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2. LES FOURNISSEURS DE PRESTATIONS AMBULATOIRES ET

2.1. La redéfinition du rôle des fournisseurs de

2.1.1. L’obligation de contracter et les tentatives de réforme

caractérise par une offre de médecins ou de professionnels paramédicaux indépendants. Ils sont organisés au sein de la FMH, l’organisation faîtière des généralistes et des fournisseurs de prestations indépendants. La FMH est une organisation ancienne qui représente souvent toute la branche des fournisseurs de prestations. Le fort corporatisme du domaine ambulatoire a conditionné la mise en œuvre de la réforme sanitaire dès ses débuts, en raison des tentatives de réduire la liberté professionnelle des médecins. Dès l’introduction de la LAMal, la FMH a organisé à plusieurs reprises des manifestations de rue.

Malgré les discussions qui avaient fait échouer le projet de deuxième réforme partielle de la LAMal et malgré les oppositions des fournisseurs de prestations, la proposition de supprimer l’obligation de contracter a été reprise. Il s’agissait d’introduire un système dans lequel les fournisseurs de prestations ambulatoires se comportent en acteurs responsables et qui les pousse à offrir des prestations économiques. La libéralisation du marché ambulatoire ne devait toutefois pas prétériter à la qualité des services offerts.

Pour les réformateurs, le fonctionnement concurrentiel n'était possible que si les assureurs-maladies disposaient de la liberté de choisir avec quels fournisseurs de prestations conclure des contrats.52 Pour éviter tout arbitraire et toute sélection des risques, ce choix devait toutefois se baser sur des

critères de concurrence objectifs. La réforme prévoyait que les fournisseurs de prestations se soumettent à des règles spécifiques d’admission, de traitement et d’organisation.53 Les fournisseurs de prestations devaient ainsi être choisis d’après leur capacité à fournir «des prestations de qualité tout en veillant à leur caractère économique».54 Les critères d’économicité et de qualité étaient censés augmenter la transparence de l’offre et favoriser la concurrence. L’objectif des modèles complémentaires ou alternatifs était, comme aux Etats-Unis, de réduire les coûts des transactions, pour améliorer la coordination entre les fournisseurs de soins de santé, et d’améliorer la surveillance.55 Il s’agissait plus particulièrement d’introduire des instruments en mesure d’identifier ce que l’on appelait les «moutons noirs», qui ne respectaient pas les principes de base.56 Le projet de loi prévoyait un élargissement du catalogue des sanctions57 pour les fournisseurs qui dérogeraient aux principes.

53 Message du Conseil fédéraldu 15 septembre 2004 relatif à la révision partielle de la loi fédérale sur l’assurance-maladie (Managed Care), loc. cit., p. 15.

54 Message du Conseil fédéraln° 04.032, loc. cit., p. 4065.

55 D’après la citation entière, «vertical restraints can be efficiency enhancing by lowering transactions costs, assuring supply of an input, improving coordination between the firms, and improving monitoring», in WILLIAMSON O. E., "Transactions cost economics", in SCHMALENSEE R., WILLIG R. (eds.),

Handbook of Industrial Organization, Amsterdam, North-Holland, 1989, CARLTON D. W. PERLOFF J.M., Modern Industrial Organization, 2nd edn., New

York, Harper Collins, RIORDAN M. H., SALOP S. C., Evaluating Vertical

Mergers : A Post-Chicago Approach, unpublished manuscript, May 16th 1994 cités

par GAYNOR M., "Competition and Exlusive Dealing Between Health Insurers and Health Care Providers", in CHINITZ D., COHEN J. (eds.), Governments and Health

Systems : Implications of Differing Involvements, Chichester, Wiley, 1998, p. 228. 56 Message du Conseil fédéraln° 04.032, loc. cit., p. 4066.

Comme nous l’avons vu, dans les modèles alternatifs d’assurance les assureurs maladie négocient des contrats avec des fournisseurs de prestations, individuellement ou par groupes. Par rapport aux rapports bilatéraux existant normalement entre fournisseurs de prestations et assureurs, les modèles de «managed care» se basent sur des rapports contractuels spécifiques. Avec ces modèles, les assureurs-maladie peuvent choisir avec quels fournisseurs ou groupes de fournisseurs de prestations ils veulent contracter. Le choix des assureurs se fonde sur différents critères, comme la volonté d’assumer la responsabilité économique, la rémunération par le salaire et la certification de la qualité. Cela signifie que les assureurs- maladie pouvaient désormais conclure des contrats sélectifs avec les fournisseurs de prestations de leur convenance, dérogeant à l’obligation de contracter et expliquant en partie le succès mitigé, jusqu’à récemment, de l’adoption de ce modèle par les prestataires.

Les partenaires sont en particulier censés assumer la responsabilité économique,58 avec l’objectif d’améliorer la gestion des maladies et des cas et, par conséquent, de mieux contenir les coûts par des économies d’échelle. Il s’agit de mettre en œuvre un système d’approvisionnement piloté par les répondants des coûts, soit les assureurs-maladie, et où une partie du risque financier est reporté sur les prestataires.59 La participation à des réseaux de soins intégrés présuppose donc que les fournisseurs de prestations co- assument la responsabilité financière des soins médicaux prodigués. D’après ces modèles, le remboursement ne se fait plus à l’acte (service offert), mais

58 BAUMBERGER J., "Managed Care", loc. cit., pp. 219-228. 59BUCHS L., "Managed Care", loc. cit., p. 126 et p. 124.

par capitation (salaires), par forfaits préétablis (budget prospectifs), par personne assurée (par tête) et pour l’ensemble des prestations fournies.60

L’obligation de contracter et la liberté de choix des assurés-patients constituaient les principales limites à l’adoption des modèles de «managed care». Les prestataires ont dans un premier temps préféré rejoindre des réseaux, les «Independent Practice Associations» (IPAs), également appelés réseaux de médecins de famille, plutôt que des HMOs. En 2006, il y avait en Suisse 20 HMO et 53 réseaux de médecins de famille.61La situation a peu changé par la suite. En 2008, il y avait 25 HMO et 61 réseaux de médecins de famille.62 Du point de vue des fournisseurs de prestations, les modèles alternatifs d’assurance n’ont souvent pas été considérés comme des alternatives valides, du fait de la perte de la liberté professionnelle et des limitations découlant des modes de paiement proposés.63 L’augmentation du volume des prestations est une pratique qui a continué après l’introduction de la LAMal. Les fournisseurs de prestations ont néanmoins récemment changé leur attitude et leur intérêt pour rejoindre des modèles alternatifs d’assurance va croissant,64 en raison également des pressions politiques, pour régler efficacement la question de la hausse des coûts.

60 Message du 15 septembre 2004 relatif à la révision partielle de la loi fédérale sur l’assurance-maladie (Managed Care), loc. cit., p. 16 ; MOSER M., Managed Care,

loc. cit. ; voir également BAUMBERGER J., loc. cit., pp. 219-228. 61 Ibid., p. 222.

62BAUMBERGER J., "Soins gérés", in KOCHER G., OGGIER W. (éd.), Système de santé suisse 2010-2012. Survol de la situation actuelle, op. cit., p. 418.

63 Voir par exemple, BEGUIN M-L., Les Réseaux de santé, Institut de droit de la santé (IDS), Neuchâtel, Universié de Neuchâtel, cahier n° 8, décembre 1999. 64 DREIDING P., FRITSCHI J., "Warum Begriffe aus der Ökonomie uns Ärztinnen und Ärzte nicht erschrecken müssen!", in Schweiz Ärztezeitung, Vol. 87, n° 29/30, 2006, pp. 1315-1319.