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La construction de la figure moderne de l'étranger

Un statut d’étranger tributaire d’une conception volontariste de l’intégration

Section 1. La construction de la figure moderne de l'étranger

Avec la chute de la royauté, les nationaux ne sont plus des « régnicoles » mais des citoyens. Malgré l’universalisme porté par la Révolution, la figure du citoyen et plus particulièrement du citoyen situé, qui est celui auquel elle s’adresse, va conduire nécessairement à la désignation de l’étranger, devenu ainsi une figure « bloquée » entre l’universalisme et la construction de la souveraineté nationale. Le dualisme fondamental sera donc désormais entre étranger et citoyen. (§ 1). Le caractère central de la participation politique dans la pensée révolutionnaire, et la conception volontariste et unitaire de la nation qui en découle, va conduire peu à peu à faire de l’étranger non plus uniquement un élément extérieur, mais celui qui doit être accueilli par la Nation puis celui dont on attend l’adhésion à ce corps national constitué. Cette évolution dans le rapport à la présence de l’étranger explique la prégnance de la notion d’intégration dans la détermination de sa condition juridique (§ 2).

§ 1. L’étranger face au citoyen situé : paradoxe de la vision universaliste de la Révolution

Le mouvement révolutionnaire s’inscrit dans l’universalité, proclamant l’égalité des droits entre nationaux et étrangers, en tant qu’ils appartiennent à une même humanité (A). Cependant, ce concept d’humanité est fragile et la conception de la citoyenneté est chaque fois plus valorisée dans un espace déterminé, celui du territoire, favorisant le « citoyen situé » au détriment de l’universalisme. C’est en parallèle de la construction de cette figure du citoyen qu’émerge la figure moderne de l’étranger (B).

A. Les conceptions universalistes au cœur du projet révolutionnaire

La révolution de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen se concevait comme une révolution sans frontières, rayonnant auprès des autres peuples et accordant aux étrangers résidant sur le territoire national des droits égaux à ceux

des nationaux (1). Néanmoins, si la Révolution cherche à protéger et à consacrer à la fois l’homme et le citoyen en promouvant l’idée d’une communauté universelle, elle cherche aussi à la protéger des puissances ennemies en guerre contre la France, expliquant les premières lois restrictives envers les étrangers qui, en réalité, ne sont que les raisons apparentes de l’exclusion dont ils font l’objet (2).

1. La promotion d’une communauté universelle : l’étranger égal du national dans une commune humanité

Tout au long du XVIIIe siècle, et en même temps que l’on contribue à préciser le rapport de l’homme à sa terre natale, à sa patrie, l’on inscrit le projet philosophique dans une perspective universaliste. La perception de l’étranger est ainsi liée à la place qui lui est réservée dans la société mais aussi au dépassement du cadre de la patrie pour s’élever au niveau de l’humanité en tant que communauté universelle. En opérant une prise de conscience des attributs qui caractérisant l’humanité, la pensée des Lumières reconnaît à l’individu, indépendamment de toute considération sociale ou culturelle et a fortiori au-delà de toute idée d’étranger, un statut particulier que la Révolution consacrera notamment en déclarant les Droits de l’homme.

Avec les Lumières, comme le rappellent Ernest Labrousse et Roland Mousnier, « tous les humains ont les mêmes droits et sont capables des mêmes progrès. Il n’y a pas de peuple élu, de race supérieure et même les différences de race, de nation, sont sans importance »1. Montesquieu, par exemple, fonde sa conception des sociétés sur un sentiment d’appartenance à une collectivité qui dépasse largement les questions de frontières, « le cœur [étant] citoyen de tous les pays »2. Ainsi, à la fin du XVIIIe siècle, les philosophes défendent l’appartenance de tous les hommes à une entité « extra-nationale », à une communauté universelle.

1 E. LABROUSSE et R. MOUSNIER, Le XVIIIème siècle – L’époque des Lumières (1715-1815),

PUF, 1985, Livre III, chap. I, p. 172.

