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II. CADRE CONCEPTUEL

2.4. L’évaluation des apprentissages

Cette section portant sur l’évaluation des apprentissages jette les balises théoriques qui nous aident à comprendre, d’une part, comment se définissent les attentes envers l’élève pour sa réussite et, d’autre part, quelle est la fonction d’une épreuve donnée. La section s’ouvre sur une définition de l’évaluation des apprentissages. Par la suite, nous nous intéressons à sa nature, critériée ou normative, pour finalement aborder ses objectifs.

2.4.1 Définition

Bachman (1990) la présente comme un « rassemblement systématique d’informations dans le but de prendre des décisions » (p.22)4. Elle aboutit à la fois à une production d’informations, mais également à un « jugement de valeur » (p.54) et peut s’effectuer à la fois sur la base d’informations et par l’établissement de comparaisons (Laurier et al., 2005). L’évaluation peut être de nature quantitative, où la performance se mesure à l’aide d’indicateurs numériques, ou qualitative, reposant alors sur des critères descriptifs (Bachman, 1990). En éducation, elle peut servir à mesurer la performance d’individus, enseignants ou élèves, mais également l’efficacité de programmes d’études (Bachman, 1990).

2.4.2 Évaluation à interprétation critériée, évaluation à interprétation normative Glaser (1963), dans un article pionnier pour l’analyse typologique de l’évaluation, a défini deux types d’informations qui peuvent en découler. Le premier concerne le « niveau d'acquisition d'une performance critériée » (p.519)5. On observe si l’étudiant sait s’acquitter correctement de telle ou telle tâche. Le second s’intéresse à « l’ordre relatif entre les individus en fonction de leur performance » (p.519). On cherche alors à savoir si l’étudiant A réussit mieux que l’étudiant B. L’auteur a jeté dans cet article les bases d’une distinction entre deux courants, l’évaluation à interprétation normative (norm reference) et l’évaluation à interprétation critériée (criterion reference), qui se retrouveront très souvent définis en opposition dans la littérature (Davidson et Lynch, 2002).

Dans un paradigme normatif, le résultat à un test donné est « rapporté et interprété en référence à la performance d'autres individus au même test » (Glaser, 1963, p.520). Dans ce contexte, une évaluation à interprétation normative de qualité permettait de contrôler la distribution des performances des individus sur une courbe normale (Davidson et Lynch, 2002). Le schéma suivant résume ce processus (Legendre, 2005) :

4 Traduction libre.

5

Figure 4. Le processus de l’évaluation à interprétation normative

Source : Legendre, 2005

L’évaluation à interprétation normative cherche à révéler les différences entre les élèves (Laurier et al., 2005). Comme le montre le schéma précédent, la moyenne « prend alors une grande importance, car elle devient le critère premier de l’évaluation de chaque élève » (Laurier et al., 2005, p.45).

En contrepartie, l’évaluation à interprétation critériée des apprentissages s’appuie plutôt sur des « critères référentiels » propres à un domaine (Bachman, 1990, p.8). La mesure permet alors de porter un jugement sur le degré d’acquisition d’une compétence, indépendamment des résultats d’autrui. Autrement dit, on s’intéresse à ce que l’individu « peut ou ne peut pas faire » (Glaser, 1963, p.520).

Figure 5. Le processus de l’évaluation à interprétation critériée

Source : Legendre, 2005

Ce second schéma illustre comment l’évaluation à interprétation critériée s’intéresse quant à elle à « l’écart observé, relativement à chaque élève, entre les apprentissages visés et les apprentissages réalisés » (Laurier et al., 2005, p.45).

Le caractère normatif ou critérié de l’évaluation nous informe sur la nature des attentes de réussite d’une épreuve. Celles-ci peuvent être définies en fonction du niveau des autres élèves ou selon des critères indiquant le niveau de réussite d’une tâche donnée. Nous ne saurions toutefois considérer les attentes de réussite sans les mettre en lien avec l’utilité de l’évaluation, les

Résultat de la mesure •31/75 Cadre de référence •Le groupe d'élèves Norme •Moyenne de 22/75 Résultat à l'évaluation •L'élève est supérieur à la moyenne Résultat de la mesure •18/20 Cadre de référence •Les objectifs d'apprentissage Critère •17/20 Résultat à l'évaluation •L'objectif est atteint

intentions qui sont à son origine. En quoi la réussite de l’élève lui servira-t-elle? Quelles seront les conséquences d’une réussite ou d’un échec?

2.4.3 Les objectifs de l’évaluation

Pour mieux comprendre les intentions de l’évaluateur lorsqu’il produit, distribue et corrige une épreuve, il faut noter que l’évaluation des apprentissages permet de poursuivre sept objectifs (Laurier et al., 2005).

