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3-La déstabilisation de la relation d’habite r

Pour d’autres habitants (nouveaux occupants), le voisinage n’est jamais une occasion de contraction des liens sociaux. Il n’a jamais favorisé le partage des préoccupations dans les pratiques d’entretien de l’espace public.

Cette attitude d’isolement et de dégradations des lieux publics déstabilise la relation d’habiter d’où le phénomène de ségrégation.

1 Simmel .G, « Digression sur l’étranger in Grafmeyer.y et Joseph. I (Trad. /présentation), L’école de Chicago (Naissance de l’écologie urbaine),Aubier, Paris, 1990, p 59

137 Les propos d’une résidente à la cité USTO expliquent en partie cette attitude :

« Comment veux-tu qu’on donne notre confiance au voisin d’aujourd’hui qui ne veut même pas qu’on interpelle dans la cité. Et quand il s’agit d’un problème de la cité, c’est le silence qui règne, et depuis il se retirent progressivement. »(Entretien n°6)

Ces attitudes et interaction entre les habitants eux-mêmes ne font que renforcer le lien de méfiance.

Les témoignages d’un habitantde la cité USTO confirment cette attitude constatée :

« C’est vrai qu’aujourd’hui tout a changé dans cette cité, les objets et les individus, on

ne plus croire au voisinage c’est devenu difficile ‘tahraz ‘’rouhak’, aklia’ ‘el jar’ ‘tbadlet’tu te méfies, la mentalité du voisin a changé »(Entretien n° 12)

Dans ces situations relationnelles, les habitants sont marqués par la méfiance qui à provoquer chez la plupart une attitude de repli pour maintenir une sociabilité privée.

« Comment veux-tu avec ces comportements ‘halet’ ‘wsakh’ ‘ouma’ ‘kench’ ‘m’kadra’ ‘el jar’ : l’état de saleté, l’absence du respect mutuel au voisin, quand tu nettoies pour toi, et tu imposes tes déchets pour le collectif, tu ne pourras jamais construire ta relation avec l’autre. » (Entretien n° 5)

Les interactions entre le voisinage ne font que créer une situation de désintégration sociale. Cette dernière ne favorise pas les lieux ou peuvent se développer les relations entre les membres de la cité, ne peuvent non plus être solidaire et ne peuvent en aucun cas, partager les valeurs. Ces attitudes de non partage chez les catégories d’enquêtés fragilisent les relations sociales.

Et comme le souligne Lussaut.M,1 dans son livre, ‘lutte de classes à la lutte des places’, il qualifie le lien social comme un lien social de nature différente.

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4 - Le sentiment de relâchement

Ainsi et pour mieux cerner la relation qu’entretient l’enquêté avec son voisin dans l’usage des lieux au quotidien, leurs expressions formulées reflètent chez la plupart le sentiment de relâchement ‘ta hseb’’ maranich’’ maa’’ houm’ ‘jabed’ : comme si je ne suis pas parmi eux‘hta’’ sila’ ‘bihoum’ : aucune relation avec eux‘ma’ ‘andech ‘placa’’ maahoum’ :je n’ai pas de place avec eux.

En guise d’illustration nous citons le cas de l’habitant de la cité Maraval :

« Aujourd’hui on parle plus de la relation du voisin, pour moi et c’est mon propre raisonnement, certes il habite le collectif mais pour moi il mène la vie à la cité à l’individuel, quand il s’agit d’un problème d’aide ou de collaboration, comme si on n’habite pas la cité et pour d’autre habitants pas de responsabilité, ces mentalités qui ont fait dégrader la situation. »(Entretien n°7)

Face à la restriction, voir l’effacement de la responsabilité des habitants, et aux contraintes vécues dans le relationnel, certains enquêtés se montrent négligents dans leurs rôle social d’habitant du collectif.

De ce qui précède, il ressort que même s’il existe le peu des cas d’habitants ayant une certaine expérience dans le collectif, cette crise du lien et selon leurs discours a entrainé la dévalorisation des milieux et des espaces.

Ce qui nous renvoie à la conception de Durkheim sur la notion de solidarité. Il insiste sur la fonction du lien social pour montrer que : quelles que soient les époques, le lien social a uni les individus et les groupes sociaux par des règles communément partagées.

A partir de l’analyse des propos des enquêtés, nous avons constaté que devant cet état actuel de crise et en présence d’une catégorie d’occupants qui perd le sens moral, connait un relâchement des bonnes habitudes.

C’est cette intégration et cette solidarité dictée par Durkheim. E. qui fondent le lien social.

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5-Le sentiment de non intérêt

Selon les interprétations des enquêtés aux modes relationnels au sein du collectif, la plupart d’entre eux éprouvent le sentiment de refus et le non intérêt accordé aux collectifs ainsi qu’à la non préoccupation dans le voisinage.

