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ADMINISTRATIVES : LA CREATION DES CONSEILS DE PREFECTURE

L’ADMINISTRATION ACTIVE

Par analogie avec la juridiction judiciaire, certains auteurs se sont efforcés, progressivement, de déterminer des critères de définition de la juridiction administrative et, plus précisément, des critères assurant l’indépendance de cette juridiction par rapport à l’administration active372. Bien évidemment, comme nous l’avons déjà dit, ces critères ne sont pas ceux du début du dix-neuvième siècle, époque où seul le critère matériel permettait de définir une juridiction. La doctrine a donc évolué et, peu à peu, étayé sa définition d’une bonne juridiction. A l’aune de ces trois critères (matériel, organique et formel), certaines critiques contre le fonctionnement des Conseils de préfecture ont été formulées. Le propos est donc ici d’analyser ces éventuelles défaillances qui n’ont pas permis au Conseil de préfecture en général (et à celui de la Meurthe en particulier) d’être une juridiction administrative spécialisée digne de ce nom.

SECTION 1. UN CRITERE ORGANIQUE.

Au premier plan, se dessine un critère organique qui consiste à confier le pouvoir de juridiction à des organes spécialement institués à cet effet et surtout bien distincts de l’administration active. En effet, si tel n’est pas le cas, c’est alors le système de l’administrateur-juge -avec tous les risques que cela comporte pour le justiciable- qui s’impose.

Or, concernant ce premier critère, nous pouvons dores et déjà dire que le Conseil de préfecture de la Meurthe (mais cela est valable pour tous) est en quelque sorte un corps distinct de l’administration active qui, théoriquement, s’occupe à titre principal, de juger le contentieux administratif, à quatre exceptions prés. Il faut tout d’abord mentionner la présence comme président de droit d’un administrateur actif et non des moindres : le préfet. Deuxièmement, il nous faut souligner la participation des conseillers -individuellement ou en corps- à l’administration active. Troisièmement, il ne faut pas oublier que les Conseils de

372 En effet, il faut bien voir que le principe de séparation est, comme le dit Chevallier, ambivalent : il faut y voir à la fois l’indépendance de la juridiction administrative par rapport à l’autorité administrative mais également celle de l’action administrative par rapport à la juridiction (éviter dans le premier cas la tutelle de l’administration sur les décisions des juges, et interdire aux juges de faire des actes d’administration). Bien évidemment, seul le premier aspect de ce principe nous intéresse.

préfecture ont généralement leurs bureaux au sein même de la préfecture. Le quatrième et dernier point concerne le statut des conseillers de préfecture, lequel ne leur accorde pas de garanties suffisantes d’indépendance.

§ 1. LA PRESIDENCE D’UN ADMINISTRATEUR ACTIF.

Dans l’ensemble, les orateurs qui participent aux débats précédant l’adoption de la loi du 28 pluviôse an VIII, s’accordent à reconnaître que la séparation opérée entre l’administration active et la juridiction, n’est pas des plus nettes. La raison en est bien évidemment à la présence du préfet au sein du Conseil de préfecture. En outre, l’interprétation même des dispositions accordant voix prépondérante et présidence du Conseil au préfet, sont sujettes à discussion. Cependant, tandis que pour certains cette participation du préfet ne peut porter atteinte à l’impartialité des décisions rendues par le Conseil de préfecture, pour d’autres, cette immixtion du préfet est insupportable.

A) Une « ligne de démarcation » des plus imprécises.

Dès les débats sur le projet de la loi qui deviendra la loi du 28 pluviôse, la discussion devant le Tribunat, avait amené l’orateur Gillet de l’Oise, à prévenir du danger de cette présence et prépondérance du préfet : « la division, dit-il, de l’administration et du contentieux, est une de ces idées saines et justes auxquelles on ne peut se refuser d’applaudir ; mais je pense qu’entre ces deux parties, il faudra tirer une ligne de démarcation bien prononcée, et qu’elle ne l’est pas assez dans le projet. Je trouve que dans le projet le préfet se mêle trop souvent, et surtout avec trop d’influence, aux juges du contentieux ». Et ce même orateur tente de montrer les conséquences fâcheuses de cette présence du préfet en prenant l’exemple des nouvelles législations sur les émigrés et les biens nationaux qui placent le sort de propriétés privées (matière en principe dévolue au juge judiciaire) dans les mains du Conseil de préfecture et donc, du préfet373.