Trois entrent en ligne de compte avant l’enseignement en tant que tel. En premier lieu, l’évaluation permet de classer les élèves en fonction de leurs forces et faiblesses, par exemple lors de l’entrée dans un établissement scolaire nouveau. Elle offre la possibilité de formuler des pronostics, soit de se prononcer sur les causes possibles de difficultés. Un processus de sélection peut également entrer en jeu afin de cibler les meilleurs éléments parmi une population qui auront accès à un établissement ou un programme contingenté (Laurier et al., 2005).

Pendant l’apprentissage, l’évaluation favorise la régulation « lorsqu’elle s’intègre au processus » (Morissette et Tousignant, 1990, p.193). Cela lui confère alors une fonction formative, souvent opposée dans la littérature à celle dite sommative, servant à « porter un jugement global sur la compétence du sujet dans l’objectif d’une prise de décision », notamment administrative (p.193). Laurier et ses collègues soulignent une confusion qui progressivement s’est emparée de ces deux concepts au fur et à mesure de leur mise en opposition au cours des dernières décennies et préconise à leur endroit un usage restreint (Laurier et al., 2005). Toutefois, ils sont à nouveau distingués ici afin, d’une part, de comprendre l’intention du Ministère et, d’autre part, de ne pas risquer d’éluder ici deux concepts encore utilisés et cités dans le domaine de l’évaluation.

Ensuite, l’auteur présente trois fonctions entrant en jeu en fin d’apprentissage, où l’élève doit passer une épreuve, cette fois-ci, sommative. Le bilan offre l’occasion, particulièrement à la fin des cycles qui ponctuent le cheminement scolaire, de marquer un temps d’arrêt et de porter un jugement sur l’acquisition des compétences par l’enfant (Laurier et al., 2005). Bien qu’important, le bilan ne revêt pas un rôle de certification, seconde fonction de l’évaluation en fin de parcours, où le résultat de l’élève sert, dans le contexte scolaire, à déterminer s’il a acquis la compétence minimale pour obtenir un diplôme (Laurier et al., 2005). Tardif (2006) soutient toutefois que l’évaluation certificative peut faire « également référence à la reconnaissance d’un niveau de développement au terme d’une période donnée, terme qui peut marquer le passage d’une année à l’autre, d’un cycle d’apprentissage à un autre, d’une étape de développement à une autre » (p.101). Nous pouvons toutefois lui reconnaître une fonction « davantage sociale que

pédagogique » puisque, selon Laurier et ses collaborateurs (2005), elle doit idéalement être réservée aux moments où l’élève doit « démontrer sa compétence en vue de son insertion sociale » (p.55).

Finalement, l’évaluation sert également à des fins de pilotage, servant essentiellement à « contrôler la qualité l’enseignement et de l’apprentissage » (Laurier et al., 2005, p.56) . Devant ce que disent les résultats, il devient alors possible, par exemple, d’intervenir en bonifiant la formation continue des enseignants, de revoir les programmes d’études ou d’allouer des ressources supplémentaires aux endroits opportuns.

2.4.4 Perspectives pour la recherche

Les attentes de réussite à une épreuve peuvent être définies de façon normative, c'est-à-dire en fonction de la performance des autres individus, ou de façon critériée, où des indicateurs permettent à l’évaluateur de vérifier l’acquisition d’un apprentissage par l’élève pris individuellement. Dans le cadre d’une épreuve critériée, c’est le « seuil minimal ou maximal » qui constitue le critère de performance (Laurier et al., 2005, p.45). Il peut alors être fort instructif pour qui s’intéresse aux attentes d’une telle évaluation de considérer les objectifs consignés dans les grilles de correction ainsi que les seuils de réussite associés à chacun d’eux et à l’évaluation en elle-même.

Concernant les objectifs de l’évaluation, on peut observer le rôle d’une épreuve étudiée : sert-elle à des fins de bilan ou de certification menant à une sanction des études de l’élève? Au contraire, a-t-elle pour objectif de soutenir l’apprentissage? Afin de répondre à ces questions, il peut être intéressant d’observer les conséquences entraînées par un échec pour le cheminement scolaire de l’élève. Un seuil de réussite ne revêtira pas la même importance selon que l’obtention d’un diplôme est conditionnelle à son atteinte ou qu’elle sert à informer l’enseignant sur l’état des apprentissages de l’élève. De façon générale, définir la fonction d’une évaluation permettrait de mettre en perspective les attentes qu’elle présente.

Toutefois, nous ne saurions traiter des attentes envers les élèves sans nous intéresser plus en profondeur aux critères de la grille de correction et aux indicateurs servant à déterminer l’atteinte de chacun d’eux. Puisque nous parlons d’évaluation de la compétence à écrire, nous devons à cette fin définir ce qu’implique réellement l’acte d’évaluer une compétence.