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droits de la propriété

Chapitre 1 : Le végétal entre variété et invention

A. L’invention, objet du brevet

115. L’invention, objet du droit des brevets, est fort complexe. Le professeur Moles l’expose comme l’acte de produire par ses propres moyens un élément, un objet ou un processus original ; plus généralement, de produire ou de créer en utilisant son imagination160.

La syntaxe161 de l’invention est sujette aux confusions162. Si, dans le langage

commun, elle désigne une différence entre une création naturelle et une création

160 MOLES A., « INVENTION », Encyclopaedia Universalis.

161 La syntaxe désigne dans ce contexte la contradiction des postulats telle que définie par Karl Popper dans La logique de la découverte scientifique ; POPPER K., La logique de la découverte scientifique, Payot, 1995.

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intellectuelle, une proposition juridique est sujette aux nuances de la doctrine163. Une

constante est toutefois retenue : celle d’une création technique applicable à tout type

d’industrie (1). La variabilité des formes associées à l’invention est garantie par le principe

juridique de la non-discrimination. Le support matériel de l’invention se diversifie en

fonction des technologies disponibles. L’invention relève à la fois de l’inerte et du vivant (2).

1. La recherche d’une définition de l’invention

116. L’invention est une création intellectuelle dotée de caractéristiques techniques. L’idée est formulée à travers trois propositions (a). Comparée à la découverte, l’invention constitue une transformation de cette dernière qui permet de mettre en évidence une certaine application pratique (b).

a. La création technique

117. Une première proposition définit l’invention à travers la loi datant de l’année 1968. L’article 7 précise : « Est considérée comme industrielle toute invention concourant dans son objet, son application et son résultat, tant par la main de l'homme que par la machine, à la production de biens ou de résultats techniques ». Cette disposition lie l’essence d’une invention à son caractère industriel. La production d’un effet technique

issu de la nature et quel que soit le moyen utilisé, décline l’identité industrielle de

l’invention164. La réforme du 13 juillet 1978165 a substitué à cette formule l’expression

qu’une invention est « susceptible d’application industrielle ».

À ce propos, l’auteur166 explique que le caractère industriel qui faisait référence à la

fois à l’objet et à l’application se trouve dans la condition explicite, celle de l’application

industrielle, et dans sa définition propre à l’objet de l’invention. Une première proposition

inclusive fixe le champ, consiste à dire que la notion juridique de l’invention n’existe que

sur un plan industriel.

163 PY E., RAYNARD J., TREFFIGNY P., Droit de la propriété industrielle, 5e Edition, LexisNexis, 2016, n°43 ; GAUMONT-PRAT H., Droit de la propriété industrielle, 3e Edition, LexisNexis, 2017 ; TAFFOREAU P., MONNERIE C., Droit de la propriété intellectuelle, 4e Edition, Gualino, n°450, AZÉMA J., GALLOUX J-C , Droit de la propriété industrielle, Dalloz, 8e Edition, 2017, n°176 ; LE STANC C., « Et la propriété scientifique ? », Propriété industrielle, 2008.

164 PASSA J., Droit de la propriété industrielle, Tome 2, LGDJ, 2013, n°56.

165 La loi de 1978, mettant en conformité la loi française avec les Conventions de Strasbourgs et de Munich.

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118. La seconde proposition définit la notion par l’intermédiaire de la doctrine positiviste allemande. Mousseron le rappelle. L’invention est une solution technique à un

problème technique, réalisable grâce à l’usage de moyens répétitifs167. Il s’agit de créations

de l’intelligence qui aboutissent à un résultat technique concret car la simple idée ne suffit

à la définir168. La doctrine s’attache à un mode opératoire pragmatique de sorte qu’il y a

invention dès lors qu’il y a un processus intellectuel aboutissant à une innovation

émergeant des connaissances169. En ce sens, l’invention brevetable est celle qui enrichit

l’état de la technique170. La notion se caractérise par l’idée d’une matérialisation concrète

d’une ingéniosité171. Elle vise alors toute solution technique comme l’expose l’article 27 de

l’accord ADPIC : « …un brevet pourra être obtenu pour toute invention, de produit ou de procédé, dans tous les domaines technologiques… »

