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CHAPITRE 1 PROBLÉMATIQUE GÉNÉRALE

2.1 PROBLÉMATIQUE SPÉCIFIQUE

2.1.1 Gestion de la chaîne d’approvisionnement

2.1.1.2 L’intégration comme facilitateur de la SCM

Dans le contexte économique actuel caractérisé par la globalisation des marchés, l’accroissement des variantes de produits, la réduction du cycle de vie des produits et la nécessité sans cesse croissance d’améliorer le service à la clientèle, l’intégration de la chaîne d’approvisionnement se révèle aux yeux de nombreux praticiens et académiciens comme un facteur déterminant pour la création de la valeur (Mitra et Singhal, 2008; Sahin et Robinson, 2005; Watson et Zheng, 2005; Kulp et al., 2004; Frohlich et Westbrook, 2001). Selon Frohlich et Westbrook (2001), le contexte est tel que les entreprises qui réussiront seront celles qui parviendront à intégrer leurs processus intra-organisationnels essentiels à la fois à ceux de leurs clients et aux processus clés des fournisseurs.

C’est également la thèse défendue par Kalakota et Robinson (1999) et Christopher (1992), lesquels suggèrent que l’intégration des processus d’affaires clés (intra- et inter-organisationnels) aux flux d’informations entre les acteurs d’une chaîne d’approvisionnement peuvent donner lieu à des améliorations importantes, y compris l’obtention d’un avantage concurrentiel et la réduction des coûts opérationnels. De manière générale, l’intégration de la chaîne d’approvisionnement est l’objectif central d’une gestion efficiente de celle-ci (Roy et al., 2006). Toutefois, elle exige une meilleure coordination et une meilleure collaboration entre les différents acteurs de la chaîne (Gosain et al., 2005). Ces exigences prennent toute leur importance dans le contexte actuel de l’économie numérique où la réalisation d’un avantage concurrentiel durable dans une chaîne

d’approvisionnement dépend de la capacité des acteurs impliqués à identifier rapidement les ressources nécessaires à leur fonctionnement, et de la nécessité de les coordonner efficacement à travers toute la chaîne (Wang et al., 2007). Grâce à une meilleure intégration de la chaîne d’approvisionnement, les acteurs de celle-ci peuvent rapidement redéployer les activités à valeur ajoutée tout au long de la chaîne afin d’éliminer les redondances entre les différents acteurs de celle-ci (Christopher, 1998), réduire les inventaires et l’incertitude liée à la demande des clients, accroître les ventes et la flexibilité organisationnelle (Fisher, 1997; Lee et al., 1997). Par exemple, en l’absence de toute intégration inter-organisationnelle, chaque acteur de la chaîne tente, chacun à son niveau, de prédire les besoins de l’échelon suivant, ce qui introduit des variations pouvant accroître « l’effet coût de fouet » à l’intérieur de la chaîne (Roy et al., 2006). De manière générale, l’intégration organisationnelle a un impact positif sur les performances de celle-ci (Sanders, 2007).

La collaboration qui, selon le dictionnaire Larousse, est « l’action de travailler avec d’autres à une œuvre commune » est d’une importance considérable pour l’intégration d’une chaîne d’approvisionnement. Elle peut se faire soit avec les clients, soit avec les fonctions internes de l’entreprise focale et les fournisseurs (Barratt, 2004). En général, la collaboration entre les fonctions internes de l’entreprise focale permet de briser l’approche de gestion en sillon, et donc de faciliter l’intégration intra-organisationnelle. Toutefois, toute stratégie d’intégration intra- organisationnelle doit s’insérer dans une perspective plus large d’intégration avec les autres acteurs de la chaîne d’approvisionnement. Toute son importance est mise en exergue par Barratt (2004) quand il note: « internal collaboration must be married with external collaboration, in

terms of developing closer relationships, integrating processes and sharing information with customers and suppliers. In other words internal integration must be aligned with the drivers and constraints of the rest of the supply chain » p. 33. À ce sujet, Parks (1999) estime qu’entre 200 à

300 milliards de dollars d’excès d’inventaires et de pertes de ventes peuvent être éliminés grâce à une meilleure collaboration entre les partenaires d’affaires des differentes industries aux États- Unis.

Les acteurs impliqués dans une stratégie d’intégration de la chaîne d’approvisionnement doivent décider du type d’intégration souhaitée et de l’étendue de cette intégration. Plusieurs nomenclatures d’intégration de la chaîne d’approvisionnement existent. Par exemple,

Themistocleous et al. (2004) distinguent : (i) l’intégration de la chaîne d’approvisionnement de type « lâche », qui est surtout dominée par des échanges d’information entre les acteurs de la chaîne, et (ii) l’intégration « serrée » caractérisée par un niveau plus élevé d’interdépendance des processus inter-organisationnels et de communications synchronisées entre les acteurs d’une même chaîne d’approvisionnement.

Fabbe-Costes (2007), quant à elle, propose que l’on fasse la distinction entre le choix des couches à intégrer et l’étendue de l’intégration souhaitée. Pour elle, il existe quatre couches interdépendantes d’intégration possibles (Tableau 2.2) et cinq niveaux d’intégration distincts qui seront présentées dans les sections ci-dessous.

