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1. Introduction.

Les placentas issus de grossesses associées à une trisomie 21 présentent des anomalies morphologiques et fonctionnelles, qui ont pour conséquences une diminution de la production et de la sécrétion des hormones synthétisées par le syncytiotrophoblaste. Ces résultats sont en contradiction avec le fait que l’on retrouve l’hCG augmentée dans le sang maternel en cas de grossesse associée à une trisomie 21.

L’objectif de ce premier article a été de vérifier ou d’infirmer les différentes hypothèses émises afin d’expliquer la discordance observée in vitro et in vivo au niveau de la production et de la sécrétion d’hCG lors d’une grossesse associée à une trisomie 21. En effet, nous avons voulu savoir dans un premier temps si lors d’une grossesse associée à une trisomie 21, l’hCG était retrouvée augmentée dans le sang maternel tout au long de la grossesse, ou si au moment du dosage des marqueurs sériques maternels (15ème SA), il n’y aurait pas un décalage du pic de sécrétion de l’hCG, normalement observé

à la 8ème SA.

Dans un deuxième temps, nous nous sommes intéressés à la clairance maternelle de l’hCG. Nous avons cherché à savoir si la demi-vie plasmatique de l’hCG présente chez les femmes ayant une grossesse associée à une trisomie 21 n’était pas plus longue que celle de l’hCG plasmatique retrouvée chez les femmes ayant une grossesse normale.

Enfin, nous avons caractérisé l’hCG synthétisée et sécrétée lors de grossesse associée à une trisomie 21. Nous avons voulu savoir si des modifications post-traductionnelles pouvaient être à l’origine du paradoxe observé. Pour cela nous avons utilisé différentes lectines ainsi que l’iso-électrofocalisation mettant alors en évidence l’existence d’une hCG hyperglycosylée dans le trisomie 21.

Nous avons ensuite montré en utilisant le test de fonctionnalité de l’hCG (cellules MA-10) que l’hormone hyperglycosylée retrouvée dans la trisomie 21 est moins active pour stimuler son récepteur.

2. Résultats.

2.1. Concentration d’hCG dans les sérums maternels.

La première figure de l’article (ci-après) compare les concentrations d’hCG dans les sérums maternels tout au long de la gestation, à partir d’une large cohorte de grossesses normales (n = 894) et de grossesses affectées par une trisomie 21 (n = 499). Nous avons observé que dans les 499 sérums issus de grossesses associées à une trisomie 21, les niveaux d’hCG sont augmentés. Il est intéressant de noter que cette augmentation se poursuit tout au long de la grossesse et est constante quel que soit le terme. De plus, nous avons observé que le pic de sécrétion d’hCG se retrouve toujours entre la 8ème et la 10ème SA à la fois dans les grossesses normales et celles associées à une trisomie 21.

2.2. Concentration d’hCG dans les milieux de culture des cellules trophoblastiques.

Nous avons étudié sur un grand nombre de cultures primaires, la diminution significative (p = 0,003) de la sécrétion d’hCG dans les milieux de culture de cellules trophoblastiques isolées à partir de placentas de trisomie 21 (337 ± 62 UI/l; n = 29) ou de placentas témoins au même âge gestationnel (930 ± 246 UI/l; n = 13). Nous avons confirmé cette observation en mesurant par RT-PCR quantitative en temps réel, les transcrits de la sous-unité β de l’hCG. Les taux de transcrits sont significativement diminués (p < 0,01) dans les cellules issues de placentas trisomiques (4139 ± 1554 en unité arbitraire, UA) comparés à ceux des cellules issues de placentas témoins (19494 ± 5812 UA). En revanche, le niveau d’hCG dans le sérum maternel correspondant à ces placentas se révèle significativement plus élevé (p < 0,0001) dans les grossesses affectées par une trisomie 21 que dans les grossesses témoins.

2.3. Cinétique d’élimination de l’hCG dans le sérum maternel après la délivrance.

Une des raisons de l’augmentation de l’hCG dans le sérum maternel et dans les milieux de culture de cellules trisomiques pourrait être l’augmentation de la demi-vie de l’hCG. Nous avons alors étudié la cinétique de disparition de l’hCG dans le sérum maternel après la délivrance et l’expulsion du placenta. Le pourcentage d’hCG restant dans la circulation maternelle, à différent temps après la délivrance (Table 1 de l’article 1) n’est pas significativement différent entre les grossesses normales ou celles associées à une trisomie 21.

2.4. Bioactivité de l’hCG.

Nous avons ensuite utilisé le test fonctionnel des cellules de Leydig (MA-10). Ces cellules expriment le récepteur de l’hCG (R-LH/CG) et produisent de la progestérone en réponse à une stimulation par l’hCG. L’utilisation de ce test nous a permis de comparer la capacité de l’hCG issue des milieux de culture normaux et trisomiques à stimuler la production de progestérone par les cellules MA-10. À concentration égale (10-10M), l’hCG présente dans les milieux de trophoblastes trisomiques

est significativement moins active (38% du témoin, p < 0,0008) pour stimuler la sécrétion de progestérone par les cellules MA-10 (Figure 2 de l’article 1).

