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3-2 L’actionneur à Décharge à Barrière Diélectrique

CHAPITRE I : GENERALITES, CONTEXTE, ET OBJECTIFS

III- 3-2 L’actionneur à Décharge à Barrière Diélectrique

a) Principes

La génération d’un vent ionique par les décharges couronnes a été mise en évidence il y a très longtemps [38]. La mise en évidence d’un effet électrohydrodynamique dans les décharges à barrière diélectrique est plus récent, et des actionneurs de type DBD ont été mis au point pour la première fois fin 1990 aux Etats-Unis par le Pr Roth [39]. Roth nomme ce type de décharge «OAUGDP» (One Atmosphere Uniform Glow Discharge Plasma) car le plasma généré par la décharge surfacique apparaît uniforme à l’œil (il est en fait dans tous les cas composé de nombreux filaments, pour des DBD dans l’air à pression atmosphérique). Roth a montré que ce type de décharge pouvait être utilisé comme actionneur pour contrôler un écoulement. L’avantage par rapport aux décharges couronnes est que la barrière diélectrique limite de façon très simple le courant et empêche la transition à l’arc.

L’actionneur est constitué de deux électrodes parallèles séparées par un diélectrique (Figure I-12). Une haute tension sinusoïdale est appliquée entre les électrodes posées sur la face supérieure du diélectrique et l’électrode de la face inférieure reliée à la terre. Une décharge s’établit au-dessus de la surface du diélectrique. La nature impulsionnelle du courant mesuré (nombreuses impulsions réparties le long de la période du signal) suggère que la décharge est composée d’un ensemble de filaments de type streamers se propageant le long de la surface. Dans les travaux de Roth ou d’autres expérimentateurs qui ont utilisé ce type de décharge, on ne trouve pas de description claire ni convaincante du principe de la génération d’un effet électrohydrodynamique dans ces décharges. Roth évoque le concept de force « paraélectrique » qui n’est ni clair ni convaincant. Les mesures de vitesses de l’écoulement généré donnent des valeurs proches de celles obtenues dans les décharges couronnes, avec une dépendance en fonction l’amplitude (de 5 à 20 kV) et de la fréquence (de 1 à 10 kHz) de la tension appliquée.

C’est l’objectif de cette thèse de comprendre et quantifier l’effet hydrodynamique observé dans ces décharges

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plasma gaine s ~ 50 µm

V

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plasma gaine s ~ 50 µm

V

Figure I-12: Schéma d’une décharge à barrière diélectrique de surface proposée pour le contrôle d’écoulement d’après [39]

b) Brève revue bibliographique sur les actionneurs à DBD

La première mise en œuvre de l’actionneur DBD a été publiée par Roth en 1998 [39]. Dans cet article, Roth montre qu’en utilisant l’une des configurations de la décharge surfacique de la Figure I-13, on peut modifier ou créer un écoulement. Les mesures de Roth du profil de vitesse de l’écoulement au-dessus de la surface sont montrées sur la (Figure I-14).

a) b)

Figure I-13: Configuration géométrique des électrodes utilisées par Roth pour établir la« OAUGDP » (a) (Roth et Sherman [39]) et sens de l’écoulement induit (b) (Post et Corke, [40]).

a) b)

Figure I-14: a)Profils de vitesse induit par la « OAUGDP », pour différentes tensions à 3 kHz(Roth et Sherman [39]); b) Force induite pour une longueur d’électrode de 27 cm

La vitesse atteint environ 3 m/s à 3 mm au-dessus de la surface. La vitesse augmente avec l’amplitude de la tension appliquée. La force totale exercée par la décharge sur le gaz, mesurée par Roth est représentée sur la Figure I-14b. Elle atteint 40 mN/m pour une tension de 5 kV rms. La force mesurée, parallèle à la surface, est dirigée comme indiquée sur la Figure I-13b, de l’électrode supérieure, vers l’électrode inférieure.

Roth attribue l’effet de la décharge sur l’écoulement à une force générée au sien de la décharge qu’il nomme force « paraélectrique » et qu’il définit par l’équation :

      = 2 0 2 1 E dx d F ε e I-6

avec E le champ électrique, ε0 la constante diélectrique de l’air et x la direction horizontale, parallèle à la surface. Cette expression est ambiguë et ne permet pas une évaluation pratique simple de la force agissant sur le gaz (voir à ce sujet la section suivante, III-3-3).