2 MONTESQUIEU, Lettres persanes, Lettre LXV, in Œuvres complètes de Montesquieu, vol. 1

Lettres persanes, Voltaire Foundation, Oxford, 2004, p. 306 : « si tu ne m’aimes pas dans un païs, où

tu n’es lié à rien, que sera-ce au milieu de la Perse et dans le sein de ta famille ? Mais peut-être que je me trompe : tu ès assez aimable pour trouver par tout des amis : le cœur est citoyen de tous les païs […] »

Les écrits de Condorcet sont éclairants à cet égard. Il part d’un double postulat : la nature humaine est partout la même, or notre capacité rationelle en constitue une partie, elle est donc également universelle. La raison étant la seule à pouvoir distinguer le juste de l’injuste, il incombe à la raison universelle de formuler les principes de justice, valable pour tous en chaque endroit. Le droit naturel est donc la source du caractère universel : si les principes de la justice sont partout les mêmes, alors les lois doivent l’être aussi. Elles ne peuvent, selon lui, résulter que du droit naturel et non également, comme le supposait Montesquieu, des conditions physiques, sociales ou historiques d’un peuple. Dans son commentaire de l’Esprit des Lois, Condorcet affirme ainsi qu’ « une bonne loi doit être bonne pour tous les hommes, comme une proposition vraie est vraie pour tous » car « comme la vérité, la raison, la justice, les droits des hommes, l’intérêt de la propriété, de la liberté, de la sûreté sont les mêmes partout, on ne voit pas pourquoi toutes les provinces d’un État, ou même tous les États, n’auraient pas les mêmes lois »3. Tous les hommes sont donc égaux en droit car ils participent de la même nature c’est pourquoi les droits de l’homme sont partout identiques.

Si la loi, comme elle le doit, touche au comportement public des hommes, alors elle ne peut être encrée que dans l’universalité : la justifier par une quelconque spécificité spatiale n’a pas de sens. Mené par son idéal de voir les hommes « ne former qu’un seul tout, et tendre à un but unique »4, Condorcet affirme que l’on « sait enfin que tous les hommes ne forment qu’une seule famille et n’ont qu’un seul intérêt. Le nom de l’humanité, de ce sentiment qui embrasse les hommes, des tous les pays et de tous les âges, […] semble réunir dans les mêmes vues ceux dont l’ambition est d’éclairer les hommes et ceux dont le devoir est de veiller à leur bonheur et de défendre leurs droits »5. S’écartant de la perspective du contrat social, il estime, comme Montesquieu, que la sociabilité est un phénomène humain qui n’a besoin d’aucun intermède théorique.

La figure d’étranger au sens politique n’est donc pas déterminante dans une telle pensée. Elle n’est pas inexistante dans la mesure où les différences de coutumes ou de cultures entre les peuples ne sont pas niées et font même l’objet d’études précises, mais

3 Condorcet, « Observations de Condorcet sur le XXIXe livre de l’Esprit des lois », in Œuvres de

Condorcet publiées par A. Condorcet et F. Arago, T. I, 1849, p. 378.

4 Condorcet, Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain, GF Flammarion, 1988,

p. 259.

5 Condorcet, « Discours à l’Académie des Sciences », in Œuvres de Condorcet publiées par A.

elle ne constitue pas un fondement de différenciation juridique. A terme, l’humanité est vouée à constituer une société unique et c’est la tâche du droit positif que d’aider les hommes à avancer dans cette voie.

Inspiré de ces doctrines, le projet révolutionnaire est inscrit dès 1789 dans l’universalité et fondé sur « la théorie des droits de l’humanité »6. Le comte de Montmorency affirme ainsi devant l’Assemblée que « les droits de l’homme en société sont éternels ; il n’est besoin d’aucune sanction pour les reconnaître. Les droits de l’homme sont invariables comme la justice, éternels comme la raison ; ils sont de tous les temps et de tous les pays »7. Dans son intervention du 20 août 1789, Duquesnoy, futur député du Pas-de-Calais à l'Assemblée législative, considère qu’ « une déclaration doit être de tous les temps et de tous les peuples ; les circonstances changent, mais elle doit être invariable au milieu des révolutions »8, appuyé par le député du tiers Jérôme Pétion de Villeneuve qui déclare qu’ « il ne s'agit pas ici de faire une déclaration des droits seulement pour la France, mais pour l’homme en général. Ces droits ne sont pas des lois, et ces droits sont de tous les temps et avant les lois »9. Ces prises de position renvoient ainsi à l’idée que s’il y a un ordre naturel rationel, il est inconcevable de le voir consacré avec des variances en fonction du lieu où il est déclaré10. Dans cette perspective,

