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PARTIE I : Exploration du rôle des PLC dans la sécrétion chlorure dépendante de CFTR

A. Les isoformes de PLC qui jouent un rôle dans la sécrétion chlorure dépendante de CFTR dans

Des études ont déjà montré le rôle des phospholipases C dans la sécrétion chlorure suite à une activation par l’H2O2 (Ivonnet et al., 2015), la forskoline (Hoque et al., 2010), l’ATP (Dutta et al., 2008) et les acides biliaires désoxycholique et chénodésoxycholique (CDCA) (Domingue et al., 2016). Namkung et ses colègues ont également montré l’implication des PLC dans un courant chlorure activé par l’ATP et sensible au CFTRinh-172 (Namkung et al., 2010). Nos résultats viennent corroborer les données de la littérature, puisque nous avons, à notre tour, identifié un rôle des PLC dans la sécrétion chlorure des cellules épithéliales bronchiques humaines suite à une activation forskoline et UTP. Les isoformes de PLC qui pourraient entrer en jeu dans la sécrétion chlorure, ainsi que les mécanismes et partenaires cellulaires engagés dans cette sécrétion seront discutés dans cette partie.

A. Les isoformes de PLC qui jouent un rôle dans la sécrétion chlorure dépendante

de CFTR dans les cellules épithéliales bronchiques

L’inhibition pharmacologique des PLC par le composé U73122 diminue la

stabilité du courant chlorure CFTR-dépendant au cours du temps

Nous avons vérifié que les PLC étaient bien impliquées dans la conductance chlorure sensible au CFTRinh-172 suite à une activation par la forskoline à la fois i) dans les cellules épithéliales bronchiques qui expriment la protéine CFTR-WT de manière endogène (16HBE14o-) et ii) dans les cellules épithéliales bronchiques CFBE41o- qui sur-expriment la protéine CFTR-WT (CFBE-WT) ou la protéine CFTR-F508del corrigée par la température (CFBE-F508del). Ainsi, l’inhibition des PLC par l’inhibiteur U73122 diminue la stabilité du courant CFTR-dépendant au court du temps d’environ 30 % par rapport à l’analogue inactif U73343 utilisé comme contrôle dans les trois lignées. Il a déjà été publié que la PLCδ1, la PLCγ1 et la PLCβ3 sont exprimées dans des lignées cellulaires épithéliales bronchiques de manière endogène (Bezzerri et al., 2011; Vachel et al., 2015; Xu et al., 2013) et leur expression a été confirmée dans nos modèles cellulaires. Nous n’avons pas de données précises concernant l’expression des autres isoformes de PLC exprimées dans nos modèles cellulaires 16HBE14o- et CFBE41o-, mais il existe des données dans la lignée A549 issue de cellules épithéliales pulmonaires humaines provenant d’un adénocarcinome ainsi que dans la lignée HBEC3-KT issue de cellules épithéliales bronchiques humaines provenant d’un sujet sain (Figure 44).

Si l’on se fie à l’ARN exprimé dans les lignées A549 et HBEC3-KT, la PLCβ4, la PLCδ3, la PLCδ4, la PLCε, la PLCη1 et la PLCη2 sont également susceptibles d’être exprimées dans les cellules épithéliales pulmonaires et de jouer un rôle dans le courant chlorure dépendant de CFTR.

La réalisation de western blots de ces six isoformes de PLC dans les lignées 16HBE14o- et

CFBE41o- permettrait d’identifier celles qui sont effectivement exprimées dans nos modèles et

qui pourraient intervenir dans le maintien de la sécrétion chlorure CFTR-dépendante au cours

du temps.

La diminution de l’expression de la PLCγ1 ou de la PLCβ3 diminue l’activation

maximale du courant chlorure CFTR-dépendant

L’objectif était de caractériser, parmi les différentes isoformes de phospholipases, celles qui sont impliquées dans la sécrétion d’ions chlorures dans nos modèles cellulaires. Nous nous sommes concentrés sur les PLCδ1, PLCγ1 et PLCβ3 qui sont exprimées dans nos modèles cellulaires. À l’aide de la technique d’interférence par ARN dirigée contre ces trois isoformes dans la lignée 16HBE14o- nous avons observé que, à la différence de la PLCδ1, les PLCγ1 et PLCβ3 interviennent dans le courant CFTR-dépendant activé par la forskoline. Par la suite, l’implication de la PLCβ3 dans ce courant CFTR-dépendant a aussi été confirmée dans les cellules CFBE-F508del corrigées et dans leurs cellules contrôles qui sont les CFBE-WT. De cette manière, lorsque l’expression de la PLCβ3 est diminuée, Figure 44 : Expression normalisée de la quantité d’ARN des 13 isoformes de PLC dans les lignées

