• Aucun résultat trouvé

Partie II RECOMMANDATIONS

CHAPITRE 6 L’ORGANISATION ET LES ACTEURS

2. Nouvelles orientations de financement et d’incitations

2.1. L’affectation controversée de la TIPP

L’affectation d’une partie de la TIPP (taxe intérieure sur les produits pétroliers) aux transports collectifs 1 a souvent été évoquée et envisagée comme une

ressource complémentaire voire substitutive au versement transport.

Affecter une part de la TIPP au financement des transports collectifs apparaît de prime abord comme une solution séduisante et facile à mettre en œuvre pour résoudre les problèmes de financement. Cette solution offre à l’évidence un certain nombre d’avantages.

Cette taxe qui abondait jusqu’ici au budget de l’État et qu’on envisage de transférer partiellement aux régions et aux départements (TIPP - R), dans le cadre de la décentralisation, présente tout d’abord l’avantage d’être une

(1) Le GART demande à l’État depuis de nombreuses années l’affectation d’une partie de la TIPP pour le financement des transports collectifs.

- Chapitre 7 -

ressource dynamique. Elle apporterait aux collectivités une ressource pérenne et renforcerait leur autonomie tout en assurant le développement des politiques en faveur du transport collectif.

Plus encore, affecter une partie de cette taxe au financement des transports collectifs répondrait à une logique de développement durable. Elle taxerait l’usage de la voiture en la faisant contribuer au financement des transports collectifs qui offrent une alternative préférable du point de vue environnemental. Cela reviendrait à prélever des fonds sur le mode de transport qui contribue le plus à l’émission de gaz à effet de serre.

L’affectation de cette taxe pourrait aussi se justifier par le fait que la voiture profite de la fluidité de la circulation à laquelle contribuent les investissements de transport collectif.

Par ailleurs, cette taxe apporterait des fonds supplémentaires sans engendrer d’inefficacités économiques importantes dans la mesure où le trafic automobile est peu sensible à court terme à son augmentation.

Enfin, la charge du financement du transport collectif serait diluée sur l’ensemble du territoire et ne provoquerait donc pas autant d’effets négatifs que le versement transport sur les politiques de développement local ou sur les stratégies de localisation des entreprises.

Pour toutes ces raisons, cette taxe apparaît plutôt comme un moyen adapté pour renforcer les budgets des collectivités sans provoquer trop d’effets indésirables. Toutefois à l’analyse, cette solution n’apparaît pas si opportune. Plusieurs raisons ont été invoquées contre une telle affectation :

– des raisons juridiques liées au processus d’harmonisation en cours en Europe sur les accises des carburants et qui ne facilitent pas la justification et l’acceptation des modulations de cette taxe à l’échelon régional ;

– des raisons techniques autour du prélèvement lui-même dans la mesure où différencier les niveaux de la taxe suppose de mettre en place un système de prélèvement et de contrôle spécifique : ce système sera d’autant plus complexe qu’on voudra le mettre en œuvre au niveau infra-régional ; – enfin, des raisons de politique fiscale concernant les taxes sur les

carburants ; ces taxes s’inscriront de plus en plus dans une logique environnementale et énergétique (taxe sur le carbone émis) et seront donc

- L’économie et le financement du système des transports urbains -

susceptibles d’être utilisées pour financer d’autres politiques que celles des transports.

Toutes ces raisons techniques avancées pour ne pas affecter la TIPP au financement des transports collectifs pourraient sans doute être surmontées. Cependant, une partie du groupe ne souhaite pas retenir cette proposition en invoquant d’autres raisons.

Le contre-argument le plus sérieux repose sur la pertinence des mécanismes incitatifs induits par cette taxe qui permettrait de régler en partie le problème financier mais pas de transformer le système de transport dans son ensemble. Les analyses montrent en effet que les augmentations de la taxe n’auraient pas ou peu d’effet sur l’usage de la voiture et donc sur le partage modal et que les marges de manœuvre offertes par la TIPP seraient rapidement épuisées pour développer l’offre. Le groupe considère qu’on ne peut pas se contenter de développer l’offre de transport collectif sans réguler en même temps l’usage de la voiture en ville. Or de ce point de vue, la TIPP reste trop globale pour orienter les comportements. Si l’on souhaite faire supporter réellement le coût des services de la voiture particulière à ceux qui en profitent, il est nécessaire de pouvoir différencier la tarification selon les types d’usages et les périodes d’utilisation.

En conséquence, il ne semble pas opportun de créer une taxe additionnelle à la TIPP affectée localement au financement des transports collectifs, mais il va de soi, que dans le cadre de la régionalisation de la TIPP, celle-ci permettra d’abonder les budgets régionaux et facilitera le financement des politiques de transport qui seront mises en œuvre à cet échelon. Dans ce cas, c’est au niveau régional que devraient se faire les arbitrages, dans la mesure où les régions doivent également financer l’offre régionale de transport ferroviaire.

La TIPP n’apparaissant pas comme la meilleure des solutions, il faut s’orienter vers d’autres mécanismes qui ont le mérite de participer au financement des transports collectifs et d’avoir une action sur la régulation de la mobilité et sur le report modal. Certains sont déjà mis en place ou expérimentés avec un certain succès dans des agglomérations étrangères. Ils se révéleront à terme en tout cas nécessaires voire incontournables pour le développement des transports et des agglomérations.

- Chapitre 7 -