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I.2. Principales activités de défense du neutrophile

I.2.3. Dégranulation du neutrophile

I.2.3.5. La Myéloperoxydase

La Myéloperoxydase(MPO) est une enzyme hémo-glycoprotéique fortement exprimée dans le neutrophile, et qui représente environ 5% du poids sec de la cellule (Klebanoff, 2005 ; Nauseef, 2014). La MPO a une masse moléculaire de 144 kDa et est constituée de deux sous- unités (hétérodimères) identiques liées par un pont disulfure. Chaque sous-unité est composée d'une chaîne polypeptidique lourde (55–64 kDa, 466 acides aminés) et une légère (10–15 kDa, 108 acides aminés) (Lau et Baldus, 2006), ainsi qu’un groupe protoporphyrine IX avec un fer central. L'environnement de l'hème est constitué par les deux polypeptides. Les deux groupements héminiques de la MPO sont structurellement et fonctionnellement identiques (Arnhold et Flemmig, 2010).La structure secondaire de la MPO est principalement α-hélicoïdale, chaque sous-unité étant constituée d'un noyau central de 5 hélices et d’un hème. Quatre hélices proviennent de la chaine lourde et la cinquième de la chaine légère (Lau et Baldus, 2006).

La MPO a été identifiée pour la première fois dans les neutrophiles et fût baptisée Verdoperoxydase à cause de la couleur verte de ses extraits (Klebanoff, 2005). Elle a été, par la suite, localisée également dans les monocytes (~1% des protéines totales) et dans une population de macrophages tissulaires (Nauseef, 2010). Dans les PN, la MPO est synthétisée sous forme d'un précurseur lors de la différenciation myéloïde dans la moelle osseuse, et est stockée dans les granules azurophiles avant que les PN ne rejoignent la circulation (Lau et Baldus, 2006). Lors de l'activation et de la dégranulation des PN, la MPO est libérée dans les vacuoles phagocytaires ainsi que dans l'espace extracellulaire.

b. Activité MPO

La MPO est une oxydoréductase (EC 1.11.1.7) dotée de deux activités principales ; une activité peroxydase et une activité d’halogénation (notamment la chloration) qui aboutissent à la formation d’oxydants et des produits radicalaires. La MPO utilise le peroxyde d'hydrogène (H2O2) et catalyse l'oxydation bi-électronique des ions Cl- pour former l'acide hypochloreux (HOCl) dans un système appelé « H2O2-MPO-HOCL-halide system »; elle peut aussi utiliser les

ions bromures ou iodures pour former les acides hypohalogénés correspondants (Arnhold et Flemmig, 2010). Depuis peu, on admet que son activité de chloration produit des espèces intermédiaires hautement réactives comme le Cl2 ou le chlore à l'état natif (•Cl), conduisant à la

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formation de dérivés chlorés comme la chlorotyrosine (Sertayn et coll., 2003). De plus, un grand nombre de substrats différents peuvent être oxydés par la MPO en formant des produits radicalaires. Ces substrats comprennent la tyrosine, le tryptophane, sulfhydryles, le phénol et les dérivés d'indole, l’oxyde nitrique et le nitrite (Tableau 3) (Arnhold et Flemmig, 2010).

Tableau 3. Substrats et produits de la MPO (Adapté à partir deArnhold et Flemmig, 2010)