119. La troisième proposition définit l’invention par opposition aux textes relatifs aux exclusions. De sorte que l’invention représente « quelques chose qui va au-delà de l’abstraction »172. C’est donc une définition négative par l’énumération d’un certain

nombre d’éléments qui peuvent correspondre à des innovations mais qui sont exclus de la

brevetabilité.

b. L’invention au diapason de la découverte scientifique

120. Le traité de Genève sur l’enregistrement international des découvertes scientifiques adopté le 3 mars de 1978, définit la découverte scientifique comme « la reconnaissance de phénomène, de propriétés ou de lois de l’univers matériel non encore reconnus et pouvant être vérifiés »173. La distinction entre une invention et une découverte réside dans l’idée que celui qui découvre élargit la connaissance, car il observe, étudie,

expérimente, raisonne pour aboutir à la compréhension d’un phénomène174. Alors que celui

qui invente, suppose qu’au-delà de l’ajout informationnel, il enrichit l’état de la

167 MOUSSERON, Traité des brevets, Librairies techniques, 1984, n° 154.

168 TAFFOREAU P., MONNERIE C., Droit de la propriété intellectuelle, 4e Edition, Gualino, n°450.

169 VIVANT M., Le droit des brevets, Dalloz, 2005, n°23.

170 POLLAUD-DULIAN F. , La propriété industrielle, Economica, 2010, n°143.

171 GAUMONT-PRAT H., Droit de la propriété industrielle, 3e Edition, LexisNexis, 2017, n°74.

172 VIVANT M., Le droit des brevets, 2e Edition, Dalloz, 2005, n°22.

173 Article premier du traité.

174 Aux termes du premier article du traité de Genève, l’auteur d’une invention scientifique est défini comme « la personne physique qui a elle-même fait une découverte scientifique, par l’observation, l’étude l’expérimentation ou le raisonnement, d’une façon déterminante pour aboutir à sa reconnaissance… »

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technique175. L’invention, par opposition à la découverte, décrit l’intervention de

l’Homme, qui module l’état naturel des phénomènes pour produire176.

121. Le fait de trouver une substance auparavant non reconnue dans la nature

constitue une découverte et son objet n'est donc pas brevetable177. Toutefois, si un effet

technique est trouvé pour cette substance, l’objet peut être brevetable. C’est par exemple le cas d’une substance qui se trouve à l’état naturel et dont on découvre qu’elle a un effet

antibiotique. Un micro-organisme qui existe à l’état naturel et produit un antibiotique peut

lui-même être brevetable comme étant un des aspects de l’invention. Les découvertes

constituent un réservoir où chacun peut puiser pour développer une invention. La brevetabilité d’une découverte peut entraver le développement technique. C’est pourquoi,

une invention brevetable peut consister en un dispositif issu d’une idée dès lors qu’elle

prend une forme concrète dotée d’un caractère technique178. La comparaison est présente dans les travaux préparatoires à l’origine de la Convention sur les brevets européens en date de l’année 1973. Les retranscriptions de la séance du 3 Mai de l’année 1961 indiquent

que le brevet est un titre qui protège la réalisation d’une idée « sous certaines formes

susceptibles d’application industrielle »179.

122. Les découvertes180 constituent le support de l’invention. L’observation est justifiée au regard du processus incrémental du progrès. L’innovation dans le champ des biotechnologies végétales n’échappe pas à ce schéma. Elle est dépendante du travail

cumulatif de la recherche, source de la connaissance de base181. Elle revêt un caractère

séquentiel ; une nouvelle innovation ouvre la voie à des applications ultérieures qui

175 AZÉMA J., GALLOUX J-C, Droit de la propriété industrielle, Dalloz, 8e Edition, 2017, n° 208.

176 Tout comme l’a écrit Roubier « (…) l'invention consiste à produire de nouveaux effets techniques.

L'invention exige que l'homme participe à sa confection ou à sa réalisation : on ne peut inventer que ce qui n'existait pas. Dans l'invention seule, l'activité de l'homme est productive, dans la découverte elle est seulement, dit-on réceptrice », ROUBIER, La valeur des droits de la propriété industrielle, Litec, 2006,

p.122.

177 Exemple cité dans la jurisprudence de la chambre des recours techniques, 2013, p.17.

178 CLÉMENT-FONTAINE M., « L’exclusion des idées », VIVANT M. (dir), Les grands arrêts de la

propriété intellectuelle, 2e Edition, Dalloz, 2015, p. (43-54).