Après ce premier article, les travaux de Roth se sont orientés vers une optimisation de l’actionneur, sans rechercher davantage à comprendre plus finement et quantifier analytiquement ou numériquement la force électrohydrodynamique (EHD) qui est à l’origine des effets observés. Plusieurs articles de Roth [41[50] sont consacrés à des études paramétriques intéressantes, en fonction de l’amplitude et de la fréquence de la tension appliquée, des dimensions des électrodes, de la nature du diélectrique etc… Nous utiliserons ces résultats pour valider les conclusions tirées de nos résultats numériques.

a) b)

Figure I-15: a) Configuration utilisée par Enloe pour mesurer la force EHD ; b) force par unité de longueur d’électrode mesurée par Enloe[51] en fonction de la puissance dissipée pour différentes

valeurs de la pression d’air, et pour une fréquence de 5kHz de la tension appliquée

Un second ensemble de travaux intéressants sur le sujet a été publiée par Enloe et al. dans une série d’articles [51-59]. Enloe et al. ont notamment mesuré avec une balance (voir Figure I-15a) la force en fonction de la puissance dissipée. La Figure I-15b montre cette force en fonction de la puissance. Nous avons, sur cette figure, normalisé les mesures de Enloe et al. à la longueur des électrodes, car seules la force par unité de longueur d’électrode et la

puissance par unité de longueur d’électrode ont un sens absolu. Ces résultats seront comparés à ceux de nos modèles numériques dans la suite de cette thèse.

D’autres équipes se sont également intéressées aux actionneurs DBD et ont publié un ensemble de mesures et d’études paramétriques très utiles à la caractérisation de ces actionneurs. L’équipe du Pr. Eric Moreau à Poitiers s’est fortement impliquée dans la caractérisation des actionneurs DBD, après avoir étudié les actionneurs à décharge couronne DC. Les travaux de cette équipe sont résumés dans les références [60-64]. L’équipe d’E. Moreau a montré qu’en optimisant les paramètres de l’actionneur (tension, fréquence, épaisseur de diélectrique) on peut augmenter la vitesse de l’écoulement créé par la décharge surfacique jusqu’à 8m/s. Ces résultats ont été obtenus pour des fréquences de la tension appliquée plutôt inférieures (de l’ordre ou inférieure au kHz) à celles utilisées par Roth, et pour des amplitudes de tension supérieures (supérieures à 20 kV). L’épaisseur de diélectrique et la largeur des électrodes dans les travaux de Moreau et al. sont également différentes de celles utilisées par Roth. Nous reviendrons, dans les sections présentant les résultats de nos modèles, sur l’effet de ces différents paramètres.

Un résultat très intéressant obtenu par l’équipe de E. Moreau montre (voir Figure I-16) l’évolution temporelle de la vitesse de l’écoulement, au cours d’un cycle de la tension appliquée. On voit que d’une part l’écoulement est généré à la fois dans les parties positive et négative du cycle, et que d’autre part la vitesse de l’écoulement est plus grande dans la partie négative (quand l’électrode supérieure est négative par rapport à l’électrode sous le diélectrique). Nous chercherons à interpréter ce résultat à l’aide de nos modèles de décharge.

Figure I-16 : Tension appliquée, courant et vitesse de l’écoulement mesurée en fonction du temps pour Vmax=16 kV et f=700 Hz ; d’après E.Mreau[65].

L’influence de la forme du signal de tension sur la force EHD ou sur la vitesse de l’écoulement a également été étudiée par différents auteurs. Nous reportons ici les résultats de l’équipe Japonaise de Abe et al. [66] . La Figure I-17 montre la force EHD mesurée par Abe et al. (que nous avons normalisée par unité de longueur d’électrode) pour différentes formes de la tension appliquée, pour une fréquence de 2 kHz et Vmax =10 kV . Ces résultats montrent que, dans les conditions considérées, la force la plus grande est obtenue quand la partie décroissante de la tension est plus longue que la partie croissante (c’est à dire quand l’électrode au dessus de la surface du diélectrique est négative pendant un temps plus long au cours du cycle). Nous essaierons également, à l’aide des modèles, d’interpréter ce résultat.

Figure I-17: force obtenue en fonction de différant signaux de tension appliqué pour(Vmax =10 kV,fr=2kHz) (Abe [66])

Pour conclure, je n’ai rapporté, dans cette revue bibliographique brève et non exhaustive, que quelques résultats qui me paraissaient particulièrement intéressants par rapport aux objectifs de ma thèse, de compréhension et de quantification des phénomènes. La littérature sur le sujet est très abondante et semble croître rapidement d’année en année. Des références complémentaires pourront être trouvées dans la revue très intéressante et beaucoup plus complète d’E. Moreau [65].

Pour terminer cette section bibliographique, il faut noter, dans toute cette littérature, l’absence presque totale de description convaincante ou d’explication des mécanismes physiques responsables de la force EHD dans les DBD surfaciques. En particulier, on peut noter le flou total sur la similarité de nature ou non de la force EHD dans les DBD par rapport à celle qui prévaut (vent ionique) dans les décharges couronnes. Ce flou est en partie due aux publications de Roth qui a beaucoup insisté sur la nature homogène du plasma des DBD de surface, ce qui exclut a priori toute similarité avec les décharges couronnes, et suggère que la force se développe au sein du plasma, ce qui, comme nous allons le voir ci-dessous, n’est pas exact.

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