373 Ainsi, déclare-t-il : « Et observez de quelle conséquence cette influence peut être, quand nos lois ont pour ainsi dire placé toutes les propriétés dans le domaine administratif, par suite de la législation sur les émigrés, et celle sur l’aliénation des domaines nationaux. Les décisions qui tiennent le plus prés à la propriété des citoyens, sont prises administrativement. Sans doute cette législation des émigrés recevra des modifications. Le gouvernement le veut, parce que la justice et l’opinion générale les réclament également. Quant aux domaines nationaux, ils donneront encore lieu à de nombreuses contestations. Les ventes sont maintenues par la constitution, lorsqu’elles sont légalement faites : mais à quel caractère doit-on reconnaître cette légalité, voilà ce qu’il faudra examiner (…) j’ai voulu citer un exemple qui prouvât combien sera étendu le contentieux de l’administration, et le danger d’y donner trop de prépondérance au préfet », La Gazette Nationale ou Le Moniteur Universel, 1800, p. 585, « Tribunat, séance du 24 pluviôse, présidence de Desmeuniers, sujet: la division territoriale, le régime administratif. Intervention de Gillet de l’Oise ».

Dans le même sens, on peut citer l’intervention de Ganilh374. Lui aussi insiste sur cette ligne de partage mal définie entre administration active et juridiction administrative. Il se montre, de plus, hostile à l’idée qu’ « administrer doit être le fait d’un seul », car cela lui semble ouvrir la porte à nombre d’abus. « On a séparé l’administration du contentieux ; mais bientôt on donne au préfet une telle influence sur cette partie, que la ligne de démarcation se trouve bien effacée. Sans doute des administrations délibérant au lieu d’agir, étaient une mauvaise institution ; mais a-t-on bien réfléchi au danger qu’il pouvait y avoir à charger un seul homme de l’administration d’un département, et à l’en charger sans surveillance avec l’appui de la force publique ? Ne doit-on pas craindre le retour des abus et des calamités dont la France a été la victime ? Ne doit-on pas craindre la résistance, lorsque ce préfet, cet homme unique aura à exécuter quelque mesure difficile, une levée, une réquisition d’hommes ou de denrées ? lorsqu’il aura à mettre les gardes nationales en mouvement, et enfin dans d’autres occasions semblables ? »375.

B) La thèse de l’indifférence.

A l’inverse de ces deux orateurs, Chauvelin376 prend la parole devant le Tribunat et affirme ne voir aucun danger dans la présence ou même la voix prépondérante du préfet au sein du Conseil de préfecture. La raison en est notamment qu’il ne considère pas, dans le cas où le préfet use de ces prérogatives, que ces matières puissent le conduire à se retrouver juge et partie. En d’autres termes, selon Chauvelin, le préfet ne peut se montrer partial en cas de litige sur une de ces matières car il n’a pu y prendre part. C’est ce que nous avons appelé la thèse de l’indifférence. Aussi, cet orateur dit-il : « Je ne redoute point la présence du préfet dans le Conseil de préfecture ; je ne redoute point la voix prépondérante dans la décision d’affaires où les administrations centrales elles-mêmes ont toujours été juges et parties. Je ne vois pas même que le préfet puisse être, par suite de la voix qui lui est attribuée dans le Conseil de préfecture, juge et partie dans des discussions qui ne doivent jamais l’intéresser personnellement. Le jugement des difficultés entre les entrepreneurs de travaux publics et l’administration pourrait seul offrir cet inconvénient ; et les lois existantes, exigeant que les travaux soient toujours adjugés à l’enchère, rendront en dernière analyse les préfets fort indifférents sur le sort de ces contestations, jugées surtout après l’examen du cahier des charges. Il est d’ailleurs nécessaire que le préfet assiste, dans diverses circonstances, aux délibérations du Conseil de préfecture, ne fût-ce que pour l’éclairer et l’instruire sur les faits ; et il est convenable, autant qu’utile, qu’il le préside lorsqu’il s’y trouve »377. Chauvelin estime donc que cette présence du préfet est même une nécessité, pour éclairer le conseil. Sur cette