6 Robespierre, dernier discours à la Convention nationale, 26 juillet 1794 : « Les révolutions qui,

jusqu'à nous, ont changé la face des empires n'ont eu pour objet qu'un changement de dynastie ou le changement du pouvoir d'un seul à celui de plusieurs. La Révolution française est la première qui ait été fondée sur les théories des droits de l'humanité et sur les principes de la justice. Les autres révolutions n'exigeaient que de l'ambition ; la nôtre impose des vertus. », in C. MAZAURIC,

Robespierre. Écrits, éd. Paris Messidor, Éditions sociales, 1989, p. 332.

7 Séance du samedi 1er août 1789, Archives parlementaires, T. 8 : Du 5 mai 1789 au 15 septembre

1789, p. 320.

8 Séance du jeudi 20 août 1789, Archives parlementaires, T. 8 : Du 5 mai 1789 au 15 septembre 1789,

p. 462.

9 Séance du dimanche 23 août 1789, Archives parlementaires, T. 8, op. cit., p. 475.

10 Certains ont considéré que cette exigence de l’universalité, répondait également à une nécessité de

la situation : le besoin de légitimité de l’Assemblée nationale autoproclamée qui, en tant que telle, ne répond pas aux exigences de désignation des représentants dans un régime représentatif tel que le conçoit Sieyès par exemple. La déclaration va ainsi devoir servir de substitut à cette carence de légitimité : elle sera un ensemble de droits « inaliénables et sacrés » de l’homme que l’Assemblée se borne à exposer. Marcel Gauchet, dans l’entrée « Droits de l’homme » du dictionnaire de la Révolution française qu’il a écrite, considère ainsi que « l’effacement de l’énonciateur qu’on y a relevé est la rançon du rôle source qu’il s’agit de faire jouer à des « principes simples et incontestables » vis-à-vis desquels l’Assemblée n’est qu’un modeste intermédiaire. D’où aussi bien la

contrainte de l’universalité qui pèse sur la rédaction. Car seule une « déclaration des droits pour tous

les temps, pour tous les pays » selon le mot de Duport le 18 août, est susceptible de cette autorité irrécusable et irrésistible dont les Constituants ont besoin à l’appui de leur entreprise. L’ancrage dans l’universel n’est ni le fruit d’un génie particulier ni la marque d’une irréalité spécifique », « Droits de

l’étranger est un homme libre que l’État doit protéger avant d’être un élément extérieur à la communauté.

L’Assemblée accueille également les paroles étrangères des peuples en Révolution, et permet à tous les hommes intéressés ou concernés par les débats, notamment en matière de guerre et de paix, d’y avoir accès. Garran de Coulon, député de Paris à l’Assemblée nationale, proposera même de faire appel « à l’ensemble des citoyens français et étrangers pour les inviter à nous communiquer leur vue sur la formation de notre nouveau Code civil et sur le perfectionnement des lois et de l’administration en général »11. L’étranger n’est donc pas présenté que comme un spectateur des travaux de la nouvelle Assemblée nationale, mais aussi comme un potentiel acteur de ceux-ci. Par cette proposition, les parlementaires révèlent leur volonté de faire de l’Assemblée nationale le lieu de convergence de la raison universelle. L’étranger présent en son sein n’agira donc plus au nom de sa patrie d’origine mais au nom de l’universalité qu’il est censé incarner12.

