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De l’entreprise à l’association : une difficile passerelle ?

CHAPITRE III. DE L’ENTREPRISE À L’ASSOCIATION : ANALYSE DE LA DIVERSITÉ

2. De l’entreprise à l’association : une difficile passerelle ?

De la transférabilité des compétences : une passation peu évidente

L’image du salarié d’entreprise que transfère ses savoirs à une association à titre gracieux paraît une évidence quand on parle de mécénat de compétences : « Si on revient au sens du mécénat en lui-même, il s’agit de transférer dans un autre domaine des compétences acquises dans le cadre de la vie professionnelle » (M16).

Cependant, l’entreprise reconnait rarement que l’expérience associative permet de développer des compétences applicables en milieu professionnel (Margaria, 2017). Le mécénat de compétences permettrait à des professionnels de réaliser des missions en lien direct avec leur activité ou leur parcours professionnel. Or, les constats de notre enquête ne permettent pas de valider cette représentation du mécénat de compétences caractérisée par un rapport étroit entre le poste en entreprise et la mission en association. En effet, seulement quatre enquêtés en missions de type flash ou longue correspondent à ce profil : par exemple, un professionnel d’une compagnie d’assurance en milieu de carrière qui a effectué une mission longue et qui a pu partager sa compétence en gestion de système informatique, ou encore un salarié d’un groupe bancaire, spécialisé en communication ayant participé à des missions flash dans le but de contribuer au plan de communication de l’association. Néanmoins, la question de la transférabilité de compétences dans le cadre du mécénat en association a été soulevée par les enquêtés comme l’un des éléments majeurs dans le passage d’une organisation à une autre.

CE QUEST LA COMPÉTENCE

Le mot compétence recouvre plusieurs éléments de définition qu’il faut préciser. L’idée que la compétence serait un ensemble de savoirs (savoirs théoriques, savoir-faire, savoir-être…) est incomplète. En effet, si les savoirs sont bien des composants de la compétence, celle-ci est plus complexe et concerne aussi la mobilisation des savoirs ou, plus précisément, « la mobilisation et la combinaison efficaces d’une variété de ressources internes et externes à l’intérieur d’une famille de situations », (et al., 2019). Elle serait, donc, la capacité à recombiner les différentes ressources détenues afin de trouver la réaction la plus appropriée à la situation (Margaria, 2017).

La compétence est une notion floue et polysémique qui a fait l’objet de définitions différentes selon le champ dans lequel elle a été étudiée (Coulet, 2016). Dans le domaine de l’éducation, la compétence représente des savoir-faire fondamentaux exprimés par des « verbes d’action ». Dans le monde de l’entreprise, la compétence serait une combinaison de connaissances, de savoir-faire et d’expériences s'exerçant dans un contexte précis qui ne peut être constaté que dans sa mise en œuvre en situation professionnelle. Ainsi, elle est venue s’opposer à la qualification (niveau validé par une institution de formation) comme une capacité repérée, évaluée et validée par l'entreprise (Margaria, 2017).

Ces deux perspectives de la compétence ne sont pas incompatibles. Mais il faut considérer que, vue par l’entreprise, la compétence est définie par rapport à un contexte et elle se joue à l’interaction entre l’individu et son poste, tandis que dans le contexte de l’enseignement, elle est attachée à l’individu qui la détient, la développe avec l’expérience (professionnelle, bénévole...) et qui pourra l’exprimer au sein d’un poste (Margaria, 2017).

Par ailleurs, si la plupart des études sur la compétence concernent les compétences individuelles, un certain nombre de chercheurs se sont intéressés à la compétence collective, notamment dans le domaine de la gestion. Dans la littérature consacrée aux compétences collectives, on trouve l’idée de différents niveaux de structuration comme le niveau macro relevant de la gestion stratégique des compétences organisationnelles, et les niveaux meso (groupes) et micro (individu) qui seraient plus spécifiquement du domaine de la GRH (Coulet, 2016).