374 GANILH (Charles) (6 janvier 1758-4 mai1836). Avocat au Parlement de Paris avant la Révolution, il est ensuite membre du Tribunat et député de 1815 à 1822. Il est également l’auteur de plusieurs ouvrages. ROBERT (Adolphe) et COUGNY (Gaston), Dictionnaire des Parlementaires de 1789-1889, Tome 3, p. 103.

375 La Gazette Nationale ou Le Moniteur Universel, 1800, p. 589-590, Tribunat, séance du 13 pluviôse, (je pense que c’est une erreur ce doit être le 25 pluviôse), sujet: la division territoriale, intervention de Ganilh.

376 CHAUVELIN (Bernard-François, Marquis de), (1766-1832). Fils d’un lieutenant-général de Louis XV, il est membre du Tribunat et régulièrement élu député de 1822 à 1829.ROBERT (Adolphe) et COUGNY (Gaston), Dictionnaire des Parlementaires français de 1789 à 1889, Tome 2, p. 77.

377 La Gazette Nationale ou Le Moniteur Universel, 1800, p. 588-590, « Tribunat, suite de la séance du 24 pluviôse, présidence de Desmeuniers », sujet: la division territoriale, intervention de Chauvelin.

dernière affirmation, cet orateur n’est pas très clair, car cette utilité du préfet semble sous-entendre qu’il donnerait son point de vue au Conseil de préfecture comme le ferait une partie à un litige : en effet, comment « instruire sur les faits » le Conseil si l’on n’a pas une meilleure connaissance (c’est à dire plus directe) de ces derniers ? C’est donc qu’il y a bel et bien un intérêt et que le préfet n’est pas si étranger que cela aux matières dont le Conseil a à délibérer. En outre, si le préfet n’a pas participé à l’adoption de l’acte litigieux, pour autant peut-il se montrer si impartial que cela, lui qui doit avoir à cœur de défendre l’intérêt général ?

Notons également l’intervention du tribun Delpierre378 qui défend lui aussi cette idée selon laquelle le préfet ne serait en aucun cas juge et partie, n’étant pas impliqué dans l’adoption des actes litigieux relevant de la compétence du Conseil de préfecture. Aussi écrit-il (et nous lui objectons les mêmes remarques que celles formulées ci-dessus) : « On a dit encore que le préfet, intervenant dans les délibérations du Conseil de préfecture, serait juge dans sa propre cause. Je parcours l’article qui règle leurs attributions du Conseil de préfecture, et je n’y vois nulle part qu’il y soit question d’intérêts relatifs au préfet ; ils appartiennent tous à la république. Il n’y intervient que comme surveillant ; il n’évalue pas les propriétés foncières et ne forme point les rôles des contributions directes ; donc il n’a aucun intérêt à trouver injuste ou légitime la demande en réduction de cote d’un citoyen qu’il n’a point imposé ; il n’en a point davantage à favoriser, ou à faire rejeter les réclamations des entrepreneurs des travaux publics, puisque leurs marchés sont le résultat des enchères ou ventes à tout le monde ; il n’en est que le régulateur et le témoin. Il n’en a pas davantage à présenter sous un jour odieux ou favorables les plaintes des particuliers, qui accuseraient les entrepreneurs de leur avoir causé du dommage puisque les entrepreneurs ne tiennent pas de lui leur existence. Trouverait-on mauvais qu’il se mêlât de grande voirie, des demandes des communes en autorisation de plaider, et du contentieux des domaines nationaux. Mais, qui donc s’en mêlera, si ce n’est l’homme du gouvernement qui est le tuteur né des communes, qui doit entretenir la solidité des chemins publics, et affermir, comme garant en chef de la révolution, l’existence des acquéreurs de domaines nationaux ! Où est, dans toutes ces matières, la cause personnelle du préfet ? dans les unes, il veille uniquement pour la république ; dans les autres, il est indépendant, et exerce par conséquent une autorité aussi amie, aussi tutélaire qu’un juge ou un jury prononçant dans le calme de toutes les passions, sur une question de droit ou de fait.