Substrat Produit

Oxydation a deux électrons

Chlorure HOCl

Bromure HOBr

Thiocyanate -OCSN, -OCN

Oxydation à un électron

Oxyde Nitrique NO, NO2

-

Nitrite NO2°

Tyrosine Radical Tyrosyl, Dityrosine

Phénols Radicaux, Dimères, Oligomères

c. Rôle de la MPO et de ses produits

Le rôle et l’importance de la MPO dans la réponse immunitaires du PN sont très souvent discutés. L'absence de complications infectieuses potentiellement mortelles chez certaines personnes présentant un déficit de la MPO est souvent avancée comme preuve que le système de la MPO est accessoire plutôt qu’essentielle pour l’activité antimicrobienne des PN. Cependant, cet argument ne tient pas compte des observations chez l’homme et des souris KO qui démontrent que la réponse antimicrobienne des cellules déficientes en MPO est beaucoup moins efficace que celle des PN normaux (Klebanoff, 2005 ; Nauseef, 2010). Ainsi, l'importance biologique de la MPO est bien illustrée chez des souris « knock-out » qui montrent une augmentation des infections par klebsiella et candida, et une mortalité accrue suite aux infections (Arataniet coll., 2004). Effectivement, la MPO est responsable de la production d’oxydants les plus puissants et les plus toxiques, à savoir le HOCl et les dérivés chlorés, qui participent efficacement à la lutte antimicrobienne au cours des infections (Lau et Baldus, 2006 ; Arnhold et Flemmig, 2010 ; Nauseef, 2010). La MPO est active sur une grande variété de microorganismes qu'elle attaque par oxydation en différents points et de différentes manières (virus, bactéries, fungi, protozoaires). Son activité bactéricide comprend une étape de fixation sur la membrane bactérienne en de nombreux points où existent des structures polysaccharidiques résistantes aux protéases et hydrolases. Cette liaison permet à la MPO une attaque extracellulaire des microorganismes trop volumineux pour être phagocytés (parasites et fungi). En contact avec les microorganismes, elle produit le HOCl et d'autres espèces capables de chloration et de nitration et qui attaquent une large gamme de molécules: les hèmes, les groupes aminés, les centres Fe-S, les groupes SH, les lipides insaturés et les bases nucléiques. Avec les lipides membranaires, le HOCl forme des amines chlorées et des chlorhydrines et perturbe la perméabilité. En oxydant les

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structures héminiques, il altère de nombreuses fonctions enzymatiques, notamment celles de la chaîne respiratoire entraînant la mort bactérienne (Sertayn et coll., 2003).

De nombreuses études ont montré un rôle de la MPO et de ses intermédiaires dans les événements inflammatoires indépendamment de son rôle dans la défense antimicrobienne (Nussbaum et coll., 2013). Les données confirment ainsi l'implication de la MPO dans la modulation des réponses des PN. Ainsi, la MPO peut moduler l’activité des protéines co-libérées dans le phagosomes ou dans le milieu extracellulaire, soit en les activant ou en les réprimant. Par exemple, une plus grande activité de l'élastase, qui est également stockée dans les granules azurophiles, est détectée dans le surnageant des PN provenant de souris « knock-out » pour la MPO. Le HOCl produit par la MPO inactivent l’élastase et d'autres enzymes telles que la cathepsine G, la protéinase-3 ou MMP-9 (Arnhold et Flemmig, 2010). D’autres données suggèrent que le système H2O2-MPO-HOCl peut également contribuer à la modulation de l'activité de la NADPH oxydase dans les PMN stimulés. Ainsi, le système H2O2-MPO-HOCl modifie de manière irréversible des sites sur le flavocytochrome b558, changeant ainsi les sites de conformation et/ou de liaison critiques pour l'assemblage de la NOX2 ; ou la modification de p47phox, p67phox ou Rac2 pour les libérer du complexe oxydase (Nauseef, 2001). De plus, il a été montré que le système H2O2-MPO-halogènes induit l'apoptose via différentes voies. Le NH2Cl, comme effecteur en aval de la chloration par le HOCl, exercent des effets pro-apoptotiques dans les PN et les cellules Jurkat par l'activation de c-Jun kinase N-terminale (JNK) et l'inhibition du facteur de transcription NFкB. Le HOCl pourrait aussi induire l’activation des caspases, alors que le HOSCN pourrait induire l'apoptose in vitro et s’est révélée plus efficace que le HOCl ou l'acide hypobromeux (HOBr) (Nussbaum et coll., 2013). Malgré que les mécanismes ne soient pas encore bien élucidés, il parait que la MPO intervient dans la modulation des activités des PN et participe ainsi à la résolution de l’inflammation et à la protection des tissus environnant le foyer inflammatoire (Arnhold et Flemmig, 2010).Cependant, la MPO via ses produits hautement toxiques pourrait intervenir et contribuer à certaines pathologies, notamment vasculaires et cardiovasculaires (Nussbaum et coll., 2013).