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THÉORIE ET MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE

3. Méthodologie de la recherche

3.1. L’entrevue semi-dirigée

L’enquête par entretien constitue une technique prédominante dans le domaine de la recherche sociale. Elle naît de la nécessité d’établir un rapport assez égalitaire entre l’enquêteur et l’enquêté pour que ce dernier ne se sente pas, comme dans un interrogatoire, contraint de donner des informations. La nature de l’information produite en est ainsi modifiée pour le meilleur (Blanchet & Gotman, 2013). Lorraine Savoie-Zajc (2009) explique que « cette technique de collecte des données est la plus appropriée dans une perspective interprétative et constructiviste de la recherche » (Savoie-Zacj, 2009) telle que celle que nous entreprenons. Sur le plan épistémologique en effet, elle permettra une meilleure compréhension d’un phénomène ancré dans le point de vue et le sens que les acteurs sociaux donnent à leur réalité La dynamique de coconstruction de sens qui s’établira entre chercheur et participant(e) stimulera l’émergence d’un nouveau discours et donc d’une nouvelle compréhension du phénomène de la construction de la conjugalité à partir des sites de rencontre. Cependant, nous sommes conscients qu’il n’est pas simple de questionner des personnes au sujet de leurs représentations, de leurs sentiments ou de leurs expériences (Gauthier, 2008). Définie comme une interaction verbale, l’entrevue contribue à la production d’un savoir socialement construit (Savoie-Zacj, 2009). Afin de tirer profit au maximum de cette technique de collecte des informations, nous avons choisi de soumettre l’échantillon de participant(e)s que nous constituerons à une entrevue semi-dirigée. Celle-ci consiste en une « interaction verbale animée de façon souple par le chercheur » (Savoie-Zacj, 2009 : 340). De cette manière, cela nous permettra de nous laisser guider par le rythme et le contenu unique de l’échange afin « d’aborder, sur un mode proche de la conversation, les thèmes généraux à explorer avec le/la participant(e) à

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la recherche » (Savoie-Zacj, 2009). Grâce à cette interaction nous espérons coconstruire avec les participant(e)s à l’étude, une riche compréhension du phénomène de la construction du lien conjugal à travers la rencontre en ligne (Savoie-Zacj, 2009).

« Plusieurs postulats sont sous-jacents au choix de l’entrevue semi-dirigée comme mode de collecte des données » (Gauthier, 2008). Traversés par les paradigmes interprétatif et constructiviste, plutôt qu’un simple jeu de questions-réponses, elle apparaît comme une narration, une unité de sens où les différentes sections sont considérées comme « en relation les unes avec les autres » (Paillé, 1994 : 177) afin de constituer un récit cohérent sur le/la participant(e) qui se raconte (Paillé, 1994). La perspective du/de la participant(e) prendra alors du sens et il nous sera possible de l’identifier, de la connaître et de la rendre explicite dans la perspective de l’interactionnisme symbolique (Savoie-Zacj, 2009). Dans la perspective de l’interactionnisme symbolique, l’humain est, en effet, perçu comme un « organisme actif » (Savoie-Zacj, 2009 : 341), c’est-à-dire capable de s’engager dans une activité car il possède un « soi lui permettant de traiter l’information reçue de son environnement et d’y répondre sachant que « c’est le sens induit qui stimule l’action » (Blumer, 1969 cité par Savoie-Zacj, 2003: 341). En effet, l’entrevue semi-dirigée vise à rendre explicite l’univers du/de la participant(e) (Vermesch, 2003). Il nous permettra d’entrer en contact de manière directe et personnelle avec le/la participant(e) (Daunais, 1992; Keats, 2000). Dans une telle interaction humaine et sociale, le/la participant(e) à la recherche est en effet en mesure de décrire, de façon détaillée et nuancée, son expérience, son savoir, son expertise. Chercheur et participant(e) agissent tour à tour à l’orientation de l’interaction développée. À la faveur de l’entrevue, peuvent être clarifiés ce que l’autre pense et qui ne

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peut être observé : sentiments, pensées, intentions, motifs, craintes, espoirs. L’entrevue semi-dirigée rend également possible l’identification, par le/la participant(e), de liens entre des comportements antérieurs et la situation présente tout en donnant accès, au chercheur, à des expériences de vie qui seraient restées autrement réservées (Savoie-Zacj, 2009).

Cette forme de collecte de donnée donne un accès privilégié à l’expérience humaine. L’entrevue semi-dirigée vise également la compréhension du monde du/de la participant(e), à ses comportements complexes et à la trame culturelle sous-jacente aux actions, sans que le chercheur n’ait à imposer une catégorisation préalable qui pourrait limiter la compréhension du phénomène étudié (Savoie-Zacj, 2009). Elle révèle enfin les tensions et contradictions animant un acteur à propos du phénomène à l’étude. Une fois la compréhension produite, le sens nouveau de l’expérience étudiée deviennent intimement rattachés au jeu de forces et de références qui traversent la vie des individus (Savoie- Zacj, 2009). L’entrevue semi-dirigée permet d’apprendre du monde du/de la participant(e) tout en aidant le chercheur à organiser et structurer sa pensée. Les deux interlocuteurs peuvent, de cette manière, produire un savoir en situation, une coconstruction grâce à l’interaction ainsi vécue. Les perspectives de l’un influençant la compréhension de l’autre lequel formule à son tour une nouvelle explication qu’il peut dès lors proposer à l’interlocuteur. Un réel échange peut dès lors naître de la rencontre : l’une tentant d’exprimer sa pensée, l’autre voulant mieux la comprendre (Savoie-Zacj, 2009). Finalement, selon Kvale (1996), ce type d’entrevue a une fonction émancipatrice puisque les questions abordées avec le/la participant(e) permettent d’approfondir certains thèmes. Elles permettent ainsi aux deux interlocuteurs d’enclencher une réflexion et

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peuvent stimuler « des prises de conscience et des transformations » de la part des deux interlocuteurs en présence (Savoie-Zacj, 2009).