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2.2 Les processus cellulaires au cours du syndrome d’ischémie-reperfusion

2.2.1 L’endothélium

Les cellules endothéliales (CE) forment l’endothélium. Il y en a trois grands types : l’en- dothélium vasculaire artériel (celui que nous avons étudié dans ce projet), l’endothélium vasculaire veineux et l’endothélium vasculaire lymphatique. La représentation d’une ar- tère de gros calibre est proposée en Figure2.2.

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FIGURE2.2 – Représentation d’une artère de gros calibre.Les grosses artères sont com-

posées de trois couches. Une couche interne ou intima qui est composée des CE formant l’endothélium et qui est en contact direct avec le plasma et les éléments figurés du sang (érythrocytes, leucocytes, plaquettes). La couche intermédiaire est appelée média et est composée d’une limitante élastique interne et de cellules musculaires lisses. La couche la plus externe est appelée adventice et est composée d’une limitante élastique externe et d’une couche de fibroblastes.

sein de quatre grandes familles : le contrôle de la de l’hémostase primaire et de la coa- gulation, le contrôle du tonus vasculaire, le contrôle de la prolifération endothéliale et le contrôle de l’inflammation (Figure2.3). Elles sont les premières cellules à constater l’arrêt de la perfusion sanguine du fait de leur localisation anatomique. Ajoutons que toutes les CE artérielles ne sont pas semblables et que de nombreux types de CE coexistent au sein d’un organe par exemple le rein (voir par exemple la revue [Molema & Aird 2012]).

Ainsi, les CE ont pour seul point commun le fait qu’elles soient organisées en mo- nocouche cellulaire. Comme nous venons de le dire, selon leur localisation, les CE dif- fèrent en de nombreux points du fait de leur fonction spécifique (Figure2.4) : les artères et veines sont les vaisseaux de conduction du sang (riche et pauvre en oxygène respective- ment à l’exception de la circulation pulmonaire), la microcirculation est composée des ar- térioles (très importante dans le contrôle de la pression artérielle), des capillaires (lieu des échanges gazeux et liquidiens entre le sang et les tissus) et des veinules (lieu critique pour la diapédèse des leucocytes lors de l’inflammation) et enfin, les vaisseaux lymphatiques qui ont pour rôle de faire circuler les cellules du système immunitaire dans les organes lymphoïdes, de faire circuler certains lipides (les chylomicrons) et également de jouer le rôle de tampon au niveau du liquide interstitiel pour éviter la formation d’œdèmes.

Lors de l’IR, l’inflammation résultante active et fait basculer les CE d’un phénotype anticoagulant/anti-inflammatoire vers un phénotype pro-coagulant/pro-inflammatoire.

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FIGURE2.3 – Les grandes fonctions de l’endothélium vasculaire.L’endothélium vascu-

laire contrôle la coagulation, le tonus vasomoteur, la perméabilité vasculaire, mais éga- lement sa propre croissance via de nombreux facteurs sécrétés ou exprimés à sa mem- brane. NO = Nitric Oxide, TFPI = Tissue Factor Pathway Inhibitor, TM = Thrombomo- duline, PGI2= Prostaglandine I2, PAI-1 = Plasminogen Activator Inhibitor 1, vWF = von Willebrand Factor, VCAM-1 = Vascular Cell Adhesion Molecule-1, ICAM-1 = Intercellular Cell Adhesion Molecule-1, IL-6 = Interleukine 6, CXCL-8 = Chemokine (C-X-C motif) Li- gand 8, CCL-2 = Chemokine (C-C motif) Ligand 2, VEGF = Vascular Endothelial Growth Factor, β-FGF = β-Fibroblast Growth Factor, TGF-β = Transforming Growth Factor-β, PDGF = Platelet-Derived Growth Factor, EDHF = Endothelium-Derived Hyperpolarizing Factor, EDRF = Endothelium-derived Relaxing Factor.

On parle de dysfonction endothéliale [Pober & Sessa 2007]. Il y a deux types d’activation endothéliale :

• L’activation endothéliale de type I qui passe par l’activation des récepteurs à 7 do-

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FIGURE 2.4 – Les trois grandes familles d’endothélium : artériel, veineux et lympha-

tique.