Si l’on considère que chaque poste ou expérience est l’occasion de développer des compétences, comme une formation serait l’occasion d’acquérir certains savoirs, il s’agit d’adopter une perspective de la compétence attachée à l’individu (Margaria, 2017). Ainsi, compte tenu de l’approche adoptée par cette étude ainsi que des récits délivrés par les enquêtés, le sens de compétence ici renvoie au niveau individuel. Donc, la compétence est attachée à la personne du salarié et non à son poste. En outre, la notion de compétence sur laquelle notre analyse s’appuie est hétérogène puisqu’elle englobe des savoir-faire techniques et des savoir-être (Oiry, 2005).

Claire Margaria (2017) distingue « compétence » au singulier et « compétences » au pluriel. La première est tout ce qui permet de traduire des savoirs en action. Il s’agit de la capacité à recombiner les différentes ressources détenues afin de trouver la réaction la plus appropriée à la situation. Au pluriel, le terme désigne les différentes ressources mobilisées au cours de l’action et les modes de combinaison de ces ressources. La compétence comprend, donc, « les compétences », auxquelles on ajoute la capacité à les mobiliser à bon escient. Ainsi, les enquêtés font référence à la fois à leur compétence, et plus souvent à leurs compétences et savoirs. Les différentes études s’attelant au développement humain dans le cadre d’activités associatives, notamment le bénévolat, parlent de compétences, de capacité, ou d’acquis.

Passerelles et Compétences, acteur associatif pionnier dans le bénévolat de compétences met l’accent sur l’apport de compétences professionnelles spécifiques - que nous pouvons traduire par savoirs techniques et savoir-faire. Il s’agit de « ressources humaines, marketing et développement, communication, stratégie et direction générale, administration et finances, informatique… et d’autres compétences ». De cette manière, cet acteur, comme d’autres du champ du mécénat de compétences,

cherche à développer l’usage du dispositif en vue de répondre à des besoins des associations, certaines ayant davantage de besoins en expertises techniques (France Bénévolat, 2006), par exemple. Dans cette perspective, le dispositif du mécénat de compétences permettrait la mise à disposition de compétences au service des associations. Nous souhaitons, donc, interroger le rapport aux compétences dans le cadre du mécénat : Quels savoirs sont mobilisés ? Peut-on parler de transfert de compétences du monde marchand vers le monde associatif ? Dans son expérience, le professionnel peut-il acquérir ou développer des compétences ? Ces questions serviront de fil rouge pour la suite de ce rapport.

§ Des compétences mobilisées hétérogènes et transversales

Les salariés ayant déclaré avoir mobilisé des savoirs, spécifiques ou transversaux, acquis dans leurs parcours de formation et/ou dans leur expérience professionnelle représentent la moitié des enquêtés (26 au total).

Les « compétences transversales » renvoient à la définition de « savoirs transversaux » dans le domaine des sciences de l’éducation, désignant des savoirs qui sous-tendent et transcendent l’apprentissage et la restitution des savoirs spécifiques à chaque matière (Margaria, 2017). Les compétences transversales seraient donc moins liées à une activité ou à un métier, et pourraient par conséquent être utilisées dans des activités professionnelles diverses.

La majorité des interviewés (65 %, 34 au total) mobilisent des savoir-faire techniques et également des savoir-être et savoir-faire relationnels. Ces derniers recouvrent l’ensemble des capacités permettant de coopérer efficacement avec autrui (écoute, travail en groupe, communication, négociation). Le mécénat d’entreprise étant à la frontière entre travail et hors travail (Gatignon-Turnau, 2005), les missions sont souvent marquées par une combinaison des compétences issues de la sphère professionnelle et de la sphère personnelle :

« D'autres personnes préfèrent rester par exemple à faire du recrutement, restent sur leurs compétences professionnelles. J'avais envie de faire un peu un mélange entre le professionnel et le personnel. » (M35)

En outre, cinq interviewés affirment mobiliser uniquement des savoir-faire relationnels et/ou leur savoir- être. Ces derniers sont ou ont été engagés dans des différents types de missions. Il est à noter qu’un quart de professionnels n’ont pas identifié des compétences mobilisées dans leurs missions.

Les savoirs mobilisés par les salariés rencontrés dans le cadre de l’enquête sont très divers : « gestion de projets », « management », « parler en public », « écoute », « ouverture d’esprit », « observation », « empathie », « organisation », « rigueur », « connaissance bureautique ». L’étude montre ainsi que les salariés peuvent mobiliser différents types de compétences.

