• Aucun résultat trouvé

DE COMPRÉHENSION ET DE PRODUCTION

2-7 L ES STRATÉGIES DE L ’ ACTE DE LIRE

Nous allons dans un premier lieu définir la notion de stratégie tout en la distinguant du processus. Nous allons essayer par la suite de citer quelques stratégies générales d‟apprentissages, et nous terminerons par développer les principales stratégies de l‟acte de lire en mettant l‟accent sur l‟importance d‟un enseignement explicite de ces stratégies.

C

HAPITRE

2:

LA COMPRÉHENSION DE L’ÉCRIT

75

2-7-1 Définition de stratégie

Le lexème stratégie est utilisé dans plusieurs spécialités de la vie et son emploi n‟appartient pas exclusivement à la didactique. Par ailleurs, en faisant référence à son étymon, nous constatons que le terme a des origines militaires. Effectivement, le mot stratégie vient du mot grec στρατηγία / stratighia (mot dérivé de στρατηγός / stratigos = « général, stratège »). Ce n‟est qu‟avec le temps que le mot s‟est imposé et s‟est répandu dans divers domaines.

Dans le dictionnaire du Petit Robert, les concepteurs, ont pris en considération la polysémie sémantique qui particularise le mot, en le définissant comme : « un ensemble d'actions

coordonnées, de manœuvres en vue d'une victoire » (Robert, 2009).

Or on peut dire qu‟une stratégie serait toujours assimilée à des activités réalisées afin atteindre un objectif. En l‟occurrence, la stratégie n‟est pas un acte conscient.

2-7-2 Les stratégies d’apprentissage

Dans le domaine de l'éducation, Cyr définit la stratégie d'apprentissage comme étant un «ensemble d'opérations et de ressources pédagogiques, planifié par le sujet dans le but de favoriser

au mieux l'atteinte d'objectifs dans une situation pédagogique. » (Cyr, 1998 : 4).

Pour l'approche actionnelle, approche qui utilise beaucoup le concept de stratégie, on la définit ainsi : « est considéré comme stratégie tout agencement organisé, finalisé et réglé

d'opérations choisies par un individu pour accomplir une tâche qui se présente à lui ». (Robert, J.,

2007 : 192).

D‟après CYR. P, les stratégies d‟apprentissage en LE sont «un ensemble d’opérations

mises en œuvre par les apprenants pour acquérir, intégrer et réutiliser la langue cible. » (Cyr, 1998

: 4).

TARDIF. M, souligne que les aspects intentionnels de ces stratégies sont pluriels: « la

stratégie a quelque chose d’intentionnel : il s’agit d’atteindre efficacement un objectif. Elle a aussi quelque chose de pluriel : il s’agit d’un ensemble de procédés. » (Tardif, 1992 : 23).

76

Figure.2.6. Schéma de stratégies d‟apprentissage, Tardif, 1992

À partir des définitions précédentes, nous pouvons dire qu‟une stratégie d‟apprentissage est nettement distincte d‟une stratégie de communication.

Cette distinction est importante jusqu‟au point ou les limites entre ces deux stratégies ne sont pas toujours étanches et que, souvent, on prend l‟une pour l‟autre arguant du fait qu‟un apprentissage réussi n‟est que le résultat d‟une bonne réception, opération essentielle dans l‟acte de communiquer.

Or, il est bien admis que l‟apprentissage et la communication impliquent des stratégies particulières en relation avec l‟objectif visé.

Aussi, on fait appel à des stratégies soit pour se faire comprendre par l‟interlocuteur, soit pour réussir à le convaincre quand le discours employé est le discours argumentatif.

En revanche, les stratégies d‟apprentissage sont mises en œuvre par l‟apprenant afin de bien assimiler une notion, ou de résoudre un problème mis sur son parcours lorsqu‟il s‟agit d‟une situation-problème.

C

HAPITRE

2:

LA COMPRÉHENSION DE L’ÉCRIT

77

Cela veut dire que les stratégies d‟apprentissage diffèrent d‟un apprenant à un autre à partir de leurs caractères individuel et volontaire. Néanmoins, il est à signaler qu‟à force de déployer les mêmes stratégies, on finit par en faire des réflexes qu‟on fait fonctionner inconsciemment pour résoudre les mêmes problèmes maintes fois rencontrés antérieurement.

Quelles sont les stratégies d’apprentissage ?

