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C ONCLUSIONS ♫ Atlas Air – Heligoland (Massive Attack, 2010)

12 D ISCUSSION DES PRINCIPAUX RESULTATS

L’objet central de ce travail de thèse était d’évaluer les mécanismes de contrôle de la contraction musculaire volontaire après un traumatisme médullaire cervical. Pour ce faire, les activations musculaires et corticales de participants traumatisés médullaires cervicaux étaient comparées aux activations musculaires et corticales de participants contrôles. Le protocole expérimental impliquait des contractions musculaires isométriques autour de l’articulation du coude, en flexion et en extension, à différents niveaux de force. Suite à un traumatisme médullaire cervical au dessus de la vertèbre C7, l’activation des muscles extenseurs de l’articulation du coude est altérée et l’activation des muscles fléchisseurs de l’articulation du coude reste intacte (Maynard et al., 1997). Ce décalage entre l’innervation des muscles fléchisseurs et l’innervation des muscles extenseurs rend l’articulation du coude particulièrement pertinente pour étudier les mécanismes de contrôle sous-jacents l’activation simultanée des muscles agonistes et antagonistes, intacts ou altérés par le traumatisme médullaire cervical (Wierzbicka et Wiegner, 1992, 1996). Dans le cadre de ce travail de thèse, cinq études ont été menées. Les deux premières études consistaient à évaluer les adaptations musculaires agonistes et antagonistes suite à un traumatisme médullaire cervical. Les deux études suivantes consistaient à évaluer la modulation des activations corticales suite à un traumatisme médullaire cervical. Enfin, une étude investiguait les interactions cortico-musculaires chez la personne traumatisée médullaire cervicale et estimait le lien entre les activités corticale et musculaire suite à un traumatisme médullaire cervical.

Concernant la production de force, les participants traumatisées médullaires cervicaux produisaient un moment de force maximal équivalent à celui des participants contrôles en flexion et un moment de force maximal inférieur à celui des participants contrôles en extension. En conséquence, l’augmentation du moment de force développé lors des

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contractions sous-maximales en extension était inférieur pour les participants traumatisés médullaire cervicaux comparativement à celle des participants contrôles.

Au niveau musculaire, nos résultats indiquent une augmentation de l’activation des muscles extenseurs chez les participants traumatisés médullaires cervicaux, quel que soit le niveau de force développé ou la direction de la contraction réalisé. Lors d’extensions du coude à moment de force net identique, les participants traumatisés médullaires cervicaux ont également une activation des muscles fléchisseurs, agissant comme muscles antagonistes, plus importantes que celles des participants contrôles. La littérature suggère que les mécanismes inhibiteurs spinaux sont altérés après un traumatisme médullaire, ce qui entraine une augmentation des activations musculaires antagonistes (Knikou et al., 2006; Knikou et Mummidisetty, 2011; Dietz, 2012). Nos résultats étendent les résultats obtenus par stimulation électrique aux contractions musculaires volontaires. Nos résultats suggèrent également que les mécanismes inhibiteurs spinaux sont plus sensibles au moment de force réellement développé plutôt qu’au niveau de force développé. Cette interprétation pourrait alors expliquer l’activation atypique des muscles extenseurs de « AC », révélées dans l’étude de cas. Les muscles extenseurs de « AC » étaient gradées 0 par le test musculaire manuel. Cette cotation était confirmée par un moment de force nul lors de MVC en extension. L’activation des muscles extenseurs était pourtant modulée en fonction du niveau de force, en flexion comme en extension. L’activation des muscles extenseurs était plus importante en flexion qu’en extension, c.-à-d., lorsque ils agissaient comme antagonistes.

Au niveau cortical, l’activation du M1 pendant la contraction musculaire augmentait avec l’augmentation du niveau de force pour l’ensemble des participants. Ce résultat a été retrouvé que la contraction soit intacte, c.-à-d. lors de flexions du coude réalisées par les participants traumatisés médullaires cervicaux, ou altérée, c.-à-d. lors d’extensions du coude réalisées par les participants traumatisés médullaires cervicaux. Ce résultat suggère que l’activation du M1

est toujours fonctionnelle après un traumatisme médullaire cervical lors d’une contraction musculaire volontaire,. Ce résultat indique également que l’activation du M1 est plus sensible à la modulation du niveau de force plutôt qu’au moment de force réellement développé. Nous avons réalisé une étude complémentaire lors de contractions en flexion. Les résultats obtenus précisent que l’activation du M1 avec le niveau de force est principalement modulée dans ses composantes fréquentielles plutôt que dans son amplitude ou sa durée d’apparition. Cette étude complémentaire a révélé que l’amplitude de l’activation du M1 post-contraction est inférieure chez les participants traumatisés médullaires cervicaux comparativement à celles des participants contrôles. Bien que la signification de l’activation du M1 post-contraction est toujours en débat, certaines études suggèrent que l’activation du M1 post-contraction reflèterait la désactivation du M1 (Pfurtscheller et al., 1998). D’autres études suggèrent que l’activation du M1 post-contraction reflèterait le traitement des informations sensorielles liées au mouvement réalisé (Cassim et al., 2001). Notre étude a également révélé un délai plus important pour inhiber la contraction musculaire chez les participants traumatisés médullaires cervicaux. La diminution de l’amplitude d’activation du M1 post-contraction pourrait alors être associée à une difficulté d’inhibition de la contraction musculaire chez les participants traumatisés médullaires cervicaux.

Dans le cadre de ce travail de thèse, nous avons réalisé une analyse préliminaire des interactions cortico-musculaires entre les participants traumatisés médullaires cervicaux et les participants contrôles pour un niveau de force en flexion et en extension. Les interactions cortico-musculaires étaient étudiées dans deux bandes de fréquences pour l’ensemble des muscles sollicités par la tâche. Les résultats obtenus mettent en évidence une diminution des interactions cortico-musculaires autour de 10 Hz chez les participants traumatisés médullaires cervicaux réalisants des contractions musculaires en extension. Les résultats mettent également en évidence une distinction des interacations cortico-musculaires par fonction

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musculaire, à savoir muscles agonistes vs. muscles antagonistes, plutôt qu’une distinction des interactions cortico-musculaires par muscle. Les interactions cortico-musculaires autour de 10 Hz étaient plus importantes avec les muscles antagonistes et les interactions cortico-musculaires autour de 20 Hz étaient plus importantes avec les muscles agonistes. Dans la littérature, il est supposé que les fréquences autour de 20 Hz pourraient refléter le contrôle cortical direct des activations musculaires (Conway et al., 1995 ; Williams et Baker, 2009a, 2009b). Bien que les études traitant des fréquences autour de 10 Hz soient plus rares, ces études supposent que les interactions cortico-musculaires autour de 10 Hz pourraient refléter le contrôle cortical des mécanismes spinaux permettant la modulation des activations musculaires (Raethjen et al., 2013; Semmler et al., 2013). Dans notre étude, la diminution des interactions cortico-musculaires autour de 10 Hz révélée chez les participants traumatisés médullaires cervicaux pourrait alors refléter l’altération du contrôle des mécanismes inhibiteurs spinaux de la contraction musculaire.