§ Qualifier le transfert de compétences du monde marchand vers le monde associatif

La question de la transférabilité suppose que les salariés en mécénat de compétences cherchent à mettre à disposition des compétences professionnelles spécifiques au service des associations. Il s’agit de considérer que la compétence reconnue dans un contexte le sera également dans un contexte plus ou moins proche. Encore une fois, les constats de l’enquête amènent à questionner cet apriori et permettent d’identifier quatre types de rapport aux compétences chez les enquêtés.

n a) Un rapport intrinsèque : Le rapport entre la mission et la mobilisation de compétences professionnelles

spécifiques constitue pour quelques salariés la condition sine qua non du mécénat, ce qui permet de le distinguer d’autres formes d’engagement comme le bénévolat. Le témoignage suivant a été recueilli

auprès d’une jeune architecte qui, avant d’être dans ce dispositif, est partie en mission internationale dans le cadre d’un congé solidaire. Sa mission a consisté à participer au projet de construction d’un bâtiment :

« Le but ce n’est pas d’aller faire du tourisme humanitaire, c’est de dire que si on a une compétence et qu’elle peut servir, on vient l’apporter. On a logé dans des orphelinats, ce n’est pas de dire : “On va passer deux semaines avec des orphelins”, c’est stupide. C’est de se dire que si on peut avoir encore une fois un intérêt à quelque chose, on y va et on apporte la connaissance qu’on peut avoir. » (M49)

Dans sa mission d’accompagnement d’insertion professionnelle de réfugiés, elle a plus recours à ses expériences qu’aux compétences développées dans son parcours professionnel. Pour elle, si la mission en mécénat de compétences peut être dissociée de son poste et de son activité professionnelle, elle critique les missions mobilisant les capacités physiques davantage qu’intellectuelles, comme des actions d’aide d’urgence, par exemple. Ce type de mission, selon elle, ne rentre pas dans le cadre du mécénat de compétences.

nb) Un rapport envisageable : il y a des professionnels qui cherchent à avoir un rapport étroit entre leur

poste en entreprise et leur mission en mécénat. Cela peut être un critère de choix dans l’entrée dans une mission, même s’il ne s’agit pas d’une condition sine qua non comme l’explique un enquêté :

« Comme j’avais des compétences administratives, informatiques et de gestion, j’ai plus recherché là-dedans [...] J’ai fait une démarche personnelle mais c’est vrai qu’elle était plus ciblée sur mes critères de compétences [...] mais cela ne m’aurait pas dérangé de faire complètement autre chose. » (M52)

Trouver une mission correspondant à sa pratique professionnelle permettrait au salarié de se projeter, comme l’affirme cette salariée :

« Cela correspondait un peu à ce que j’avais fait dans ma carrière. [...] les commandes de matériels, la comparaison d’un fournisseur à l’autre, la gestion d’un budget, c’étaient mes compétences professionnelles. [...] quand j’ai vu l’annonce j’ai dit : “Ah bon ça va, je devrais pouvoir faire.” » (M53)

n c) Un rapport non souhaitable : certains salariés sont motivés par une « envie de déconnecter » et

cherchent des missions éloignées de leur vie professionnelle. Cela concerne des professionnels en milieu de carrière (« besoin de prendre l’air », M50) ainsi que des professionnels en fin de carrière qui essaient de se projeter dans un nouveau métier (« dans la deuxième partie de ma vie » [M23]).

« Mais je n'ai pas forcément envie de revenir sur une chose que j'ai déjà faite. J'ai envie de déconnecter. » (M34, 58 ans, a travaillé toute sa carrière dans une société bancaire, actuellement en mission longue dans une association œuvrant dans l’accueil de personnes âgées.)

nd) Un rapport impossible : pour certains professionnels, le transfert de compétences ne peut pas avoir

lieu parce que leurs expertises sont liées à des spécificités des entreprises.

« Nous ne mettons pas du tout nos compétences à disposition. [...] Ma compétence actuelle, c’est la gestion de crise. Ma vraie grosse compétence, c’est la gestion de crise dans le domaine bancaire. Vous voyez une association qui a besoin de cela ? Même une grosse association, elle n’a pas besoin d’un gestionnaire de crise. Elle va demander à un prestataire de lui écrire sa gestion de crise et c’est tout. » (M17, 58 ans, spécialiste en gestion de risque bancaire, cadre dans une société financière, son seul employeur pendant toute sa carrière professionnelle.)

