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1-LES RESULTATS DE L'ETUDE DESCRIPTIVE 1.1 Les caractéristiques des foyers

3- L’ANALYSE DES RESULTATS 3.1 L’étude descriptive

3.1.1- Les résultats généraux

De par le faible échantillon et la répartition inégale des foyers selon les caractéristiques, nous n’avons pas pu faire une étude comparative entre ces différentes caractéristiques. Néanmoins, on a pu voir apparaître des tendances selon certaines caractéristiques.

Les résultats généraux de notre étude sont, pour la majorité, comparables aux précédentes thèses. Nous pouvons mettre en parallèle ces résultats avec les thèses de Samuel GUILLAUME (9) et Sandrine LAVAU-DENES (10). Concernant la thèse de Guillaume ANTUNES (1), il est difficile de faire un comparatif car il n’ a pas répertorié les médicaments par boîtes mais par nombre de comprimés et il n’a recueilli que les formes orales, sèches et liquides, et a mis de côté toutes les autres voies d’administration (cutanée, oculaire, nasale, intramusculaire …etc.) ce qui n’est pas notre cas. Néanmoins, certains résultats semblent intéressants. Ils sont répertoriés dans le tableau ci-dessous :

Thèse Sandrine LAVAU- DENES (1998) Samuel GUILLAUME (2010) Guillaume ANTUNES (2013) Notre thèse

Nombre moyen de boîtes par foyer 46 24 27,7 49

Nombre moyen de boîtes périmées (pourcentage) 8,5 7,3

(30,33%) (12%)

6,65 (13,5%)

Pourcentage des foyers présentant des périmés 74% _ _ 60%

Pourcentage d’emballages neufs 33,5% _ _ 56,9%

Pourcentage de spécialités ayant une indication connue _ 73,6% _ 81,2%

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Nos résultats se rapprochent de ceux de S. LAVAU-DENES, qui a utilisé une méthode similaire, mais la population étudiée est différente, sans critère d’âge. Le seul résultat qui diffère est le nombre d’emballages neufs qui peut être expliqué par la différence de population étudiée et la période de réalisation de ce travail datant de 1998. L’écart de temps entre les deux travaux pourrait nous montrer une tendance au stockage et notamment de médicaments non entamés, plus important à notre époque.

Le nombre moyen de boîtes est très différent pour les thèses de S. GUILLAUME et G. ANTUNES. Cela pourrait s’expliquer par une différence de population étudiée pour la première et par une différence de nombre de foyers inclus pour la seconde. Pour S. GUILLAUME, même si la population cible est la même concernant l’âge, il n’a inclus que les patients pouvant gérer seuls leur traitement. Il s’agit probablement de patients plus autonomes, capables de réaliser un tri régulier dans leurs pharmacies, et de gérer les stocks plus facilement. Concernant la thèse de G. ANTUNES, il n’a inclus que 15 foyers. La population est très faible ce qui explique cette différence de résultat.

Une étude anglaise de 1982 (37) retrouvait une moyenne de 22,8 boîtes de médicaments parmi les 130 familles visitées ce qui est largement inférieur à notre étude, mais la population, l’âge et la période ne sont pas les mêmes.

Dans notre étude, le gisement de médicaments non utilisés est important puisqu’on retrouve un nombre important de médicaments périmés, d’emballages neufs, mais également de médicaments arrêtés (23,6%). On ne peut bien évidemment pas additionner ces chiffres puisque certains médicaments arrêtés ont pu être comptabilisés parmi les périmés et les emballages neufs, et inversement les emballages neufs parmi les périmés et les médicaments arrêtés.

Il est tout à fait normal de voir que le traitement chronique est important en nombre de boîtes et en coût puisque la population cible concerne les plus de 65 ans qui présentent potentiellement plus de pathologies chroniques et donc plus de traitement au long cours. Il est, par ailleurs, rassurant de voir la faible proportion de périmés dans les médicaments chroniques (8,3% soit 1,88 boîte du traitement chronique par foyer en moyenne). Concernant les emballages neufs de cette catégorie, cela peut être normal d’en retrouver car certains patients ont pu faire leur renouvellement juste avant ma venue.