Il ne serait pas aussi aisé de répondre à cette objection, si elle s’adressait aux actes qu’il fait comme sous-préfet dans l’arrondissement chef-lieu, et qu’il concourt à juger, comme préfet dans le Conseil de préfecture. L’esprit d’économie qui a guidé le gouvernement, lui a

378 La Gazette Nationale ou Le Moniteur Universel, 1800, p.619-620, « Corps législatif, présidence de Grégoire, suite de la séance du 28 pluviôse, suite du discours de Delpierre, orateur du Tribunat, sujet: la division territoriale ».

Le Dictionnaires des Parlementaires rapporte l’existence de deux Delpierre, deux frères vosgiens, tous deux homme de loi avant la Révolution. L’un, Antoine-François, Baron Delpierre (1764-1854), est député en 1791 et au Conseil des Cinq-Cents. Il est, ensuite, membre du Tribunat puis baron de l’Empire. Il conserva ses fonctions sous la Restauration. Le parcours de son frère aîné est peu éloigné du sien. En effet, Nicolas-François Delpierre (1753-1812) est successivement député au Conseil des Cinq-Cents puis au Corps législatif. Il mourut dans l’exercice de ses fonctions de procureur impérial de Mirecourt. ROBERT (Adolphe) et COUGNY (Gaston), Dictionnaire des Parlementaires français de 1789 à 1889, Tome 2, p. 326.

dérobé cette contradiction, qui, espérons-le, disparaîtra bientôt, pour rendre le préfet tout entier à ses fonctions naturelles de chef de l’administration ».

C) La thèse de l’équilibre.

Si, pour sa part, Roederer ne nie pas que le préfet puisse être, dans ce système, juge et partie, pour autant, il abonde dans le même sens que Chauvelin quant au caractère inoffensif de la présence du préfet au sein du Conseil de préfecture. Il s’en ouvre devant le corps législatif. Il explique, lui aussi, que cette présence est même nécessaire pour que le jugement dudit conseil puisse être pris de façon équilibrée, c’est à dire en ayant bien tenu compte des intérêts publics comme privés (et non d’un seul des deux) : « le projet, dit-on, constitue le préfet juge et partie, en lui donnant séance et voix prépondérante au Conseil de préfecture. (…) Quelle garantie, demande-t-on, restera aux parties qui voudront réclamer contre les actes des administrateurs, devant le tribunal que l’administrateur présidera ?379 Je réponds à cette question par la suivante : quelle garantie restait depuis la constitution de 1791 ? quelle garantie reste maintenant, sous la Constitution de l’an III, contre les actes des administrateurs, devant un tribunal que les administrateurs composent ? N’est-il pas bien plus probable qu’on obtiendra justice d’un tribunal présidé par un préfet, et très ordinairement jugeant sans son assistance380, que par un tribunal composé des administrateurs contre lesquels on réclame ? Pourquoi tant se révolter contre la proposition du gouvernement, quand on a souffert patiemment et qu’on souffre encore maintenant sans réclamation des lois et des usages qu’il adoucit et qu’il réforme ? S’est-on révolté contre les deux constitutions qui ont donné les administrateurs pour juges de leurs propres faits ? C’est pour cette raison que l’on ne doit pas confondre les actes d’administration, faits par le magistrat pour l’intérêt public avec les actes faits par le citoyen pour son intérêt privé. La loi a présumé que comme l’administrateur est homme public dans ses actions administratives, rien ne l’empêche d’être impartial dans ses jugements entre l’intérêt public et l’intérêt particulier. Il y a quelque chose d’outré dans cette confiance. Un administrateur peut bien ne tenir à ses actes par aucun intérêt personnel, et y tenir par prévention, par amour propre. Aussi est-ce en grande partie par cette considération que le gouvernement a voulu donner d’autres juges aux parties. Mais, si l’expérience prouve que des tribunaux séparés de l’administration se font naturellement un esprit opposé à ses

besoins381, et suivent une marche trop embarrassée pour elle, il est nécessaire que

379 Autrement dit, où il sera juge et partie. C’est le système de l’administrateur-juge ! Mais Roederer semble établir une distinction entre l’administrateur qui devrait juger le contentieux né de ses propres actes et l’administrateur qui connaît des actes d’un autre administrateur. Effectivement, théoriquement, le Conseil de préfecture va juger des actes d’administrateurs : or, pour leur part, ils ne sont pas censés faire d’administration active..