Tableau 2.2: Types d’intégration à considérer dans la gestion de la chaîne d’approvisionnement

Type de couche

d’intégration Caractéristiques de la couche d’intégration

Flux Fluidité et continuité, pertinence des flux physiques, informationnels et financiers, individuellement et de manière conjointe. Processus et

activités Synchronisation des opérations pour chaque processus clé, cohérence entre les processus opérationnels clés, intégration des processus au niveau opérationnel, organisationnel et stratégique.

Systèmes et

technologies Interopérabilité et interconnectivité des systèmes et technologies physiques et d’information, individuellement et de manière combinée. Acteurs Interaction, coordination et collaboration des individus, des équipes,

des fonctions et des entreprises ; communication, travail collaboratif et interfaces communicationnelles.

Source: (Fabbe-Costes, 2007)

La couche d’intégration des flux physiques, financiers et d’information

Celle-ci peut se faire de manière individuelle ou conjointe. Quoi qu’il en soit, il est souhaitable de les réaliser conjointement. Par exemple, une meilleure intégration des flux d’informations peut renforcer la gestion des flux physiques et optimiser les flux financiers qui, en fin de compte, serviront de preuve à la création de la valeur à l’intérieur de la chaîne d’approvisionnement. La couche d’intégration des processus et des activités

Elle permet, par exemple, de synchroniser les opérations concernant la conception, la production, la distribution et le recyclage du produit. Cette couche d’intégration peut jouer un rôle de facilitateur de la mise en œuvre des stratégies de production juste à temps.

La couche d’intégration des systèmes et des technologies

Elle est considérée comme une composante importante dans la gestion de la chaîne d’approvisionnement (Lambert et al., 1998). Celle-ci permet de réaliser l’interconnectivité et l’interopérabilité des technologies et des systèmes utilisés à l’intérieur de la chaîne d’approvisionnement. L’intégration des systèmes et des technologies exige une grande communication, une capacité à travailler ensemble et la mise en place des interfaces communicationnelles standardisées entre les différents acteurs de la chaîne (Barratt, 2004).

La couche d’intégration des acteurs de la chaîne d’approvisionnement

Elle permet de définir et mettre en œuvre les interactions, la coordination, la collaboration et la coopération entre les individus, les équipes et les fonctions impliquées dans la gestion de la chaîne d’approvisionnement au niveau intra- et inter-organisationnel.

Le niveau d’intégration intra-organisationnelle

Ce niveau d’intégration est le premier stade d’intégration de la chaîne d’approvisionnement et concerne les acteurs internes à chaque organisation impliquée dans la gestion de la chaîne d’approvisionnement (ex. marketing, production et logistique).

Le niveau d’intégration inter-organisationnelle limitée

Ce niveau d’intégration se rapporte aux partenaires directs (les fournisseurs ou les clients de niveau 1) d’une entreprise focale de la chaîne d’approvisionnement et a souvent été implantée en utilisant une approche dyadique dans la chaîne d’approvisionnement (Håkansson et Persson, 2004).

Le niveau d’intégration inter-organisationnelle étendue

Il concerne l’ensemble des acteurs de la chaîne d’approvisionnement (directe et inverse). La désignation de ce niveau d’intégration varie selon les auteurs. Par exemple, Håkansson et Persson (2004) et Harland (1996) parlent de chaîne d’approvisionnement externe tandis que pour Mentzer et al. (2001), on a affaire à un niveau d’intégration de chaîne d’approvisionnement étendue. Le niveau d’intégration multi-chaînes ou l’entreprise réseau

Ce niveau d’intégration s’intéresse à l’ensemble des chaînes d’approvisionnement auxquelles participe une seule organisation et correspond à ce que Håkansson et Persson (2004) appellent « inter-business network », et Lefebvre et al. (2001) l’entreprise virtuelle, qui est une entité

hautement performante regroupant des fournisseurs, clients et concurrents afin de réaliser un produit et /ou un service.

Le niveau d’intégration sociétale

Ce niveau d’intégration est en pleine expansion et vise à intégrer les préoccupations sociales et environnementales des clients finaux dans la gestion de la chaîne d’approvisionnement. Il vise également à développer de nouveaux produits et processus à valeur ajoutée, tant pour le client que pour la firme, tout en minimisant de manière significative les impacts sur l’environnement. La matérialisation de cette intégration passe par exemple par l’utilisation des matériaux recyclables dans le processus de développement de nouveaux produits.

En définitive, il est possible de constater que les stratégies d’intégration d’une chaîne d’approvisionnement dépendent de plusieurs facteurs parmi lesquels la collaboration entre les acteurs de la chaîne, le choix du type d’intégration et du niveau de l’étendue de l’intégration de la chaîne. Dans le contexte actuel de l’économie numérique et de la mondialisation des marchés, les entreprises explorent, analysent et implantent les technologies susceptibles de les aider à réaliser les deux dimensions importantes suivantes au niveau de la chaîne d’approvisionnement : (i) l’intégration des processus clés intra- et inter-organisationnels et (ii) l’intégration des interfaces des systèmes présents dans la chaîne. L’objectif est de faciliter les flux informationnels et réaliser ainsi l’intégration des données au niveau de la chaîne d’approvisionnement (Gulledge, 2006), condition sine qua non de réalisation d’avantages concurrentiels durables. C’est dans ce continuum que naît l’engouement qu’on observe actuellement pour la technologie RFID et le réseau EPC.