2.5. Glycosylation de l’hCG.

Dans le but de déterminer quelles anomalies de glycosylation pouvaient être responsables de la nette diminution de la bioactivité de l’hormone, nous avons quantifié par RT-PCR quantitative le niveau des transcrits de deux enzymes impliquées dans la voie de glycosylation de l’hCG: la sialyl- transférase-1 (SIAT-1, qui ajoute un groupement sialyl aux structures antennées) et la fucosyl- transférase-1 (FUT-1, qui ajoute un groupement fucose au premier N-acétyl-glucosamine des glycoprotéines). Les ARNm de ces deux enzymes sont significativement plus élevés (p < 0,05) dans les cytotrophoblastes trisomiques (n = 5) comparés aux cytotrophoblastes normaux (n = 5) (27 ± 15 UA vs 2,5 ± 1 UA pour la SIAT-1 et 9 ± 3 UA vs 3 ± 1 UA pour la FUT-1). L’utilisation de lectines spécifiques de plusieurs groupements glycosylés a montré que l’hCG sécrétée par les cytotrophoblastes trisomiques est différemment glycosylée par rapport à celle présente dans les milieux de culture normaux (tableau 2 de l’article 1). L’IEF (iso-électrofocalisation) et le western-blot (figure 3 de l’article 1) montrent que l’hCG présente dans les milieux de culture de trophoblastes normaux s’équilibre aux alentours d’un point isoélectrique égal à 7,3 tandis que dans les milieux de culture de trisomie 21, l’hCG est caractérisée par un point isoélectrique plus acide (pHi = 4,5).

3. Conclusion.

Le défaut de différenciation trophoblastique et le retard de maturation placentaire observés dans la trisomie 21, nous a incité à penser que l’augmentation de l’hCG observée pourrait être liée à un décalage du pic de la sécrétion de l’hormone dans le sang maternel. Lors de grossesses normales, la concentration d’hCG sécrétée dans le sang maternel augmente rapidement pour atteindre un pic entre la 8ème et la 10ème SA, cette augmentation est suivie d’une chute rapide, les taux d’hCG restent alors constants tout le long de la grossesse dans le sang maternel. Les facteurs responsables de ce pic de sécrétion d’hCG restent actuellement inconnus. Lors de grossesses associées à une trisomie 21, le pic de sécrétion d’hCG dans le sang maternel est observé au même moment que celui observé lors de grossesses normales (entre la 8ème et la 10ème SA). Cependant, l’hCG est retrouvée augmentée dans le sang maternel tout le long d’une grossesse associée à une trisomie 21. Le décalage du pic de sécrétion ne peut donc pas être retenu comme l’hypothèse expliquant le paradoxe des sécrétions d’hCG. Une nouvelle hypothèse, concernant des modifications de la clairance de l’hCG, a été vérifiée dans cet article afin d’expliquer la discordance entre une synthèse d’hCG placentaire diminuée et un taux maternel élevé. L’élimination de l’hCG sérique maternel dépend de son catabolisme hépatique, de son élimination rénale et de sa captation par le placenta et les ovaires. Dans cette étude, nous avons montré que la disparition de l’hCG présente dans le sang maternel après expulsion du placenta, est la même entre des grossesses normales et celles associées à une trisomie 21. L’hypothèse d’une clairance différentielle en l’absence de placenta entre une hCG dite “normale” et “trisomique 21” n’est pas valable. Cependant l’hypothèse d’une clairance différentielle au niveau du placenta n’est pas à exclure.

Nous avons étudié de manière qualitative et fonctionnelle, l’hCG sécrétée par les trophoblastes en culture issus de placentas de trisomie 21 comparées à ceux issus de placentas normaux. Nous avons montré pour la première fois, grâce à différentes techniques (IEF et utilisations de lectines, étude des messagers des enzymes impliqués dans la glycosylation), que l’hCG produite par les cellules trophoblastiques trisomiques est anormalement glycosylée. Les cellules trophoblastiques trisomiques produisent une hCG plus acide (pHi de 4,5) due a une augmentation des résidus d’acide sialique, mais aussi une hCG plus fucosylée par rapport à l’hCG synthétisée et sécrétée par les cellules trophoblastiques normales. Nous avons alors regardé quel pouvait être l’impact de cette glycosylation anormale sur la bioactivité de l’hormone.

Nous avons pu mettre en évidence, grâce au test de bioactivité réalisé sur des cellules de Leydig (Ascoli, 1981), que l’hCG produite par les trophoblastes trisomiques est biologiquement moins active que l’hCG produite par des trophoblastes normaux. L’hCG produite par les cellules trophoblastiques trisomiques stimule moins bien le récepteur LH/CG au niveau des organes cibles et par conséquent au niveau du placenta, qu’une hCG produite par des cellules trophoblastiques normales. Le placenta est

un organe qui possède un grand nombre de récepteurs LH/CG (Licht et al., 1993) et il est maintenant bien établi que l’hCG joue un rôle autocrine important dans la différenciation trophoblastique (Cronier et al., 1994) (Yang et al., 2003). Il existe une re-capture de l’hCG par les cellules trophoblastiques. Dans cette étude, nous n’avons pas pu expliquer le paradoxe de l’hCG, les hypothèses qui avaient été émises se sont révélées infructueuses. Cependant cette étude nous a permis de mettre en évidence la présence d’une hCG anormalement glycosylée, sécrétée par les cellules trophoblastiques trisomiques. Nous avons pu montrer de même, que cette hCG anormalement glycosylée est biologiquement moins active. Ceci nous a amené à proposer de nouvelles hypothèses afin d’expliquer le paradoxe de l’hCG. En effet, l’augmentation de l’hCG sérique maternelle retrouvé lors d’une grossesse associée à une trisomie 21 pourrait être due:

- À une diminution du nombre de récepteurs LH/CG au niveau des cellules trophoblastiques trisomiques, ou à la présence d’un récepteur anormal.

- À une diminution de fixation sur son récepteur et/ou d’internalisation de l’hCG anormalement glycosylée et biologiquement moins active, sécrétée par les cellules trophoblastiques trisomiques.

Trophoblast Production of a Weakly Bioactive Human