• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 1 : INTRODUCTION

E. L’implication du métabolisme mitochondrial du glucose

2. L’entrée du pyruvate dans le cycle de Krebs

Suite à son transport dans la mitochondrie, le pyruvate est décarboxylé en acétyl- CoA par la PDH afin d’être métabolisé dans le cycle de Krebs et ainsi produire de l’ATP (voir Section II A.2.3). Dans les cellules β pancréatiques, près de 50 % du pyruvate entre cependant dans le cycle de Krebs par la voie anaplérotique (MacDonald 1993a; Khan et al. 1996), c’est-à-dire en étant métabolisé en oxaloacétate par la PC. Dû à l’absence de la néoglucogenèse (MacDonald et al. 1992) et au faible taux de synthèse des acides gras (Brun et al. 1996) dans ces cellules β, plusieurs groupes de recherche ont suggéré que le processus d’anaplérose est impliqué dans les mécanismes de régulation de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose (MacDonald et al. 2005). Ainsi, le métabolisme du pyruvate à travers la PDH conduit à la production d’ATP, nécessaire au mécanisme de déclenchement de la sécrétion d’insuline, alors que le métabolisme du pyruvate par la PC conduit au processus d’anaplérose, qui serait impliqué dans la voie d’amplification de la sécrétion d’insuline (Prentki et al. 1997). Différentes études ont donc été réalisées afin d’établir l’importance relative des enzymes PDH et PC dans les mécanismes de régulation de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose.

2.1 Via la pyruvate déshydrogénase

La PDH est un complexe multienzymatique. Son activité est régulée par l’inhibition allostérique qu’exercent ses produits et par son statut de phosphorylation. Ainsi, la PDH kinase phosphoryle la PDH afin de l’inactiver et la PDH phosphatase hydrolyse le lien phosphate afin de réactiver la PDH. Puisque l’oxydation du pyruvate à travers la PDH et le cycle de Krebs conduit à la production d’ATP et que l’ATP est un facteur de couplage métabolique important dans la sécrétion d’insuline (voir Section III D), le groupe du Dr Rutter a émis l’hypothèse que la PDH aurait un rôle important à jouer dans la régulation de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose. Ils ont cependant observé que la modulation de l’activité de la PDH, par la surexpression de la PDH kinase ou de la PDH phosphatase, était sans effet sur la sécrétion d’insuline en réponse au glucose. L’augmentation de l’activité de la PDH induite par le dichloroacétate n’a pas non plus affecté la sécrétion d’insuline (Nicholls et al. 2002). Une étude indépendante a aussi confirmé que l’inhibition de la PDH par la surexpression de la PDH kinase n’affectait pas la sécrétion d’insuline (Xu

et al. 2008a). L’ensemble de ces résultats suggère que l’activité de la PDH n’est pas

limitante pour la sécrétion d’insuline en réponse au glucose. Il est cependant important de rappeler que le flux métabolique à travers la PDH, bien que non limitant pour la régulation de la sécrétion d’insuline, est important pour la production de l’ATP et l’homéostasie métabolique des cellules.

2.2 Via la pyruvate carboxylase

La PC est une enzyme anaplérotique importante dans plusieurs processus cellulaires (Jitrapakdee et al. 2006). Dans les cellules β pancréatiques, la PC semble impliquée dans la régulation de la voie d’amplification de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose. L’utilisation d’un inhibiteur de la PC, l’acide phénylacétique (Bahl et al. 1997), a permis d’observer une diminution significative de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose dans les îlots de Langerhans ainsi que dans différentes lignées cellulaires β pancréatiques (Farfari et al. 2000; Liu et al. 2002; Lu et al. 2002; Attali et al. 2006; Fransson et al. 2006). Ces résultats ont récemment été confirmés par deux études qui ont employé les ARN

interférant (RNAi) afin de diminuer l’expression de la PC. De fait, la diminution de l’expression et de l’activité de la PC par des ARN interférant spécifiques a conduit à la réduction de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose (Hasan et al. 2008; Xu et al. 2008a). À l’opposé, la surexpression de la PC a conduit à une augmentation de la sécrétion d’insuline (Xu et al. 2008a). De toute la littérature, une seule étude n’a pas observé d’effet de la diminution de l’expression de la PC sur la sécrétion d’insuline en réponse au glucose (Jensen et al. 2006). L’utilisation de RNAi a permis de réduire de 35 à 50 % les niveaux protéiques de la PC, mais n’a diminué que de 20 % son flux métabolique. Les auteurs de cette étude concluent que la diminution de l’expression de la PC a été compensée par une augmentation de son activité afin de préserver le flux anaplérotique et la régulation adéquate de la sécrétion d’insuline par les cellules β. Ainsi, l’ensemble des études suggère que la PC joue un rôle déterminant dans la régulation de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose.

Les résultats obtenus in vivo soutiennent aussi l’hypothèse que l’activité de la PC est plus importante dans la régulation de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose que celle de la PDH. Chez le modèle des rats Zucker Fatty, les cellules β pancréatiques compensent pour la résistance à l’insuline des tissus périphériques en amplifiant la sécrétion d’insuline en réponse au glucose. Cette élévation de la sécrétion d’insuline corrèle avec une augmentation de l’activité de la PC, alors que celle de la PDH est diminuée de 30% (Liu et

al. 2002). Fait intéressant, l’inhibition de l’activité de la PC par l’acide phénylacétique dans

les îlots de ces rats Zucker Fatty conduit à une diminution de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose (Liu et al. 2002). De plus, la diminution de la sécrétion d’insuline observée dans deux modèles de rats diabétiques de type 2, les Zucker Diabetic Fatty et les Goto Kakizaki, corrèle avec une réduction de l’activité de la PC dans les îlots pancréatiques (MacDonald et al. 1996a; MacDonald et al. 1996b). Il est cependant à noter que l’activité de la PDH est aussi diminuée dans les rats diabétiques Goto Kakizaki (Zhou et al. 1995). Une diminution de l’activité de la PC a aussi été observée chez des patients diabétiques de type 2 (MacDonald et al. 2009). L’ensemble des études confirme que la PC joue un rôle déterminant dans la régulation de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose. De plus, les

résultats obtenus dans les modèles in vivo de rats suggèrent que l’anaplérose, à travers la PC, est un des mécanismes impliqués dans la compensation de la sécrétion d’insuline pour la résistance à l’action de l’insuline dans les tissus périphériques. Ce mécanisme pourrait être altéré chez les diabétiques.

Finalement, le groupe du Dr Cline a utilisé la technologie de la résonance magnétique nucléaire afin de déterminer l’importance de la PDH et de la PC dans la sécrétion d’insuline. L’incubation des cellules β INS 832/13 à différentes concentrations de glucose marqué au carbone 13 a permis d’établir une corrélation significative entre le flux métabolique à travers la PC et la sécrétion d’insuline. Cependant, la corrélation est encore plus élevée lorsque les flux métaboliques à travers la PC et la PDH sont combinés, ce qui suggère que la sécrétion d’insuline est augmentée lorsque l’oxydation du glucose est couplée à l’anaplérose (Cline et al. 2004).

Documents relatifs