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2.2 Indications de l’existence de la matière noire

2.2.3 A l’échelle de l’Univers

Un peu de cosmologie - Avant de décrire les observations de la présence de matière

noire à l’échelle de l’Univers, qui ont également permis de mesurer la densité de matière noire, il est important de rappeler quelques principes de cosmologie.

La description de l’Univers telle que nous le connaissons aujourd’hui est contenue dans le modèle standard de la cosmologie, appelé ΛCMD cold dark matter, et repose sur la théorie de la relativité d’Einstein, dans laquelle le contenu de l’Univers est relié à sa géométrie suivant les équations 2.1 [17].

Rµν

1

2Rgµν = 8πGNTµνΛgµν (2.1)

où GN est la constante de Newton et où :

— la partie gauche décrit la géométrie de l’Univers :

— Rµν et R sont respectivement le tenseur et le scalaire de Ricci, qui représentent

la courbure de l’Univers,

— gµν est le tenseur métrique (la métrique permet de décrire les symétries du

problème étudié).

— la partie droite décrit le contenu énergétique de l’Univers :

— Tµν est le tenseur d’énergie-impulsion,

— Λ est la constante cosmologique, qui représente l’accélération de l’expansion de l’Univers.

Pour décrire l’Univers à travers les équations d’Einstein, il est nécessaire de définir une métrique. La métrique la plus générale est celle de Robertson-Walker qui repose sur l’hypothèse que l’Univers est homogène et isotrope à grande échelle.

En résolvant les équations d’Einstein dans la métrique de Robertson-Walker, et en supposant que l’Univers se comporte comme un fluide parfait, on obtient les équations de Friedmann (équations 2.2) : elles permettent la description dynamique de l’Univers au travers du paramètre a(t). Ce paramètre, appelé facteur d’échelle, décrit l’évolution de l’expansion de l’Univers au cours du temps.

(˙a a) 2 = 8πGN 3 ρtotκ a2 (2.2) où :

— ρtot est la densité totale d’énergie de l’Univers : ρtot = ρm+ ρr+ ρΛ,

— κ est la constante de courbure de l’Univers.

Ainsi, l’équation 2.2 traduit l’évolution de l’Univers au travers de sa densité totale

d’énergie ρtot, dont les 3 composantes décrivent les différentes composantes de l’Univers :

— ρm est la densité d’énergie de la matière non relativiste (baryonique4 ou non),

4. La matière baryonique correspond à la matière composée de baryons, eux-mêmes composés de quarks, constituants fondamentaux de la matière.

— ρr est la densité d’énergie des rayonnements et de la matière relativiste,

— ρΛ est la densité d’énergie responsable de l’expansion de l’Univers.

En définissant une densité critique ρc, correspondant à un Univers plat (i.e. κ = 0), on

peut alors normaliser les différentes densités d’énergies de l’Univers en unité de ρc. On

obtient ainsi les paramètres de densité : Ωm = ρρmc, Ωr = ρρrc, ΩΛ= ρρΛc.

Ce sont ces paramètres qui seront utilisés pour décrire la composition de l’Univers.

Détermination de la densité de matière dans l’Univers - L’étude du fond diffus

cosmologique [18] (Cosmic Microwave Background), combiné aux résultats des études sur les amas de galaxies (voir section 2.2.2) et sur les supernovae de type Ia, permettent de

mesurer la densité de matière dans l’Univers, c’est à dire Ωm [17].

Une supernovæ de type Ia est l’explosion résultant de la fin de vie d’une étoile naine blanche. La particularité des supernovæ de type Ia est que leur luminosité reste similaire d’une supernovæ à une autre : ce sont des chandelles standards de la cosmologie. Il

est ainsi possible de mesurer l’évolution de l’expansion de l’Univers et donc ΩΛ (en

mesurant leurs décalages vers le rouge5). La connaissance de Ω

Λ permet de contraindre les

valeurs de Ωm, mesurées par l’étude du CMB. En effet, lors des tous premiers instants de

l’Univers, ce dernier était extrêmement dense et chaud, sous forme d’un plasma primordial composé de matière et de rayonnement. Globalement homogène, ce plasma comporte quelques anisotropies de matière. Par attraction gravitationnelle, ces petites sur-densités de matière se sont condensées jusqu’à ce que la pression de radiations contrebalance la force gravitationnelle, créant des ondes dans le plasma primordial. Puis, par expansion, l’Univers devient moins dense et moins chaud, réduisant la probabilité d’interaction entre radiation et matière et permettant aux radiations d’échapper du plasma : ce sont ces photons qui composent le CMB. Refroidie par l’expansion de l’Univers, la température

du CMB est d’environ 2.7 K et présente de très faibles fluctuations de l’ordre de 10−5K.

Ces fluctuations ou anisotropies traduisent celles du plasma primordial et nous permettent de mesurer la densité de matière et de radiation de l’Univers au moment du découplage. Par décomposition en harmonique sphérique, il est possible de décrire les fluctuations du CMB sous forme d’un spectre de puissance angulaire, présenté figure 2.4, et dont chaque pic permet de mesurer les paramètres cosmologiques. L’étude de ce spectre permet de mesurer de façon distincte la densité de matière baryonique et non-baryonique. En considérant que cette matière non-baryonique est composée de matière noire, l’étude du CMB permet donc de mesurer la quantité de matière noire dans l’Univers. Ainsi, les valeurs des paramètres cosmologiques obtenues par la collaboration Planck en 2019 [18], présentées dans le tableau 2.1, montrent que la matière baryonique représente environ 4% de la densité énergétique de l’Univers, alors que la matière noire en représente environ 26%.

5. Le décalage vers le rouge (ou redshift en anglais) de la lumière émise par un objet astrophysique est produit par la modification du spectre électromagnétique dû à l’expansion de l’Univers.

0 1000 2000 3000 4000 5000 6000 D T T ` [µ K 2] 30 500 1000 1500 2000 2500 ` -60 -30 0 30 60 ∆ D T T ` 2 10 -600 -300 0 300 600

Fig. 2.4 – Spectrum angulaire du CMB, par l’expérience Planck [18]

Paramètre Valeur

Densité de matière totale (%) 31.1 ± 0.6 Densité baryonique (%) 4.95 Densité de matière noire (%) 26.36

Densité d’énergie noire (%) 69.9 ± 0.6

Table 2.1 – Paramètres cosmologiques [19]. La matière noire représente 84.8% de la matière totale présente dans l’Univers (i.e. 26.36

31.1 ×100 = 84.8).

D’autres observations à l’échelle cosmologique (telles que l’étude des oscillations ba- ryoniques acoustiques [19] ou encore des mesures de nucléosynthèse primordiale [19]) ont également permis de mesurer avec précision le contenu de l’Univers, et sont en parfait accord avec les mesures présentées ici.

2.2.4. Caractéristiques de la matière noire provenant des observations