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Le rôle joué par le vent sur les Monts du Forez est un facteur prédominant dans le climat qui règne sur les parties sommitales du massif. En effet, le vent influence largement les températures ressenties. L’effet du vent est particulièrement visible durant l’hiver, notamment en raison des températures glaciales qu’il induit, des congères formées par le vent, ainsi que le givre qu’il donne. Un rapide aperçu des roses des vents en trois points différents (plaine, massif, crêtes du Forez) montre une variabilité très significative de la répartition de la direction des vents durant l’année ainsi que leur intensité.

Il est donc nécessaire d’étudier l’effet local du vent, bien que les stations météorologiques ne semblent pas donner des directions parfaitement représentatives des conditions régnant au Col de la Chamboite et à Pierre-sur-Haute. En raison de leurs positions respectives par rapport au relief local, ces stations semblent fortement influencées par les reliefs environnants, au même titre que pour les précipitations (qui dépendent en partie du vent). On observe alors de fortes disparités tant en terme d’intensité et de direction entre les trois stations étudiées : le Col du Béal, Chalmazel et Andrézieux-Bouthéon (Cf. Figure 14 en début de chapitre pour localisation).

Une variabilité régionale due aux reliefs régionaux

L’étude de la répartition des vents à Andrézieux-Bouthéon, dans la plaine du Forez, constitue une des rares études complètes du vent et de la météorologie dans la région, réalisée par J.-B. Suchel [Suchel, 1984]. L’avantage de ce travail est de présenter les données de nombreuses années. L’inconvénient est que la station étudiée est située en plaine et à une distance pouvant altérer à première vue la représentativité des conditions rencontrées sur les Hautes Chaumes. Il ressort de cette étude que ce sont les directions NNW et SSE qui se détachent nettement au cours des années, avec respectivement 16,3% et 17% des fréquences couvertes par ces deux secteurs (Cf. Figure 22).

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Figure 22 : Rose des fréquences des vents selon les directions à Bouthéon (1948-1965), d’après J.-B. Suchel [Suchel, 1984].

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Concernant les vitesses, l’auteur observe deux périodes dans l’année où les vents sont les plus forts (vitesse supérieure ou égale à 16m/s) : le début et la fin de la saison froide avec en particulier avril. Des vents puissants en début de saison froide sont intéressants en ce qui concerne le début de formations des congères. Celles qui sont observables en début de saison froide (décembre) au Col de la Chamboite semblent plus souvent orientées derrière des obstacles et formées par des vents de secteurs WNW plutôt que NNW. Il en va de même le plus souvent pour la grande congère de la Chamboite et sa corniche qui se forment au cours des mois de décembre, janvier et février. Le givre semble être également un bon indicateur des derniers jours de vent selon son orientation. Cependant, certaines évolutions de la corniche sont observables durant les mois de février-mars avec une incurvation (surtout sur l’extrémité Nord de la congère) s’alignant perpendiculairement à un vent venant du NW plutôt que du WNW. Cette incurvation de la partie Nord de la corniche a été particulièrement visible pendant les hivers 2009-2010 et 2012-2013. On en déduit alors qu’au niveau du Col de la Chamboite, le vent est le plus souvent de secteur WNW, pouvant aller jusqu’à NW. Il faut noter aussi la présence d’un couloir guidant le vent jusqu’au col de la Chamboite, orienté WNW et qui doit surement avoir une influence sur les vents au col. Les vents du Nord sont également modifiés localement par les sommets que l’on rencontre entre le Col du Béal et le Col de la Chamboite. On peut donc en déduire que même si la station d’Andrézieux-Bouthéon est relativement éloignée des reliefs des Monts du Forez, elle présente une assez bonne représentativité des vents dominants d’après les observations faites au niveau du Col de la Chamboite. Elle semblerait finalement assez détachée de l’effet de la chaine du Forez sur le vent, malgré le possible effet couloir de la plaine du Forez et des reliefs environnants, qui doit probablement réorienter les flux selon l’axe de la plaine (NNW-SSE).