179 Document OEB, travaux préparatoires révision article 52 Convention sur les brevets européens 1973 séance BR 199/72, Bruxelles le 25 mai 1972.

180 Dans le cadre de ce paragraphe les découvertes font également référence aux connaissances.

181 HEISEY P-W, THIRTLE C., «Public Sector Plant Breeding in a Privatizing World», Resource Economics

Division Economic Reasearch Service, U.S. Departement of Agriculture.Agriculture Information, 2001 ;

TROMMETTER M., « Gestion collective et droits dans les biotechnologies : une analyse économique »,

Revue Lamy Droit de l'Immatériel, 2013 ; TROMMETTER M., « Propriété intellectuelle et organisation de la

recherche dans le secteur des semences » ; BLONDELS., LAMBERT-WIBER S., MARÉCHAL C. ( dir ),

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peuvent correspondre à des améliorations182. Les nouvelles innovations génèrent de

nouvelles connaissances et la création de l’innovation relève des connaissances et des

moyens disponibles.

2. Les propriétés de l’invention

123. L’article 27.1 de l’accord des ADPICS indique que : « Sous réserve des dispositions des paragraphes 2 et 3, un brevet pourra être obtenu pour toute invention, de produit ou de procédé, dans tous les domaines technologiques, à condition qu'elle soit nouvelle, qu'elle implique une activité inventive et qu'elle soit susceptible d'application industrielle. Sous réserve des dispositions du paragraphe 4 de l'article 65, du paragraphe 8 de l'article 70 et du paragraphe 3 du présent article, des brevets pourront être obtenus et il sera possible de jouir de droits de brevet sans discrimination quant au lieu d'origine de l'invention, au domaine technologique et au fait que les produits sont importés ou sont d'origine nationale». Le principe de non-discrimination écarte toute éventuelle discrimination envers n’importe quel domaine technologique. Toute matière peut ainsi servir de support à l’essence d’une invention (a). Dans le domaine de la génomique, l’affaire Relaxine explicite le lien entre l’essence de l’invention et son support génique (b).

a. L’indifférence

124. Le principe de non-discrimination consacré en droit international à l’article 27.1.94 de l’accord ADPIC, garantit la neutralité du support matériel de l’invention et interdit toute discrimination par le droit des brevets entre les différents domaines

technologiques. La disposition citée à l’article 70.8183 réaffirme la disponibilité et

182 « Un innovateur bénéficie des connaissances accumulées antérieures, tout en ne finançant que la partie

incrémentale des connaissances qu’il engendre…La production de connaissances bénéficie d’économies d’apprentissage …et l’innovation prend la forme d’une succession d’améliorations de qualité » écrit par

ENCAOUA D. et al., « Les enjeux économiques de l'innovation. Bilan du programme CNRS », Revue

d'économie politique, 2004.

183 Dans les cas où un Membre n'accorde pas, à la date d'entrée en vigueur de l'Accord sur l'OMC pour les produits pharmaceutiques et les produits chimiques pour l'agriculture, la possibilité de bénéficier de la protection conférée par un brevet correspondant à ses obligations au titre de l'article 27, ce Membre: a) nonobstant les dispositions de la Partie VI, offrira, à compter de la date d'entrée en vigueur de l'Accord sur l'OMC, un moyen de déposer des demandes de brevet pour de telles inventions; b) appliquera à ces demandes, à compter de la date d'application du présent accord, les critères de brevetabilité énoncés dans le présent accord comme s'ils étaient appliqués à la date de dépôt de la demande dans ce Membre ou, dans les cas où une priorité peut être obtenue et est revendiquée, à la date de priorité de la demande; et c) accordera la protection conférée par un brevet conformément aux dispositions du présent accord à compter de la délivrance du brevet et pour le reste de la durée de validité du brevet fixée à partir de la date de dépôt de la

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l’exercice du droit des brevets pour les produits pharmaceutiques, les produits chimiques et pour l’agriculture. En droit européen, elle a été intégrée au sein de l’article 52 de la Convention sur les brevets européens à la suite de la modification intervenue le 29 novembre 2000 : « Les brevets européens sont délivrés pour toute invention, dans tous les domaines technologiques, à condition qu'elle soit nouvelle, qu'elle implique une activité inventive et qu'elle soit susceptible d'application industrielle ». Cette dernière disposition est reprise à l’article L.611-10 du Code de la propriété intellectuelle français.

