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Chapitre 1. Contexte du travail de recherche

I. L’évolution des besoins en matière d’évaluation environnementale des produits en contexte

I.2. L’évolution des besoins en indicateurs pour mesurer la performance environnementale des

I.2.1. La perception des changements en cours qui induit cette

évolution

Nous avons montré dans le paragraphe précédent que les indicateurs environnementaux employés par les constructeurs et équipementiers sont variables et que leur agrégation n’assure pas la complétude de l’évaluation. Par ailleurs, cette forme d’évaluation, rendue possible par les systèmes d’informations en place dans les entreprises) est un bilan qui s’applique à la situation technologique existante c’est à dire dans le contexte des motorisations actuellement employées et des matériaux couramment exploités. Or comme nous l’avons vu précédemment la réglementation actuelle et les pressions géopolitiques associées à la disponibilité des ressources, poussent à ce que dans les années à venir de fortes innovations technologiques émergent tant en terme de motorisation (moteur électrique) que d’origines des matériaux employés (biosourcés). Dans ce futur contexte, il sera alors nécessaire d’intégrer de nouveaux aspects de contrôles des profils environnementaux des composants. En effet, les problématiques environnementales drainées par ces nouvelles technologies varieront de celles actuellement en œuvre. Ainsi, les impacts environnementaux majeurs comme l’épuisement des ressources, le réchauffement climatique, l’eutrophisation, l’occupation du sol, etc. ne sont pas mesurables aujourd’hui avec les systèmes d’informations qui parcourent la Supply Chain automobile actuellement. Par ailleurs, d’éventuels transferts de pollution peuvent se produire lors de changements de technologies ou d’origine des matériaux. Une nouvelle fois, le danger de l’évaluation par des métriques est qu’ils ne mesurent que ce que l’on pense à surveiller.

En conclusion, une évaluation environnementale jugée correcte et préventive des éventuels transferts d’impacts au regard des produits s’inscrivant dans tous les contextes décrits précédemment, nécessite, en complément de l’utilisation des métriques d’ingénierie,

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l’adjonction d’autres indicateurs qui ne sont pas évalués systématiquement aujourd’hui dans le secteur automobile. En particulier, dés lors que l’on s’intéresse à l’utilisation des matières à faibles émissions, des matières recyclées, des matières moins denses ou des matériaux issus de la biomasse il est indispensable de disposer d’outils d’évaluation environnementale globale et multicritère. Une question similaire de la globalité de la mesure se pose lorsque l’on est dans le cas d’une rupture technologique forte comme pour le passage des moteurs thermiques aux moteurs électriques. Nous pouvons donc énoncer que les indicateurs d’ingénierie doivent exister et constituent une part importante des déterminants du profil environnemental des produits pour répondre aux exigences la législation. En revanche, ils ne peuvent être employés seuls par les équipementiers et les constructeurs pour permettre une réelle éco-conception des équipements automobiles.

Les compléments d’informations seront donc à rechercher dans les indicateurs d’ACV, car l’ACV est le seul outil permettant une analyse environnementale à la fois systémique et quantitative. Il nous reste à identifier quelle liste d’indicateurs d’ACV doit être prise en compte et comment cette liste variera selon les impacts liés aux diversités de matières, à la diversité des technologies et de gammes de produits..

I.2.2. L’ACV en contexte de l’industrie automobile

Depuis une quinzaine d’années, les constructeurs automobiles

[Le Borgne et Feuillard 1997] , [Eberle 2000] , [Schmidt et al. 2004] et les équipementiers [Muñoz et al.2006] , [Puri et al.2009] ont conduits des ACV et ont réfléchi sur comment mieux les prendre en compte dans le développement des produits automobiles. En réalité, l’influence des pressions politiques de différents niveaux (institutions européennes, lobby…), a été tout d’abord la principale raison qui a poussé les constructeurs à s’engager dans la conduite des ACV [Chanaron 2009] . En contexte de l’usage des ACV, si nous considérons les constructeurs précurseurs comme VW AG, BMW, Daimler Chrysler, Ford, Volvo, ils disposent dans leurs organisations une équipe de DFE formé d’un expert ACV et d’autres experts en provenance d’autres métiers (matières, process, design, manufacturing…). Cette équipe d’experts fonctionne en ingénierie collaborative pour mieux communiquer des impacts environnementaux des produits (en interne) et mieux exploiter les résultats des ACV, afin de faire évoluer son usage vers :

