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Grâce à l’analyse de l’énonciation, nous avons trouvé un style d’énoncé personnel chez Martine qui peut être qualifié de sobre (Unrug). Avant de répondre à chaque question elle réfléchissait et elle répondait de manière précise et succincte. La précision se manifestait par des références chronologiques définies (années, périodes de temps), par son langage technique, et par un discours direct caractérisé par l’absence d’hésitations. Dans sa majorité, ses réflexions portent sur ses avis sur les sujets abordés, les sentiments et les difficultés qu’elle rencontre. Il est à noter qu’elle n’illustre pas souvent son propos par des exemples. Au moment de revenir sur certaines thématiques elle est cohérente avec ce qu’elle a dit auparavant. Tant l’absence d’hésitation que la recherche de cohérence et l’absence de beaucoup d’exemples pourraient être interprétés comme des indicateurs associés à un discours contrôlé de sa part (Unrug).

2. Son parcours de formation et professionnel

Martine a 28 ans, elle est en couple et elle n’a pas d’enfants. Après un BAC en Sciences et Techniques du Laboratoire elle a commencé ses études de médecine et deux ans plus tard a décidé de commencer les études pour être infirmière.

Elle a obtenu son diplôme d’infirmière en juin 2003 et a commencé immédiatement à travailler dans une clinique privée. Là, elle est entrée dans un service de suite de couches (pour les femmes qui ont accouché).

Après être restée à ce poste pendant quatorze mois, elle a demandé à aller au bloc opératoire parce qu’elle s’ennuyait. Martine considérait que le travail au service comme infirmière était trop routinier et trouvait que le travail au bloc changeait beaucoup. La transition du service au bloc n’a pas été facile car cela lui a demandé une adaptation au nouveau rythme de travail, aux personnes différentes et aux spécialités.

Parce que j’ai commencé à m’ennuyer un petit peu dans mon service. Je trouvais que je n’ apprenais plus rien et que c’était toujours la même chose, la répétition, et je ne voulais plus faire ça. Voilà, je m’ennuyais, alors que le bloc, c’était plus... ça change tous les jours, et on ne fait pas la même chose, il y a beaucoup de chirurgiens, il y a beaucoup d’ habitudes.

Elle est donc entrée dans un bloc pluridisciplinaire en juillet 2004 et a appris de bonnes bases de ses collègues. Avant d’entrer en formation, son rythme de travail était de 35 heures hebdomadaires, mais elle devait faire des gardes pour lesquelles il fallait être disponible une fois par semaine et un week-end par mois pendant la nuit. Elle estimait que dans sa clinique ils faisaient quarante interventions par jour ce qui constitue d’après elle un rythme de travail intense36. Mais elle exprime aussi le plaisir qu’elle trouvait dans son travail :

Ça me...ça me plaît en fait. Ça me plaît beaucoup de faire ça.

Martine raconte que c’est elle qui a fait la démarche dans son établissement pour faire la formation d’Ibode et il est important de remarquer qu’il n’y a pas d’autres infirmières de bloc diplômées. Étant donné que les frais de formation étaient élevés et que les horaires étaient à

36 Martine fait la comparaison par rapport aux hôpitaux publics où elle considère que le rythme de travail est plus

temps complet, elle ne pouvait plus travailler. Donc une fois passé son concours d’entrée elle a demandé à sa clinique de lui financer cette formation. Comme la clinique qui l’employait n’acceptait pas de financer sa formation, elle a décidé de s’adresser à d’autres établissements. Ayant reçu des offres de travail et de formation de la part d’autres établissements elle a négocié une nouvelle fois son contrat avec sa clinique. Et là ils ont décidé de lui financer la formation pour qu’elle reste dans l’établissement. En octobre 2006 elle est entrée au Centre de Formation pour faire les études d’Ibode.

Donc, c’était, soit ma clinique s’engageait à faire la même chose ou alors je démissionne et je prends un contrat avec un autre établissement.

Pour Martine la formation va produire des changements dans sa vie professionnelle parce que comme on l’a déjà dit, elle sera la seule infirmière de bloc opératoire diplômée à son retour. En fait, au moment du premier entretien, elle raconte qu’on lui a offert le poste de chef de bloc opératoire dans cette clinique mais qu’elle hésite à l’accepter car le poste pourrait devenir une tension entre sa vie professionnelle et ses envies dans le domaine de sa vie privée :

(...) J’ai fait des études et pour l’instant il faut quand même que je pense à ma vie personnelle et que je

construise quelque chose...je veux avoir des enfants, bon... donc… voilà.

Elle ajoute qu’elle fait la formation pour son épanouissement personnel et en même temps pour l’utilité que le diplôme aura au moment de changer de travail.

(...) Mais pour moi, pour mon épanouissement personnel et puis par rapport à ma carrière aussi, parce que si j’ai envie de changer de poste, si j’ai envie d’avancer, un diplôme c’est un tremplin pour faire d’autres choses (...) Ça sera mieux au moment de chercher du travail, le champ d’épanouissement d’être Ibode que d’être infirmière de bloc.

Nous pourrions conclure que ses initiatives sont les suivantes : d’abord demander d’entrer au bloc, ensuite faire de la formation en la négociant avec la clinique pour les convaincre de la financer. Et si nous ajoutons son idée que cette formation va produire des changements dans sa vie professionnelle, tant dans un futur proche qu’ultérieurement, nous trouvons beaucoup d’indicateurs de la motivation de la part de Martine pour s’engager dans la formation d’Ibode. Plus précisément nous nous référons ici au sentiment d’auto-détermination comme facteur de motivation37, et aussi aux motifs intrinsèques épistémiques et extrinsèques vocationnels

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Le concept de sentiment d’autodétermination appartient à E. Deci et R. Ryan, cité ici par Ph. Carré (1999) et souligne le rôle du libre choix des sujets et l’effet qu’être conscient de son autonomie d’agir a sur la motivation à

d’engagement en formation (Ph. Carré, 1999)38

. Nous pourrions faire le lien entre cette motivation positive et les représentations liées à la construction de sens par rapport aux stages.

Attribution de sens aux situations de stage

Nous exposons ici les résultats de l’analyse qui a pour objectif de comprendre la construction de sens liée à la situation de stage chez Martine. L’organisation de l’analyse vise à : énoncer les caractéristiques les plus importantes de la situation. Nous analysons d’abord les représentations liées aux stages et ensuite, les représentations associées au rapport entre le stage et la situation de travail.

3. La situation de stage

Grâce à l’analyse thématique du discours nous avons classé les représentations qui sont liées à la situation de stage en catégories et sous catégories :

Tableau 2. Les thématiques associées aux stages

Thématiques associées à la situation de stage selon Martine

L’image des autres La représentation du stagiaire, la représentation du travailleur

Les processus d’adaptation au stage Moment (début du stage, début des stages), temps d’adaptation, éléments auxquels s’adapter.

Le processus d’apprentissage

Lien avec l’expérience préalable, exposition à la multiplicité d’espaces et de personnes, rapport au formateur, résultats (combler un manque, pouvoir manipuler le nouveau matériel, utiliser des machines).

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Le motif épistémique fait référence à l’apprentissage comme source de plaisir et motif de motivation pour apprendre en lui-même. Le motif extrinsèque vocationnel s’oriente vers l’acquisition des compétences nécessaires pour le développement de la carrière professionnelle.

L’organisation du stage Durée, fonctions de l’encadrement (protection, évaluation, prise en charge).

Nous analysons de manière dynamique les thématiques ici présentées dans la partie qui suit.