On peut dire que plusieurs classifications ont été proposées et que les critères sur lesquels sont classifiées relèvent d‟un choix personnel propre à chaque auteur. En revanche on peut parler de trois grandes catégories de stratégies d‟apprentissage, à savoir les stratégies cognitives, les stratégies métacognitives et les stratégies affectives. Cette typologie tridimensionnelle est proposée notamment par O'malley, J.M. et Chamot, A.U, et constituera une référence dans ce domaine. Nous allons essayer de définir chacune de ces stratégies tout en mettant l‟accent sur les actions qu‟elles impliquent et, par conséquent, ce qui la distingue des autres.

2-7-3 Les stratégies cognitives

Sous cette qualification sont rassemblées toutes les actions que l‟apprenant entreprend en vue d‟acquérir ou de retrouver l‟information, et qui accompagnent le déroulement de l‟apprentissage. Elles sont observables d‟une façon générale dans la mesure où, intervenant pendant l‟apprentissage, elles se manifestent par des comportements susceptibles d‟être analysés par l‟enseignant.

CYR fait remarquer à ce propos que ce type de stratégies : « impliquent une interaction

entre l’apprenant et la matière à l’étude, une manipulation mentale et physique de cette matière et l’application de techniques spécifiques en vue de résoudre un problème ou d’exécuter une tâche d’apprentissage. » (Cyr, 1998 : 54)

À cet effet, on peut interpeller les actions suivantes :

- La pratique linguistique: répéter, pratiquer les phonèmes de différentes façons, utiliser des fonctions du langage, enchevêtrer des éléments pour pouvoir produire des séquences plus longues, pratiquer le nouveau lexique dans divers contextes ;

- la compréhension des messages : utiliser les techniques du skimming (lecture rapide en vue d‟une compréhension globale) et du scanning (lecture sélective).

78 Analyser et raisonner :

- l‟analyse des énoncés ou des lexèmes via la décomposition, raisonner d‟une manière déductive en appliquant les règles de la langue cible ;

- la création des stratégies pour la réception et la production : prise de notes, rédaction objective et la mise en relief de certains passages etc. …

Le rédacteur doit chercher une représentation des connaissances qu‟il partage avec son destinataire. Carvalho, (2002), Grize, (1997) et Bernard, Besse, (1998) ont mis le point sur la façon dont s‟y prenait une personne adulte en situation d‟illettrisme lors d‟une production écrite et plus précisément sur l‟efficacité de la transmission d‟un message écrit à un destinataire fictif.

Pour ce faire, ils proposent à des personnes d‟écouter un message par téléphone. Ils leur demandent après de transcrire par écrit un message à la personne destinataire.

Après cela, les produits écrits seront soumis à des spécialistes de la matière qui déterminent le degré de pertinence de chaque production.

Ensuite, ils ont constaté qu‟il existe trois profils. En se préoccupant des procédures d‟écriture utilisées, il apparaît que 10% des sujets étudiés utilise un procédé d‟écriture visuel ou mémorisé, 22% ont une écriture phonétique et 68% optent pour un procédé orthographique.

Les chercheurs approuvent que la présence d‟un allocutaire lors de la production écrite a permis de mettre en œuvre des potentialités psycholinguistiques des rédacteurs en état d‟illettrisme qui ne surgissent pas lorsque le destinataire est absent au moment de la production écrite.

2-7-4 Les stratégies métacognitives

La métacognition est définie par O'malley, J.M. et Chamot, A.U comme étant « la

cognition sur la cognition ».

La question majeure est maintenant de comprendre si ces compétences font partie des compétences visées par l‟institution. Ou, différemment dit, est-ce que les habiletés métacognitives sont présentes dans les programmes officiels ?

Dans les programmes du secondaire en Algérie, et en ce qui concerne l‟enseignement de la langue française, les compétences ciblées sont précisées. Il est consigné « Les compétences

C

HAPITRE

2:

LA COMPRÉHENSION DE L’ÉCRIT

79

formes de communication qui s’établissent dans la classe... Par exemple, la prise de parole en classe pour expliquer ce que l’on a fait ne s’improvise pas. Cela suppose une technique particulière : quels aspects du travail fait doit-on rapporter ? Dans quel ordre, de quelle manière ? En prenant appui sur quel type d’aide-mémoire ?1»

On peut faire le constat immédiat que rien ne soit proposé par apport aux compétences métacognitives, faire appel à l‟usage d‟un aide-mémoire est fort intéressant pour apprendre, mais comment faire pour que les apprenants arrivent à assimiler le fonctionnement de la mémoire pour qu‟ils puissent concevoir un outil qui peut les aider réellement à construire et à utiliser leurs ressources cognitives ?

Que peut proposer l‟enseignant au sein de la classe pour permettre à ses apprenants de construire des compétences utiles pour apprendre des savoir-faire, autrement dit des "compétences métacognitives" ?

