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En comparaison avec l’histoire générale du sertão semi-aride de l'État de Bahia, l’évolution du système agraire du Territoire du Sisal, présente un certain nombre de caractèristiques spécifiques:

- l’introduction précoce de la culture du sisal dans les années 1940-50, en remplacement partiel de l’élevage bovin, caprin ou ovin;

- la consolidation progressive d’une agriculture familiale marchande de taille moyenne, suite à l’occupation de fait d’anciennes terres de parcours, à l’achat de terrains à des latifundiaires pendant la crise des prix du sisal des années (1980/90) et à la réforme agraire;

- la mise en place de systèmes de production fondés sur une association étroite de l’élevage et des polycultures avec une production de sisal dans les exploitations familiales de taille moyenne.

Le phénomène d’enclosure remonte à son origine à la moitié du XXe siècle avec l’introduction de la culture de sisal pour l’exportation. Ce processus a commencé sur l'initiative des grands éleveurs de bovins qui historiquement occupaient les terres de la région. Les sous-systèmes d'élevage ont été remplacés par l’agriculture d’exportation. Les exploitants familiaux (paysans) laissaient auparavant leur troupeaux pâturer sur les terres de parcours jusqu’alors indivises. Ces terres ont diminué rapidement, et il ne leur est resté que quelques maigres réserves de pâturage («fundos de pasto»).

Système agraire Système agraire Système agraire d’élevage de bovins de production de sisal polyculture-élevage à partir des sesmarias avec la production de sisal

1600 1950 1980

Pendant les années 1960, l´État de Bahia est devenu le principal producteur de fibres, dépassant l´État de Paraiba. L´apogée a duré jusqu'à la décennie de 1970.

Le sisal ou agave sisalane est originaire de la péninsule de Yukatan au Mexique. Les premiers bulbes ont été amenés de Floride au Brésil et introduits dans le Recôncavo de Bahia par Horacio Urpia Junior qui désirait l´exploiter dans sa propriété. Cependant, cette culture n´a pas été possible à cause des pluies fréquentes dans le Recôncavo de Bahia. La moyenne des pluies à Valente est d’environ 600 ou 700 mm tandis qu´à Salvador, proche du Recôncavo, la moyenne pluviométrique est de 1902 mm par an.

En 1911, les premiers plants ont été envoyés de Bahia vers l´État de Paraiba puis vers les autres États du Nord-Est comme Rio Grande do Norte et Pernambuco. À Bahia, il y eut diverses actions d´encouragement à la culture. En 1940/41 fut fondé dans la commune de

177 Nova Soure, Bahia, le Núcleo Colonial Presidente Vargas, comprenant une grande étendue de culture du sisal et doté d´une des usines de transformation les plus complètes du Brésil.

En 1940, Décio Monte Alegre et José de Araújo Góis installèrent une usine à Valente pour préparer la fibre de sisal à la commercialisation. D´autres usines ont été créées en même temps que se sont installées de nouvelles cultures. Cette plante qui jusqu´en 1950 était cultivée dans des terres de cultures de subsistance peut enfin se développer.

L’expansion du sisal pour l’exportation commence, dans la région, avec les enclosures, dans les années 1940/1950, de façon à ce que les animaux de quiconque ne viennent pas endommager les plantations. Elle fut d’abord le fait des grands propriétaires fonciers en complément ou en substitution de leurs élevages extensifs antérieurs.

La demande en fibre de sisal fut d’abord le fait de l’industrie navale, pendant la 2e Guerre Mondiale.

À partir de la fin des années 1970, suite à la chute des prix du sisal, les grandes surfaces réservées aux systèmes de culture ont été réduites, détruites ou transformées en pâturage, ce qui a entraîné un processus d´appauvrissement des agriculteurs minifundiares et des travailleurs salariés.

Pendant les années 1980, les prix internationaux, ainsi que la demande pour le sisal, ont fortement baissé ce qui a provoqué une diminution du nombre et de la surface des plantations de sisal et a favorisé un processus migratoire vers les grands centres de l´État et du pays. Ce sont les grands propriétaires latifundiaires qui ont abandonné ou vendu, en premier, les plantations de sisal en vertu de la baisse des prix et de la diminution du profit par rapport l’augmentation des coûts de production de nettoyage, de récolte et des salaires des travailleurs. La raison principale de la faible demande en sisal est la concurrence des produits synthétiques. Pendant la décennie de 1990, la culture du sisal a subi une régression encore plus prononcée suite aux chutes successives du prix international de la fibre. Il s’en suivit une progression des élevages, une expansion de l´élevage des bovins au détriment de la culture. Le sisal est traité désormais, moins comme une fibre pour l´exportation que comme une plante fourragère complémentaire pour l´élevage, du moins chez les grands propriétaires.