« Je n’utilisais pas mes compétences du boulot, parce que les compétences du boulot sur le suivi financier des besoins en capital d’une banque, il va falloir s’accrocher pour relier cela aux besoins de l’association. » (M21, 41 ans, ingénieur de système informatique, cadre dans un groupe bancaire.)

« Beaucoup de mes compétences développées dans mon entreprise, étaient intrinsèquement liées à la taille de la structure, par exemple, la capacité de conduire un projet dans une grande organisation, la capacité d’identifier des enjeux et de conduire le dialogue social avec des organisations syndicales. Tout cela, je ne le retrouve pas ici. » (M25, 62 ans, cadre dans un groupe bancaire.)

À partir du corpus de l’enquête, la question de la transférabilité des compétences peut être analysée selon deux perspectives. Si l’on suppose que la mission correspond à l’activité professionnelle, il s’agirait de transférer de savoirs utilisés dans le monde marchand vers le monde associatif. Autrement, si l’on considère que la mission s’éloigne de la pratique professionnelle, le salarié engagé peut être confronté au défi de transposer des connaissances d’un domaine à l’autre.

Pour certains professionnels, le transfert de compétences professionnelles d’un contexte à un autre se fait de manière naturelle :

« Que l’on prenne la parole devant un groupe d’adultes ou devant un groupe de collégiens, même si les puristes diront que ce n’est pas la même chose, que ce ne sont pas les mêmes objectifs, en réalité c’est la même chose. On agit sur un groupe. Et à partir de là, on met en œuvre les mêmes compétences. » (M06) « C’était de la gestion. C’est la même chose. [...] Je gérais les stocks, que ce soit la gestion des stocks. Après, c’est une méthode de travail mais le résultat est le même. » (M47)

D’autres interviewés laissent comprendre des difficultés dans le transfert de leurs compétences mobilisées dans des entreprises vers les associations. Certains professionnels n’ont connu dans leur carrière que des grandes entreprises avec des services et des équipes très spécialisées. Or, dans les associations ils trouveront des structures moins hiérarchisées, avec des équipes moins spécialisées et plus « polyvalentes » en termes de compétences et de missions, comme le soulignent ces témoignages :

« Même si Emmaüs Défi a beaucoup de rigueur dans son fonctionnement, cela reste quand même une association. Elle n’a pas la rigueur des process d'une entreprise. Cela étant, les champs et les domaines d’action sont moins stables, moins figés que dans une entreprise. Cela a des côtés positifs, mais aussi parfois des côtés déstabilisants. » (M25)

« Je pense que quand vous venez d’un grand groupe, les postes sont souvent très découpés avec des fonctions assez particulières, et dans une association, on vous demande de faire un peu tout. C’est très compliqué pour les profils qui ne sont pas hyper polyvalents. [...] Vous vous retrouvez à faire de la communication, ce que je n’avais jamais vraiment fait par exemple [...]. J’ai fait les rapports annuels, j’ai fait des brochures, j’ai pondu du PowerPoint au kilomètre – ça, j’en faisais déjà beaucoup – j’ai fait aussi de la gestion de grands comptes. Je n’avais jamais été commerciale et là, j’ai géré des grands comptes, des grands bailleurs de fonds [...] à la fois pour le privé et le public. J’ai développé un savoir-faire mais sur le tas et un peu à l’instinct de gestionnaire de grands comptes. Ce côté commercial est renforcé. » (M50)

En autre, cette perspective soulève la question du développement de nouvelles compétences (« cela m'apporte énormément au niveau compétences » [M35]).

§ Développement de compétences individuelles dans le mécénat de compétences :

nouveautés ou renforcement ?