Les propos de l’enquêté de la cité Usto expriment bien le sentiment de désintérêt au collectif :

« il nous arrive et rarement de procéder à la propreté des lieux avec les nouveaux

voisins les habitudes ont changé‘ ma’ ‘kench’ ‘moufahama’ :il n’ya pas d’entente yaraaf’ ‘ghi’ ‘hajtah’ :’il cherche que son intérêt ‘oualet’ ‘ haka’ maa’ ‘jaa’r, ‘darwak’ :, c’est devenu comme ça avec le voisin d’aujourd’hui les moments de l’Aid el Kebir, juste laver les lieux du sang, mais encombre les lieux de la décharge par des sacs sales et pleins d’odeurs qui restent en permanence pour l’évacuation par les services de L’APN ».(Entretien n°6)

Par ces expressions langagières fréquentes, nous interprétons cet égoïsme et ce repli qui caractérisent les seuls intérêts personnels chez les habitants des cités, et favorisent cette autonomie individuelle et une liberté d’agir diminuée de contrôle1

.

Encore le témoignage d’un habitant de la cité seddikia ;

« Quand je vois la réaction de certains de mes voisins pour ne pas dire la majorité, ils

sont totalement coupés de ce monde ‘ aich’ ‘nafsah’ : vit pour lui-même’, rah jar :’le voisin n’est plus el ‘niya’ wal ‘mkadra’ : plus le voisin de bonne foi, et du respect. » (Entretien

n°18)

C’est cette fonction commune à tous les individus dont parle Durkheim, génère le lien social, que l’individu se révèle toujours lié aux autres est absorbé par le groupe.

Ce dysfonctionnement relationnel au sein des catégories d’habitants des cités, a débouché sur des actions de toutes natures sur les lieux publics et sur une dévaluation des espaces collectifs et des personnes.

140 Les témoignages d’une enquêtée de la cité USTO fait cette distinction de représentation et d’évaluation marquée chez les habitants.

« Avant, le voisin te prend pour un grand ‘ychouf’ ‘kbir’kane’t’el ‘ mkadra’’ou terbiya,

kan andah chan aliil te regarde par le haut, il avait du respect de l’éducation, aujourd’hui tu vaux dans leurs yeux comme plus petit il baisse sa tête et te dépasse. »(Entretien n° 21)

Les enquêtés expriment leurs ressentis sur la dégradation des liens et des valeurs dans le voisinage ainsi que le changement constaté dans leur vie sociale. Ces pratiques d’habité peuvent se révéler dans différentes situations. Ces situations ainsi décrites ne peuvent que devenir les causes de déstabilisation de la relation au voisinage.

Les propos de l’habitant de la cité Usto sont révélateurs :

« Avec nos anciens voisins, je me rappelle il t’écoute, ‘kanet’ el’ ‘moufahama’wal’ ‘hourma :’ il y avait de l’entente et de l’intimité et comme on disait ‘khtarel jar’ ‘kbeldard'’ : le choix du voisinage précède le logement mais aujourd’hui c’est un autre verdict ’maranich’‘saken ‘fi’‘darek’ :je n’habite pas dans votre logement, je suis propriétaire de mon appartement, c’est tout ce qu’on peut entendre de voisins. » (Entretien n°21)

Les témoignages que nous venons de présenter, montrent bien cette transformation des liens sociaux et la diversification des appartenances Simmel. G et affaiblissent les liens sociaux

Dans un point sur le rôle de la morale E Durkheim1 : « le mode d’adaptation ne devient une règle de conduite que si le groupe le consacre de son autorité ».

Ces rapports de voisinage, les pratiques de détournement des lieux publics par la saleté ainsi que cette liberté individuelle d’agir ne font qu’accentuer l’état d’exclusion au sein des habitants des cités. La distanciation et le repli sont devenus la règle de conduite chez les

1Durkheim. E, Article, Risque du lien social p 48 Durkheim. E, op cit p 34

141 enquêtés, ayant une attitude de crainte, des rapports de rencontre et de confrontation entre les habitants où on ne peut pas être exposé à l’autre.1

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CONCLUSION :

En somme, les attitudes et pratiques de rejet sur les lieux déterminent un mode relationnel entre les habitants du collectif. Ces usages différenciés de l’espace public chez la plupart des enquêtés, ont contribué cependant à créer un déséquilibre en abandon et à la non-assistance à l’intérêt général du collectif.

L’ensemble des interprétations formulées par les enquêtés témoignent de l’absence et de la non considération du voisin, ainsi que la dégradation des lieux et des valeurs. Cette situation conflictuelle dans l’habité au sein des cités a généré un état de désaffiliation chez la plupart d’entre eux.

Il est vrai que le sentiment de dépendance du groupe, de solidarité et de participation dans le collectif, détermine aussi le comportement moral de ces groupes d’habitants. Ainsi peut- on prononcer que dans le cas de l’habiter collectif, le bien individuel et le bien commun poursuivent une même finalité ?

Sinon comment peut-on caractériser chez l’habitant un sentiment faible de solidarité de non interdépendance, de non- participation, et le non-respect à autrui. Dans ce sens, et avant d’aborder ces questions, nous estimons plus judicieux d’analyser la notion de la citoyenneté, pour mieux cerner l’importance du rôle du lien social et les pratiques d’habiter dans l’espace public.

CHAPITRE 3

LA CITOYENNETE