique partiel spatialement organisé"...En clair, cela veut dire que, par rapport à l'Etat, le tarritoire va apparaître, à la fois, comme limite et un titre à l'exercice des compétences de l'Etat: il permet de répartir l'autorité des différents Etats dans le monde sur les différentes populations

qui occupent ces territoires.

3) Critique de la théorie:

Cette dernière théorie, qui est de beaucoup plus satisfaisante que les précédentes, est celle qui est aujourd'hui la plus généralement admise. Elle est parfaitement compatible avec tous les aspects de

l'emprise territoriale de l'Etat.

Exemple, analyse de Charles Rousseau:

Ainsi que l'a fait remarquer Charles Rousseau, elle a d'abord le mérite de s'intégrer dans les cadres généraux de la technique de droit public, qui analyse les prérogatives étatiques comme des

compétences attribuées aux gouvernants et aux agents publics pour remplir certaines fonctions d'intérêt social.

Cette théorie rend beaucoup mieux compte que les théories précédentes:

-des cessions territoriales (=qui apparaissent alors comme de simples transferts de compétences entre les Etats en présence),

-du statut des territoires coloniaux (= la différence entre ces ces territoires et le territoire métropolitain correspondra à la différence de répartition des compétences étatiques);

-de la décolonisation qui, inversement, apparaîtra comme une réattribution ou remise des compétences de la métropole à l'ancienne colonie.