Une variabilité locale due aux reliefs locaux

Si l’on considère les données de la station météorologique de Chalmazel, utilisée largement pour ce travail de thèse en raison de sa proximité avec le site d’application et le nombre de paramètres disponibles, les observations sont radicalement différentes (Cf. Figure 23 et Annexes C10). Toutefois, les données utilisées ne comprennent que la période comprise entre juin 2006 et juin 2012.

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Figure 23 : Rose des fréquences de vent cumulées par classes de vitesses selon les directions moyennes journalières (juin 2006 à juin 2012), d’après les données Météofrance de la station de Chalmazel MF42039003.

Sur les six dernières années, les vitesses de vent apparaissent comme plus faibles et les directions orientées unilatéralement dans un cadran SW. Les vitesses observées suggèrent une situation relativement abritée du village de Chalmazel. Cette tendance semble confirmée par l’étonnant groupement des directions. En effet, la station météo de Chalmazel est située dans l’alvéole géomorphologique de Chalmazel, ce qui l’abriterait des secteurs autres que ceux compris entre le Sud et l’Ouest. Si l’on compare avec les secteurs dominants observés à Andrézieux-Bouthéon et le Col du Béal, on peut dire que la situation géomorphologique de Chalmazel l’abriterait principalement des vents de secteurs S-E, N-W et N-E. La station de Chalmazel présente donc des vents non représentatifs du site d’application, mais on peut faire l’hypothèse que l’influence du vent sur les précipitations y est plus faible qu’au Col du Béal. Chalmazel recevrait alors des précipitations encore peu affectées par les effets éoliens, contrairement aux crêtes.

En ce qui concerne la station du Col du Béal, la période utilisée est la même que pour celle de Chalmazel, soit du 01/06/2006 au 01/06/2012. On retrouve le secteur dominant SSW de la station de

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Chalmazel. La fréquence des vents de SW est encore plus visible. Un secteur NE vient de plus s’ajouter avec près de 25% en termes de fréquence sur la période considérée (Cf. Figure 24 et graphique vitesse moyenne journalière du vent au col du Béal en Annexes C10).

Figure 24: Rose des fréquences de vent de vent cumulées par classes de vitesses selon les directions moyennes journalières de juin 2006 à juin 2012, d’après les données Météofrance de la station du Col du Béal MF63384001.

On remarquera la puissance des vents par rapport à ceux observés à Chalmazel, avec des maxima supérieurs à 10m/s et fréquemment supérieurs à 8m/s. Une fois ces vitesses élevées constatées, on peut se poser des questions à propos des directions, diamétralement opposées à celles observées dans la plaine à Andrézieux-Bouthéon. A l’instar du Col de la Chamboite, le Col du Béal présente une aérodynamique spécifique susceptible de perturber les mesures anémométriques. En effet, la station est située au Sud-Est d’un mont (Roche Courbe) et se trouve dans un couloir orienté NE-SW. Le mont de Roche Courbe abriterait la station des vents provenant du NW, alors qu’ils sont fréquemment observés au Col du Béal (qui n’est qu’à deux kilomètres au Sud), grâce aux « marqueurs » comme les congères, le givre mais aussi la végétation qui reflètent les directions empruntées par le vent.

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De plus, la station a été déplacée pendant l’intervalle de mesure, ce qui ne va pas dans le sens de la fiabilité des données mesurées. La distribution quasi-exclusivement orientée selon un axe NE-SW est sans doute à relier avec le couloir de la même orientation. L’absence de vent dans le cadran Sud-Est s’explique probablement par le dôme formé par le sommet de Peyre Mayou au Sud et plus généralement au Sud-Est. La distribution des vitesses parallèlement à l’axe du couloir peut également faire douter sur la possible accélération de l’air induite par effet Venturi. Pourtant, des observations sur le terrain au niveau de Peyre Mayou confirment localement, d’après l’orientation de congères d’obstacles, une mesure cohérente des directions de vents locaux. Ce n’est par contre pas le cas de ceux observés au Col de la Chamboite, se rapprochant des mesures enregistrées dans la plaine.