125. En vertu de ce principe, l’invention brevetable est indifférente au domaine technologique, c’est-à-dire qu’elle est extensive à toute forme de matérialité et de

technologie184. Le principe de non-discrimination impose une égalité de traitement des

inventions et assure le caractère unitaire du droit des brevets. L’élément inventif peut-être

associé à une matière inerte ou à une matière biologique. De la même manière, la matière biologique peut correspondre à une copie d’un élément naturel ou à un élément naturel modifié.

126. La diversité des supports matériels est garantie par le principe de

non-discrimination sous réserve des exclusions de la brevetabilité. L’accès à toutes les possibilités inventives est traduit dans une notion ouverte englobant les techniques

disponibles. Dans cette orientation, le droit des brevets recouvre trois natures d’objets :

l’invention inerte, l’invention génétique native et l’invention génique modifiée. Au surplus, la qualité, l’intérêt économique, les difficultés, la complexité et inversement la simplicité de sa mise en œuvre ne doivent pas être pris en considération dans l’interprétation de la

notion de l’invention185. Le principe de non-discrimination réserve une interprétation

ouverte de la notion d’invention.

demande conformément à l'article 33 du présent accord, pour celles de ces demandes qui satisfont aux critères de protection visés à l'alinéa b).

184 ABOUKRAT A., La protection juridique des inventions en biotechnologies humaines, approche

comparative en Europe, en France et aux États-Unis, Thèse de doctorat, NOIVILLE C., ROCHEFELD J.

(dir), Université Paris 1, 2015, p. (43-46).

185 En outre, ni le mérite, la qualité l’importance ou la valeur de l’invention, les difficultés de sa mise au moins ou l’inverse la simplicité, l’intérêt économique qu’elle présente, le caractère imparfait des résultats ne doivent pas être pris en compte voir dans ce sens, POLLAUD-DULIAN F., La propriété industrielle, Economica, 2010, p.143.

71 b. L’invention génique

127. Le brevet en litige dans la présente affaire186 a pour titre « clonage moléculaire et caractérisation de la séquence codant pour la relaxine humaine ». La relaxine humaine est une hormone qui relâche l’utérus durant l’accouchement. L’invention est la production de l’hormone à des fins thérapeutiques. Afin d’atteindre ce résultat, le brevet propose une méthode permettant d’isoler, de purifier, de cloner et de faire exprimer la séquence

nucléotidique, qui fut modifiée pour les besoins expérimentaux187.

Le recours en opposition arguait notamment que les revendications relatives aux séquences d’ADN telles qu’elles sont présentées dans le corps humain violent l’exclusion prévue à l’article 53 au motif qu’elles soulèvent un désaccord éthique justifié au regard de

l’ordre public et des bonnes mœurs188. À ce propos, la décision précise « qu’un élément

isolé du corps humain ou autrement produit par un procédé technique, y compris la séquence ou la séquence partielle d'un gène [....], même si la structure de cet élément est identique à celle d'un élément naturel », peut constituer une invention brevetable189. La séquence revendiquée est différente de la séquence présente à l’état naturel. De plus, elle a été modifiée. Il découle de cette interprétation que l’objet de l’invention n’est pas exclu de la brevetabilité ainsi que le support génique et pour le cas présent, un ADN recombinant correspondant en partie à la séquence dont il dérive.

128. Suivant ce raisonnement, le titulaire du brevet n'est pas propriétaire au sens

propre du terme de la séquence génétique native. Les droits conférés par le brevet portent sur l'invention et non sur l'objet corporel, le gène natif dont elle use. Le brevet n'est pas un droit d'appropriation d’un élément participant au programme biologique, ni une aliénation

ou un transfert de propriété d’une entité organique ; celui-ci ne devient aucunement objet

de commerce. C'est tout au plus un droit d'appropriation immatériel qui confère un droit d'exploiter l’invention en question pendant un temps limité. Le brevet porte donc sur une

186 OEB, Chambre des recours techniques, T 272/95, 15 avril 1999, JO 1999, 590.

187 Brevet : EP0112149 B1.

188 L’ordre public et les bonnes mœurs ont pour fondement, pour le cas présent, le principe de non patrimonialité du corps humain et de ses éléments, voir en ce sens GAUMONT-PRAT H., « Brevetabilité du vivant : animal, végétal et humain application du droit des brevets aux inventions biotechnologiques »,

JurisClasseur Brevets, Fascicule 4241, 2015, n° 30.