En plus d’associer les étrangers à l’élaboration des nouvelles lois, les révolutionnaires mettent en place un statut juridique de l’étranger, fidèle lui aussi en partie au projet universaliste de la Révolution. Fidèle à la doctrine de l’Ancien droit, la Constituante considère comme étranger l’individu né en-dehors du royaume de parents étrangers. Le concept d’étranger n’est donc encore que purement juridique. Un décret du 30 avril 1790 « répute français » tout étranger qui est domicilié en

l’homme », in F. Furet et M. OZOUF (dir.), Dictionnaire critique de la Révolution française : idées, Flammarion, 2007, p. 127.

11 M. Vincens-Planchut répondra, révélant un certain consensus : « L'adoption de la deuxième

proposition de M. Garran ne pourrait qu'honorer 1'Assemblée, et son premier objet mérite notre approbation », Archives parlementaires, Séance du dimanche 16 octobre 1791, T. 34 : Du 1er octobre au 10 novembre 1791, p. 251.

12 C’est dans cette perspective que s’inscrit par exemple Marie-Joseph Chénier, représentant de

plusieurs citoyens de Paris lorsqu’il propose, dans une pétition du 24 août 1792, de constituer « le congrès du monde entier » en faisant le don du titre de citoyens français aux « apôtres de la liberté (…) Eh ! Si le choix du peuple portait ces hommes illustres à la Convention nationale, quel spectacle imposant et solennel offrirait cette Assemblée qui va déterminer de si grands destins ! L’élite des hommes réunie de tous les points de la terre, ne semblerait elle pas le congrès du monde entier ? […] c’est par de telles adoptions qu’il est possible de réaliser cette fraternité universelle, premier vœu des philosophes, premier but de l’ordre social. C'est ainsi que la liberté s'élèvera sur les débris de l'édifice féodal et du colosse monarchique, et que toutes les nations pourront se reposer un jour sous l'ombrage de l'égalité. », Archives parlementaires, T. 48 : Du 11 août au 25 août 1792, Séance du vendredi 24 août 1792, au soir, p. 689.

France depuis cinq ans, à condition qu’il ait épousé une Française ou qu’il y ait acquis un immeuble ou crée un commerce. La Constitution de 1791 reprendra ces dispositions en y ajoutant la naturalisation par acte législatif sans autre condition que de fixer son domicile en France et d’y prêter le serment civique. Enfin, les enfants d’étrangers peuvent devenir Français s’ils fixent leur résidence dans le royaume. En plus de poser les règles relatives à l’admission des étrangers à la nationalité, la Constituante s’attache à améliorer la condition des étrangers vivant en France. Si elle reste réservée sur la question des droits politiques13, elle n’aura cesse de rappeler la protection due aux étrangers, la mesure la plus intéressante en la matière étant celle qui autorisa les étrangers à exercer la profession de leur choix.

La détermination de la Constituante se manifesta principalement dans le droit des successions, principal révélateur des inégalités entre sujets et étrangers sous l’Ancien régime. Dès 1790, le droit d’aubaine est supprimé car il est considéré par l’Assemblée comme « contraire aux principes de fraternité qui doivent lier les hommes »14. Les étrangers sont ainsi invités à « jouir sous un gouvernement libre des droits sacrés et inviolables de l’humanité »15. La loi du 8 août 1791 donnera ensuite droit aux étrangers de recueillir la succession d’un Français. Par ailleurs, le Code pénal établi par la Constituante en 1791 ne contient aucune disposition propre aux étrangers et adopte une approche purement territoriale de la loi pénale. Enfin, l’Assemblée consacre un titre entier de la nouvelle constitution à la question des rapports de la nation française avec les autres nations mais aussi avec leurs ressortissants. Ce texte rappelle les droits civils reconnus aux étrangers, la protection qui s’y attache ainsi que les obligations qui leur sont liées de respecter les lois françaises de police16. L’étranger est donc présent dans la Constitution, il est reconnu

13 Par un arrêté du 20 juillet 1789, elle refuse aux étrangers de siéger à l’Assemblée nationale. Puis,

en 1791, suite à la fuite de Varennes, elle les soumet par le décret des 28-29 juin à la surveillance des municipalités.