D‟autre part, penser que les lacunes dans les apprentissages scolaires, les difficultés rencontrées, sont en majeure partie liées au fait que l‟apprenant n‟a pas acquis les compétences nécessaires pour apprendre, c‟est-à-dire apprendre à apprendre.

Autrement dit, il s‟agit de ces opérations effectuées par l‟apprenant et qui lui permettent de réfléchir sur la façon même de son apprentissage.

Elles consistent, en fait, « à réfléchir sur son processus d’apprentissage, à comprendre les

conditions qui le favorisent, à organiser ou à planifier ses activités en vue de faire des apprentissages, à s’évaluer et à s’auto-corriger ». (Cyr, op. cit).

Ceci peut leur attribuer un caractère plus important, c‟est que les stratégies appartenant à ce domaine ne se limitent pas à un moment d‟apprentissage, mais le dépassent et deviennent susceptibles d‟être transférées à d‟autres situations.

Ce sont justement ces stratégies auxquelles il convient d‟accorder une attention particulière dans la mesure où elles renvoient à un savoir procédural, un savoir qui permet à l‟apprenant d‟apprendre à apprendre, car c‟est la finalité de tout apprentissage.

Ces stratégies se divisent à leur tour en plusieurs opérations mentales inhérentes et intervenant à des moments divers du processus d‟apprentissage. Il s‟agit effectivement de :

1

80

La planification : planifier c‟est se faire assigner des objectifs à court et/ou à long terme; c‟est aussi examiner une thématique nouvelle en classe; prédire des éléments linguistiques utiles pour accomplir une activité d‟apprentissage ou d‟un fait communicatif ou productif.

L‟attention : être attentif à tout élément langagier capable d‟ajouter une ou des contributions à l‟apprentissage; ceci dit garder son attention au cours de l‟exécution d‟une activité. L‟autogestion : assimiler les conditions facilitant l‟apprentissage de la langue et chercher à les adjoindre.

L‟autorégulation : contrôler et corriger sa performance au cours d‟une activité d‟apprentissage ou d‟une situation de communication.

L‟identification du problème : délimiter l‟objectif d‟une activité langagière ou un de ses aspects qui nécessite un aboutissement à une réalisation convenable.

L‟autoévaluation : évaluer ses propres compétences permettant la réalisation d‟une tâche langagière ou une situation de communication; évaluer le résultat de ses performances langagières ou de ses apprentissages.

Signalons à ce propos que l'importance des stratégies métacognitives a été mise en relief par le CECR qui les a regroupés en quatre catégories: la planification, l'exécution, le contrôle et la remédiation1.

1. la planification (ou organisation) : en gros réfléchir à la tâche avant de l'exécuter; 2. l'exécution : la réalisation de la tâche;

3. le contrôle (ou l'évaluation) : le jugement de la tâche; 4. la remédiation : l'autocorrection2.

2-7-5 Les stratégies socio-affectives

Les stratégies socio-affectives impliquent des interactions avec les autres (pairs en classe) dans le but de privilégier l'acquisition de la langue étrangère (poser des questions, coopérer...).

Ces dernières peuvent prendre plusieurs formes et se réalisent par plusieurs opérations. Entre autres, pour les actions entreprises par l‟apprenant dans le cadre de ces stratégies, Cyr affirme

1Robert, J.P: Dictionnaire pratique de didactique du Fle. 2e édition revue et augmentée, prise en compte détaillée du Cadre européen commun de référence pour les langues, Paris: Ophrys, 2007, p. 188.

C

HAPITRE

2:

LA COMPRÉHENSION DE L’ÉCRIT

81

que les questions de clarification et de vérification sont: demander de répéter; demander des explications, des clarifications, des reformulations1

.

La collaboration : est l‟interaction avec des pairs dont la finalité est d‟accomplir une activité ou de résoudre une difficulté d‟apprentissage.

Les activités coopérationnelles animent les apprenants à adopter des attitudes efficientes pour l‟ensemble de la classe.

L‟autogestion des affections ou la diminution de l‟agitation : se parler afin de réduire le l‟angoisse qui accompagne la réalisation d‟une activité d‟apprentissage ou d‟un acte de communication; utiliser plusieurs techniques contribuant à renforcer la confiance en soi et à la motivation du groupe; s‟encourager et surtout faire face aux erreurs et courir des risques.

Cela dit, les stratégies de lecture ne pourraient être conçues indépendamment des stratégies globales d‟apprentissage.

Elles ont certes leurs spécificités, mais elles relèvent toutes des mêmes types (cognitif, métacognitif et socio-affectif) et permettent à l‟apprenant de mieux acquérir le savoir et de s‟en servir ultérieurement à bon escient.