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L’expression « gestion différenciée » : racine et nuance

PARTIE 1 : ARTICULATION DE LA NOTION DE « SAUVAGE » DU CONCEPT DE

2. Perception et représentation affinée de la gestion différenciée

2.1. L’expression « gestion différenciée » : racine et nuance

Peut-on laisser la nature sauvage se développer dans des interstices urbains, sans intervention humaine ? Cette idée s’est développée dans les parcs et jardins en ville, mais son application dans les autres espaces publics comme trottoir, cheminement, pied d’arbres, etc., semble plus délicat. Au regard des perceptions et représentation, mais également par contraintes de sécurité et d’accessibilité. Cependant la gestion différenciée ou écologique de ces espaces fait partie des objectifs de lutte contre la dégradation de la biodiversité (Marc

BARRA, 2012). Cette gestion des espaces publics ne se fait pas sans résistances culturelle,

car elle implique nos perceptions, nos codes esthétiques et nos habitudes (Jean-Claude

GENOT, 2008)

La gestion différenciée est apparue lors du colloque de Strasbourg en 1994, qui rassemblait les idées et les expériences en gestion écologique des espaces verts. Maintenant, les villes sont plus en plus préoccupées par leur environnement et mettent en place des politiques de gestion écologique des espaces verts, afin d’optimiser les différents moyens du Service et les aspects environnementaux

La gestion différenciée est un modèle appliqué pour la gestion des espaces verts, mais peut également être appliqué dans tout espace public qui demande de l’entretien. Cette pratique demande des modifications des pratiques et une adaptation du regard sur la nature urbaine, car nous passons de la maîtrise du vivant à l’accompagnement de la nature, voire même aux aménagements naturels. Elle est aussi appelée gestion écologique, gestion raisonnée ou durable (Laure CORMIER, Marek KENDEREV, 2013). Elle consiste depuis le 1er janvier 2017 (loi Labbé) à interdire aux collectivités territoriales, aux établissements publics et à l’Etat l’utilisation des produits phytosanitaires sur le domaine public (espaces verts, forêts, promenades, espaces accessibles ou ouverts au public), à utiliser des plantes locales et mettre en place une gestion hiérarchisée des espaces verts (et espaces publics) à l’aune de leur localisation et de leur « prestige » (Anna ROUADJIA, 2017). Nous allons observer différents types d’entretiens qui passent de soigné et esthétique, à une gestion alternative, pour un aspect champêtre, et même naturel. Cette gestion une fois mise en place est suivie et peut être réajustée, ce qui donne une méthode évolutive et adaptative, en accord avec les axes du plan Ecophyto II.

Figure 33 : Code appliqué aux sites définis par l'intervention préalable © (I. kozlik, 2010)

C’est dans les années 1970’, que le mouvement de « retour à la nature » se développe. D’abord à Paris, Orléans et Rennes, qui sont les villes pionnières dans cette discipline. C’est lors d’un colloque à Rennes en 1993, que le terme « gestion différenciée » est officialisé. (Laëtitia GENDRY, 2014). C’est à partir de là que tout a commencé, et que cette pratique s’est standardisée dans de nombreuses villes.

Mais on remarque qu’il n’y a pas de définition « propre » à la notion de « gestion différenciée », chaque acteur qui l’utilise l‘interprétant à sa façon.

Nous allons tout d’abord nous référer aux définitions du CNRTL (Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales) en séparant les deux termes :

- Gestion : « Action de diriger un service ou d’assurer une fonction effective » - Différenciée : « Distinguer en faisant ressortir les différences »

Elle désigne donc une action permettant de faire ressortir les différences, mais cette première définition ne nous donne pas le domaine précis de l’action. Je me suis donc référée à la définition de la « Mission Gestion Différenciée », pour en obtenir une plus précise et faire ressortir les objectifs de cette notion.

« La Gestion Différenciée fait évoluer le modèle horticole standard en intégrant à la gestion des espaces verts un souci écologique. Elle permet de gérer au mieux le patrimoine vert d’une ville avec des objectifs précis et en tenant compte des moyens humains. Elle crée de nouveaux types d’espaces plus libres correspondant à une utilisation contemporaine aux fonctions plus variées. »

Grâce à cette définition, on approche la diversité d’applications de la gestion différenciée dans le domaine des espaces verts. On comprend qu’il y a une évolution dans la pratique horticole, une méthode d’entretien plus écologique des espaces verts, en prenant en compte la main- d’œuvre disponible.

Une autre définition plus technique, d’Yveline Cottu, ingénieure horticole, va faire ressortir une certaine hétérogénéité des espaces verts.

« Dans l’optique de la Gestion Différenciée, le concepteur paysagiste crée un espace adapté à son milieu (sol, climat, environnement urbain...). Il limite l’entretien et les traitements phytosanitaires, favorise le développement d’une diversité faunistique et floristique, tout en respectant le cahier des charges. »

Elle remarque que la gestion différenciée n’est pas qu’un mode d’entretien, et qu’elle commence dès le début du projet. Elle montre les différentes méthodes et enjeux qui constituent la gestion différenciée, comme la technique de désherbage, en tenant compte de la biodiversité actuelle. Il est donc demandé d’intégrer en amont un travail de réflexion, d’information ainsi qu’un récapitulatif de l’ensemble des pratiques sur l’ensemble des espaces verts, dans un cahier des charges.

Enfin voici une dernière définition du Service Espaces Verts & Propreté de la ville de Nuits- Saint-Georges, où j’ai pu moi-même mettre en place une gestion différenciée en 2015.

« La gestion différenciée des espaces verts et naturels en ville, s’inscrit dans les principes du développement durable. Ce qui permet de répondre à des enjeux de natures différentes.

- Enjeux environnementaux

 Préserver et valoriser la biodiversité des espaces naturels

 Limiter les pollutions : produits phytosanitaires, bâches plastiques, énergies  Gérer les ressources naturelles : économiser la ressource en eau, valoriser les

déchets verts,…

- Enjeux culturels

 Valoriser l’identité des paysages communaux

 Diversifier et transmettre le savoir-faire et l’art du jardinier

- Enjeux sociaux

 Renforcer le cadre de vie des habitants en diversifiant les espaces  Sensibiliser le grand public à l’environnement

 Favoriser l’autonomie des agents  Enjeux économiques

 Faire face à des charges de fonctionnement de plus en plus abondantes et contraignantes

 Maîtriser les temps de travaux

 Plantes adaptées aux différents milieux  Respect des cycles naturels

 Adapter le matériel (faucheuse, broyeuse, brasse de désherbage,…)

- Enjeu technique

 Technique basée sur des savoirs stricts sur la biologie, la physiologie et l’écologie. »

La différenciation des dépendances vertes en fonction de leurs usages constitue à ce titre une méthode intéressante, car elle permet de proposer des nouveaux modes de gestion, généralement plus extensifs, qui intègrent le souci de l’environnement, tout en s’adaptant aux contraintes liées aux usages et aux usagers. Ces techniques participent donc, autant que possible, à la réduction des pollutions, à l’économie des ressources naturelles et au développement de la biodiversité, tout en assurant une qualité esthétique et les conditions de confort et de sécurité nécessaires à l’accueil du public. La gestion différenciée peut finalement être définie par la complémentarité de ces deux principes : la favorisation autant que possible de la biodiversité et la prise en compte de l’impact des actions de l’Homme sur l’environnement, en essayant de réduire leur portée.

Chaque collectivité interprète la conception et sa mise en pratique de la gestion différenciée selon l’adaptation et les moyens dont elle dispose, ce qui signifie que chaque collectivité a ses propres résultats.