14 Loi du 6 août 1790 : « l’Assemblée nationale, considérant que le droit d’aubaine est contraire aux

principes de fraternité qui doivent lier tous les hommes quels que soient leur pays et leur gouvernement, décide que ce droit établi dans les temps barbares doit être proscrit, a décrété le droit d’aubaine et celui de détractation abolis pour toujours ». in J.-B. DUVERGIER, Collection complète

des lois, décrets, Ordonnance, règlements, avis du Conseil d’État de 1788 à 1824, 1824, T. 1, p. 318.

15 Rapport du député Barrère, Archives parlementaires, Séance du vendredi 6 août 1790, au matin,

T. 17, séances du 9 juillet au 12 août 1790, p. 628-629.

16 La Constitution des 3-14 septembre 1791 dispose ainsi que « Les étrangers qui se trouvent en

comme un membre de la communauté étatique, même s’il n’est pas membre de la communauté nationale.

Cependant, cette première attitude de la Constituante ne doit pas cacher son pragmatisme et sa prudence. La nécessaire conservation de l’ordre public puis le début des guerres révolutionnaires la conduisent en effet à mettre en place les premières lois de police des étrangers.

2. Les guerres révolutionnaires, justifications apparentes de la méfiance envers l’étranger et du durcissement des mesures de police

Dès 1790, il revient aux municipalités de formuler les règles nécessaires au maintien de l’ordre, notamment afin d’exprimer leur loyauté à l’égard de la Révolution. Dans les dispositifs préconisés, la surveillance des étrangers occupe une place prépondérante. Ainsi, Sieyès présente la nouvelle organisation de la justice et de la police de France en faisant de la figure de l’étranger l’une des caractéristiques de l’espace urbain à contrôler17. Parmi les étrangers, deux catégories attirent particulièrement l’attention de la constituante : les descendants des protestants français expatriés et les juifs. Pour les premiers, la Constituante vote le décret des 9 et 15 août 1790, pris sur le rapport de Barrère, qui leur restitue la qualité de français à condition qu’ils viennent demeurer en France et prêtent le serment civique. En revanche, pour les seconds, le règlement de la situation fut plus complexe, marquant les premières réticences envers certaines catégories d’étrangers. A la fin de l’Ancien Régime, les statuts des communautés juives sont extrêmement divers. Le décret du 28 janvier 1790 reconnut aux juifs portugais et espagnols, nombreux dans la région de Bordeaux et d’Avignon, les droits de citoyens actifs. Mais les juifs des autres régions durent attendre au-delà même de la Constitution des 3-14 septembre 1791, jusqu’au décret du 27 septembre 1791 pour pouvoir prétendre, comme n’importe quel autre étranger, devenir citoyens selon les conditions posées par la loi. Cependant, dans

Conventions arrêtées par les puissances étrangères ; leur personne, leurs biens, leurs industries, leur culte sont également protégés par la loi » in Textes constitutionnels français, PUF, 19e éd., 2005. 17 Il dit ainsi : « quant à la ville de Paris, son immense population, le grand abord des

étrangers…exigent des lois particulières pour l’organisation de sa police », Archives parlementaires, Séance du vendredi 19 mars 1790, T. 12 : séances du 2 mars au 14 avril 1790, p. 250.

cette première phase révolutionnaire, les textes et le contrôle des flux demeurent assez rares.

En 1793 et 1794, le nombre de textes est multiplié par trois et la condition des étrangers fait l’objet d’une attention croissante. Cette inflation législative et le durcissement qui l’accompagne sont en partie dus au début de la guerre qui oppose la France aux puissances européennes. D’abord tenus de faire une déclaration dans la commune où ils se trouvent sous peine d’expulsion « sous vingt heures de la commune et sous huit jours du territoire de la République » et de dix ans de fers pour les ressortissants des pays en guerre avec la France18, les étrangers sont ensuite le plus souvent arrêtés comme suspects et condamnés à mort lorsqu’ils sont convaincus d’espionnage ou de conspiration. Pour mieux identifier les étrangers, les passeports furent mis en place et standardisés. Le décret du 1er février-28 mars 1792 oblige les