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5. les ions haloniums

5.2 Ions bromonium

L’atome de brome a une polarisabilité de 3,05 Ǻ3. Malgré cette polarisabilité inférieure

à celle de l’atome d’iode, la réactivité des ions bromoniums est proche de celle des ions io- doniums. En revanche la structure de ces ions est plus impactée par l’environnement élec- tronique du centre cationique.

5.2.1 Études par spectroscopie RMN

La méthodologie d’ionisation de dérivés de 1-iodo-2-fluoroéthane précédemment évoquée a été utilisée sur les dérivés bromés. De manière analogue, l’observation d’un seul singulet à δ = 5,53 ppm suggère un ion éthylènebromonium cyclique et symétrique. C’est

également le cas pour les dérivés substitués par des groupements méthyles. Cependant, lorsque la température est portée à -40°C, les substrats 1,2-diméthylés s’isomérisent (Figure 47).72L’atome de brome stabilise donc moins bien la charge positive que l’atome d’iode.

Me H Me H Br Me Me H H Br Me H H Me Br -60°C -40°C

Figure 47 : Isomérisation des ions bromoniums.

5.2.2 Étude par spectroscopie infrarouge

Les ions bromoniums ont également été étudiés par spectroscopie infrarouge.74 L’

ion, généré à partir de dérivés du 1,2-dibromoéthane dans une matrice de SbF5, a ensuite

été analysé à -196°C. Il présente une bande d’absorption à une fréquence de 3140 cm-1,

caractéristique de la vibration d’élongation d’une liaison C-H avec hybridation du carbone, associée à un don d’électron du brome vers la liaison C-H. Une seconde bande d’absorption à une fréquence de 1596 cm-1 peut être attribuée à la vibration d’élongation d’une liaison

carbone-carbone partiellement double. Ces résultats sont en accord avec l’hypothèse d’un ion bromonium cyclique.

5.2.3 Étude par difractométrie de rayon X

Une réaction de bromation d’adamantylidèneadamantane conduit à l’ion bromonium correspondant et à l’anion Br3- comme contre-ion. L’encombrement stérique très important,

du aux deux cycles adamantane, empêche l’approche de nucléophiles susceptibles de pié- ger le cation. L’ion bromonium est alors très stable et peut être recristallisé à 60°C sans être dégradé.75 Les cristaux obtenus ont été étudiés par diffractométrie de rayon X (Figure 48).

L’ion bromonium présente une structure cyclique légèrement dissymétrique.

Br

Figure 48 : Structure de l’io , ’-diadamantanebromonium.

La substitution du contre-ion Br3- par un ion triflate impacte l’ion bromonium qui pré-

sente alors une structure cyclique symétrique.76L’environnement électronique du cation joue

donc un rôle essentiel sur la stabilité de cet ion.

5.2.4 Études théoriques

De nombreuses études théoriques ont été menées sur la stabilité relative des diffé- rentes formes de ces ions.77

7879

-

8081

82 Quelle que soit la méthode utilisée, les résultats concordent

sur la stabilité relative des différentes structures des ions bromoniums. Dans le cas de l’ion éthylènebromonium, les calculs effectués par Reynolds sur l’affinité d’hydrure en phase gaz présentent un minimum d’énergie pour la structure cyclique symétrique. L’ion α- bromocarbénium a une énergie proche de celle de la structure pontée, en revanche la forma- tion d’un ion -bromocarbénium est extrêmement défavorisée (Figure 49).78

