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4. L ’ ACTIVITÉ DES GROUPES VISANT L ’ ISP DANS LES ORGANISMES COMMUNAUTAIRES AU

4.1 L’émergence de la programmation souple et ouverte et l’importance des

4.1 L’émergence de la programmation souple et ouverte et l’importance des partenariats intersectoriels

La consultation des recherches québécoises recensées permet d’affirmer que l’intervention dans les groupes d’ISP visant les personnes en chômage de longue durée s’articule généralement autour d’une programmation pouvant être qualifiée de souple et ouverte. S’appuyant plus spécifiquement sur l’étude de Bélisle, Yergeau, Bourdon, Dion et Thériault (2011)44, Michaud et al. (2012a) définissent une programmation souple comme celle dont

les activités sont planifiées, mais ajustées au contexte des personnes participantes et aux choix qu’elles font à l’intérieur de la programmation. Une programmation ouverte fait référence aux ajouts d’activités non planifiées et fortement contextualisées construites au fur et à mesure qu’émergent des besoins liés aux situations de vie des personnes participantes. (p. 232-233)

En se basant sur les données de l’évaluation d’un programme d’ISP pour les jeunes de 16-17 ans ayant interrompu leurs études, Bélisle et al. (2011) soulignent que la souplesse (ou flexibilité) et l’ouverture se révèlent transversales et touchent tant les

44 Dans le domaine de l’orientation, le mot activités (au pluriel) est largement utilisé pour désigner

l’organisation des tâches d’un groupe ou un contenu transmis. Dans cette thèse, pour éviter la confusion avec l’activité (au singulier), qui est notre objet de recherche, nous utiliserons le mot tâches ou atelier pour référer aux activités.

modalités d’accompagnement que le choix des partenaires à mobiliser pour soutenir la programmation, les parcours des jeunes ou les initiatives régionales. Selon l’équipe de recherche, ce type de programmation permet aux organismes, notamment à ceux s’inscrivant dans une programmation nationale ou touchant plusieurs sites, d’adapter leur intervention aux particularités régionales et aux besoins émergents des personnes participantes. Les auteurs précisent que la souplesse et l’ouverture exigent cependant, de la part des personnes intervenantes, « une compréhension plus large des principes qui guident l’intervention et leur adaptation, en continu, aux besoins des jeunes et aux contingences des milieux » (p. 17). Dans ce contexte éducatif non-formel45, la programmation n’est pas pré- établie par un ministère comme en contexte scolaire. Ainsi, dans certaines programmations, les personnes participantes peuvent être amenées à contribuer à la planification des tâches ou des ateliers en fonction de leurs besoins et de leurs projets individuels ou collectifs (Michaud et al., 2012a; Savard et al., 2005).

Comme le montrent d’autres travaux sur l’ISP comme celui de Filteau, Leclerc et Bourassa (2003), les caractéristiques de souplesse et d’ouverture peuvent toutefois cohabiter avec une pression forte des politiques d’emploi et de l’agence nationale d’emploi (Emploi-Québec) pour le placement et le retour rapide en emploi. Cette pression peut susciter ce que Leclerc, Bourassa, Maranda et Comeau (1997) ont nommé la « gymnastique du double écart » (p. 104), entre le travail prescrit visant l’insertion rapide en emploi et le travail réel tentant de s’ajuster aux besoins des personnes participantes et aux contraintes du marché du travail.

45 Bien que cela ne soit pas explicite dans l’ensemble des recherches, ce contexte d’intervention paraît intégrer

une perspective de l’apprentissage tout au long de la vie qui reconnaît l’importance de soutenir l’apprentissage des adultes pour favoriser ou maintenir leur insertion sociale et professionnelle (Alheit et Dausien, 2005; Bélisle, 2003, 2012; Québec, 2002).

La souplesse touche également les logiques d’intervention et les logiques d’action qui orientent les interactions au sein des groupes. Comme l’ont démontré Bélisle (2003)46 et Michaud et al. (2012a), ces logiques sont plurielles et se chevauchent au cours de l’intervention dans les groupes d’ISP. Dans cette dernière recherche, les logiques d’intervention ont été associées à l’efficacité de l’intervention. Elles sont activées selon les situations vécues par les groupes et les personnes participantes dans leurs différents contextes. Cependant, les analyses ne montrent que peu comment ces logiques d’intervention sont activées et évoluent dans un groupe précis puisque les analyses de plusieurs sites ont été principalement faites de façon transversale.

Plusieurs études montrent, sur un plan plus large, l’importance des partenariats intersectoriels ou territoriaux dans la programmation des groupes d’ISP. Selon Bélisle et al. (2011), cette approche partenariale s’est étendue au Québec depuis les années 1990 et vise la concertation d’acteurs qui sont interpelés par un problème commun sur un territoire donné. Dans le cas des personnes en chômage de longue durée, les différents partenaires sont concernés par l’insertion sociale et professionnelle, mais aussi plus globalement par les questions touchant la précarité et la pauvreté de ces personnes et de leur famille. Les partenaires mobilisés viennent entre autres des secteurs communautaires, scolaires, des entreprises, du secteur gouvernemental de la santé et des services sociaux (Desmarais et Lamoureux, 2012; Michaud et al., 2012a; Panet-Raymond et al., 2003; Raymond et Comeau, 2006; Turcotte et al., 2007). L’intensité des partenariats construits peut varier selon les programmes observés (Bélisle, 2003). Ainsi, bien que certains programmes soutiennent l’importance de la réalisation de projets dans la communauté, ils ne mettent pas explicitement de l’avant l’approche partenariale, et les partenariats semblent se concrétiser selon les besoins singuliers des personnes participantes dans les dimensions biologiques,

46 Les logiques d’action identifiées par cette auteure sont : la logique de placement, la logique de plaisir, la

logique de dévoilement de soi et la logique d’empowerment. Michaud et al. (2012a) identifient les logiques d’intervention suivantes : la logique de l’engagement dans la création et le maintien de liens affectifs sécures (sic), fiables et peu conditionnels, la logique de continuité de divers secteurs, la logique de l’empowerment, la logique de la connaissance et du changement de soi, la logique de l’accompagnement de la personne dans ses différents systèmes et la logique féministe.

psychologiques, sociales et vocationnelles (Savard et al., 2004). Par ailleurs, afin de favoriser les interactions directes, l’entraide et la solidarité entre les membres, l’intervention dans les groupes d’ISP a lieu principalement dans des groupes restreints, dont les caractéristiques sont décrites dans la prochaine sous-section.