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Selon les professeurs Lluelles et Moore, « [l]a liberté de contracter signifie la liberté de passer toute sorte de contrats, nommés ou innommés, sur toute sorte d’objet, pour toute motivation, ainsi que la liberté d’aménager le contenu normatif du contrat »206. Envisager la question de la

203J.-L. BAUDOUIN, P.-G. JOBIN, Les obligations, 7e éd. par P.-G. JOBIN et N. VÉZINA, préc., note 31, n°

189, p. 304.

204Cette remarque n’est pas valable pour les promesses de contrat où, dès la levée de l’option, les parties doivent

conclure le contrat final.

205Infra, p. 245-249.

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liberté dans le déroulement de la négociation nous invite ainsi dans un premier temps à aborder la question de la liberté quant aux décisions prises durant cette phase de formation du contrat (§ 1), puis celle de la formalisation des pourparlers (§ 2) et des négociations parallèles (§ 3).

§ 1 : Liberté quant aux décisions prises durant les pourparlers

Malgré leurs origines romaines, les droits des contrats de tradition civiliste ont pris de la distance vis-à-vis du droit romain en sortant du « système fermé » de cette époque. Dans l’Antiquité, les acteurs économiques n’avaient pas le droit de choisir le mode de formation du contrat puisqu’à chaque type d’obligation correspondait un contrat spécifique. Ainsi, les contractants ne pouvaient pas sortir des « carcans contractuels » et devaient nécessairement s’engager à travers des contrats verbis, litteris, res ou ceux de bonne foi. Il s’agissait de contrats nommés207.

De nos jours208, les individus sont libres de déterminer la forme du contrat envisagé ainsi que son contenu si bien que le droit positif reconnaît « la possibilité pour les personnes de conclure des contrats auxquels le législateur n’a pas nécessairement accordé un cadre normatif

207Contra : René-Marie Rampelberg considère que « même si les Romains n’ont jamais imaginé mettre en place

une théorie de l’autonomie de la volonté (…), ils se sont cependant largement émancipés du cadre strict de la quadripartition des débuts des temps classiques et ont su assouplir considérablement (…) les structures contractuelles » (René-Marie RAMPELBERG, « Le contrat romain : de la convention type à la libéralisation tardive », dans Brigitte BASDEVANT-GAUDEMET (dir.), Contrat ou Institution : un enjeu de société, coll. « Systèmes », Paris, L.G.D.J., 2004, p. 11, à la p. 15).

208Le professeur Goldstein et Me Mestiri ont précisé que ce changement a eu lieu dès Domat puis Pothier qui

« rejettent la conception du droit romain selon laquelle la volonté ne suffit pas à créer le contrat, mais nécessite le respect de formalités » (Gérald GOLDSTEIN et Najla MESTIRI, « La liberté contractuelle et ses limites. Étude à la lueur du droit civil québécois », dans Benoît MOORE (dir.), Mélanges Jean Pineau, Montréal, Éditions Thémis, 2003, p. 299, à la p. 304).

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particulier »209 et que « [l]es parties jouissent d’une grande liberté quant au contenu de leur contrat »210.

Il est à noter que le législateur est depuis au moins un siècle réticent à intervenir dans le droit des contrats. Influencé par le principe de l’autonomie de la volonté, un contrat ne peut être valable qu’à partir du moment où les individus ont souhaité être contraints par ce dernier211. Les individus dotés d’un libre arbitre sont suffisamment rationnels, pour définir avec leur partenaire durant la négociation le contenu le plus avantageux pour eux. Ils n’ont pas besoin d’un acteur externe comme l’État pour s’immiscer dans la relation en construction afin de les protéger.

Il n’y a ainsi dans le droit québécois moderne pas de « dirigisme contractuel »212. Les individus sont libres de créer un contrat sur mesure, permettant d’exprimer et de garantir au mieux leurs devoirs et obligations. Ils peuvent laisser libre cours à leur créativité contractuelle, « faire naître des obligations, les modifier, et transférer la propriété de biens »213 et ne sont pas toujours obligés de suivre les formes contractuelles proposées dans le Code civil car la plupart de ces dernières ne sont pas impératives mais supplétives de volonté. C’est pourquoi il est impossible de dresser une liste exhaustive des différents contrats existants. Il y a autant de contrats que de personnes pour les conclure.

209D. LLUELLES et B. MOORE, préc., note 27, n° 134, p. 69.

