• Aucun résultat trouvé

Chapitre 2. Problématique de recherche

I. Positionnement scientifique du travail de recherche

I.1. Les différentes approches d’intégration de l’environnement en entreprise

I.1.1. Historique

Plusieurs classifications des approches d’intégration de l’environnement en entreprises ont été proposées dans la littérature, s’efforçant généralement d’identifier leurs périmètres d’actions. Depuis une quinzaine d’années, les travaux d’une équipe de recherche du Georgia Institute of Technology (Stewart Coulter et Bert Bras) ont permis d’identifier sept approches différentes de réduction des impacts environnementaux des produits en fonction de l’étendue de leur prise en compte sur une échelle temporelle [Janin 2000] (Figure 3). Trois classes d'approches ont été ainsi définies dans ces travaux, à savoir :

Celles qui sont appliquées au sein d'une seule étape du cycle de vie, ou se concentrent sur certains étapes spécifiques du cycle de vie d’un produit, par exemple : l’ingénierie de l’environnement et la prévention de pollution ;

Celles qui couvrent toutes les étapes du cycle de vie d’un produit : DFE (design for environment), ECDM (environmentally conscious design and manufacturing), LCD (life cycle design) ;

Celles qui vont au-delà du cycle de vie d’un seul produit et font la promotion d’approches systémiques: la notion d’écologie industrielle et du développement durable.

Figure 3. Echelle environnementale et temporelle des différentes approches visant à réduire les impacts environnementaux [Janin 2000] .

Les paragraphes suivants approfondissent ces trois classes d’approches, issues des travaux de [Bras 1997], et reprises ensuite par [Janin 2000] et par [Jacqueson 2002] pour décrire la notion de l’intégration de l’environnement en entreprise.

I.1.1.1. Les approches centrées sur une (des) étape(s)

spécifique(s) du cycle de vie d’un produit

Le « management environnemental des sites de production (MESP) », sous son aspect traditionnel, visait à minimiser les impacts environnementaux engendrés lors de la fabrication des produits par la gestion et le contrôle des polluants dans l’eau, les rejets atmosphériques et les déchets solides. Cette approche inclut la nature des traitements de dépollution appliqués par l’usine (approche dite « end of pipe »). Cette pratique était coutumière dans les premières actions des entreprises en matière d’environnement au cours des années 70. Cette approche initiale a évolué vers la « prévention de la pollution », qui fit son apparition en Europe au cours des années 90, visant en plus du traitement des rejets d’usines, au recyclage des déchets de fabrication. Les efforts de prévention de la pollution sont donc plus larges que les efforts traditionnels du MESP. Toutefois ces approches restent focalisées sur l’étape de fabrication du produit.

Depuis les années 90, l'expression « Design for X » est apparue pour englober un large éventail d'approches de conception de produits [Huang et Mak 1997] , afin de relier les

Chapitre 2.

exigences des clients à certains critères tels que la robustesse, la fonctionnalité, la fiabilité et les impacts sur l'environnement. Dans ce contexte, si on parle de critères de conception axés sur l’environnement, diverses approches récentes comme la conception pour le recyclage, la conception pour le remanufacturing, etc… sont également centrées sur des étapes spécifiques du cycle de vie d'un produit.

Ces démarches élargissent donc le cadre du MESP. Toutefois, elles ne demeurent focalisées que sur certains aspects environnementaux et étapes spécifiques du cycle de vie, ce qui peut nuire à d'autres aspects et peut rendre le produit moins respectueux de l'environnement dans l’ensemble de son cycle de vie. Cette réflexion a conduit différents acteurs (chercheurs, sociétés civiles, certaines entreprises…) à préférer une orientation vers des approches qui englobent le cycle de vie complet du produit.

I.1.1.2. Les approches orientées « cycle de vie » d’un

produit:

[Tomiyama et al 1997] ont décrit ces approches comme étant une approche holistique et systémique qui fournit une plus grande capacité à réduire l'impact environnemental des produits et des processus associés. Ainsi, les préoccupations environnementales comprennent dans ce cas toutes les étapes du cycle de vie, au-delà du champ d'application de la prévention de la pollution afin d'inclure les impacts résultant de l'utilisation et de l'élimination de ce produit.