A549 et HBEC3-KT

La lignée A549 est une lignée pulmonaire épithéliale humaine issue d’un adénocarcinome et la lignée HBEC3-KT est une lignée bronchique épithéliale humaine. https://www.proteinatlas.org

l’activation du courant chlorure CFTR-dépendant est réduit de 25 % dans les cellules CFBE-WT ainsi que dans les cellules CFBE-F508del corrigées. La PLCγ1 et la PLCβ3 interviennent donc dans la sécrétion chlorure dépendante de CFTR. Cependant d’autres isoformes de PLC pourraient participer à la sécrétion chlorure dépendante du CFTR (Figure 44).

Par la suite, une stratégie d’interférence par ARN dirigée contre les autres isoformes de PLC

exprimées de manière endogène dans nos modèles pourrait déterminer quelles PLC, en plus de

la PLCγ1 et de la PLCβ3, pourraient intervenir dans l’activation du courant CFTR-dépendant.

Les expériences en chambre de Ussing permettent d’observer la résultante de l’activation de plusieurs conductances ioniques, et pas seulement celles qui résultent de l’activité du canal CFTR. L’ajout de DIDS, un inhibiteur des canaux chlorure autres que CFTR n’empêche pas la diminution d’activation du courant CFTR-dépendant d’avoir lieu en présence du siRNA PLCβ3. Ce résultat suggère que la PLCβ3 exerce une action sur le courant CFTR.

Des expériences de patch-clamp dans les CFBE41o- transfectées avec le siRNA PLCβ3 pourraient

confirmer l’impact de la diminution d’expression de cette protéine sur la fonction du canal CFTR.

Comment les PLCγ1 et PLCβ3 impactent-elles le courant chlorure CFTR-dépendant ? Compte tenu du fait que les PKC interviennent dans la phosphorylation du canal CFTR et qu’elles sont activées sous l’action des PLC, nous avons tenté de répondre à cette question en regardant le rôle des PKC dans l’activation du courant CFTR-dépendant par la PLCβ3. L’inhibition des PKC par le composé Gö6983 diminue faiblement le courant chlorure CFTR-dépendant, ceci dans les cellules transfectées avec le siRNA PLCβ3 et dans les cellules transfectées avec le siRNA contrôle. Il semblerait donc que ce ne soit pas les PKC qui soient impliquées dans l’activation du courant chlorure par la PLCβ3. L’inhibiteur de PKC utilisé, le Gö6983, est un inhibiteur à spectre large qui bloque les PKCα, PKCβ, PKCγ, PKCδ et PKCζ à la concentration utilisée de 1 µM. Il se pourrait tout de même que d’autres isoformes de PKC soient activées par la PLCβ3 et exercent une action sur le canal CFTR.

Il semblerait, en effet, que parmi les isoformes de PKC existantes, la PKCε soit impliquée dans

les mécanismes d’activation du courant CFTR-dépendant (Alcolado et al., 2011; Alshafie et al.,

2014). Il pourrait-être utile de refaire les expériences de fonctionnalité sur des cellules

transfectées avec le siRNA contrôle ou le siRNA PLCβ3 en présence du peptide inhibiteur des

PKCε, le peptide EAVSLKPT.

Au cours de nos expériences, nous n’avons pas déterminé de quelle manière les phospholipases C exercent précisemment leur action sur le courant chlorure CFTR dépendant. Cependant nous avons identifié, dans la littérature, l’existence de partenaires communs entre les PLCβ3, PLCγ1 et CFTR qui apportent un élément de réponse (Figure 45).