210Louise LANGEVIN et Nathalie VÉZINA, « Le contrat », dans Collection de droit 2017-18, École du Barreau

du Québec, vol. 6, Obligations et contrats, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2017, EYB2017CDD126 (La référence).

211Infra, p. 232-241.

212Michel COIPEL, « La liberté contractuelle et la conciliation optimale du juste et de l’utile », (1990) 24 R.J.T.

485, 489.

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L’état du droit en France et en Allemagne est similaire. Ainsi, pour le droit français, l’alinéa premier du nouvel article 1102 dispose que « [c]hacun est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi »214. Concernant le droit allemand, « [g]enerally speaking, the parties can contract out of the rules of law contained in the first two books of the BGB concerning the law of obligations arising out of contracts »215 parce que les règles sont des dispositives Recht. En d’autres termes, « the parties are free to define the scope and nature of their contractual obligations »216.

Néanmoins, la volonté individuelle n’est pas absolue. Le législateur québécois est tout de même intervenu afin de poser quelques règles impératives relatives au contenu du contrat. La volonté individuelle n’est un fondement juridique qu’à partir du moment où elle respecte ces règles minimales. En d’autres termes, « [e]n matière civile et en matière commerciale notre droit est essentiellement consensuel. La liberté de commerce procède de ce principe. Cela ne veut pas dire que cette liberté est sans limites. Ses limites sont celles de l’ordre public ou d’une convention particulière »217. Ainsi, « les parties peuvent déroger aux dispositions du code, à moins que celles-ci n’intéressent l’ordre public (art. 9 C.c.Q.) »218. L’article 9 du Code civil du Québec dispose en partie que « [d]ans l’exercice des droits civils, il peut être dérogé aux règles du présent code qui sont supplétives de volonté ».

214Nous avons ajouté les italiques.

215Basil S. MARKESINIS, Hannes UNBERATH et Angus JOHNSTON, The German Law of Contract. A

Comparative Treatise, 2e éd., Oxford (Portland), Hart Publishing, 2006, p. 46. 216Id.

217Vachon c. Lachance, préc., note 184, par. 23. 218L. LANGEVIN et N. VÉZINA, préc., note 210.

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Comme le soulignent des auteurs, « [l]a liberté contractuelle suppose donc qu’on ne viole pas l’ordre public, qui est sa limite naturelle, éventuellement matérialisée par le droit positif »219. Par exemple, l’article 1373 alinéa 2 dispose que « la prestation doit être possible et déterminée ou déterminable ; elle ne doit être ni prohibée par la loi ni contraire à l’ordre public ». L’article 1411 précise quant à lui qu’« est nul le contrat dont la cause est prohibée par la loi ou contraire à l’ordre public ». Sans oublier l’article 1413 qui dispose qu’« est nul le contrat dont l’objet est prohibé par la loi ou contraire à l’ordre public » ou l’article 13 de la Charte qui souligne que « [n]ul ne peut, dans un acte juridique, stipuler une clause comportant discrimination. Une telle clause est sans effet ». Si l’on utilise un raisonnement a contrario, on comprend qu’en dehors des exigences légales d’ordre public, les individus sont libres de déterminer le contenu de leurs obligations contractuelles sans autre intervention extérieure.

Le législateur propose certains modèles de contrats, les contrats nommés. Les acteurs sont libres de les suivre ou de s’en détacher pour créer un contrat sur mesure. Ainsi, « [u]ne personne ne peut se voir imposer (…) une clause qu’elle ne souhaite pas »220 car « le principe de la liberté contractuelle est le droit que possède chaque individu (…) de discuter et de négocier librement les conditions, les effets et l’extinction de ses obligations avec l’autre contractant »221. Autrement posé, « les parties sont libres, en principe, de conclure tout contrat

219G. GOLDSTEIN et N. MESTIRI, préc., note 208, à la p. 310. 220F. LEVESQUE, préc., note 21, p. 26.

221J.-L. BAUDOUIN, P.-G. JOBIN, Les obligations, 7e éd. par P.-G. JOBIN et N. VÉZINA, préc., note 31, n° 75,

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qu’elles désirent et d’insérer dans ce contrat toutes les clauses qui leur paraîtront opportunes »222 comme « l’objet du contrat, ses conditions de temps, de lieux »223.