189 Le raisonnement s’appuie sur la règle 23 sexies(2) CBE 1973 (nouvelle règle 29(2) CBE) afin d’interpréter l’exclusion prévue à l’article 53, relative aux bonnes mœurs et l’ordre public. Règle 29(2) CBE « un élément isolé du corps humain ou autrement produit par un procédé technique, y compris la séquence

ou la séquence partielle d'un gène, peut constituer une invention brevetable, même si la structure de cet élément est identique à celle d'un élément naturel. ».

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invention, l’effet technique dérivé de l’expression du gène et non de l’objet chose corporel. L’invention est l’effet obtenu au moyen de la séquence. Les séquences génétiques formant l'essentiel d'une invention brevetée ne sont donc pas appropriées en tant que telles. Par ailleurs, le brevet d’invention concerne le gène humain, ou des séquences génétiques, jamais l’ensemble du génome d’une part, et l’invention relève d’une copie de l’ADN

génomique d’autre part.

La séquence brevetée, même similaire en partie à la séquence génomique, est

obtenue par des moyens technologiques. Elle correspond à une reproduction modulée d’un

élément naturel. L’argument évoqué retrouve ses limites. Une invention relevant de la matière génique n’est pas un objet immatériel qui désigne l’application industrielle d’un élément de la matière. La dissociation entre la séquence et l’effet est incongrue. Cette interprétation, fictive et propre au droit des brevets, s’affranchit d’un postulat scientifique. L’effet allégué est intrinsèquement lié à la séquence. En ce sens, l’essence de l’invention est substantiellement liée à la matière qui en est le support.

B. La technicité

129. Le paragraphe 1 de l’article 52, indique que : « Les brevets européens sont délivrés pour toute invention dans tous les domaines technologiques, à condition qu'elle soit nouvelle, qu'elle implique une activité inventive et qu'elle soit susceptible d'application industrielle ». L’interprétation du texte relatif à l’article 52 de la CBE, dénote une

condition pour la définition de l’invention déduite du postulat même de l’invention (2). Les

décisions de l’Office européen des brevets reconnaissent que la technicité est un caractère fondamental pour définir les contours de l’objet de la Convention. L’examen de la brevetabilité requiert au préalable la vérification du caractère technique de l’invention (1).

1. La condition explicite

130. L’Office européen des brevets considère que le caractère technique est une

condition implicite au sens de l’article 52 (1) de la Convention sur les brevets européens

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l’Union européenne contractants de la Convention. La jurisprudence des États contractants

reconnaît que la technicité est exigée pour la brevetabilité d’une invention190.

Toutefois, il faut souligner que la spécificité de l’Office est qu’il prescrit une

condition présentée comme sine-qua-non191qui s’inscrit dans une démarche progressive

pour l’examen de la brevetabilité.

131. Après avoir vérifié que la demande ne concerne pas des éléments exclus de la

brevetabilité, l’objet de la revendication considéré dans son ensemble, est mis à l’épreuve

du caractère technique192. Pour qu’une invention brigue la propriété intellectuelle par

brevet, il faut qu’elle soit d’abord appréciée comme étant porteuse d’une caractéristique

technique193. Ensuite, il convient de l’évaluer au regard des trois autres conditions.

« L’invention se conçoit comme un résultat technique inhérent à l’objet revendiqué indépendamment de l’état de la technique et potentiellement brevetable s’il répond aux trois conditions »194. La vérification de cette caractéristique s’effectue de manière autonome. L’examen ne se réfère pas à l’état de la technique, comme c’est le cas pour

l’activité inventive195. La détermination du caractère technique n’est pas tributaire d’une

quelconque contribution de l’invention à l’état de la technique. La Convention sur les

brevets européens ne prévoit ni explicitement, ni implicitement, l’exigence d’un progrès

technique ou même d’un effet utile apporté par l’invention par rapport à l’état de la

technique196. Ces avantages sont importants pour l’appréciation de l’activité inventive.

L’appréciation de cette condition est indépendante des conditions de brevetabilité197

190 TPICE, 5 octobre 1988, affaire T 22/85, « Résumé et recherche de documents / IBM », JO OEB, 1990, p.