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Par contre, on peut voir un nombre de médicaments arrêtés du traitement chronique important (16,5% soit 3,75 boîtes en moyenne). Ce chiffre s’explique par une pharmacie familiale présentant un stockage excessif essentiellement sur le traitement chronique, avec un nombre de boîtes arrêtées et périmées très important.

Mais de manière plus générale sur la pharmacie familiale, il n’est en revanche pas normal de trouver des traitements aigus arrêtés. Lorsqu’un traitement aigu est terminé, si le conditionnement est adapté et le patient observant, il ne devrait pas rester de comprimés à la fin du traitement. Concernant des traitements pris à la demande, il n’est également pas normal de trouver des boîtes périmées. Le patient pourrait alors prendre des médicaments périmés, moins efficaces et ne soulageant pas suffisamment les symptômes. Il y a manifestement un manque de tri régulier dans ces pharmacies.

Une hypothèse pour expliquer le manque de tri, la mauvaise gestion de l’armoire à pharmacie et donc un stockage excessif qui en résulte, serait l’absence de conscience du caractère dangereux des médicaments, ainsi que le manque de connaissance sur les risques d’interactions médicamenteuses.

C’est concernant le traitement aigu que l’on a vu le plus de stock, de médicaments périmés, de médicaments arrêtés (que le traitement soit fini ou non) et d’emballages neufs. Il est tout de même curieux de trouver en moyenne 54,5% d’emballages neufs parmi le traitement aigu. En effet, lorsqu’on parle de traitement aigu, on parle de traitement donné pour une pathologie intercurrente et sur une courte durée. Pour quelles raisons le nombre d’emballages neufs de traitement aigu est-il aussi important ? Est-ce que les patients prennent bien les traitements jusqu’au bout ? Est-ce que les boîtes contiennent plus de comprimés qu’il n’en faut pour la totalité du traitement ? Est-ce que les prescriptions contiennent trop de boîtes ordonnées par rapport à la durée du traitement ?

C’est pour répondre à ces questions que l’analyse du stockage des médicaments nous a paru intéressante.

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3.1.2- Les résultats par caractéristique des foyers

On peut voir apparaître des corrélations entre le stockage des médicaments et certaines caractéristiques des foyers. Ces chiffres sont à prendre avec précaution dans la mesure où nous n’avions pas un grand échantillon.

Néanmoins, on a pu remarquer, avec logique, que le nombre élevé de pathologies paraît être un facteur de stockage de médicaments notamment pour les emballages neufs de traitement chronique et les boîtes périmées de traitement aigu. Un nombre élevé de pathologies chroniques entraîne un nombre de traitements chroniques plus élevé. Cette population peut aussi présenter de nombreuses fragilités pouvant entraîner des pathologies intercurrentes plus fréquentes. Le tri dans les pharmacies familiales peut paraître plus difficile à faire pour cette population.

De la même manière, le fait de ne pas avoir de tiers aidant à la gestion des médicaments paraît être un facteur de stockage et à l’inverse, l’intervention d’un ou plusieurs TPS ou l’association TPS/TNPS paraît diminuer le stockage à domicile des médicaments chroniques. En revanche, l’association TPS/TNPS ne diminue pas le stockage concernant le traitement aigu, au contraire. Multiplier les intervenants est intéressant concernant le traitement chronique puisque le gisement de MNU est faible à ce niveau, mais il apparaît être l’inverse concernant le traitement aigu. Lorsque de nombreux intervenants gèrent les traitements, en règle générale, il s’agit de situation où le patient est plus dépendant et demande plus d’attention. Le temps consacré à la gestion des médicaments est alors moins important, chaque intervenant se préoccupant surtout du traitement chronique. Le manque de communication entre les intervenants est peut-être aussi une explication. Cette situation nécessite une coordination dans la gestion de la pharmacie familiale qui peut parfois faire défaut. Il serait peut-être plus intéressant, dans ces cas-là, de désigner une seule personne à la gestion de la pharmacie familiale plutôt que multiplier les intervenants.