Par ailleurs, dans certains cas, les parties en présence doivent se soumettre au respect de certaines conditions de forme sous peine de nullité de l’accord passé. Ainsi, l’article 1385 du Code civil du Québec dispose que « [l]e contrat se forme par le seul échange de consentement entre des personnes capables de contracter, à moins que la loi n’exige, en outre, le respect d’une forme particulière comme condition nécessaire à sa formation, ou que les parties n’assujettissent la formation du contrat à une forme solennelle »224. Le consensualisme demeure néanmoins le principe en droit civil.

En droit français, l’article 1102 alinéa 2 dispose que « [l]a liberté contractuelle ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l’ordre public ». En Allemagne également, bien que « the number of restraints on freedom of contract in the BGB [are] very limited »225, elles existent. Ainsi,

« [t]he only conditions for the validity of a ‘legal transaction’ contained in the General Part are, naturally, legal capacity (§§ 104-13), absence of mistake or vitiating factors (§§ 116-24), compliance with form (§§ 125-9), proper notification of the addressee of a declaration of intention inter absentes (§§ 130-2). To this list we must add the ‘negative criteria’ of absence of a statutory prohibition (§ 134), no violation of public policy (§ 138 I), or the creation of a grossly inadequater and unduly obtained bargain (§ 138 II) »226.

222Gabriel MARTY et Pierre RAYNAUD, Droit civil. Les obligations, t. 2 « Les sources », 2e éd., Paris, Sirey,

1988, n° 32, p. 29.

223Madeleine CARON, « Approches du problème de la liberté contractuelle », (1956-1957) 7 R.J.E.U.M. 12, 21. 224Nous avons ajouté les italiques.

225B. S. MARKESINIS, H. UNBERATH et A. JOHNSTON, préc., note 215, p. 45. 226Id.

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Nous venons de le voir, la liberté contractuelle s’exprime durant les négociations à travers la possibilité de choisir la forme et le contenu du contrat envisagé. Elle fonde également le droit reconnu aux parties de formaliser les pourparlers.

§ 2 : Liberté de formaliser les pourparlers

La liberté contractuelle reconnue aux cocontractants potentiels leur permet d’encadrer les pourparlers à travers la conclusion éventuelle de conventions. À ce propos, Monsieur de Coninck souligne : « [l]a liberté contractuelle permet aux parties de s’accorder sur les obligations qu’elles devront respecter dans le cadre de la négociation »227. Cet encadrement conventionnel des pourparlers peut intervenir durant toute la phase de tractations préalables, que ce soit en début de processus ou durant celui-ci. Ainsi, les parties qui ont accepté d’entrer en négociation peuvent formaliser le processus ou bien ne pas le formaliser.

Plusieurs facteurs permettent de comprendre l’intérêt croissant qu’ont les cocontractants potentiels à prévoir de tels accords. En particulier, un tel phénomène s’explique en raison des nombreux avantages qu’il permet. En premier lieu, dès qu’il s’agit de contrats complexes ou à long terme, les situations dans lesquelles les négociations ne sont pas encadrées sont rares. Comme l’a précisé la professeure Guillemard, « [à] cause de la longueur et de la complexité de la négociation, il peut être prudent, au début, d’établir par écrit les buts envisagés... au moins pour ne pas risquer de les perdre de vue ! »228.

227Bertrand DE CONINCK, « Le droit commun de la rupture des négociations précontractuelles », dans Marcel

FONTAINE (dir.), Le processus de formation du contrat. Contribution comparatives et interdisciplinaires à l’harmonisation du droit européen, coll. « Bibliothèque de la Faculté de droit de l’Université catholique de Louvain », Bruxelles, Bruylant, Paris, L.G.D.J., 2002, p. 17, à la p. 39.

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Formaliser les pourparlers peut également être stratégique dans la mesure où cela permet « de lier le plus précocement possible son partenaire »229. Dans le même ordre d’idée, la stratégie précontractuelle permet d’inciter son cocontractant potentiel à s’investir davantage dans la négociation ou de démontrer sa motivation.

