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La ligne ` a dispersion nulle

5.2 Fa¸connage

5.2.2 La ligne ` a dispersion nulle

a dire des filtres permettant de contrˆoler ind´ependamment phase et amplitude spectrales et dont on puisse reprogrammer rapidement la fonction de transfert.

5.2.2 La ligne `a dispersion nulle

5.2.2.1 Disperser sans dispersion

Une premi`ere approche pour r´ealiser un fa¸conneur repose sur l’utilisation d’une ligne `

a dispersion nulle. Ce dispositif, aussi appel´e ligne 4f, a ´et´e initialement propos´e par Froehly et ses collaborateurs [22, 23]. Il est compos´e d’une paire de lentilles de focale f et d’une paire de r´eseaux, align´es en arrangement 4f (voir figure 5.5). Le premier r´eseau disperse

f f f f

Plan de Fourier

Figure 5.5 – Ligne `a dispersion nulle ou ligne 4f : l’impulsion d’entr´ee est dispers´ee par le premier r´eseau et la premi`ere lentille image chaque composante spectrale en un point du plan de Fourier (plan de sym´etrie). La deuxi`eme partie est sym´etrique et recompose l’impulsion d’entr´ee que l’on retrouve inchang´ee en sortie de ligne. f correspond `a la focale des lentilles.

angulairement les diff´erentes composantes spectrales de l’impulsion entrant dans la ligne et la premi`ere lentille les image dans le plan de Fourier, situ´e au centre de la ligne 4f. Cette premi`ere moiti´e de la ligne n’est ni plus ni moins qu’un spectrom`etre. La deuxi`eme partie de la ligne est sym´etrique et permet de recomposer l’impulsion d’origine en rassemblant ses composantes. Telle quelle, la ligne 4f n’introduit aucune d´eformation sur l’impulsion d’entr´ee,4 d’o`u le nom de ligne `a dispersion nulle. Pour r´ealiser un fa¸conneur `a l’aide d’une ligne 4f, il suffit d’ins´erer un masque spatial dans son plan de Fourier : ´etant donn´e que les composantes spectrales de l’impulsion d’entr´ee y sont imag´ees, ce masque va aussi agir comme un masque spectral.

5.2.2.2 Diff´erents types de masques

Dans un premier temps des masques fixes ont ´et´e utilis´es[24], ce qui n´ecessitait la cr´eation et l’alignement d’un nouveau masque pour chaque nouvelle mise en forme. De

nos jours, diff´erents masques programmables contrˆol´es par ordinateur sont disponibles. Ils permettent de changer tr`es rapidement de mise en forme. Il existe trois grandes cat´egories de masques programmables : `a cristaux liquides, acousto-optiques o`u `a miroirs d´eformables. Les masques `a cristaux liquides ou LC-SLM (liquid crystal spatial light modulator) sont compos´es d’une fine couche de cristaux liquides n´ematiques pris entre deux ´electrodes transparentes. La bir´efringence de cette couche peut ˆetre contrˆol´ee en modifiant la tension aux bornes des ´electrodes. Le plus souvent, ces masques sont pixellis´es et chaque pixel se comporte comme une lame d’onde variable command´ee en tension. Avec un masque `a cristaux liquides, on peut donc modifier la phase spectrale ϕ(ω) en contrˆolant ind´ epen-damment l’´epaisseur optique de chaque pixel[25, 26]. Pour modifier `a la fois la phase et l’amplitude spectrale, il faut associer deux masques `a cristaux liquides[27,28] agissant sur deux polarisations orthogonales5, comme cela est pr´esent´e sur la figure 5.6.

Double LC-SLM

Figure 5.6 – Ligne 4f associ´ee `a deux masques `a cristaux liquides agissant sur des pola-risations crois´ees. Au niveau de chaque pixel la phase et l’amplitude de l’onde transmise sont contrˆol´ees ind´ependamment.

Les masques acousto-optiques ou AOM (Acousto-Optical Masks) sont aussi utilis´es pour contrˆoler `a la fois la phase et l’amplitude spectrales[29, 30]. Les AOM sont parcou-rus par une onde acoustique mise en forme qui va induire un r´eseau de diffraction dont on peut localement faire varier l’efficacit´e et la phase en fonction de la forme de l’onde acoustique. Dans le plan de Fourier, les diff´erentes composantes spectrales vont ainsi ˆetre diffract´ees avec des coefficients de phase et d’amplitude d´efinis par la forme de l’onde acous-tique. Contrairement aux LC-SLM, les AOM ne sont pas pixellis´es. Autre particularit´e, la diffraction impose l’utilisation d’une ligne 4f « cass´ee », comme cela est pr´esent´e sur la figure 5.7 page ci-contre. Le principal d´efaut de cette ligne 4f cass´ee est qu’elle n’est plus `

a dispersion nulle : certaines composantes spectrales parcourent un chemin optique plus long que d’autres. Cela introduit une distorsion de l’impulsion en sortie de la ligne qu’il est n´ecessaire de compenser.