75 H. Slebocka-Tilk, R. G. Ball, R. S. Brown, J. Am. Chem. Soc., 1985, 107, 4504.

76 R. S. Brown, R. W. Nagorski, A. J. Bennet, R. E. D. McClung, G. H. M. Aarts, M. Klobukowski, R. McDonald, B.

D. Santarsiero, J. Am. Chem. Soc., 1994, 116, 2448.

77 V. I. Teberekidis, M. P. Sigalas, Tetrahedron, 2005, 61, 3967. 78 C. H. Reynolds, J. Am. Chem. Soc. 1992, 114, 8676.

79

T. P. Hamilton, H. F. Schaefer, J. Am. Chem. Soc., 1990, 112, 8260.

80

R. A. Poirier, G. R. Demaré, K. Yates, I. G. Csizmadia, J. Mol. Struct. (Theochem), 1983, 94, 137.

81 M. R. Helal, A. T. Afaneh, Jordan J. Chem., 2008, 3, 389. 82 H. Hausenstock, R. R. Sauers, Tetrahedron, 2004, 60, 1191.

H H H H Br Br H H HH H

>

>

 = 3,3 kcal.mol-1 H Br H H  = 29,8 kcal.mol-1

Figure 49 : Énergies relatives des ions éthylènebromoniums.

À la différence de l’ion iodonium, La présence de substituants influence sensiblement la stabilité relative des ions bromoniums. Par exemple dans le cas de l’ion 1,2- diméthyléthylènebromonium, la différence d’énergie entre les différentes formes de l’ion bromonium est fortement diminuée (Figure 50).

H Me Me H Br Br H Me MeH H

>

>

 = 3,5 kcal.mol-1 Me Br H Me  = 0,3 kcal.mol-1

Figure 50 : Énergies relatives des ions 1,2-diméthyléthylènebromoniums.

Une étude a été effectuée par Shellhamer sur les paramètres géométriques et sur les densités de charges de l’ion propylènebromonium.83 La structure présente une énergie mi-

nimale pour une longueur de liaison C-Br = 2,021 Ǻ et C’-Br = 2,114 Ǻ. La densité de charge sur les deux atomes de carbone diffèrent de moins de 0,1 électron. Ces paramètres corres- pondent à une structure cyclique présentant une légère dissymétrie.

Les études précédentes étant modélisées dans le vide, Ohta a réalisé une étude sur l’impact du solvant en incluant une molécule de SO2.84 Malgré la faible nucléophilie de la

molécule de SO2, celle-ci est capable de réagir avec l’ion tétraméthyléthylènebromonium

lorsque l’approche est syn. En revanche aucune addition n’est observée lorsque l’approche est anti. Les auteurs expliquent cette réactivité particulière par une interaction charge-dipôle de l’ion bromonium avec la molécule de SO2 permettant une activation de cette dernière

(Figure 51).

83

D. F. Shellhamer, D. C. Gleason, S. J. Rodriguez, V. L. Heasley, J. A. Boatz, J. J. Lehman, Tetrahedron, 2006, 62, 11608.

Br S O O Br S O O Br O S O rapide syn anti Br S O O

Figure 51 : I te a tio de l’io bromonium avec une molécule de SO

2

.

Suite à ces résultats, Ohta suggère que l’espèce ionique générée par Olah dans le mélange SbF5-SO2 et décrite comme un ion bromonium cyclique symétrique, serait mieux

décrite comme un équilibre rapide de complexes ion halonium-SO2.85

5.2.5 Étude par spectrométrie de masse

Une étude conduite par Beauchamp a permis la détermination expérimentale de l’affinité d’hydrure pour l’ion éthylènebromonium. La méthode repose sur la spectrométrie de masse par photoionisation couplée à un analyseur à résonance cyclotronique.86 La diffé-

rence énergétique observée est de 1,4 kcal.mol-1 en faveur de l’ion bromonium ponté par

rapport à l’ion α-bromocarbénium.

5.2.6 Conclusion

La forte polarisabilité de l’atome de brome induit une bonne stabilisation de la charge positive dans les ions bromoniums. Comme dans le cas des ions iodoniums, la structure ion bromonium cyclique est favorisée. En revanche les substituants et l’environnement électro- nique du cation ont un réel impact sur la géométrie de l’ion bromonium ponté. Les variations de température influent également sur la stabilité de ces ions.

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