Encadrer les pourparlers correspond à la dynamique contemporaine230 qui cherche dans tous les domaines de la vie courante à pallier les risques. Le caractère par nature incertain, aléatoire et peu sécurisant des pourparlers peut poser problème pour les parties. Bien que le risque soit toujours présent durant les pourparlers, elles vont essayer de le réduire à travers la formalisation de ces derniers. Ainsi, « les praticiens du droit ont développé (…) plusieurs instruments précontractuels permettant à leurs clients de mieux gérer les risques associés à la conduite de ce type de négociations et ainsi, maximiser les probabilités de succès de l’opération envisagée »231. Dans le même sens, selon le professeur Lutter, la formalisation des pourparlers permet « de créer dans la mer de ce qui est encore juridiquement indécis des îlots de sécurité »232.

Enfin, la formalisation des pourparlers permet de constituer des preuves en cas de contentieux futur. Par exemple, en cas d’une action pour non-respect d’une clause de confidentialité, « la

229D. MAZEAUD, préc., note 82, 45. Voir également pour le droit québécois : « Le sacro-saint principe de la

liberté de contracter, si cher à notre droit d’inspiration libérale, s’en trouvera donc restreint. En effet, (…) une fois la lettre d’intention signée, les parties n’auront plus une aussi grande liberté de mettre fin à leurs pourparlers » (Louis PÉLOQUIN et Christopher K. ASSIÉ, « La lettre d’intention », (2006) 40 R.J.T. 175, 179).

230Ulrich BECK, La société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, coll. « Champs Essais », Paris,

Flammarion, 2008.

231L. PÉLOQUIN et Ch. K. ASSIÉ, préc., note 229, 176.

232Cité par le professeur Pédamon dans Michel PÉDAMON, Le contrat en droit allemand, 2e éd., coll. « Droit des

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contractualisation consiste en l’allègement de la charge de la preuve pour l’entreprise victime »233.

Les cocontractants potentiels peuvent donc encadrer conventionnellement les pourparlers mais, aussi le faire de la manière dont ils le souhaitent. En cela, la liberté précontractuelle garantit une grande créativité quant au fond et à la forme que les documents échangés à cette fin peuvent prendre234. Les professeurs Mousseron, Raynard et Seube l’ont souligné : « les opérateurs en charge de la construction du contrat (…) puisent dans leur liberté une source renforcée d’inspiration pour l’organisation de leurs rapports »235.

Ainsi, « [d]ifférents vocables ont été donnés au cours des années par la pratique commerciale à ces instruments »236 comme des formules telles que le « protocole d’accord », l’« accord de principe », la « lettre d’intention », la « lettre d’intérêt », l’« engagement d’honneur », les « mémoires d’entente », les « listes de conditions », la « lettre de confort ». De tels documents sont « souvent désignés, dans la pratique de tous les jours au Québec, sous leur appellation

233Anne-Sophie LUCAS-PUGET, « L’opportunité des clauses de confidentialité aujourd’hui, et demain ? »,

L.P.A. 2016.226-227.50.

234La professeure Guillemard souligne que « [c]ette fantaisie d’expression est sûrement liée à la règle de la liberté

contractuelle et évidemment précontractuelle » (S. GUILLEMARD, préc., note 24, 169). Dans le même sens : « [i]l n’existe aucune forme consacrée de documents préparatoires, lesquels varient selon leur auteur » (L. PÉLOQUIN et Ch. K. ASSIÉ, préc., note 229, 197). Pour le droit français : « les formules utilisées en pratique sont révélatrices, par leur diversité, de l’échelle de liberté qu’ont les intéressés de se donner à faire ou à ne pas faire quelque chose dans la perspective de la conclusion du contrat » (J. GHESTIN, Traité de droit civil, La formation du contrat, t. 1 « Le contrat - Le consentement », 4e éd. par J. GHESTIN, G. LOISEAU et Y.-M.

SERINET, préc., note 163, n° 713, p. 516).

235J. M. MOUSSERON, Technique contractuelle, 5e éd. par P. MOUSSERON, J. RAYNARD et J.-B. SEUBE,

préc., note 68, n° 8, p. 20.

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anglaise »237 tels que « concept paper », « heads of agreement », « term sheet », « agreements in principle », « letters of intent », « commitment letters », « letter of understanding », « binding in honour only », « honour clause » ou « gentlemen’s agreement »238.

Face à une telle imagination des praticiens du droit, il semble difficile, voire impossible, de dresser une liste exhaustive des principaux outils de formalisation des pourparlers. C’est pourquoi nous ne nous intéresserons qu’aux principaux.