Enfin, il est possible d’utiliser des miroirs d´eformables `a membrane[31, 32], ou `a micro-miroirs ´electrom´ecaniques (MMEMS)[33, 34, 35]. Dans ce cas, on utilise une demi-ligne 4f ou demi-ligne 2f, le faisceau de sortie ´etant renvoy´e sur le faisceau d’entr´ee. Les miroirs `a membrane sont constitu´es d’une membrane r´efl´echissante souple suspendue sur des pistons contrˆol´es en tension. En fonction du d´eplacement des pistons, la membrane se d´eforme. La d´eformation de la membrane se traduit par une variation du chemin optique et donc de

5. Avec deux masques `a cristaux liquides agissant sur deux polarisations orthogonales, on modifie en fait la phase et la polarisation de l’onde traversant chaque pixel. En utilisant un polariseur en sortie de la ligne `a dispersion nulle, le contrˆole de la polarisation se transforme en contrˆole de l’amplitude.

AOM

Figure 5.7 – Ligne 4f associ´ee `a un masque acousto-optique. L’angle de diffraction n´ecessite de « casser » la ligne 4f qui n’est plus `a dispersion nulle.

la phase spectrale. Les miroirs `a MMEMS sont constitu´es d’une rang´ee de micro-miroirs ind´ependants que l’on peut faire avancer ou reculer par application d’une tension. Tout comme pour les miroirs `a membrane, seule la phase spectrale peut ˆetre modifi´ee. La diff´ e-rence principale entre ces deux solutions est que les membranes permettent une variation douce et continue de la phase spectrale alors que les MMEMS sont pixellis´es et permettent d’introduire des sauts de phase spectrale.

Bien ´evidemment, il existe d’autres possibilit´es pour r´ealiser un fa¸conneur `a base de ligne 4f. Il est ainsi possible d’utiliser comme masque des valves optiques[36] (cristaux liquides non-pixellis´es) ou encore de remplacer les r´eseaux par des prismes[37] afin de mettre en forme des impulsions tr`es large bande.

5.2.2.3 Principales caract´eristiques

Les fa¸conneurs `a base de ligne `a dispersion nulle ont ´et´e utilis´es avec succ`es dans de tr`es nombreux domaines de recherche comme le contrˆole coh´erent[38], la compression d’impulsions[39], l’optique quantique[40] ou le refroidissement de mol´ecules[41].

Ils pr´esentent toutefois un certain nombre de limitations. Tout d’abord, ce sont des dispositifs optiques complexes, d´elicats `a aligner et `a utiliser. Ensuite, ils introduisent sur les impulsions mises en forme un couplage spatio-temporel. C’est `a dire qu’ils mettent en forme simultan´ement le profil temporel, mais aussi le profil transverse de l’impulsion. Par exemple, un d´ecalage temporel s’accompagnera toujours d’un d´ecalage de l’impulsion par rapport `a l’axe optique et une d´erive de fr´equence temporelle par l’apparition d’une d´erive de fr´equence spatiale (chirp spatial en bon franglais). Il s’agit l`a d’un d´efaut inh´erent au principe mˆeme de fonctionnement de la ligne 4f : les composantes angulaires et spectrales sont coupl´ees au niveau du r´eseau et sont simultan´ement mises en forme par le masque plac´e dans le plan de Fourier. En sortie de la ligne, le profil transverse reproduira donc toujours le profil temporel de l’impulsion.

Enfin, dans le cas fr´equent o`u le masque utilis´e est pixellis´e, l’impulsion mise en forme est accompagn´ee d’un certain nombre de r´epliques temporelles. Cela peut se comprendre ais´ement par des consid´erations de transform´ee de Fourier : le masque pixellis´e se comporte comme une fonction de transfert discr`ete dans le domaine spectral, ce qui correspond, dans le domaine temporel `a une fonction de r´eponse p´eriodique. L’impulsion mise en forme est ainsi accompagn´ee d’une infinit´e de copies r´eguli`erement espac´ees dans le temps. Cepen-dant, ces r´epliques sont moins r´edhibitoires qu’il n’y paraˆıt car elles ont tendance `a ˆetre d´eform´ees et att´enu´ees.

Malgr´e ces limitations, la ligne 4f reste un fa¸conneur extrˆemement efficace avec de nombreux points forts. Tout d’abord, il s’agit d’une technique ´eprouv´ee et tr`es bien do-cument´ee. De nombreuses publications d´etaillent tant les limites que les capacit´es de la ligne 4f et il est ainsi relativement ais´e de cerner les possibilit´es offertes par diff´erentes configurations.

De plus, elle permet g´en´eralement de mettre en forme des impulsions laser quelque soit le taux de r´ep´etition du laser6.

Autre point important, la ligne 4f supporte des impulsions intenses. En effet, sauf au niveau des r´eseaux, le faisceau est dispers´e et donc l’´energie r´epartie sur une plus grande surface. Il est ainsi possible d’obtenir en sortie de ligne 4f des densit´es de puissance de plusieurs centaines de GW/cm2.

Enfin, il est possible de concevoir et de r´ealiser assez simplement une ligne 4f taill´ee sur me-sure pour des gammes spectrales et des applications donn´ees en choisissant judicieusement les r´eseaux et les focales des miroirs.