En effet, les PLCβ et CFTR sont régulés par des protéines qui contiennent des domaines PDZ (Kim et al., 2011b; Raghuram et al., 2001). Par exemple, il a été mis en évidence qu’il existe des liens fonctionnels entre les protéines NHERF (Na+/H+ Exchanger Regulatory Factor) et CFTR (Arora et al., 2014; Zhang et al., 2017) mais aussi entre les protéines NHERF et PLCβ3 (Jiang et al., 2014; Oh et al., 2004). En effet, au niveau de son extrémité COOH, il a été montré que CFTR établit des liaisons avec des domaines PDZ (Guggino and Stanton, 2006; Wang et al., 1998; Xia et al., 2016). Ainsi NHERF1 interagit avec l’extrémité COOH du canal CFTR pour le stabiliser à la membrane (Arora et al., 2014; Sharma et al., 2016). De plus, les protéines NHERF1 et NHERF2 interviennent dans la phosphorylation de CFTR et favorisent donc l’activité du canal (Broadbent et al., 2017). Une étude dans un modèle murin KO (en anglais « Knock out ») pour la protéine NHERF1 a montré que cette protéine est requise pour l’obtention d’une activation maximale du courant chlorure CFTR-dépendant par la forskoline au niveau de l’épithélium intestinal (Broere et al., 2007). En outre, l’activation du courant chlorure CFTR-dépendant dans le modèle murin KO diminue de 35 % par rapport au modèle contrôle. Cette diminution est du même ordre de grandeur que celle que nous observons suite à la diminution de l’expression de la PLCβ3 dans notre étude (25 %). Par conséquent, la PLCβ3, via son interaction avec la protéine NHERF, pourrait jouer un rôle dans la sécrétion chlorure dépendante de CFTR en favorisant l’interaction entre les protéines NHERF et CFTR. Les lignées épithéliales pulmonaires A549 et HBEC3-KT expriment l’ARN des protéines NHERF1 et NHERF2 (Figure 46), suggérant que des interactions pourraient s’établir entre CFTR et la PLCβ3 via ces deux protéines pour favoriser la sécrétion chlorure.

Figure 45 : Partenaires communs entre CFTR et les phospholipases C identifiés dans la littérature

CFTR

SHANK2

SH3 and multiple ankyrin repeat domains protein 2

NHERF1

Na(+)/H(+) exchange regulatory cofactor 1

NHERF2

Na(+)/H(+) exchange regulatory cofactor 2

PLCγ1

PLCβ3

(Hwang et al., 2005b; Lee et al., 2007a; Wu et al., 2007)

(Hall et al., 1998; Jiang et al., 2014; Lobo et al., 2016; Reczek and Bretscher, 2001) (Holcomb et al., 2014; Hwang et al., 2000a; Oh et al., 2004; Zhang et al., 2017)

Pour tester cette hypothèse il serait intéressant de regarder l’expression des protéines NHERF

ainsi que la localisation des trois protéines NHERF, CFTR et PLCβ3 dans les lignées 16HBE14o-

et CFBE41o- en immunomarquage et de regarder les interactions entre ces trois partenaires par

la technique de co-immunopréciptation. L’idéal serait, par la suite, et si l’existence de telles

interactions se confirment, de réaliser des mutants au niveau des sites d’interactions entre

NHERF et la PLCβ3 et de regarder les répercussions sur le courant CFTR-dépendant en chambre

de Ussing.

Il n’est pas renseigné dans la littérature que la PLCγ1, qui intervient également dans le courant chlorure CFTR-dépendant dans les cellules qui expriment la protéine CFTR-WT de manière endogène, soit régulée par des protéines via des domaines PDZ. D’ailleurs les PLCγ, contrairement aux PLCβ, ne possèdent pas de domaine PDZ sur leur structure et ne sont à priori pas régulées par les protéines NHERF. En revanche, la PLCγ1 et la protéine CFTR partagent une affinité pour la protéine SHANK2 (en anglais «SH3 and multiple ankyrin repeat domains protein 2 ») (Lee et al., 2007a; Wu et al., 2007). Par ailleurs il a été mis en évidence que SHANK2 régule négativement CFTR (Kim et al., 2004; Lee et al., 2007a). Compte tenu de ces informations nous pouvons émettre une hypothèse : la PLCγ1, en établissant des liaisons avec la protéine SHANK2, intervient dans le courant chlorure CFTR-dépendant en diminuant l’interaction entre les protéines CFTR et SHANK2.

Figure 46 : Expression normalisée de la quantité d’ARN des protéines NHERF1, NHERF2 et SHANK2 dans les lignées A549 et HBEC3-KT

La lignée A549 est une lignée pulmonaire épithéliale humaine issue d’un adénocarcinome et la lignée HBEC3-KT est une lignée bronchique épithéliale humaine. https://www.proteinatlas.org

Afin de valider cette hypothèse, l’expression de SHANK2 dans nos modèles cellulaires devra être

confirmée par western blot, de même que les interactions SHANK2-PLCγ1 et SHANK2-CFTR. Pour

aller encore plus loin, et si de telles interactions sont établies dans nos modèles cellulaires, il

serait intéressant de réaliser des mutants de la protéine PLCγ1 avec une délétion au niveau de

son domaine SH3, puisque c’est via ce domaine qu’elle interagit avec SHANK2, et d’exprimer

cette protéine dans nos modèles pour réaliser des expériences de fonctionnalité du courant

chlorure CFTR-dépendant en chambre de Ussing.

B. Les différences observées entre l’effet siRNA et l’effet inhibition