La conception consciente de l’environnement (ECDM) recouvre la conception du couple produit et process [Wanyama et Ertas 2003] . Dans cette approche, l’idée est que les concepteurs soient conscients, dans leurs activités, des effets environnementaux négatifs sur l’ensemble du cycle de vie du produit, en incluant des contraintes dans leurs réflexions pour limiter ces effets [Stuart et Sommerville 1998] .

L’approche « conception pour l’environnement (DFE) est un concept qui intègre la dimension « environnement » dans la conception du produit, au même titre que les autres critères gérés habituellement par les concepteurs (coûts, qualités, performances…). Elle est considérée comme une approche multicritère du DFX [Hauschild et al.2005] car elle regroupe par complémentarité plusieurs critères de conception axées sur la dimension « environnement » dans les approches de DFX [Santos-Reyes et Lawlor-Wright 2001] , [Ciechanowski et al.2007] . Ainsi, selon le concept du DFE, un produit sera d’autant mieux conçu pour l’environnement que plusieurs critères environnementaux et toutes les étapes du cycle de vie, ont été considérés au cours de sa conception [Janin 2000] .

L’approche « conception pour le cycle de vie » (LCD) est une approche qualifiée du berceau à la tombe (cycle de vie complet) d’un produit, avec l’objectif de fournir les informations les plus complètes possibles sur le profil environnemental du produit au concepteur. La mise en œuvre de cette approche nécessite des connaissances

multidisciplinaires et sous entend une acquisition de connaissances environnementales suffisantes par le concepteur, permettant à ce dernier à concevoir un produit, dont les impacts potentiels auront été identifiés et minimisés.

I.1.1.3. Les approches systémiques

L’utilisation de l’expression « écologie industrielle », indique qu’on ne se limite pas au périmètre du cycle de vie d’un seul produit, mais qu’on prend en compte les interactions de cycles de vies de plusieurs produits et process des fabricants. On parle ainsi d’un système industriel qui englobe une diversité de produits fabriqués dans des industries n’appartenant pas nécessairement à un même secteur industriel. Ces différents secteurs s’efforcent de réduire l’impact de l’utilisation de l’énergie, des matériaux etc…en échangeant des co-produits. Ils doivent donc travailler ensemble pour réduire les impacts environnementaux du système industriel, dépassant ainsi l’horizon d’une durée de vie humaine. Cette approche s’inspire des échanges multiples existants entre les écosystèmes biologiques et considère que le système industriel doit être intégré à part entière dans l’écosystème terrestre et non plus considéré uniquement comme une source de nuisances.

Il est difficile de donner une définition précise de ces concepts [Commoner 1997] ,[Oldenburg 1997] , [De Bruijn et Hofman 2000] , mais il est bien plus simple de les illustrer par quelques exemples :

Le parc éco industriel de Kalundborg (Danemark), qui associe plusieurs entreprises au sein d’une même zone géographique [Heeres et al.2004] , [Jacobsen 2009] .

Le « Zero Emission Research Initiatives (ZERI) » de Gunter Pauli [Pauli 2010] , qui vise à concourir à l'augmentation de la biodiversité et intègrent entre autres les principes de bouclage des flux matière et énergie, d'investissement dans le capital social, le bio mimétisme, l'économie circulaire, l'économie de fonctionnalités et tendent vers le zéro déchets. Dans ce concept, chaque population est considérée capable de répondre à tous ses besoins primaires avec ce dont elle dispose localement.

La directive de l’UE du 8 mai 2003, visant à promouvoir l'utilisation de biocarburants ou autres carburants renouvelables dans les transports [2003/30/CE] : la rationalisation de la consommation des ressources fossiles dans le transport par la promotion des sources d’énergies renouvelables est considérée comme un moyen de réaliser les objectifs d’engagements dans la lutte contre le changement climatique [Di Lucia et Nilsson 2007] .

Le développement durable (rapport Brundtland 1987) est l’approche la plus large concernant la prise en compte temporelle et spatiale du problème environnemental. Dans ce concept, la préoccupation associée à la maîtrise du développement de la croissance

Chapitre 2.

industrielle et économique est tempérée du souci d’une équité sociale à l’échelle mondiale et dans l’espace temps de notre civilisation.

I.1.2. Les niveaux d’intégration de l’environnement en entreprise