De récents travaux de recherche ont démontré que l’activité bénévole permet à des jeunes professionnels de développer des compétences, des ressources et des acquis (Margaria, 2017 ; Cortessis

et al., 2019). Une étude dédiée au mécénat d’entreprise dans la perspective de la gestion des ressources

humaines a précédemment démontré les effets de l’engagement en matière de ressources humaines : cohésion interne, épanouissement personnel et acquisition de nouvelles compétences (Gatignon- Turnau, 2005). Pourtant, l’idée des activités associatives porteuses de compétences (Margaria, 2017) n’est pas mise en avant quand on parle du mécénat : « On ne nous a pas dit : “Est-ce qu'il y a des compétences que vous voudriez acquérir ? Ça n’a pas été présenté dans ce sens.” » (M37)

Parce qu’il est historiquement associé aux politiques de RSE, certaines entreprises cherchent à aborder le mécénat dans la perspective du développement de ressources humaines, un changement que se fait ressentir par cette interviewée :

« Je pense que cela développe autant de compétences que cela en fournit, et je pense que les entreprises commencent à s'en rendre compte. Au début, elles pensaient que c'était juste donner des compétences, mais elles ne voyaient pas la partie développement de compétences. [...] Ils ont bien conscience que cela aide à développer aussi des compétences. » (M29)

Cette perspective peut constituer une attente pour certains professionnels (« J’aurais bien aimé, mais non » M53) et peut avoir un impact sur leur volonté d’engagement. Et même si cela ne constitue pas une condition d’entrée dans le dispositif (« Je n’y suis pas allé pour ça » [M38]), les effets du mécénat en termes de compétences ont été confirmés par la majorité des interviewés (59 %). Interrogés sur le développement de compétences dans le cadre de leurs missions en associations, ces derniers ont souligné trois effets distincts :

a) l’acquisition de compétences, plus rare, identifiée par 20 % comme, par exemple, l’interviewé M25 : « C’est clairement mobiliser des compétences que je n’avais pas » ;

b) le développement ou le renforcement des compétences pré-acquises, ce qui a été souligné par des nombreux interviewés soit 40 % : « Ce ne sont pas des compétences nouvelles que je vais apporter au groupe, ce sont des compétences que j’avais déjà et que j’ai renforcées » (M50) ;

c) l’apprentissage ou l’acquisition de connaissances spécifiques relatives, par exemple, au domaine d’activité de l’association. Cela concerne plus de la moitié (53 %) des interviewés ayant ressenti les effets du mécénat en termes de développement de compétences.

§ Types de compétences acquises ou développées

Les activités associatives étant source non négligeable d’expériences et d’apprentissages, les évolutions institutionnelles en France en termes de valorisation de l’expérience du bénévolat dans la formation professionnelle cherchent à en rendre compte. À ce titre, la loi de modernisation sociale de 2002 intègre l’expérience bénévole dans les validations des acquis de l’expérience (VAE) et la loi relative au travail de 2016 instaure un compte de l’engagement citoyen où les jeunes peuvent enregistrer des heures de bénévolat.

Pour les professionnels interrogés, l’expérience du mécénat de compétences a permis d’acquérir ou de développer des savoirs très divers : « écoute », « capacité d'intégration », « adaptabilité », « savoir-être », « compréhension des autres », « empathie », « pédagogie », « ouverture d’esprit », « partage », « capacité d’interaction », « animation de groupes de travail », « compétences bureautiques », « gestion de projets », « stratégie », « marketing opérationnel », « commercial ». Ainsi, il s’agirait de savoirs (techniques et transversaux), comme des savoir-faire relationnels (« pour ma part, ce sont plus des compétences relationnelles » [M04]) ou encore des savoir-être (« pas de compétences dans le professionnel, mais je dirais des compétences comportementales » [M28]). Cet interviewé évoque des compétences « interculturelles » :

« Oui, certainement. Là, en l'occurrence, ce sont des compétences d'écoute puisqu'on fait du coaching “professionnel”, on est donc obligé d'écouter la personne. C’est aussi de l'agilité parce que l'on est obligé de se mobiliser pour essayer de trouver des solutions [...]. Pour moi cela nous développe des compétences, c’est très clair, et pour beaucoup de personnes des compétences interculturelles. » (M29)

En fait, il s’agit de savoir-faire relationnels fortement liés à des contextes de travail où les professionnels ont interagi avec des équipes très hétérogènes quant au statut (salariés, bénévoles, bénéficiaires, service civique etc.), quant à l’âge (adolescents, jeunes, personnes âgés), quant à l’origine (étrangers de différentes nationalités) ou encore quant au statut social (chômeurs, réfugiés, femmes en situation d’exclusion). Ces trois témoignages décrivent ce contexte qui exige une capacité d’adaptation des professionnels :