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L’entrée dans les classifications internationales

A. R ENAISSANCE DU CONCEPT

1. L’entrée dans les classifications internationales

Les premiers critères diagnostiques des états mixtes sont issus des critères diagnostiques pour la recherche (Spitzer et al., 1978), se voulant affranchi de tout à priori etiopathogénique qui inspirera l’élaboration de la première version du DSM (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux). Selon cette classification, le diagnostic d’état mixte nécessite la validation des critères d’un épisode maniaque et de ceux d’un épisode dépressif.

Les états mixtes apparaissent dans le DSM dans sa troisième version révisée en 1987 (DSM-III-R). Leur définition traduit alors une certaine hésitation, tentant une sorte de consensus entre de nombreuses perspectives (tableau IV.). Ainsi ces critères sont stricts quant au degré

de la dépression associée puisque doivent s’associer à l’état maniaque les critères complets de l’épisode dépressif majeur. En revanche, le critère de durée minimale des symptômes dépressifs est réduit à un jour alors que les symptômes maniaques doivent être présents au moins deux semaines. Pour ce qui est de la relation temporelle entre symptômes maniaques et dépressifs, la présence simultanée et l’alternance rapide (à quelques jours d’intervalle) sont acceptés ce qui ne distingue pas les formes instables des formes stables. Les états mixtes semblent alors considérés comme un sous-type de manie avec une ou plusieurs irruptions dépressives dont la stabilité n’est pas obligatoire. Ils laissent également déjà entrevoir certains problèmes de diagnostic différentiels avec, d’une part, la labilité thymique de l’état maniaque, et d’autre part les cycles rapides.

Tableau IV. Critères diagnostiques de l’épisode mixte selon le DSM-III-R (APA, 1987)

A. L’épisode actuel (ou le plus récent) comprend le tableau symptomatique complet à la fois des épisodes dépressifs majeurs et des épisodes maniaques (à l’exception du critère de durée des épisodes dépressifs, une durée de deux semaines n’étant pas requise) intriqués ou alternant rapidement à intervalle de quelques jours.

B. Des symptômes dépressifs marqués persistant au moins un jour entier.

C’est justement pour pallier ces problèmes que le DSM-IV (APA, 1994) restreint nettement la définition. N’est alors retenue que l’association simultanée des deux troubles, et ce pendant au moins une semaine pratiquement tous les jours (tableau V.). Les épisodes induits par les antidépresseurs sont désormais considérés à part en tant que « trouble de l’humeur induit par une substance, avec caractéristiques mixtes », mais les symptomatologies d’allure mixte survenant durant le traitement pharmacologique d’un état maniaque ne sont pas éliminées.

L’accent est également mis sur la sévérité de l’accès sans prise en compte des formes incomplètes telles que les hypomanies mixtes ou les épisodes empruntant des symptômes

limite de ce système de classification est l’absence de prise en compte des symptômes communs à la manie et à la dépression. En effet, sur les neuf items, dont cinq sont nécessaires pour établir le diagnostic d’épisode dépressif majeur, quatre sont possiblement rencontrés dans la manie : la modification du poids, les troubles du sommeil, les perturbations psychomotrices et la diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer. Il suffit donc de réunir un seul critère spécifique de l’épisode dépressif majeur chez un patient présentant un état maniaque pour remplir les critères d’état mixte. Cette définition est conservée pour la dernière version révisée du DSM : le DSM-IV-TR (APA, 2000).

Tableau V. Critères diagnostiques de l’épisode mixte selon le DSM-IV (APA, 1994)

A. Les critères sont réunis à la fois pour un épisode maniaque et pour un épisode dépressif majeur (à l’exception du critère de durée), et cela presque tous les jours pendant au moins une semaine.

B. La perturbation est suffisamment sévère pour entraîner une perturbation marquée du fonctionnement professionnel, des activités sociales ou des relations interpersonnelles, ou pour nécessiter l’hospitalisation afin de prévenir des conséquences dommageables pour le sujet ou pour autrui, ou il existe des caractéristiques psychotiques.

C. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex. substance donnant lieu à abus, médicament ou autre traitement) ou d’une affection médicale générale (p. ex.

hyperthyroïdie).

NB : Des épisodes d’allure mixte clairement secondaires à un traitement antidépresseur (médicament, sismothérapie, photothérapie) ne doivent pas être pris en compte pour le diagnostic de trouble bipolaire I.

La classification internationale des maladies (OMS, 1993) inclue pour la première fois les états mixtes dans sa dixième version. L’épisode mixte est alors caractérisé par la présence de symptômes hypomaniaques, maniaques et dépressifs, intriqués ou alternant rapidement (en l’espace de quelques heures), ces symptômes persistant au moins deux semaines (tableau VI.).

Tableau VI. Critères diagnostiques de l’épisode affectif mixte isolé selon la CIM-10 (OMS, 1993)

A. L’épisode actuel est caractérisé, soit par la présence simultanée, soit par une alternance rapide (en l’espace de quelques heures), de symptômes hypomaniaques, maniaques et dépressifs.

B. Des symptômes maniaques et dépressifs doivent être conjointement au premier plan, la plupart du temps, pendant une durée d’au moins deux semaines.

CIM-10 et DSM-IV sont donc divergents, tant sur la durée (une semaine contre deux) que sur la cooccurrence des troubles. La CIM-10 conserve l’alternance rapide du DSM-III-R mais à l’échelle de quelques heures ce qui rend la distinction encore plus difficile avec la labilité de l’humeur, d’ailleurs fréquemment présente en cas d’état mixte. En revanche, l’avantage par rapport au DSM-IV est la prise en compte des hypomanies mixtes et des épisodes mixtes de moindre intensité.