On remarque donc une variabilité importante des vents, tant en terme de directions que de vitesses, induite par le relief. Si les marqueurs observés sur le terrain donnent une direction relativement précise des derniers jours de vent, on se trouve dans la situation délicate de ne pas pouvoir se fier aux mesures des stations météorologiques et de ne pas pouvoir non plus faire une acquisition en continu fiable. Le secteur dominant au Col de la Chamboite sera donc fixé entre l’WNW et le NW, d’après les différentes observations évoquées précédemment, bien que d’autres directions soient observées. Pour ce qui concerne les vitesses, on se contentera de noter que la formation des congères est principalement due à des phénomènes de reptation et surtout de saltation des cristaux de glace de neige transformés (Cf. Figure 17).

L’influence des vents sur les précipitations est sensible à grande échelle, notamment régionale. Par exemple, dans le cas où une masse d’air provenant du Nord rencontre des reliefs qui se dressent selon une direction perpendiculaire, l’effet de barrière sur les nuages sera augmenté, ce qui provoque de fortes précipitations. On peut citer l’épisode du 17/04/2012 où près d’un mètre de neige tombe sur le Pilat alors que les Monts du Forez ne reçoivent que quarante centimètres en raison d’une masse d’air provenant du NNE.

A l’échelle locale, les vents, et par conséquent les précipitations, sont affectés par les variations locales et régionales des reliefs. Dans le cas du Lignon, le bas du bassin présentera des précipitations proches de celles observées à Andrézieux-Bouthéon. Il n’en est pas de même sur les reliefs des Monts du Forez où les précipitations sont déjà plus fortes en raison de l’effet de barrière des reliefs. A l’échelle très locale, l’effet Venturi lié aux couloirs renforce encore les effets du vent sur les précipitations liquides et solides. Cet effet est encore plus remarquable sur les précipitations solides, beaucoup plus facilement remobilisables une fois tombées au sol. L’apport d’eau lié au vent peut devenir alors très important localement, comme dans le cas d’une congère. Sur une année complète, on atteindra alors des valeurs de précipitations pouvant être jusqu’à deux fois plus importantes sur une zone protégée pouvant abriter une congère pendant l’hiver. Pour un même vent dominant, ce site

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reçoit en effet l’effet très local du vent sur les précipitations solides (congères) et l’effet du vent local sur les précipitations liquides.

En revanche, une zone particulièrement exposée au vent présentera des précipitations liquides probablement plus importantes en période chaude alors qu’elles seront plus faibles dans le cas de précipitations solides durant l’hiver, en raison de la déflation.

D’autre part, le vent a également un rôle significatif dans la fonte de la neige. S’il est capable de faire baisser les températures ressenties, il est un des outils les plus efficaces pour faire fondre le manteau neigeux, en particulier dans le cas d’un vent du Sud relativement chaud. En effet, le vent pénètre dans le manteau neigeux, faisant rentrer d’autant plus la chaleur entre les cristaux. Ce phénomène est presque plus efficace qu’une journée ensoleillée puisque la masse de froid du manteau neigeux est alors affectée en profondeur par la chaleur de l’air, ce qui est moins le cas avec l’effet de l’ensoleillement seul en raison du pouvoir isolant de la neige. De plus, l’évaporation est d’autant plus importante quand l’air circule.

Les principales congères se formant dans des dépressions à l’abri des vents NW, les accumulations neigeuses se retrouvent d’autant plus exposées lors d’un épisode de vent du Sud. Ceci renforce l’effet de « fonte différentielle » liée à l’épaisseur de neige, sachant que les accumulations résistent tout de même mieux à la fonte en raison de leur volume, et apportent de l’eau sur une plus longue période.