380 Ce qui semble le cas pour notre Conseil de préfecture de la Meurthe. Mais alors s’il est plus courant que les Conseils de préfecture jugent sans le préfet, qu’advient-il de ce bel équilibre qui doit présider aux décisions du Conseil de préfecture ? En théorie, les conseillers de préfecture n’ayant pas de rôle dans l’administration active (en réalité nous verrons qu’ils en ont et d’ailleurs, de l’avis de certains auteurs comme Chevallier, que ces attributions vont finir par prendre le pas sur celles de juges), la loi de l’an VIII ne revient donc pas au système d’administrateurs jugeant les actes d’autres administrateurs : d’où, en principe, ce sont des juges qui n’ont pas pu être les administrateurs à l’origine de l’acte litigieux !

l’administrateur puisse se faire entendre, se faire écouter des juges, leur proposer les raisons d’intérêt public qu’il peut avoir, et coopérer lui-même au jugement, si l’on veut qu’il y ait une véritable impartialité dans les jugements : c’est pourquoi nous avons donné au préfet la faculté de présider le Conseil de préfecture. Les juges le ramèneront aux intérêts des particuliers, il ramènera les juges à l’intérêt public ; et la justice sortira de leur rapprochement »382. Selon Roederer, il n’était pas possible de laisser le préfet statuer seul sur ces litiges car il n’aurait pas été réellement impartial. C’est pourquoi, le Conseil de préfecture a été institué. Mais, pour autant le préfet n’en est pas exclu. En effet, c’est par nécessité d’établir un certain équilibre dans la prise en compte des intérêts publics et privés, que le projet de loi (et la loi du 28 pluviôse ensuite) décide de laisser le préfet, pourtant un administrateur actif, s’immiscer dans le règlement du contentieux auprès du Conseil de préfecture. Qui plus est, cette présence évite de renouer avec la désastreuse expérience des juridictions administratives spécialisées de l’Ancien Régime qui avaient fini par se retourner contre le gouvernement, aux côtés des Parlements. De cette équilibre, doit naître, selon Roederer, l’impartialité. Cette vision du rôle du préfet semble cependant un peu simpliste car elle ne tient pas compte de la différence d’ordre hiérarchique qui existe entre le préfet et les conseillers de préfecture ; différence qui doit, sans nul doute, se ressentir sur les actes de ces derniers. En effet, comme nous aurons l’occasion d’y revenir, c’est bel et bien le préfet qui, avec le ministre de l’Intérieur, choisit les conseillers de préfecture et rend compte à ce dernier de leurs actions, tout au long de leur carrière. Celle-ci peut donc rapidement prendre fin si tel est le souhait du préfet.

Desmousseaux383, membre du Tribunat, est du même avis que Roederer. Il n’a pu

s’exprimer publiquement, faute de temps, mais une partie -prise au hasard par l’imprimeur- de son discours a fort heureusement été reproduite au Moniteur Universel. Pour lui, la présence du préfet au sein du Conseil de préfecture ne signifie pas la persistance du système de l’administrateur-juge, mais, au contraire, offre de bonnes garanties pour le respect de l’intérêt privé. Par ailleurs, il reprend à son compte la thèse de l’indifférence des préfets (pour les affaires réglées devant le Conseil de préfecture), thèse déjà évoquée par Chauvelin. Il en conclut l’impartialité du préfet, même s’il reconnaît que cette « ligne de démarcation » dont parlent ses collègues n’est pas claire. « Les fonctions des préfets, dans leurs conseils