Concernant le lieu de consultation, les consultations faites au cabinet entraînent un gisement de MNU plus important que celles faites en visite. Lors des visites, le stock de médicaments présents au domicile des patients est facilement accessible par le médecin, et ce dernier peut prescrire uniquement le nécessaire. Le critère « consultation au cabinet et en visite » n’est pas forcément exploitable car l’échantillon n’est que de 3 patients.

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Posséder plusieurs lieux de conservation des médicaments entraînerait également un stockage excessif, et cela est d’autant plus vrai pour les médicaments du traitement aigu. Multiplier les lieux de rangements pourrait entraîner un manque de vérification systématique, un manque de tri dans la pharmacie familiale. Cela pourrait montrer une certaine négligence vis-à-vis des médicaments et peut-être une banalisation du médicament en lui-même et de ce qu’il représente pour le patient.

En conclusion de cette étude descriptive, on a pu voir apparaître des liens entre le stockage excessif des médicaments et certaines caractéristiques de foyers. On pourrait ainsi établir une corrélation entre le stockage excessif des médicaments à domicile et le nombre élevé de pathologies des patients, l’absence d’un tiers aidant à la préparation des médicaments, ou au contraire la multiplication des intervenants, la consultation au cabinet et le nombre élevé de lieux de rangement.

3.1.3- Les génériques

La proportion des génériques retrouvés est relativement faible, 30,7%. Ils représentent 38,3% des traitements chroniques et 24,3% des traitements aigus.

En 2012, près de 20% de boîtes de médicaments vendues étaient des génériques (38). L’Avenant n°9, sur la Délivrance des Médicaments Génériques, signé en novembre 2014, fixe à 85% le taux national de pénétration des médicaments génériques concernant 26 molécules ciblées, en 2016 (39).

La différence trouvée entre l’objectif et notre étude est due au fait que notre étude a recensé tous les médicaments génériques, sans se limiter aux 26 médicaments ciblés. En revanche, le taux de génériques de notre étude est supérieur à celui du rapport de la Sécurité Sociale de 2010 (18,7%) (38). La proportion des médicaments génériques aurait tendance à croître au fil des années. Cette hypothèse est renforcée par une étude montrant qu’en 2013, la part des génériques représente 30% du marché pharmaceutique (24).

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3.2- L’étude qualitative

Pour cette enquête, les patients nous ont donné les raisons qui influencent un stockage excessif des médicaments dans leur domicile. Nous avons obtenu des réponses variées et très intéressantes.

Un point important à retenir dans cette étude est que certains patients interrogés n’avaient pas la même représentation d’un « stockage excessif de médicaments ». Ils ne reconnaissaient pas avoir un nombre important de médicaments, et notamment de boîtes non utilisées. Ils estimaient leur pharmacie correctement tenue.

La principale cause évoquée par les patients est la différence du nombre de comprimés entre les boîtes de différentes spécialités concernant le traitement chronique. Ainsi, ils se retrouvent souvent, alors que la plupart des boîtes sont finies, avec une avance de certains médicaments. Cette avance se répercute mois après mois. Et concernant le traitement aigu, ils évoquent là encore, un trop grand nombre de comprimés dans les boîtes, par rapport au traitement prescrit. Pour les patients, il s’avère que le conditionnement est un problème majeur. Ils le considèrent souvent mal adapté et l’incriminent dans cet excès de médicaments.

Certains patients ont également avoué une mauvaise observance autant pour les traitements aigus que chroniques. En règle générale, c’est par simple oubli, mais parfois il s’agit d’une mauvaise acceptation de la maladie. Un défaut d’éducation sur les pathologies chroniques, asymptomatiques, peut entraîner une mauvaise observance. La mauvaise observance thérapeutique est difficile à quantifier, mais on estime que 30 à 60% des patients avec des pathologies chroniques sont peu ou non-observants avec des degrés divers entre les patients (40).