à l’activation de la voie Rho. Elle permet d’initier la réponse inflammatoire avec une production de PGI2, de NO et la présentation de P-sélectine. Cette réponse n’est ef- fective que durant 10 à 20 minutes, au-delà, les récepteurs se désensibilisent pour éviter un emballement de la réponse inflammatoire [Feng et al. 1998]. Elle aboutit également à la rétraction des CE et à la formation d’interstices entre elles permettant

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le passage de protéines plasmatiques du compartiment vasculaire vers le compar- timent interstitiel (formation d’œdèmes) ;

FIGURE2.5 – Dysfonction endothéliale de type I.[Pober & Sessa 2007]

• L’activation endothéliale de type II qui est activée lorsque l’inflammation dure plus de 20 minutes et renforce l’activation de type I en permettant également l’éléva- tion du Ca2+ intracellulaire, mais surtout la synthèse de gènes codant pour des protéines pro-inflammatoires (AP-1, Activator Protein 1 ; NFκB, Nuclear Factor-κB) et permettant un recrutement (CCL2, Chemokine (C-C motif) Ligand 2 encore appelée MCP1, Monocyte Chemotactic Protein 1) et une adhésion plus ferme des leucocytes (E- sélectine ; ICAM-1, InterCellular Adhesion Molecule 1 ; VCAM-1, Vascular Cell Adhe- sion Molecule 1). Elle dépend notamment des cytokines pro-inflammatoires TNFα (Tumor Necrosis Factor α) et de l’interleukine 1 (IL-1).

Ainsi, l’activation endothéliale aboutit à : une augmentation de la perméabilité vascu- laire, un déséquilibre entre la production de facteurs pro-relaxants et pro-contractants et la genèse d’un environnement pro-inflammatoire permettant l’activation de la coagulation et du système du complément. Le déficit de production de substances pro-relaxantes va aboutir à une diminution de la vasorelaxation au moment de la reperfusion aboutissant au phénomène de no reflow. Ce phénomène est caractérisé par une augmentation de l’im- pédance des microvaisseaux [Rezkalla & Kloner 2002,Reffelmann et al. 2003] qui a pour

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FIGURE2.6 – Dysfonction endothéliale de type II.[Pober & Sessa 2007]

conséquence la perte du greffon. Cela indique que les CE sont importantes dans l’adap- tation à l’IR, mais qu’elles ne sont pas seules à agir : les péricytes (cellules entourant les vaisseaux et contrôlant leur diamètre par leur contraction/relaxation) ont un rôle crucial dans cette adaptation du tonus vasculaire au cours de l’IR comme cela a récemment été démontré [Yemisci et al. 2009].

Les conséquences de certaines pathologies aiguës peuvent parfois être retrouvées dans le cadre de l’IR. Par exemple, le syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA) résulte d’une inflammation du parenchyme pulmonaire aboutissant à une lésion des parois alvéo- laires et à l’apparition d’un œdème pulmonaire dit lésionnel. Dans le cadre de la transplan- tation pulmonaire, il peut se produire exactement le même processus du fait de l’inflam- mation induite par l’IR indissociable de cette procédure [de Perrot et al. 2003]. D’un point

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de vue mécanistique, cette augmentation de la perméabilité vasculaire a été démontrée dans un modèle in vitro d’hypoxie de cellules endothéliales dans lequel il était retrouvé une réduction des niveaux d’AMPc [Ogawa et al. 1992] mais également in vivo chez des sou- ris exposées à une hypoxie de (atmosphère à 8% d’O2durant 4h) [Thompson et al. 2004]. L’IR aboutit donc à une inflammation dite stérile du fait de l’absence de micro-organismes pathogènes [Chen & Nuñez 2010,Shen et al. 2013]. L’inflammation est une réponse non spé- cifique et systématisée à une agression de l’organisme. Cette agression peut être liée à une infectionpar un pathogène qui va alors engendrer une cascade de signaux aboutissant au recrutement de cellules inflammatoires et plus particulièrement de cellules de l’immunité innée telles que les polynucléaires neutrophiles et les macrophages. Ces cellules vont alors phagocyter les agents pathogènes et vont sécréter des cytokines et chimiokines permettant l’activation de lymphocytes et donc la réponse immunitaire adaptative. De façon similaire à l’éradication des pathogènes, la réponse inflammatoire est également primordiale dans le contexte de réparation tissulaire suite à des lésions telles que les traumatismes, l’IR, ou des lésions induites par des agents pharmacologiques tels que la cyclosporine ou le lithium. On parle alors d’inflammation stérile du fait que l’inflammation apparait en l’absence de tout micro-organisme pathogène. L’inflammation stérile est discutée dans le Chapitre2.