Tout d’abord, les cocontractants potentiels peuvent conclure des contrats portant sur les modalités de la négociation, parfois qualifiés de contrats de négociation, d’accords de négociation, de contrats préliminaires envisageant la négociation du contrat définitif ou encore de conventions de négociation. Ces contrats ont pour principal objectif d’organiser et d’encadrer contractuellement le processus de la négociation d’un contrat définitif et d’en définir ses modalités et les conditions. Ils sont particulièrement utiles « lorsque les intérêts en jeu sont importants ou que des frais élevés peuvent être engagés par les parties pendant la

237Id.

238Il s’agit d’un « accord dépourvu de sanction étatique (...) pour lequel les parties ont clairement voulu situer leur

relation en dehors du droit. Les parties ne s’engagent ici que sur l’honneur, l’effectivité de leur lien n’étant pas garantie par l’état, mais bien plutôt par la qualité de la réputation dont elles jouissent dans le monde des affaires » (Id., 178). Il est à noter que le droit français est plus strict que le droit québécois en la matière. Il reconnaît parfois des effets juridiques aux engagements d’honneur : « la jurisprudence française ne donne pas toujours plein effet à l’intention des parties de s’engager sur l’honneur. Face à une telle affirmation de la volonté des parties, elle ne se sent pas toujours liée et n’écarte donc pas systématiquement la création de certaines obligations légales » (Bruno OPPETIT, Droit et modernité, coll. « Doctrine juridique », Paris, Presses universitaires de France, 1998, p. 289). Une explication de ce fait est livrée comme suit : « le droit français répugne à réserver aux parties une telle faculté de mise à l’écart de la chose juridique » (J. M. MOUSSERON, M. GUIBAL et D. MAINGUY, préc., note 82, n° 390, p. 230). Néanmoins, il est précisé qu’« il ne faudrait pas déduire de ces différentes analyses une tendance à la réintégration juridique systématique des engagements d’honneur dans la sphère contractuelle » (Id.).

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période des pourparlers, qui peut être longue »239. Le législateur, qu’il soit québécois, français ou allemand, ne les consacre pas directement dans le Code civil. En effet, « ces formules contractuelles sont, bien souvent, et même si elles se situent avant le contrat, … des contrats (…) C’est sans doute la raison pour laquelle le Code civil se désintéresse des contrats de négociation en particulier de la négociation du contrat en général »240.

En tant que contrat innommé, le contrat de négociation laisse « place à l’imagination et à la créativité de chacune des parties impliquées »241. Ainsi, les règles que les parties s’engagent à suivre durant les pourparlers sont diverses242. Généralement, les parties prévoient le calendrier de la négociation en fixant les dates importantes comme éventuellement une date butoir pour la fin de celle-ci, elles précisent le ou les lieux où elle se tiendra, son format ou encore la personne sous l’autorité de laquelle elle sera conduite.

Les contrats de négociation peuvent également régir le comportement des parties243 par l’intermédiaire d’une clause d’exclusivité afin de s’interdire de « solliciter, initier ou poursuivre toute discussion ou négociation de quelque nature avec un tiers ayant trait en tout

239Ch. LARROUMET et S. BROS, préc., note 26, n° 293, p. 255 et 256.

240J. M. MOUSSERON, M. GUIBAL et D. MAINGUY, préc., note 82, n° 340, p. 197.

241Gérard COULOMBE et Patrick THÉORÊT, « Protocoles d’entente : stratégies et pièges », dans INSIGHT

INFORMATION CO., Négociation et rédaction d’importantes conventions commerciales. Comment blinder vos documents, Toronto, Insight Press, 2000, p. 57, à la p. 71.

242Il s’agit ici d’une différence entre le contrat de négociation et les avant-contrats. Le législateur prévoit pour les

avant-contrats quelques règles à respecter. Par exemple, l’article 1785 du Code civil du Québec dispose que le contrat préliminaire par lequel une personne promet d’acheter un immeuble à usage d’habitation « doit contenir une stipulation par laquelle le promettant acheteur peut, dans les dix jours de l’acte, se dédire de la promesse ».

243Pour une définition en droit français voir : D. MAZEAUD, préc., note 82, 47 pour qui ces contrats « envisagent

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ou en partie à la transaction »244 envisagée. Celle-ci doit néanmoins être limitée dans le temps245. Dans le même sens, les cocontractants potentiels peuvent s’obliger conventionnellement à agir suivant les exigences de la bonne foi durant le processus de la