De nombreux patients ont également évoqué une surprescription de médicaments. La poly-médication chez les personnes âgées est responsable de la survenue d’effets indésirables, d’interactions médicamenteuses, de chutes et d’un certain nombre d’hospitalisations (41, 42). Une prescription raisonnée, en accord avec les recommandations, est à privilégier. Les patients sont également demandeurs d’une prescription plus adaptée comme le montre notre étude. Cette inobservance thérapeutique peut également être en

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lien avec un manque de confiance dans les médicaments et plus particulièrement des génériques, évoqué par les patients dans notre étude.

En règle générale, face à un excès de stock de médicaments, la plupart des patients réagissent en le disant à leur médecin ou pharmacien, et inversement, les professionnels de santé se renseignent avant de prescrire ou délivrer les traitements aux patients. Mais ces mesures ne sont visiblement pas suffisantes ou peut-être pas suffisamment systématiques puisqu’on retrouve tout de même des médicaments non-utilisés en nombre important.

En matière de tri des médicaments, les patients sont plein de bonne volonté et souhaitent avoir une pharmacie bien tenue. Mais lorsqu’on répertorie le nombre de médicaments périmés et arrêtés, on s’aperçoit qu’ils ne réalisent finalement pas régulièrement ce tri. Pour ces patients âgés, ce processus peut paraître difficile. Certaines co-morbidités, notamment les déficiences visuelles, peuvent compliquer le tri des périmés puisque la date de péremption est souvent écrite en petits caractères, difficiles à déchiffrer à ce moment-là. J’ai, par ailleurs, été étonnée du devenir des médicaments pour certains patients qui disent se débarrasser des médicaments aux ordures ménagères, ou les brûlent. Il y a visiblement un manque de communication sur la nécessité du recyclage des médicaments en matière de protection de l’environnement. Cette hypothèse est renforcée par les réponses sur la connaissance du recyclage médicamenteux. Aucun des patients ne connaissait l’organisme Cyclamed. Et certains ne savaient pas que le recyclage humanitaire ne se faisait plus. Les patients sont plus motivés par le recyclage humanitaire que par le recyclage environnemental (43), ainsi l’arrêt du recyclage humanitaire peut expliquer un intérêt moins important des patients vis-à-vis du recyclage médicamenteux. L’important à retenir est que peu de patients déclarent ne pas recycler les médicaments et surtout peu d’entre eux déclarent jeter les médicaments aux ordures. La plupart des patients ont des bonnes habitudes qu’il faut transmettre à ceux ne recyclant pas les médicaments.

Par ailleurs, 2 des patients interrogés avaient déjà utilisé des antibiotiques en automédication, malgré la communication faite autour de l’importance de demander avis au médecin traitant avant une prise d’antibiotique, et également l’information médiatique relayant la phrase « les antibiotiques, c’est pas automatique ». Dans une étude (44), des chercheurs ont estimé à 3,1% l’automédication par des antibiotiques. Une des raisons à cette automédication est l’utilisation d’antibiotiques précédemment prescrits pour des

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symptômes similaires. Dans notre étude, les antibiotiques pris correspondaient en effet à des restes de traitements qui avaient été prescrits pour les mêmes symptômes.

Un stockage excessif de médicaments entraîne un certain nombre de risques et notamment chez une population fragile. Parmi ces risques, on peut noter des erreurs dans la prise médicamenteuse, un surdosage de certaines spécialités, la survenue d’effets indésirables et des interactions médicamenteuses. Afin de diminuer ce stock et ces risques, un certain nombre de solutions s’offre à nous :

- Réduire le stock par la délivrance médicamenteuse unitaire

- Améliorer l’implication des professionnels de santé (médecins, pharmaciens, infirmiers) dans la surveillance de la gestion médicamenteuse des patients, et de leur armoire à pharmacie.

- Améliorer la communication et l’information faite aux patients concernant les médicaments. Favoriser l’éducation thérapeutique.

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4- LES SOLUTIONS POUR DIMINUER LES STOCKS DE MEDICAMENTS A DOMICILE

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