- l’évaluation des stratégies de réduction de masse et de la promotion du recyclage en fin de vie,

- la recherche des alternatives de solutions matières, technologies et assemblages plus respectueux de l’environnement,

Un exemple concret s’agit de l’usage de l’ACV comparative entre le procédé de recyclage mécanique par la voie de démontage, et de la technologie de recyclage VW Sicon process [Krinke et al.2006] , pour promouvoir le recyclage en fin de vie. VW Sicon est une technologie de recyclage qui a été développée conjointement par Volkswagen AG et Sicon GmbH. Le processus de VW-Sicon est basé sur le principe de générer des flux de matières à partir des véhicules en fin de vie par un traitement spécifique et le raffinement des résidus de broyage. Les matières acquises peuvent être ainsi utilisées comme matières premières secondaires substituant les matières premières vierges. Le processus de VW-Sicon est une approche axée sur le marché et prend en compte les potentialités du marché et les exigences des clients pour les matières produites. Des usines VW-Sicon sont actuellement en usage en Belgique, en Autriche et au Pays-Bas.

Les équipes DFE utilisent, par le biais des experts ACV, des logiciels commercialisées (comme GaBi, Simapro et Umberto, mais c’est le logiciel GaBi qui est utilisé par la majorité de ces constructeurs) pour évaluer les impacts environnementaux des produits, matières ou technologies. Des interfaces entre les outils d’ACV et les outils de gestion de données sont également développées chez certains constructeurs (on peut citer notamment les approches SlimLCI de VW [Koffler et Krinke 2008] et l’EPS model (SPINE database) de Volvo [Louis et Wendel 2001] ), afin de faciliter le transfert des données techniques nécessaires pour conduire des ACV.

Une évaluation environnementale conduisant à un choix de solutions véritablement moins polluantes exige toutefois que la réalisation des ACV, ainsi que l’exploitation de ses résultats, doivent avoir lieu tout au long du processus de conception [Schiffleitner et al.2008] et impliquent « fortement » les concepteurs dans l’évaluation de la performance environnementale des solutions proposées, ainsi que la prise de décision qui en découlera [Kaïla et Hyvarinen 1996] . L'industrie automobile rencontre cependant plusieurs difficultés pour intégrer l'ACV dans le processus de conception du produit [Koffler et Krinke 2008] . La collecte de toutes les données requises pour la réalisation des ACV au plus tôt dans la phase de conception est difficile en raison du manque de données en quantité et en qualité [Chanaron 2009] . En outre, le manque d'expériences en ACV au sein des acteurs de la conception pour la modélisation du cycle de vie du produit et pour l'interprétation des résultats [Dewulf et Duflou 2003] , est une véritable barrière pour la mise en œuvre de l’ACV dans le processus de conception.

L’intégration effective des aspects environnementaux dans le processus de conception représente donc un défi complexe pour les concepteurs, les ingénieurs des procédés et les experts environnement au sein de l’industrie automobile [Keoleian et Kar 2003] .

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Ainsi, pour pouvoir évaluer systématiquement et améliorer réellement les performances environnementales des produits, il devient impératif que l'industrie automobile déploie systématiquement une approche globale d’évaluation, qui doit être « totalement intégrée » dans les pratiques de l'équipe de conception. Une telle évaluation doit être basée sur du « quantitatif », et «opérationnel » pour les concepteurs, tout en leur permettant de repérer sur le cycle de vie du produit :

Les « x » impacts potentiels (hot spots), L’ (es) « y » étape(s) la (es) plus critique(s),

afin de pouvoir les réduire et garantir à cet effet une conception de produit « réellement » respectueuse de l’environnement.

II. Le contexte de l’évaluation environnementale des produits chez