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La contribution du tissu adipeux dans l’insulino-résistance

D. Une conséquence de l’obésité : la résistance à l’insuline

3) La contribution du tissu adipeux dans l’insulino-résistance

a)L’hypothèse portale

Le tissu adipeux est chargé de stocker les excès d’apports énergétiques qui ne sont pas utilisés par les autres organes. L’adipocyte augmente donc son activité métabolique de lipogenèse et réduit son activité lipolytique. La vacuole lipidique augmente donc de volume, mais celui-ci est limité. Comme décrit précédemment, la vacuole lipidique est entourée de périlipines qui jouerait le rôle de senseur du contenu lipidique (Blouin et al., 2006). Une fois qu’un certain étirement de la membrane de la vacuole est atteint, les périlipines induisent un signal stoppant le stockage lipidique. Le mécanisme par lequel l’adipocyte devient inactif est mal connu, mais il semble impliquer PPARγ dont l’expression diminuerait avec l’augmentation du volume de la vacuole (Tanabe et al., 2004). Si la consommation calorique reste élevée, le tissu adipeux ne pourra plus joue son rôle et les acides gras ne seront plus stockés. Ils circuleront librement dans le sang et pourront induire une lipotoxicité au niveau du foie, du pancréas et du muscle (Ravussin and Smith, 2002).

Nous avons vu que l’augmentation de la masse grasse est fortement corrélée au développement de perturbations métaboliques telle que la résistance à l’insuline. Ceci est plus particulièrement vrai concernant le tissu adipeux viscéral. Le tissu adipeux sous-cutané et le viscéral différent au niveau de certaines caractéristiques. Le tissu adipeux viscéral présente une sensibilité à l’insuline plus faible que le tissu sous-cutané, ainsi qu’une meilleure activité lipolytique en réponse à la stimulation par les catécholamines (Wajchenberg, 2000). Ces caractéristiques influent donc sur la balance entre stockage et libération des acides gras circulants et joue en défaveur du tissu adipeux viscéral. De plus, ce dernier possède une position centrale au sein de l’organisme et sa vascularisation lui donne un accès direct à la veine porte. Les acides gras libérés par le tissu adipeux

63 vont alors directement rejoindre le foie et être à l’origine de bouleversements métaboliques. Ce concept est appelé l’hypothèse portale.

Comme expliquer précédemment, les adipocytes hypertrophiés voient leur fonction sécrétrice perturbée et un état inflammatoire se met en place dans le tissu adipeux obèse. La sécrétion de TNFα induit alors une inhibition de l’adipogenèse (Spiegelman and Hotamisligil, 1993) et une augmentation de l’activité lipolytique des adipocytes, ce qui augmente encore la libération d’acides gras (Guilherme et al., 2008). De plus, les sécrétions des autres adipokines varient également en fonction de la taille de l’adipocyte, ce qui peut avoir des effets néfastes sur les organes cibles, qu’ils soient centraux ou périphériques.

b)La lipotoxicité

Les acides gras et le glucose sont les principales sources d’énergie de l’organisme. En condition d’apports glucidiques et lipidiques normaux, le glucose est le substrat métabolisé en premier. Lors d’une activité physique, une fois que le glucose a été utilisé, les acides gras stockés sont métabolisés à leur tour. Il existe donc une synergie régulée entre l’utilisation du glucose et des acides gras comme ressources énergétiques. Cette régulation peut être perturbée lorsque la concentration du glucose ou celle des acides gras est anormalement élevée. Une hyperplipidémie est capable d’inhiber l’utilisation du glucose (Randle et al., 1963), tandis qu’une augmentation du taux de glucose sanguin diminue la β-oxydation des acides gras et stimule l’expression des facteurs impliqués dans la lipogenèse, conduisant à une accumulation d’acide gras dans les cellules (Roche

et al., 1998). Dans le cas de l’obésité, les dysfonctionnements des adipocytes et l’inflammation du

tissu adipeux contribuent à une hyperlipidémie qui va permettre l’accumulation d’acides gras au niveau des organes non-adipeux tel que le foie, le pancréas et le muscle. Cette accumulation d’acides gras cause des effets néfastes sur le métabolisme de l’organe (Schaffer, 2003). Elle est aussi à l’origine du développement de la résistance à l’insuline. Les acides gras induisent l’expression de PKC qui inhibe l’activité des protéines IRS en augmentant la phosphorylation de leur résidu sérine et thréonine. L’inactivation du gène codant pour PKC dans des souris améliore l’efficacité de la voie de signalisation de l’insuline et les protège de l’insulino-résistance (Kim et

al., 2004).

Le foie est un organe capable de produire des triglycérides en synthétisant des acides gras par lipogenèse de novo. Il est donc le lieu de stockage d’une petite quantité d’acides gras. Dans le cas de l’obésité, des acides gras provenant de l’alimentation et de la lipolyse du tissu adipeux, vont

64 s’ajouter à cette réserve d’acides gras, qui va alors devenir bien supérieure à ce que le foie peut supporter. On aboutit donc à une stéatose du foie et au développement d’une insulino-résistance. Cette dernière sera à l’origine d’une augmentation de la production de glucose par néoglucogenèse hépatique, ce qui renforce l’intolérance au glucose (Postic and Girard, 2008).

Au niveau du muscle, l’accumulation d’acide gras est possible en situation physiologique normale afin de subvenir à ses besoins lors d’exercices physiques intenses et prolongés. Au cours de l’obésité, ils s’accumulent dans le muscle en quantité bien supérieur aux besoins. Chez les personnes obèses insulino-résistantes, la β-oxydation des acides gras devient alors incomplète et induit la formation de résidus intermédiaires tels que le DAG et l’acyl-CoA, qui semblent être à l’origine du développement de l’insulino-résistance (Perseghin et al., 1999).

Le pancréas est l’organe de détection de la glycémie et de la sécrétion de l’insuline. La toxicité des acides gras induit un défaut de sécrétion d’insuline par les cellules β et des dommages irréversibles pouvant aller jusqu’à induire leur apoptose. Par exemple, les acides gras augmentent l’expression de la protéine UCP-2 qui dissipe le potentiel électrochimique au niveau de la chaîne respiratoire mitochondriale, ce qui fait baisser le ratio ATP/ADP. Or, la cellule β interprète cette diminution de ratio comme le signal d’une glycémie faible et la sécrétion d’insuline est donc réduite (Yamashita et al., 2004) (Figure 15).

Figure 15 : Lipotoxicité et hyperglycémie.

L’hyperlipidémie causée par le tissu adipeux induit une augmentation de l’oxydation des acides gras au niveau du muscle et du foie. La lipotoxicité diminue la sécrétion d’insuline par le pancréas. Il en résulte une augmentation du taux de glucose sanguin.

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