Mais un certain nombre de latifundiaires ont préféré vendre leurs terres, au profit des nouvelles catégories d’exploitants agricoles familiaux. Commencée dans les années 1980, la réforme agraire a amplifié ce processus sous la pression des mouvements sociaux.

Les grands latifundia d’élevage bovin et/ou de plantations de sisal ont été expropriés par l’État, à travers l’INCRA, afin de constituer des «assentamentos» ruraux. S´est alors formé un véritable réseau de communautés rurales suivant le travail des syndicats ruraux. La réforme agraire a été un autre phénomène social qui a contribué à la revitalisation des plantations de sisal et à en faire des exploitants familiaux les principaux producteurs.

178 Suite à l'émergence d’une agriculture familiale de taille moyenne, et du fait que les parcelles cultivées ont pu être encloses, la région a connu dans les années 1980/90 une expansion rapide des cultures fourragères du type palme fourragère et graminées fourragères comme le «capim Buffel» (Cenchrus Ciliaris) (COUTO et FREITAS, 1996). Cette expansion fut à l’origine d’une véritable intensification des systèmes d’élevage au sein des exploitations familiales en complément de la culture du sisal qui a pu s’y maintenir grâce aux interventions de l’APAEB. Une grande partie des agriculteurs mettent des clôtures dans leurs exploitations pour assurer, non seulement la propriété foncière, mais aussi pour éviter les dégâts provoqués par de leurs animaux et de ceux de leurs voisins dans les plantations.

Les systèmes de production des agriculteurs familiaux du Territoire du Sisal associent, non seulement agriculture et élevage, mais intègrent aussi une autre forme d´association dénommée "consortium" – une association de différents espèces cultivées au sein d’une même parcelle. Les plus importants concernent les combinaisons de haricot, maïs et manioc afin de réduire les risques et d´assurer la subsistance de la famille. Les tubercules et la farine de manioc sont destinés à l´autoconsommation familiale et ne sont que rarement vendus.

A partir de ce moment, la culture du sisal a été réalisée dans les petites et moyennes propriétés d´agriculteurs familiaux, la seule catégorie sociale qui a maintenu la culture dans le Territoire du Sisal, puisque les grands propriétaires ont transformé les plantations de sisal en pâturages avec l’élevage de bovins, mais ont aussi vendu leurs terrains ou ont été expropriés par l’INCRA.

Le fait est que ce sont les grands exploitants latifundiaires qui ont abandonné la production de sisal, tandis que les exploitants agricoles familiaux ont continué à le cultiver au sein de leurs systèmes de polyculture-élevage. Avec la chute des prix du sisal dans les années 1980/1990 et la constante augmentation des salaires, le système de culture du sisal, exigeant en travail, ne permettait plus aux grands exploitants d’assurer un taux de profit au moins égal à celui qu’ils pouvaient obtenir dans l’élevage extensif ou dans d’autres secteurs d’activités économiques. Telle est la raison pour laquelle ils ont choisi pour vendre leurs terrains ou reconvertir leurs exploitations vers l’élevage extensif.

Très différente a été l’altitude des exploitants agricoles familiaux pour qui la force de travail est familiale et n’a pas d’autres coûts que son coût d’opportunité. Pour être mieux rémunérés, ces agriculteurs n’hésitent pas à travailler plus pour leur propre compte et mettre en oeuvre des systèmes de culture et d’élevage beaucoup plus intensifs à l’unité de surface. Telle est la raison pour laquelle ils ont maintenu la production du sisal et commencé à mettre en place des cultures fourragères, avec l’assistance technique et les marchés procurés par l’APAEB. Selon Nascimento (2003), l’extraction du sisal utilise un grand contingent de force de travail et se produit dans des conditions précaires caractérisées par une utilisation du travail infantile et des femmes, accompagnée de fréquentes mutilations et de journées de travail moyennes de 12 heures.

179 Les travaux agricoles sont très concentrés dans le temps et plus de 40% des travaux ont lieu pendant les mois de juillet et août, en relation avec des calendriers agricoles des cultures du sisal et du manioc.

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7.3 La définition de l’échantillon et de la typologie des systèmes de production