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3   LES MODES DE PRODUCTION AGRICOLE ALTERNATIFS 51

3.2 Catégorisation et description des types de pratiques agricoles alternatives 55

3.2.2 L’agriculture biologique 57

L’agriculture biologique est souvent citée comme alternative à la culture intensive et comme façon d’améliorer les rendements de l’agriculture traditionnelle. Telle que définie par l’International Federation of Organic Agriculture Movements (IFOAM) cette pratique se base sur quatre principes, soit la santé, l’écologie, la justice et la précaution (IFOAM, 2009).

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En ce sens, l’agriculture biologique devrait soutenir et contribuer à l’amélioration de la santé. La santé du point de vue d’IFOAM est très inclusive et holistique puisqu’elle comprend tout ce à quoi peut toucher l’agriculture, soit la santé du sol, des plantes, des animaux, des humains ainsi que celle de la planète, le tout comme une entité indivisible. Ce type d’agriculture doit également être basé sur les cycles écologiques. Cette affirmation implique une connaissance de ces cycles et de l’écosystème pour travailler en accord avec ceux-ci afin de pouvoir en bénéficier de façon maximale. Tel que tout juste mentionné, une bonne source de savoir à cet égard est l’ensemble des connaissances traditionnelles que détiennent les petits paysans et dont la valorisation est fortement recommandée par la FAO, mais également dans le Rapport de l’International Assessment of Agricultural Science and

Technology for Development (IAASTD). Cette approche implique donc un changement de paradigme revendiqué par les militants pour l’agriculture biologique. Changement visant le passage d’une prémisse selon laquelle l’Homme doit conquérir la nature pour survivre, vers une prémisse où celui-ci doit apprendre de la nature afin de bénéficier de ses services (Jordan, 2008).

L’équité, la justice et le respect sont également au centre de l’agriculture biologique et s’appliquent autant entre les individus qu’entre les individus et leur environnement. Cela sous-entend entre autre que les participants à ce système doivent bénéficier d’une bonne qualité de vie et que les systèmes de production et de distribution soient ouverts, équitables et qu’ils tiennent compte des coûts réels, donc qui internalisent les coûts environnementaux et sociaux (IFOAM, 2009).

Ce survol des principes de l’agriculture biologique ne peut être considéré complet sans mentionner le principe de précaution. Principe selon lequel l’agriculture biologique devrait être gérée de façon responsable et précautionneuse afin de préserver la santé et le bien-être des générations futures, mais également de l’environnement.

L’objectif est d’encourager la gestion des ressources selon les cycles naturels pour augmenter la fertilité et l’activité biologique du sol via un accroissement de la qualité et de

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la quantité de matière organique présente dans celui-ci. Cette meilleure gestion vise à réduire les besoins en intrants extérieurs, notamment en engrais et en herbicides et à éliminer l’utilisation de tous produits de synthèse. D’ailleurs, le terme ‘biologique’ provient de l’utilisation d’intrants biologiques plutôt que synthétiques, ce qui constitue le cœur même de la pratique d’une agriculture biologique. Pour y parvenir, les agriculteurs biologiques doivent miser sur un environnement qui comprend une grande diversité d’espèces et une activité biologique importante (Greenpeace, 2009). Elle présente un fort avantage face à l’environnement du fait qu’en respectant ces principes grâce à une gestion holistique, l'agriculture biologique permet de maintenir et de renforcer la santé des agrosystèmes, notamment au niveau de la biodiversité, des cycles biologiques et de l'activité biologique des sols (FAO, 2011d).

Il va de soi que la pratique d’une agriculture biologique est moins dommageable pour l’environnement que celle de l’agriculture conventionnelle. Cependant, malgré les grands principes qu’elle énonce, la seule application réelle et contraignante concerne l’utilisation de produits synthétiques. Bien que cela entraîne souvent une transformation des pratiques, comme la culture en jachère et le compostage, rien ne garanti une pratique entièrement respectueuse de l’environnement. Conséquemment, un agriculteur qui pratique la monoculture, le tillage du sol (qui est une forme de labourage qui entraîne l’érosion du sol) et qui exporte ses produits sur de très grande distance, consommant de grandes quantités de carburant fossile pourrait très bien être certifié biologique (Jordan, 2008).

Un autre désavantage de l’agriculture biologique, qui concerne cette fois directement les petits paysans, est que d’un point de vue commercial, ce type d’agriculture doit être certifié par un tierce parti (Cazali, 2008). Puisque cette certification peut être onéreuse, cet aspect peut devenir un obstacle important pour les agriculteurs des PED dont les ressources financières sont souvent limitées et pour qui l’obtention de la certification peut s’avérer inabordable. Les frais de certification varient selon la surface et le type de production, mais selon Antoine Faure d’ECOCERT, un organisme certificateur, les frais sont d’environ quatre cents euros annuellement (ibid.). De plus, cette certification présente des avantages surtout lorsque la production est destinée à l’exportation puisque le marché intérieur pour

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les produits biologiques dans les PED est peu développé (Agriculture et agroalimentaire Canada, 2010). À priori, les PED étant de faibles consommateurs de produits biologiques, les avantages que présentent la certification pour les petits paysans sont minces puisque les produits biologiques sont destinés majoritairement à l’exportation, les principaux marchés étant situés en Europe et en Amérique du Nord (FAO, 2007). Or, la production des petits paysans est majoritairement destinée aux marchés locaux et à la consommation des ménages, les coûts reliés à la certification ont donc pour eux peu de retombées positives. Pour ces raisons, ce type d’agriculture n’est pas nécessairement la meilleure alternative disponible pour les petits agriculteurs des PED (Jordan, 2008).